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07/10/2022 | FRANCE | N°21/03493

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 2 a, 07 octobre 2022, 21/03493


MINUTE N° 424/2022

























Copie exécutoire à



- Me Joëlle LITOU-WOLFF



- la SELARL LEXAVOUE COLMAR



- Me Anne CROVISIER



Le 7 octobre 2022



Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE



ARRÊT DU 7 Octobre 2022



Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 21/03493 - N° Portalis DBVW-V-B

7F-HUSL



Décision déférée à la cour : 06 mai 2021 par le président du tribunal judiciaire de Strasbourg



APPELANTE et intimée sur incident :



La S.A. PACIFICA

ayant son siège social [Adresse 6] à[Localité 4]



représentée par Me Joëlle LITOU-...

MINUTE N° 424/2022

Copie exécutoire à

- Me Joëlle LITOU-WOLFF

- la SELARL LEXAVOUE COLMAR

- Me Anne CROVISIER

Le 7 octobre 2022

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 7 Octobre 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 21/03493 - N° Portalis DBVW-V-B7F-HUSL

Décision déférée à la cour : 06 mai 2021 par le président du tribunal judiciaire de Strasbourg

APPELANTE et intimée sur incident :

La S.A. PACIFICA

ayant son siège social [Adresse 6] à[Localité 4]

représentée par Me Joëlle LITOU-WOLFF, avocat à la cour.

INTIMEES et appelantes sur incident :

Madame [H] [I]

demeurant [Adresse 7] à [Localité 5] (ALLEMAGNE)

représentée par la SELARL LEXAVOUE COLMAR, avocat à la cour.

La Société VIVAO SYMPANY AG prise en la personne de son représentant légal

ayant son siège social [Adresse 8] à [Localité 3] (SUISSE)

représentée par Me Anne CROVISIER, avocat à la cour

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 modifié et 910 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 29 Avril 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente de chambre, et de Madame Nathalie HERY, chargées du rapport

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Isabelle DIEPENBROEK, Présidente de chambre

Madame Catherine GARCZYNSKI, Conseiller

Madame Nathalie HERY, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Dominique DONATH faisant fonction

ARRÊT contradictoire

- prononcé publiquement après prorogation du 24 juin 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente et Mme Dominique DONATH, faisant fonction de greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE et PRÉTENTIONS des PARTIES

Le 13 janvier 2018, Madame [H] [K] épouse [I], propriétaire d'un véhicule automobile de la marque Skoda, a été victime d'un accident de la circulation impliquant un véhicule de marque Audi A3 assuré auprès de la société Pacifica.

Par acte délivré le 7 décembre 2020, Madame [H] [K] épouse [I] a fait assigner la société SA Pacifica, en présence de la société Vivao Sympany AG, caisse d'assurance-maladie sociale suisse, devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Strasbourg pour faire ordonner, sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile, une expertise médicale afin de constater ses lésions et évaluer les préjudices subis du fait de l'accident, et aux fins d'obtenir la condamnation de la société Pacifica au paiement de plusieurs provisions à savoir : 2 000 euros concernant la liquidation de son préjudice corporel, 12 818,85 euros au titre du préjudice matériel, 14 467,35 euros à valoir sur le préjudice financier, et 2 153,28 euros au titre des majorations de primes d'assurance.

Par ordonnance du 6 mai 2021, le juge des référés du tribunal judiciaire de Strasbourg a, au principal renvoyé les parties à se pourvoir et réservé tous droits et moyens, et :

- ordonné une expertise, et commis en qualité d'expert le docteur [L] [J] ;

- condamné la SA Pacifica et la SARL Vivao Sympany AG à verser à Mme [H] [K] épouse [I] une provision de 1 000 euros à valoir sur l'indemnisation globale du préjudice corporel ;

- condamné la SA Pacifica et la SARL Vivao Sympany AG à verser à Mme [H] [K] épouse [I] une provision de 12 208,85 euros à valoir sur l'indemnisation globale du préjudice matériel ;

- dit n'y avoir lieu à référé pour le surplus des demandes de provision ;

- condamné Mme [H] [K] épouse [I] aux dépens ;

- rejeté tous les autres chefs de demande des parties ;

- rappelé que la décision bénéficie de l'exécution provisoire de droit en application de l'article 514 du code de procédure civile.

