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10/10/2022 | FRANCE | N°22/03722

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 17 (sc), 10 octobre 2022, 22/03722


Copie transmise par mail :

- à Madame. [Y] [N] par remise de copie contre récépissé par l'intermédiaire de

l'établissement hospitalier

- à Maître [L] [D]

- au directeur d'établissement

- au directeur de l'ARS

- au JLD



Copie à Monsieur le PG



le 10 Octobre 2022



Le Greffier,

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

CHAMBRE 17 (SC)



R.G. N° : N° RG 22/03722 - N° Portalis DBVW-V-B7G-H52A



Minute n° : 72/

2022





ORDONNANCE du 10 Octobre 2022

dans l'affaire entre :





APPELANTE :



MME LA PROCUREURE DE LA REPUBLIQUE DE STRASBOURG





- partie demanderesse au référé -







INTIMES :
...

Copie transmise par mail :

- à Madame. [Y] [N] par remise de copie contre récépissé par l'intermédiaire de

l'établissement hospitalier

- à Maître [L] [D]

- au directeur d'établissement

- au directeur de l'ARS

- au JLD

Copie à Monsieur le PG

le 10 Octobre 2022

Le Greffier,

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

CHAMBRE 17 (SC)

R.G. N° : N° RG 22/03722 - N° Portalis DBVW-V-B7G-H52A

Minute n° : 72/2022

ORDONNANCE du 10 Octobre 2022

dans l'affaire entre :

APPELANTE :

MME LA PROCUREURE DE LA REPUBLIQUE DE STRASBOURG

- partie demanderesse au référé -

INTIMES :

Madame [Y] [N]

née le 25 Mars 1987 à [Localité 4]

de nationalité française

[Adresse 2]

[Localité 1]

Actuellement hospitalisée au Centre Hospitalier D'[Localité 3]

comparante, assistée de Maître Eulalie LEPINAY, avocat au barreau de COLMAR, commise d'office

Monsieur le Directeur du Centre Hospitalier d'[Localité 3]

- parties défenderesses au référé -

Ministère public auquel la procédure a été communiquée :

M. RAYMONDEAUD-CASTANET, Avocat général

Catherine DAYRE, Conseiller à la cour d'appel de Colmar, agissant sur délégation de Madame la première présidente, assistée lors des débats en audience publique du 10 octobre 2022 de Nadine FRICKERT, Greffier, statue comme suit par ordonnance réputée contradictoire :

Vu la décision d'admission en soins psychiatriques, en date du 30 septembre 2022, prise par Monsieur le Directeur du Centre hospitalier d'[Localité 3];

Vu la décision de maintien, sous la forme d'une hospitalisation complète prise le 3 octobre 2022, par Monsieur le Directeur du Centre hospitalier d'[Localité 3];

Vu la saisine du juge des libertés et de la détention par Monsieur le Directeur du Centre hospitalier d'[Localité 3] en date du 5 octobre 2022;

Vu l'ordonnance, en date du 7 octobre 2022, par laquelle le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Strasbourg a ordonné la main-levée de l'hospitalisation complète de Madame [Y] [N], à l'expiration d'un délai maximal de 24 heures à compter de sa notification;

Vu l'appel interjeté par le procureur de la république du tribunal judiciaire de Strasbourg le 7 octobre 2022 avec demande d'effet suspensif;

Vu l'ordonnance en date du 7 octobre 2022, rendue par le conseiller agissant sur délégation de Madame la première présidente, déclarant suspensif l'appel du procureur de la république du tribunal judiciaire de Strasbourg ;

Vu les conclusions du procureur général qui sollicite l'infirmation de la décision et qu'il soit dit n'y avoir lieu à ordonner la main levée de l'hospitalisation complète de Madame [Y] [N];

Vu l'avis d'audience transmis aux parties et au conseil de la patiente le 7 octobre 2022.

MOTIFS

Le procureur de la république du tribunal judiciaire de Strasbourg a formé appel de l'ordonnance entreprise, rendue le 7 octobre 2022, par déclaration motivée adressée le 7 octobre 2022 au tribunal judiciaire et reçue le même jour, puis transmise par ce dernier au greffe de la juridiction compétente le même jour, de telle sorte qu'il a été satisfait aux dispositions des articles R3211-19 et R3211-20 du code de la santé publique et que l'appel est régulier.

Le ministère public a notamment fait valoir , en substance, qu'à la période concomitante à la décision d'admission, la patiente était alitée, mutique, sans contacte verbal ou visuel avec autrui, sidérée; que dès lors la décision d'admission ne pouvait lui être notifiée; que la notification était intervenue le 2 octobre 2022, lorsque la patiente était sortie de son état de sidération.

A l'audience, et aux termes de ses conclusions, le ministère public a notamment réaffirmé que, jusqu'au 2 octobre 2022, l'état de santé de Madame [N] ne lui permettait pas de recevoir la notification de son admission en hospitalisation complète; que la notification est intervenue dès que l'état de la patiente l'a permis; que , de fait, l'absence de notification de la décision d'admission avant le 2 octobre 2022, ne saurait faire grief à la patiente, celle-ci n'étant pas, avant cette date en état de recevoir ladite notification.

Il a ajouté qu'au regard de la pathologie de la patiente les soins sans consentement sous forme d'une hospitalisation complète, étaient toujours nécessaires.

