La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/10/2022 | FRANCE | N°21/00311

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 2 a, 14 octobre 2022, 21/00311


MINUTE N° 435/2022





























Copie exécutoire à :



- Me Guillaume HARTER



- Me Claus WIESEL



Le 14 octobre 2022



Le greffier































REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE



ARRET DU 14 Octobre 2022





Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 21/00311 - N° Portalis DBVW-V-B7F-HPCA



Décision déférée à la cour : jugement rendu le 24 novembre 2020 par le tribunal judiciaire de Mulhouse





APPELANT :



Monsieur [X] [C]

demeurant [Adresse 5]



Représenté par Me Guillaume HARTER, avocat au barreau de COLMAR





...

MINUTE N° 435/2022

Copie exécutoire à :

- Me Guillaume HARTER

- Me Claus WIESEL

Le 14 octobre 2022

Le greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE

ARRET DU 14 Octobre 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 21/00311 - N° Portalis DBVW-V-B7F-HPCA

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 24 novembre 2020 par le tribunal judiciaire de Mulhouse

APPELANT :

Monsieur [X] [C]

demeurant [Adresse 5]

Représenté par Me Guillaume HARTER, avocat au barreau de COLMAR

INTIMÉS :

Monsieur [D] [J]

demeurant [Adresse 2]

Monsieur [R] [W]

[Adresse 3]

Représentés par Me Claus WIESEL, avocat au barreau de COLMAR

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 01 juillet 2022, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente de chambre,

Madame Myriam DENORT, conseiller,

Madame Nathalie HERY, conseiller,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Dominique Donath, faisant fonction.

ARRET contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente et Madame Sylvie SCHIRMANN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE et PRÉTENTIONS des PARTIES

M. [C] est propriétaire d'une parcelle cadastrée [Cadastre 1] au [Adresse 5], voisine des parcelles cadastrées [Cadastre 4] appartenant à M. [J], et 45 appartenant à M. [W] dont elle est séparée par un ancien cours d'eau dit « [Localité 6] », qui est comblé.

Par une correspondance du 9 juin 2008, la ville de [Localité 7] a précisé que le fossé étant comblé et n'étant plus utilisé pour l'évacuation des eaux, il était possible de le cadastrer et de l'inscrire au Livre foncier, et qu'il était présumé être mitoyen, la propriété de son lit étant à partager entre les propriétaires de chaque rive jusqu'à son axe, en l'absence de titre, prescription ou marque contraire.

Reprochant aux consorts [J] et [W] d'avoir implanté une haie de thuyas et une clôture au-delà de l'axe du fossé en violation de sa propriété, M. [C] les a fait citer devant le tribunal judiciaire de Mulhouse, selon exploit du 23 janvier 2017, aux fins de les voir condamner à enlever la clôture, à couper un arbre d'une hauteur de plus de 20 m et à élaguer leurs thuyas.

Par jugement du 24 novembre 2020, le tribunal judiciaire a déclaré recevables les demandes de M. [C] mais l'a débouté de sa demande de condamnation à couper l'arbre et à élaguer les thuyas, de même que de sa demande de condamnation, sous astreinte, des consorts [J] et [W] à démanteler la clôture, et l'a condamné au paiement à ces derniers de la somme de 1 000 euros, chacun, par application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le tribunal a écarté les demandes relatives à la coupe d'un arbre et à l'élagage des thuyas en l'absence d'élément de nature à prouver, au jour de l'introduction de la demande, l'existence d'une arbre de plus de 20 m de haut dont les branches dépasseraient sur la propriété de M. [C] et 'l'étoffement' de la haie de thuyas

Le tribunal a considéré que la demande était recevable en tant que dirigée contre M. [W] qui était propriétaire du fonds voisin au jour de l'introduction de la demande et avait donc qualité à défendre. En revanche, la vente de son bien, le 25 janvier 2018, privait d'objet les demandes dirigées à son encontre puisque d'éventuelles condamnations ne seraient pas opposables aux nouveaux propriétaires, au surplus M. [W] pouvait se prévaloir de la prescription acquisitive qui avait produit ses effets en 2016.

Il a ensuite retenu que M. [J], qui invoquait la prescription acquisitive, ne contestait pas que la clôture était implantée sur le fonds de M. [C] ; qu'il prétendait que la clôture actuelle avait été implantée en 1951, ce que contestait M. [C] qui produisait des attestations de membres de sa famille contredites par celles émanant de tiers produites par le défendeur ; que si un incident relatif à l'installation d'une clôture en béton avait opposé les parties en 1985 ce qui avait interrompu la prescription, M. [J] justifiait par contre s'être comporté, depuis cette date, en légitime propriétaire de la parcelle notamment en plantant la haie de thuyas.