Le juge des référés a considéré que Mme [H] [K] épouse [I] justifiait d'un motif légitime au soutien de sa demande d'expertise. Sur les demandes de provisions, le juge des référés, après avoir retenu que le droit à indemnisation de Mme [H] [K] épouse [I] n'était pas sérieusement contestable, a considéré que la demande de provision faite au titre du préjudice corporel, ne se heurtait à aucune contestation sérieuse et devait être fixée à hauteur de la somme de 1 000 euros, que sur le préjudice matériel, la société Pacifica ne faisait pas la preuve du paiement de la somme de 10 134,76 euros à Mme [H] [K] épouse [I], et qu'au vu des preuves rapportées par cette dernière, la créance d'indemnisation du préjudice matériel ne se heurtait à aucune contestation sérieuse à hauteur de la somme de 12 208,85 euros, qu'en revanche ses demandes au titre d'un préjudice financier et au titre de la majoration de sa prime d'assurance, se heurtaient à des contestations sérieuses.

Par déclaration reçue au greffe par voie électronique le 29 juillet 2021, la société Pacifica a interjeté appel de cette décision.

Par ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 1er février 2022, la société Pacifica demande à la cour de :

- sur son appel et le moyen d'irrecevabilité de Madame [I],

- dire nul et de nul effet l'acte de signification par Maître Lefebvre-Portemont en date du 16 juin 2020 ;

- dire en conséquence irrecevable le moyen d'irrecevabilité de l'appel soulevé par Madame [I] ;

- dire recevable l'appel de la SA Pacifica ;

- dire pour le surplus l'appel bien fondé ;

- réformer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a condamné la société Pacifica avec la compagnie Vivao Sympany AG à payer une provision de 12 208, 85 euros à valoir sur l'indemnisation du préjudice matériel, et a rejeté les demandes de la société Pacifica ;

- débouter Madame [I] de ses demandes à l'encontre de la compagnie Pacifica ;

- confirmer pour le surplus l'ordonnance entreprise en ses dispositions non contraires ;

- condamner Madame [I] aux dépens d'appel et à payer à la Compagnie d'assurances Pacifica la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- dire l'arrêt à intervenir commun et opposable à la société Vivao Sympany AG ;

- débouter la société Vivao Sympany AG de tous moyens, demandes et prétentions articulés à l'encontre de la compagnie Pacifica, comme non fondés ;

- sur l'appel incident de Madame [I],

- le dire mal fondé, et en débouter Madame [I] ainsi que de l'intégralité de ses fins, moyens, demandes et prétentions et de la condamner aux frais de l'appel incident.

Sur l'irrecevabilité de la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de l'appel, la société Pacifica soutient que l'acte de signification de l'ordonnance produit par Mme [I], est nul en ce qu'il n'a pas été adressé au siège de la société, mais à l'adresse d'une agence Pacifica située à [Localité 9], que l'acte ne mentionne pas le siège social de la société Pacifica, que l'huissier est dans l'obligation de remettre l'acte à une personne physique et qu'il ne pouvait, pour s'exonérer de cette obligation, se contenter d'indiquer dans l'acte que « personne n'ouvre », ce qui est peu vraisemblable s'agissant d'une agence d'assurance appelée à recevoir de la clientèle, que la signification doit être annulée, et par voie de conséquence, son appel déclaré recevable.

L'appelante soutient également que, contrairement à ce qu'avance Mme [I], elle n'a pas acquiescé à la condamnation, que toute renonciation à un droit doit être expresse et non équivoque, que le fait de régler des condamnations exécutoires, en présence d'une exécution forcée et pour éviter la radiation de l'appel, ne peut manifestement pas être considéré comme étant un acquiescement à la décision.

Sur la demande de provision, la société Pacifica soutient s'être opposée au versement d'une provision et dit avoir déjà versé une somme de 10 134,76 euros.

