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07/10/2022 | FRANCE | N°16/00498

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 2 a, 07 octobre 2022, 16/00498


MINUTE N° 433/2022





























Copie exécutoire à



- Me Nadine HEICHELBECH



- Me Anne CROVISIER





Le 07/10/2022



Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE



ARRET DU 07 Octobre 2022





Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 16/00498 - N° Portalis DBVW-V-B7A-GBK4

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Décision déférée à la cour : 02 Octobre 2015 par le tribunal de grande instance de SAVERNE



APPELANT et intimé incident :



Monsieur [M] [H]

demeurant [Adresse 27]

[Localité 22])



représenté par Me Nadine HEICHELBECH, avocat à la cour.





INTIMÉS et appelan...

MINUTE N° 433/2022

Copie exécutoire à

- Me Nadine HEICHELBECH

- Me Anne CROVISIER

Le 07/10/2022

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE

ARRET DU 07 Octobre 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 16/00498 - N° Portalis DBVW-V-B7A-GBK4

Décision déférée à la cour : 02 Octobre 2015 par le tribunal de grande instance de SAVERNE

APPELANT et intimé incident :

Monsieur [M] [H]

demeurant [Adresse 27]

[Localité 22])

représenté par Me Nadine HEICHELBECH, avocat à la cour.

INTIMÉS et appelants incidents :

Monsieur [W] [P]

Madame [X] [E]

demeurant tous deux [Adresse 28]

[Localité 29]

représentés par Me Anne CROVISIER, avocat à la cour.

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 24 Juin 2022, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Isabelle DIEPENBROEK, Présidente de chambre

Madame Myriam DENORT, Conseiller

Madame Nathalie HERY, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme Dominique DONATH, faisant fonction

ARRET contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente et Madame Dominique DONATH faisant fonction de greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE et PRÉTENTIONS des PARTIES

Propriétaire à [Localité 29] (Bas-Rhin) d'une parcelle figurant au cadastre de cette commune, section [Cadastre 5], n° [Cadastre 16], sur laquelle est implantée une maison, M. [H] prétend que cette maison est alimentée en eau potable par un puits situé sur la parcelle contiguë n° [Cadastre 18], dont M. [P] est nu-propriétaire et Mme [E] usufruitière.

Ces derniers lui ayant interdit l'usage du puits, M. [H] les a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Saverne, lequel, par jugement en date du 2 octobre 2015, a :

- déclaré recevables les demandes de M. [H],

- rejeté, avant dire droit, sa demande de vue des lieux,

- rejeté la demande principale de M. [H] tendant à voir constater l'existence d'une servitude de puisage et de conduite d'eau au profit de sa parcelle,

- rejeté les demandes reconventionnelles de M. [P] et Mme [E] en indemnisation d'un préjudice de jouissance et exécution d'une obligation de faire sous astreinte,

- condamné M. [H] aux dépens et à verser à M. [P] et Mme [E] une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le tribunal a retenu que la servitude de puisage invoquée, ayant un caractère discontinu, ne pouvait être établie que par titre, et que l'acte de vente du 17 juillet 1938, qui, selon M. [H], aurait créé la servitude, ne constituait pas un tel titre.

*

M. [H] a régulièrement interjeté appel de ce jugement par déclaration en date du 29 janvier 2016.

Par arrêt avant dire droit du 16 novembre 2017 la cour a ordonné une mesure d'expertise confiée à M. [C] géomètre expert avec mission de :

1- se rendre sur les lieux et décrire les ouvrages afférents à la servitude litigieuse (puits, captage de source, réservoir, canalisations), indiquer en quoi ils sont apparents ou, au contraire, dissimulés ;

2- dire s'il existe une conduite alimentant en eau la parcelle n° [Cadastre 16] de M. [H] depuis la parcelle n° [Cadastre 18] des consorts [K] et si la parcelle n° [Cadastre 16] dispose d'une autre alimentation en eau potable ;

3- reconstituer la chaîne des transferts de propriété depuis l'acte de vente du 17 juillet 1938 concernant la parcelle alors cadastrée sous le n° [Cadastre 7] et dire si la servitude de conduite d'eau mentionnée dans cet acte correspond à celle revendiquée par M. [H], dont le fonds dominant est sa parcelle n° [Cadastre 16] et le fonds servant la parcelle n° [Cadastre 18] des consorts [K] ;

La cour a retenu que l'acte de vente du 17 juillet 1938 produit par M. [H] concernait une parcelle anciennement cadastrée sous le n° [Cadastre 7], qui avait fait l'objet de divisions et dont seraient issues les parcelles actuellement cadastrées n° [Cadastre 16] et [Cadastre 18]. Toutefois, compte tenu de l'imprécision de l'ancien cadastre et de l'absence de justification de l'ensemble des mutations de propriété intervenues depuis 1938, il apparaissait impossible, en l'état, de vérifier si la servitude de conduite d'eau visée dans l'acte du 17 juillet 1938 correspondait bien à celle revendiquée par M. [H].