M. [C] a interjeté appel de ce jugement, le 28 décembre 2020, en toutes ses dispositions.

Par conclusions transmises par voie électronique le 29 mars 2021, il demande à la cour d'infirmer partiellement le jugement en ce qu'il l'a débouté de ses demandes tendant à la condamnation, sous astreinte, de M. [J] à élaguer les thuyas se trouvant en limite de sa propriété et à démanteler la clôture, ainsi qu'en ce qu'il l'a condamné par application de l'article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau de :

- condamner M. [J] à démanteler la clôture qu'il a installée sur la propriété de M. [C], et ce sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir ;

- condamner M. [J] à élaguer les thuyas se trouvant en limite de propriété de M. [C], et ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir ;

- donner acte à M. [C] de son désistement d'appel à l'encontre de M. [W] ;

- débouter les parties intimées de toutes demandes formées au titre d'un appel incident ;

- condamner en tout état de cause M. [J] aux entiers frais et dépens des deux instances ainsi qu'au paiement de la somme de 2 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.

S'agissant de la haie de thuyas, il maintient que cette haie très étoffée empiète sur sa propriété, ce dont il justifie par un procès-verbal de constat dressé le 16 septembre 2014, estimant qu'il ne peut être contesté que, sept ans après ce constat d'huissier, la haie de thuyas se soit étoffée et qu'elle empiète nécessairement sur sa propriété, sans qu'il soit besoin d'apporter d'autres éléments justificatifs, sauf à ce que M. [J] puisse justifier avoir fait intervenir ces dernières années une entreprise aux fins d'en procéder à l'élagage du côté de la propriété de M. [C].

Sur l'empiètement, il approuve le jugement qui a retenu qu'un incident était survenu en 1985 de nature à interrompre une éventuelle prescription acquisitive, mais reproche au tribunal d'avoir considéré que, depuis cette date et jusqu'à l'introduction de l'instance en 2017, M. [J] s'était comporté comme légitime propriétaire de manière continue et non interrompue, paisible, publique, et non équivoque, et que de ce fait, la prescription trentenaire avait emporté tous ses effets au moins à compter de 2016.

Il soutient en effet qu'un litige a opposé les parties en 2015 au sujet de l'implantation de la haie de thuyas, ce qui démontre que l'implantation de la clôture était contestée et que la possession n'était ni paisible, ni non équivoque. D'ailleurs M. [W] s'était engagé à arracher la haie existante, de sorte qu'aucune prescription acquisitive ne peut donc être opposée.

Prenant acte de la cession de son fonds par ce dernier, il indique ne pas maintenir ses demandes contre lui.

Par conclusions transmises par voie électronique le 25 juin 2021, MM. [J] et [W] concluent au rejet de l'appel, à la confirmation du jugement et à la condamnation de M. [C] au paiement de la somme de 3 000 euros à chacun d'eux sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Ils font valoir que la haie de thuyas de M. [J] a été élaguée sans excéder la hauteur réglementaire de 2 mètres, de sorte que la demande est mal fondée.

Ils contestent de même le prétendu empiètement, faisant valoir que M. [C], s'étant désisté de son appel à l'égard de M. [W], ne peut maintenir ses demandes contre M. [J], puisque ce désistement emporte acquiescement au jugement en tant qu'il l'a débouté de sa demande dirigée contre M. [W], et que la clôture de M. [J] est implantée dans l'alignement parfait de celle de M. [W].

En tout état de cause, la Ville de [Localité 7] n'a jamais dit que la limite parcellaire se trouvait au milieu de l'ancien fossé mais seulement qu'elle n'en était plus propriétaire, évoquant seulement une simple présomption de mitoyenneté.

M. [J] approuve le jugement en ce qu'il a retenu la prescription acquisitive puisque la limite séparative actuelle qui correspond à la clôture existe depuis 1951, voir depuis 1939 ainsi qu'il en justifie, de sorte que la prescription était acquise bien avant les incidents de 1985.

Pour l'exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions notifiées et transmises par voie électronique aux dates susvisées.

La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 1er février 2022.

MOTIFS

A titre liminaire, il convient de donner acte à M. [C] de ce qu'il se désiste de son appel à l'égard de M. [W], ce désistement qui n'est pas assorti de réserves étant parfait en application de l'article 401 du code de procédure civile en l'absence d'appel ou de demande incidents.

Il ne peut être déduit de ce désistement, qui emporte certes acquiescement au jugement l'ayant débouté de sa demande à l'égard de M. [W], une reconnaissance par M. [C] du bien fondé des prétentions de M. [J] et une reconnaissance du jeu de la prescription acquisitive, ce désistement étant motivé par le fait que M. [W] a cédé son fonds, ce qu'avait relevé le premier juge qui avait ainsi considéré que les demandes formées contre ce dernier devenaient de ce fait 'sans objet'. Il sera observé que, contrairement à ce qui est soutenu par les intimés, M. [C] ne pouvait appeler en cause les nouveaux propriétaires en l'absence d'évolution du litige au sens de l'article 555 du code de procédure civile.

Au fond, le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande tendant à l'élagage des thuyas en l'absence d'élément de nature à prouver qu'à ce jour la haie de thuyas située sur le fonds de M. [J] excéderait la hauteur de deux mètres, ce qui ne peut certainement pas être déduit d'un constat d'huissier dressé le 16 septembre 2014, ou de photographies n'ayant pas date certaine, alors que M. [J] justifie par des photographies transmises par courrier électronique du 27 janvier 2017 à son assureur de protection juridique de l'élagage de la haie, au plus tard à cette date.