S'agissant du préjudice matériel, elle argue que l'indemnité pour le véhicule Skoda fixée à 10 100 euros est une valeur estimée et qu'aucune expertise ni document précis n'a été produit par la partie adverse à ce sujet, que les frais de remorquage, les frais de gestion et d'expertise, la location de véhicule de remplacement, la privation de jouissance et le reste d'essence, sont des sommes indiquées sous réserves de vérification par des pièces probantes, et qu'elle a déjà réglé 10 134,76 euros par virement en date du 7 octobre 2020 au profit de l'assureur allemand Barmenia par l'intermédiaire de la société Dekkra.

S'agissant du préjudice financier, l'appelante fait valoir que Mme [I] ne produit aucune pièce probante, que le véhicule Skoda était nécessairement assuré, que telle que présentée, sa demande de provision aboutit à ce qu'elle soit indemnisée deux fois de la valeur résiduelle, par son assureur et par la société Pacifica ; que concernant l'assurance du crédit pour le financement du véhicule qu'évoque Mme [I], elle ne peut couvrir que le décès ou l'incapacité de l'emprunteur et ne concerne pas les dommages, et qu'ainsi le juge des référés ne pouvait se déclarer incompétent sur ce poste.

S'agissant de la majoration de prime, la société Pacifica argue que Madame [I] ne justifie pas qu'elle subirait une majoration de prime exclusivement imputable à un accident dont elle n'est pas responsable.

Par ses dernières conclusions en date du 10 février 2022, Mme [H] [K] épouse [I], demande à la cour de déclarer l'appel irrecevable car tardif, de déclarer l'appelante irrecevable et mal fondée en ses prétentions afin d'annulation du procès-verbal de signification de l'ordonnance entrepris ; de débouter l'appelante de ses conclusions à fins d'annulation de l'acte de signification de l'ordonnance ; de retenir les acquiescements à ordonnance ; de confirmer l'ordonnance en ce qu'elle a ordonné la mesure d'instruction et condamné Pacifica à une provision sur le préjudice corporel de 1 000 euros ; de confirmer l'ordonnance en ce qu'elle a alloué la provision de 10 134,76 euros au titre de l'action directe ; de débouter l'appelante de ses fins et prétentions ; de condamner l'appelante en tous les frais et dépens de l'instance d'appel ; de condamner l'appelante à une indemnité de procédure de 3 000 euros pour l'instance d'appel par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ; d'infirmer et de réformer l'ordonnance de référé entreprise en ce qu'elle a rejeté les prétentions autres de Mme [I] ; statuant à nouveau, de condamner Pacifica au paiement de la provision de 14 467,35 euros à valoir sur le préjudice financier ; de la condamner au paiement de la provision de 2 153,29 euros au titre des majorations de prime ; de dire que la provision sur 12 208,85 euros sera augmentée des intérêts moratoires du 27 mars 2018 ; d'ordonner que les intérêts échus depuis plus d'un an seront capitalisés ; de condamner Pacifica aux entiers frais et dépens de la première instance ; de la condamner au paiement d'une indemnité de procédure de 3 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour la première instance ; de constater que Mme [I] n'a élevé ni n'élève la moindre prétention à l'encontre de la société Vivao ; de débouter la société Vivao de toutes ses fins et prétentions à l'encontre de Mme [I] ; d'inviter la société Vivao à faire rectifier l'ordonnance entreprise ; d'infirmer l'ordonnance de référé du 6 mai 2021 ; de déclarer la procédure commune et opposable à la société Vivao Sympany.

Mme [I] soutient que les conclusions aux fins d'annulation de la signification sont irrecevables, les mentions présentes sur l'acte de signification faisant foi jusqu'à inscription de faux, les dénégations ne pouvant être considérées qu'à l'aune de l'inscription de faux ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

Ces conclusions sont en tous cas mal fondées, en ce qu'il lui était loisible de faire citer l'appelante auprès de son établissement secondaire, ce qui est conforme aux prévisions de l'article 690 du code de procédure civile, à charge pour ce dernier d'être vigilant, étant observé que l'assignation initiale avait été délivrée de la même façon sans que l'appelante ne soulève de difficultés. Mme [I] soutient également qu'il est loisible de signifier par voie de dépôt à l'étude dès lors qu'est caractérisée l'impossibilité de signifier à personne, ce qui a été fait en l'espèce, l'huissier ayant déposé son avis de passage dans la boîte aux lettres extérieure et ayant adressé l'avis de signification conformément aux prévisions de l'article 658 du code de procédure civile. Elle fait valoir que l'huissier démontre avoir accompli les diligences utiles à savoir la vérification sur place, la délivrance de l'avis de passage et l'émission de la lettre d'avis. Enfin, Mme [I] soutient que l'intimée n'a dépêché personne pour retirer l'acte de signification, qu'elle ne s'est pas manifesté au titre des saisies ultérieures, estimant que la procédure de saisie-attribution subséquente intervenue a donné lieu à une offre d'acquiescement de la part de Pacifica.