Aux termes du rapport qu'il a déposé le 26 mars 2021, l'expert judiciaire, M. [C], conclut que la propriété de M. [P] (n°[Cadastre 18] de la section [Cadastre 4]) n'est grevée d'aucune servitude de canalisation au profit d'aucun fonds, et a fortiori au profit de celui de M. [H] (n°[Cadastre 16] section [Cadastre 4]), estimant par ailleurs que le deuxième puits situé sur le fonds de M. [H] pourrait suffire à ses besoins en eau, si son eau est potable.

Par conclusions transmises par voie électronique le 6 septembre 2021, M. [H] demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il l'a débouté de ses demandes et l'a condamné au paiement d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens et de :

- constater l'existence d'une servitude de puisage et de conduite d'eau à la charge du fonds de M. [P] (parcelle n° [Cadastre 18]) au profit de son fonds (parcelle n° [Cadastre 16]),

- subsidiairement de constater l'existence d'une servitude acquise par prescription trentenaire,

- ordonner la rectification en ce sens de la servitude inscrite au Livre foncier,

- de dire que, sauf à commettre un abus de droit, M. [P] et Mme [E] ne peuvent prélever de l'eau dans le puits, seule source d'approvisionnement en eau de sa parcelle,

- dire et juger qu'il a un droit d'accès au réservoir conformément à l'article 696 du code civil,

- condamner M. [P] et Mme [E] à lui payer une somme de 2 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des entiers dépens de première instance et d'appel,

- rejeter l'appel incident et confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes reconventionnelles de M. [P] et Mme [E],

- débouter les intimés de toutes conclusions contraires.

Il soutient que les deux parcelles sont issue d'un fonds unique et que, de tout temps, le puits situé sur le fonds de M. [P] a été utilisé pour alimenter en eau son propre fonds.

Il prétend rapporter la preuve d'un titre pour une servitude décrite comme une servitude de 'conduite d'eau', et se fonde à cet égard sur un acte de vente du 17 juillet 1938, ainsi que sur les fiches du Livre foncier aux noms des précédents propriétaires, corroborés par des attestations et par l'existence d'une canalisation. Il conteste que cette servitude concerne d'autres parcelles comme cela est soutenu par les intimés du fait des différences de niveau entre les différentes parcelles, les parcelles n°[Cadastre 12] et [Cadastre 13] étant situées plus haut que le puits.

Subsidiairement, il invoque la prescription acquisitive trentenaire, une servitude d'écoulement d'eau - et non de puisage -, pouvant selon lui être établie sur ce fondement, puisqu'elle est continue et apparente en raison de l'existence d'ouvrages permettant son exercice, en l'occurrence une trappe permettant d'accéder au puits situé sur le terrain de M. [P].

Si, selon l'expert, il existerait deux servitudes de conduites d'eau bénéficiant à son fonds, une servitude S1 grevant la parcelle n°[Cadastre 13] et une servitude S2 grevant les parcelles n°[Cadastre 19], [Cadastre 20] et [Cadastre 21], ces servitudes ne peuvent être effectives qu'en passant par la parcelle n°[Cadastre 18] appartenant à M. [P], cet argument ayant été écarté par l'expert sans explications.

Il ajoute que n'a été constatée aucune autre canalisation alimentant son fonds que celle passant par le fonds de M. [P] et considère qu'il y a lieu de présumer, sauf preuve contraire, que la conduite d'eau dont l'existence a été constatée est bien celle mentionnée au Livre foncier.

L'appelant soutient enfin que la demande reconventionnelle de M. [P] et Mme [E] est irrecevable et mal fondée puisque le puits situé sur leur fonds est la seule source d'alimentation en eau de son propre fonds.