S'agissant des empiètements allégués, il convient de constater qu'il n'est pas contesté que la clôture litigieuse est implantée en limite de l'ancien fossé comme l'affirme M. [C].

M. [J] souligne toutefois, à juste titre, que le courrier de la Ville de [Localité 7] du 9 juin 2008 ne se prononce nullement sur les limites de propriété, mais fait seulement état de la présomption de mitoyenneté de l'article 666 du code civil, tout en précisant qu'elle s'applique en l'absence de titre, de prescription ou de marque contraire.

En l'espèce, M. [J] justifie par plusieurs attestations concordantes émanant de tiers que la clôture litigieuse a été mise en place au moins depuis 1951.

M. [A] attestait ainsi, le 4 mai 1985, connaître la parcelle n° [Cadastre 4] - propriété de M. [J] - depuis 1939, cette parcelle ayant appartenu à ses beaux parents et ayant été cédée en juin 1951 à M. [Z], et affirme avoir entretenu un potager allant jusqu'au [Localité 6] dès 1946 et installé un rucher, et que le grillage qui formait clôture de la propriété sur la rive nord du fossé n'a jamais été déplacé depuis cette date.

Mme [H] [Z] - grand-mère de M. [J] -, attestait également, le 3 mai 1985, avoir acquis la parcelle n°[Cadastre 4] en mai 1951, et qu'à cette date, la parcelle était déjà grillagée, le grillage étant en alignement avec celui des deux voisins et se situant à l'emplacement en rouge sur le plan, c'est à dire en limite nord du [Localité 6].

Mme [F], née [S] atteste connaître Mme [J], née [Z], mère de M. [J] depuis son enfance, et s'être rendue très souvent dans le verger de la propriété, et que la clôture actuellement en place se situe à l'emplacement de l'ancienne clôture qui séparait le fonds des époux [Z] de la propriété de Mme [B] - actuelle propriété de M. [C] -. Ce témoignage est corroboré par celui de Mme [U], également amie d'enfance de Mme [J] qui atteste être allée dans son enfance dans le verger y ramasser des fruits et que la clôture séparant le fond du jardin de la propriété de Mme [B] était déjà là lorsque les parents de [K] [J], née [Z] ont acheté le terrain, M. [L] [J], père de [D] [J] l'ayant remplacée car elle était vétuste. Mme [G] également amie d'enfance de Mme [K] [J] qui indique avoir joué dans le verger et cueilli des fruits confirme aussi l'existence d'une clôture au même emplacement que l'actuelle depuis 1951.

Ces témoignages tous concordants émanant pour la plupart de tiers par rapport aux parties ne sont pas utilement contredits par les attestations de M. [P] [C], fils de l'appelant, qui ne concerne que l'incident de 1985, de M. [N], ami de la famille [C], qui affirme qu'il n'y avait pas de barrière sur la gauche lorsqu'ils se sont installés au [Adresse 5], ce témoignage étant trop imprécis, ni par celle de Mme [E] [C], épouse de l'intimé, affirmant qu'à leur arrivée sur les lieux, il n'y avait pas de clôture sur la parcelle appartenant désormais à M. [J], ce qui a permis au maçon de mettre une caravane de chantier à l'emplacement de l'ancien fossé comblé, cet unique témoignage qui émane d'une personne ayant un intérêt au litige n'étant pas suffisamment probant.

La plantation d'une haie de thuyas, le remplacement du grillage de clôture par M. [J], père, puis par l'intimé constituent des actes de possession en qualité de propriétaires.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que M. [J] justifie d'une possession continue, ininterrompue, paisible, publique et non équivoque en qualité de propriétaire de la totalité de l'emprise de l'ancien fossé bordant son fonds, de sorte que la prescription était déjà acquise lors de l'incident survenu en 1985, et a fortiori en 2015.

Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a débouté M. [C] de sa demande de démantèlement de la clôture dirigée contre M. [J].

Le jugement sera également confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles. M. [C], qui succombe, supportera les dépens d'appel et sera débouté de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel. Il sera en revanche alloué aux intimés une somme de 1 000 euros, chacun, sur ce fondement en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450, alinéa 2 du code de procédure civile,

DONNE acte à M. [X] [C] de son désistement d'appel à l'égard de M. [R] [W] ;

CONFIRME, dans les limites de l'appel, le jugement du tribunal judiciaire du 24 novembre 2020 ;

Y ajoutant,

CONDAMNE M. [X] [C] à payer à M. [D] [J] et M. [R] [W], la somme de 1 000 € (mille euros), chacun, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, en cause d'appel ;

DEBOUTE M. [C] de sa demande sur ce fondement en cause d'appel.

Le greffier, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 2 a
Numéro d'arrêt : 21/00311
Date de la décision : 14/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-14;21.00311 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award