Mme [I] ajoute que l'appelante a volontairement acquitté par deux fois les causes de l'ordonnance et en acquiesçant à la saisie-attribution par surcroît en date des 16 août 2021 et 22 décembre 2021, et que ces circonstances lui permettent d'opposer à l'appelante l'exception d'acquiescement à jugement.

Sur sa demande de provision sur son préjudice matériel, Mme [I] soutient que la somme de 12 818,85 euros correspondant au préjudice matériel - travaux de réparation, frais de dépannage, reste d'essence dans le réservoir, frais de 'désimmatriculation', frais d'expertise, frais de location de véhicule de remplacement, privation de jouissance - doit être lui allouée à titre de provision dès lors que l'obligation de l'intimée n'est pas contestable, et que la société Pacifica ne conteste pas sa garantie, cette dernière ayant désintéressé à tort un tiers, au mépris des règles de l'action directe. Elle soutient en effet que le paiement ne peut être fait qu'entre les mains du tiers lésé, ce qui lui rend inopposable le paiement fait à un tiers qui n'est pas subrogé dans ses droits.

Sur appel incident, Mme [I] soutient que l'ordonnance devra être infirmée en ce qu'elle a écarté l'allocation d'une provision à valoir sur le préjudice financier procédant du sinistre, alors que l'accident a provoqué la destruction du véhicule Skoda, qui avait été financé par Skoda Bank, le solde du crédit qui s'établit à 14 467,35 euros devant lui être alloué à titre de provision.

Elle prétend en outre avoir subi une majorations de ses primes d'assurances pendant quatre années du fait du sinistre, et que le cumul de ces majorations doit être imputé à l'assureur du responsable, de sorte qu'il y a donc lieu de lui allouer également le montant de 2 153,29 euros.

Enfin, elle estime que l'action directe doit être considérée comme une action contractuelle en paiement au sens et par application des articles L.113-5 et L.124-3 du code des assurances et que les intérêts moratoires doivent courir à compter du jour de la mise en demeure du 27 mars 2018.

Sur l'appel de la société Vivao, Mme [I] soutient qu'elle n'entendait élever aucune prétention à l'encontre de Vivao, que le dispositif de l'assignation ne visait qu'à une mise en cause pure et simple comme de droit au titre de l'article L.376-1 du code de la sécurité sociale et que le premier juge a statué extra et ultra petita, qu'il appartient à la cour d'en tirer les conséquences en infirmant et réformant l'ordonnance.

Par ses conclusions transmises par voie électronique, le 22 novembre 2021, la société de droit suisse Vivao Sympany AG, demande à la cour de déclarer la SA Pacifica mal fondée en son appel ; de l'en débouter ainsi que de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions ; de condamner la SA Pacifica aux entiers frais et dépens et à régler à la société Vivao Sympany AG la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; de déclarer la société Vivao Sympany AG recevable et bien fondé en son appel incident ; d'infirmer partiellement l'ordonnance entreprise ; de débouter Mme [H] [K] épouse [I] de sa demande de provision formée à l'encontre de la société Vivao Sympany AG ; de condamner la SA Pacifica aux entiers frais et dépens né de l'appel incident.

Elle relève que Mme [I] n'a jamais demandé sa condamnation à lui verser une provision quelconque alors que la société a été condamnée à verser solidairement des montants provisionnels, qu'il y a lieu de constater que cette demande n'est pas fondée puisqu'aucune demande n'a été formulée à l'encontre de la société Vivao Sympany AG et qu'aucun fondement juridique à une condamnation n'a été précisé. Elle soutient également qu'elle verse des prestations en cas de maladie et qu'elle ne peut en aucun cas être condamnée à en verser dans le cadre de cet accident puisque la société Vivao Sympany AG ne verse rien en cas d'accident.