*

Par conclusions transmises par voie électronique le 14 mars 2022, M. [P] et Mme [E] concluent à la confirmation du jugement déféré, sauf en ce qu'il a rejeté leurs demandes reconventionnelles en dommages et intérêts et aux fins d'enlèvement du cadenas apposé par M. [H] sur le puits litigieux. Formant appel incident de ces chefs, ils sollicitent la condamnation de l'appelant à leur payer une somme de 5 000 euros en réparation de leur préjudice de jouissance, et à ôter le cadenas, sous astreinte. Ils sollicitent la condamnation de M. [H] à leur payer une somme de 5 000 euros au titre de leurs frais non compris dans les dépens exposés à hauteur de cour.

Ils font valoir que l'expert a constaté le caractère apparent de l'ouvrage de captage situé en amont du réservoir d'eau et dudit réservoir, tous deux étant situés sur la propriété de M. [P], ainsi que l'existence de deux puits situés sur la propriété de M. [H], mais qu'il n'a pas pu constater le mode d'alimentation de ces différents ouvrages. Ils en déduisent que la conduite d'eau invoquée par M. [H] n'est pas apparente.

Les intimés soulignent que l'expert a également relevé, dans le cadre de ses observations utiles, qu'il existe sur la propriété de M. [H], un deuxième puits d'un rendement 13,5 fois supérieur au rendement du bassin qui serait prétendument alimenté par un tuyau depuis la propriété de M. [P], ce puits servant au remplissage de la piscine de M. [H] selon ses explications.

En outre, l'identification de l'origine de ces différentes parcelles a permis à l'expert judiciaire d'exclure, sans aucune équivoque, le fait qu'une servitude grèverait le fonds de M. [P] au profit du fonds de M. [H], puisqu'il n'y a en effet aucune inscription de servitude grevant le fonds de l'intimé, la servitude de conduite d'eau concernant les parcelles section [Cadastre 4] n°[Cadastre 12] et [Cadastre 13] qui sont en amont de celle de M. [H], et en aucun cas celle de M. [P], l'expert ayant en outre écarté l'argument de M. [H] selon lequel il ne serait pas possible que la servitude de conduite d'eau grevant la parcelle située à côté du fonds de M. [P] puisse bénéficier à son propre fonds sans passer par le fonds de l'intimé.

Les intimés ajoutent que M. [H] ne peut pas non plus revendiquer une servitude de puisage qui est discontinue et ne peut s'établir que par titre.

Au soutien de leur demande reconventionnelle, M. [P] et Mme [E] font valoir que M. [H], sans disposer d'aucun droit, a posé un cadenas sur le puits appartenant à M. [P], et a détruit, à plusieurs reprises, les cadenas posés par ce dernier, violant ainsi son droit de propriété ce qui justifie l'allocation de dommages et intérêts et sa condamnation à enlever ledit cadenas.

Pour l'exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions notifiées et transmises par voie électronique aux dates susvisées.

La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 5 avril 2022.

MOTIFS

Sur la servitude de conduite d'eau

Conformément à l'article 690 du code civil les servitudes continues et apparentes s'acquièrent par titre ou par la prescription trentenaire.

L'article 691 du même code énonce par ailleurs : ' Les servitudes continues non apparentes, et les servitudes discontinues apparentes ou non apparentes, ne peuvent s'établir que par titres.

La possession même immémoriale ne suffit pas pour les établir, sans cependant qu'on puisse attaquer aujourd'hui les servitudes de cette nature déjà acquises par la possession, dans les pays où elles pouvaient s'acquérir de cette manière.  .

Comme l'a retenu le tribunal une servitude de puisage qui est discontinue ne peut s'établir que par titre.

M. [H] prétend en premier lieu que son fonds bénéficie d'une servitude de conduite d'eau qui résulterait d'un titre. Il se réfère à un acte de vente daté non pas du 17 juillet 1938 mais des 9 et 30 juillet 1938 portant sur une parcelle anciennement cadastrée section D n° [Cadastre 7]p, distraite d'une parcelle n°[Cadastre 7], avec création d'une servitude de conduite d'eau la grevant, ainsi qu'au feuillet n°1685 du Livre foncier mentionnant l'inscription, le 12 septembre 1938, d'une servitude de conduite d'eau à la charge de la parcelle section D n°[Cadastre 7]p.