Madame [N] a fait valoir que l'ensemble des démarches, prévues par le code de la santé publique, et notamment la notification de l'admission, devaient être réalisées quelque soit le degré de compréhension de la personne; qu'en l'espèce seules des démarches partielles avaient été réalisées.

Elle a conclu à la confirmation de la décision entreprise et à la main-levée de l'hospitalisation, conformément au souhait de la patiente.

Aux termes de l'article L3211-3 du code de la santé publique toute personne faisant l'objet de soins psychiatriques en application des chapitres II et III du titre I est informée le plus rapidement possible et d'une manière appropriée à son état, de la décision d'admission et de chacune des décisions mentionnées au deuxième alinéa de l'article L3211-3, ainsi que des raisons qui les motivent; elle est aussi informée de sa situation juridique, de ses droits et des voies de recours qui lui sont ouvertes.

Il en résulte que l'information de la décision d'admission en soins psychiatriques et des raisons qui la motivent doit être immédiate, à moins que l'état du patient ne la rende impossible dès ce moment, une telle impossibilité devant être justifiée au regard du certificat médical de 24 heures.

En l'espèce, il ressort du certificat médical d'admission , rédigé le 30 septembre 2022 par le docteur [U] [W], que Madame [Y] [N] a été amenée à l'hôpital pour un mutisme et une absence de réactivité, faisant suite au placement judiciaire de ses deux enfants.

Le médecin rédacteur du certificat constatait que la patiente était alitée immobile, présentait une absence de contact oculaire avec un regard fixe, ne montrait aucune interaction, verbale ou non verbale étant mutique et sidérée. Il précisait qu'elle présentait aussi une hypotonie et une passivité motrice lors de l'examen avec une absence complète d'initiative motrice.

Le certificat médical de 24 heures, rédigé le 1er octobre 2022 par le docteur [V] [B] reprenait les mêmes observations et ajoutait que Madame [Y] [N] refusait de s'alimenter et de prendre son traitement.

Le relevé des démarches de recherche et d'information de la famille mentionnait par ailleurs que la patiente refusait de communiquer les coordonnées d'une personne pouvant agir dans son intérêt, celle là étant qualifiée de catatonique.

Il s'évince bien de ces certificats, que, du fait de son impossibilité de communiquer, de son état de sidération qualifié aussi de catatonie , l'état de santé de Madame [Y] [N] ne lui permettait pas la notification de son admission et de ses droits le plus rapidement possible.

Il ressort du certificat médical de 72 heures, établi le 3 octobre 2022 que la patiente avait repris la communication verbale mais était opposante aux soins et au traitement.

La notification de son admission et de ses droits a été réalisée le 2 octobre 2022, veille de ce certificat.

Dès lors qu'à son admission, l'état de santé de la patiente ne lui permettait pas de se voir notifier la décision d'admission ainsi que ses droits, que par ailleurs cette information a été réalisée lorsque l'état de la patiente s'est améliorée, le retard dans la notification de l'admission et des droits n'a causé aucun grief à la patiente, la procédure étant alors régulière.

La décision du juge des libertés et de la détention ayant ordonné la main levée sur le fondement de l'irrégularité de la procédure, doit donc être infirmée.

Il y a lieu, ensuite, de rappeler qu'en application des dispositions de l'article L. 3212-1 du code de la santé publique, une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l'objet de soins psychiatriques sur décision du directeur d'établissement dans le cadre d'un péril imminent que lorsque d'une part ses troubles mentaux rendent impossible son consentement, et que d'autre part, son état mental nécessite des soins assortis d'une surveillance constante justifiant son hospitalisation complète.

En l'espèce les circonstances de l'admission sous le régime des soins contraints, en date du 30 septembre 2022, ont été rappelées ci-dessus.

Les certificats et avis médicaux ultérieurs révèlent de manière circonstanciée et concordante la persistance des troubles, d'abord sous forme d'un état de sidération avec mutisme complet, puis sous la forme d'un discours à tonalité persécutive, un contact méfiant et réticent ainsi qu'une opposition aux soins.

L'avis motivé, rédigé le 8 octobre 2022 par le docteur [M] [K], fait état d'un discours cohérent mais inadapté, de troubles du jugement, de paralogismes, d'un émoussement affectif, d'une méconnaissance de ses troubles mentaux et d'une réticence importante aux soins psychiatriques.

A l'audience la patiente a réitéré son refus d'être hospitalisée et son refus de prendre son traitement.

En conséquence, au vu des éléments médicaux dont la teneur vient d'être rappelée, le maintien de l'hospitalisation de Madame [Y] [N] dans un cadre contraint apparaît seul à même de permettre la poursuite des soins adaptés à son état de santé, de consolider son adhésion aux soins, de garantir sa protection et d'assurer une évolution suffisamment solide et durable de son état, étant rappelé qu'il n'est pas du ressort du juge de substituer son appréciation à l'évaluation médicale de l'état de santé et de l'adhésion aux soins du patient. Il convient dès lors d'ordonner la poursuite des soins contraints sous forme d'une hospitalisation complète.

PAR CES MOTIFS :

Infirme la décision du 7 octobre 2022, rendue par le Juge des Libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Strasbourg,

Dit n'y avoir lieu à ordonner la main levée de la mesure de soins psychiatriques sous forme d'hospitalisation complète de Madame [Y] [N] .

Laisse les dépens à la charge du Trésor.

Le greffierLe conseiller


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 17 (sc)
Numéro d'arrêt : 22/03722
Date de la décision : 10/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-10;22.03722 ?
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