Pour l'exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions notifiées et transmises par voie électronique aux dates susvisées.

L'affaire a été fixée d'office à bref délai en application de l'article 905 du code de procédure civile, par ordonnance de la présidente de la chambre du 1er septembre 2021.

MOTIFS

Sur la recevabilité de l'appel formé par la société Pacifica 

En application des dispositions combinées des articles 490 et 528 du code de procédure civile, l'ordonnance de référé peut être frappée d'appel dans un délai de quinze jours courant à compter de la signification de l'ordonnance. 

Par ailleurs, aux termes de l'article 654 du code de procédure civile, la signification doit être faite à personne. La signification à une personne morale est faite à personne lorsque l'acte est délivré à son représentant légal, à un fondé de pouvoir de ce dernier ou à toute autre personne habilitée à cet effet.

Pour s'opposer à la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de l'appel soulevée par Mme [I], la société Pacifica invoque la nullité de la signification de l'ordonnance. L'intimée conclut à l'irrecevabilité de cette fin de non-recevoir mais pour des motifs qui concernent en réalité son bien fondé, de sorte que la fin de non-recevoir doit être déclarée recevable.

L'ordonnance frappée d'appel a été signifiée par Mme [I] à la société Pacifica, selon exploit du 16 juin 2021 délivré à « SA Pacifica, pris en la personne de son établissement secondaire sis [Adresse 1], [Localité 9], RCS, SIRET 352 358 865 000 66, société anonyme représentée par son Président Directeur Général ». Cet acte a fait l'objet d'un « dépôt à l'étude » en raison d'une impossibilité de signification à personne, l'huissier ayant précisé : « N'ayant pu, lors de mon passage, avoir aucune indication sur le lieu où rencontrer le destinataire de l'acte, ces circonstances rendant impossible la remise à personne ou à une personne présente acceptant de recevoir, et vérifications faites que le destinataire est domicilié à l'adresse indiquée suivant les éléments indiqués ci-après », et « Circonstances rendant impossible la signification à personne ou à une personne présente : bureaux visiblement en activité mais personne ne m'ouvre ». L'huissier indique en outre au sujet des vérifications concernant le domicile ou la résidence : « nom à la sonnette/ boîte aux lettres » et « connaissance de l'étude ».

L'appelante ne conteste nullement que l'agence sise à l'adresse [Adresse 2] à [Localité 9] soit une de ses agence ou établissement secondaire, et ne prétend pas non plus que celle-ci ne serait pas habilitée à recevoir une notification lui étant destinée, arguant seulement du fait que la signification n'a pas été faite à l'adresse de son siège social. Or, comme le soutient à bon droit l'intimée, une telle signification est régulière, en application de l'article 690 du code de procédure civile qui autorise la notification à une personne morale « au lieu de son établissement ». Par voie de conséquence, la signification n'est pas entachée de nullité pour avoir été délivrée à un établissement secondaire de la société Pacifica. 

L'absence dans l'acte d'indication de l'adresse du siège social de l'appelante est constitutif d'un vice de forme qui n'est susceptible d'entraîner la nullité de l'acte qu'en cas de démonstration d'un grief. La société ne faisant état d'aucun grief, ce moyen doit également être rejeté.

Dans le cas où la signification à personne s'avère impossible, l'article 655 du code de procédure civile prévoit que l'acte peut être délivré soit à domicile, soit, à défaut de domicile connu, à résidence. L'huissier de justice doit alors relater dans l'acte les diligences qu'il a accomplies pour effectuer la signification à la personne de son destinataire et les circonstances caractérisant l'impossibilité d'une telle signification. 

L'article 656 dispose que : ' si personne ne peut ou ne veut recevoir la copie de l'acte et s'il résulte des vérifications faites par l'huissier de justice, dont il sera fait mention dans l'acte de signification, que le destinataire demeure bien à l'adresse indiquée, la signification est faite à domicile. Dans ce cas, l'huissier de justice laisse au domicile ou à la résidence de celui-ci un avis de passage conforme aux prescriptions du dernier alinéa de l'article 655. Cet avis mentionne, en outre, que la copie de l'acte doit être retirée dans le plus bref délai à l'étude de l'huissier de justice, contre récépissé ou émargement, par l'intéressé ou par toute personne spécialement mandatée.

La copie de l'acte est conservée à l'étude pendant trois mois. (...) .

L'huissier ayant mentionné dans l'acte les vérifications qu'il a effectuées concernant le domicile, à savoir : « nom à la sonnette/ boîte aux lettres » et « connaissance de l'étude », et ses constatations: « bureaux visiblement en activité mais personne ne m'ouvre », ces mentions sont suffisantes pour répondre aux exigences du texte susvisé, alors qu'il n'est nullement contesté qu'une agence Pacifica soit établie à l'adresse à laquelle l'acte a été signifié, les constatations faites par l'huissier faisant au surplus foi jusqu'à inscription de faux. 

La demande d'annulation de l'acte de signification doit donc être rejetée et l'appel formé par la société Pacifica, plus de quinze jours après la signification de l'ordonnance du juge des référés doit être déclaré irrecevable comme tardif. 

Sur les appels incidents

L'article 550 du code de procédure civile dispose : 'sous réserve des articles 905-2,909 et 910, l'appel incident ou l'appel provoqué peut être formé, en tout état de cause, alors même que celui qui l'interjetterait serait forclos pour agir à titre principal. Dans ce dernier cas, il ne sera toutefois pas reçu si l'appel principal n'est pas lui-même recevable ou s'il est caduc.'

Conformément à l'article 528 du code de procédure civile, le délai à l'expiration duquel un recours ne peut plus être exercé court, de la notification de la décision, y compris à l'égard de ce lui qui notifie.

Mme [I] ayant fait signifier l'ordonnance querellée par acte du 16 juin 2021, le délai d'appel a commencé à courir à cette date. L'irrecevabilité de l'appel principal entraîne donc l'irrecevabilité de l'appel incident formé le 7 octobre 2021, dans le délai de l'article 905-2 mais après expiration du délai pour former appel principal.

En revanche, dès lors qu'il n'est pas justifié de la signification de l'ordonnance à la société Vivao Sympany AG, l'appel incident formé par cette dernière sera déclaré recevable.

Il convient de constater que c'est à tort que le premier juge a prononcé des condamnations contre cette société contre laquelle Mme [I] n'avait formulé aucune demande, l'ayant seulement appelée en déclaration d'ordonnance commune. La décision entreprise devra donc être réformée de ce chef, et il sera dit n'y avoir lieu à condamnation de la société Vivao Sympany AG au bénéfice de Mme [I], celle-ci ne pouvant être déboutée d'une demande qu'elle n'a pas formée.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

En considération de la solution du litige, il convient de confirmer l'ordonnance en ses dispositions relatives aux dépens et frais exclus des dépens.

Les dépens d'appel seront mis à la charge de la société Pacifica.

Il n'est pas inéquitable de laisser à la charge de chacune des parties les frais exclus des dépens qu'elle a exposés en cause d'appel. Les demandes présentées en appel en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile seront donc rejetées.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450, alinéa 2 du code de procédure civile,

DÉCLARE la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de l'appel recevable ;

DÉBOUTE la SA Pacifica de sa demande de nullité de la signification de l'ordonnance entreprise ;

DÉCLARE l'appel formée par la SA Pacifica irrecevable comme tardif ;

DÉCLARE l'appel incident de Mme [H] [K], épouse [I] irrecevable ;

DÉCLARE l'appel incident de la société Vivao Sympany AG recevable ;

INFIRME l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a condamné la société Vivao Sympany AG à payer à Mme [I] les sommes de 1 000 euros à titre de provision à valoir sur son préjudice corporel et de 12 208,85 euros à titre de provision à valoir sur son préjudice matériel ;

Statuant à nouveau dans cette limite et ajoutant à l'ordonnance,

DIT n'y avoir lieu à condamnation de la société Vivao Sympany AG au bénéfice de Mme [I] ;

REJETTE les demandes présentées au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel ;

CONDAMNE la SA Pacifica aux entiers dépens de la procédure d'appel.

Le greffier, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 2 a
Numéro d'arrêt : 21/03493
Date de la décision : 07/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-07;21.03493 ?
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