L'expert après avoir analysé les plans cadastraux, notamment le plan napoléonien en vigueur jusqu'en 1983, et les copies de différents feuillets du Livre foncier ayant trait à l'historique du parcellaire indique que :

- la section D du cadastre est devenue section [Cadastre 4] lors de la rénovation cadastrale de 1983,

- la parcelle section [Cadastre 4] n° [Cadastre 16] a été créée par la réunion des anciennes parcelles section D n°[Cadastre 24]/[Cadastre 7] et [Cadastre 25]/[Cadastre 6],

- la parcelle section [Cadastre 4] n° [Cadastre 14] a été créée par la division de la parcelle n° [Cadastre 17] qui était issue de la division d'une parcelle n°[Cadastre 15] provenant de la réunion des anciennes parcelles section D n° [Cadastre 2],[Cadastre 3],[Cadastre 8], [Cadastre 9], [Cadastre 10], [Cadastre 11], [Cadastre 23]/[Cadastre 7] et [Cadastre 26]/[Cadastre 1],

- la parcelle section D n°[Cadastre 7]p qui provient de la parcelle n°[Cadastre 7] correspond aux parcelles section [Cadastre 4] n°[Cadastre 12] et n°[Cadastre 13],

- les inscriptions au Livre foncier font apparaître deux servitudes de conduite d'eau en rapport avec l'objet de l'expertise identifiées S1 et S2 par l'expert, ces deux servitudes ayant pour fonds dominant le fonds de M. [H] et pour fonds servant la parcelle section [Cadastre 4] n° [Cadastre 13] pour la servitude S1, et les parcelles section [Cadastre 4] n° [Cadastre 19]/[Cadastre 12], [Cadastre 20]/[Cadastre 12] et [Cadastre 21]/[Cadastre 12] pour la servitude S2,

- les servitudes inscrites au feuillet n° 1685 du Livre foncier ouvert au nom de M. [H] grèvent l'ancienne parcelle n°[Cadastre 7]p, correspondant désormais aux parcelles n°[Cadastre 12] et [Cadastre 13],

- le feuillet n°1205 du Livre foncier ouvert au nom de M. [P] ne mentionne aucune servitude de canalisation ou de conduite grevant cette parcelle.

Il résulte de l'ensemble de ces constatations, qui ne sont pas utilement contredites par l'appelant, et de l'examen des annexes jointes au rapport d'expertise, que la parcelle de M. [P] - n°[Cadastre 18] de la section [Cadastre 4] - n'est grevée d'aucune servitude de

canalisation au profit d'aucun fonds, et a fortiori au profit de celui de M. [H] - n°[Cadastre 16] section [Cadastre 4] -, les servitudes de conduite d'eau bénéficiant à ce fonds grevant d'autres parcelles.

Par voie de conséquence, M. [H] ne peut donc revendiquer l'existence d'une servitude de conduite d'eau constituée par titre.

Il ne peut pas davantage se prévaloir de l'acquisition d'une telle servitude par prescription acquisitive, alors qu'aucune canalisation n'est apparente contrairement à ce qu'il affirme. L'expert a en effet indiqué n'avoir constaté la présence d'aucune conduite alimentant en eau la parcelle n°[Cadastre 16] de M. [H] depuis la parcelle n°[Cadastre 18] des consorts [K], les seuls ouvrages apparents étant :

- sur le fonds de M. [P] :

* un réservoir d'eau verrouillé par un cadenas dont seul M. [H] a la clé,

* un puits de captage situé en amont de ce réservoir

- sur le fonds de M. [H] :

* un puits de forme circulaire d'un mètre de diamètre de 40 m3 ayant un rendement de 13,5 m3/jour, 13,5 fois supérieur à celui revendiqué situé sur le terrain appartenant à M. [P], aucun lien n'existant entre ces deux puits, servant au remplissage de la piscine de M. [H],

* un second puits d'un rendement de 1 m3/jour qui, selon les affirmations de M. [H], serait alimenté par le trop plein du réservoir situé sur le fonds de M. [P], ce que l'expert n'a pas pu vérifier.

En l'absence de toute canalisation ou autre ouvrage apparent démontrant que le fonds appartenant à M. [H] serait alimenté en eau à partir du réservoir situé sur le fonds de M. [P], les attestations produites ne pouvant y pallier, l'appelant ne peut revendiquer l'acquisition d'une servitude de conduite d'eau par prescription trentenaire.

C'est tout aussi vainement que M. [H] prétend que, du fait de la configuration des lieux, les servitudes S1 et S2 grevant d'autres parcelles que la parcelle n° [Cadastre 18] ne peuvent être effectives qu'en passant par cette parcelle n°[Cadastre 18] appartenant à M. [P], l'expert ayant écarté cet argument en page 9 de son rapport en réponse à un dire du conseil des intimés. Il indique en effet souscrire à l'analyse de Me [O] qui avait avancé que, du fait du profil altimétrique des lieux, la déclivité de 27 mètres permettait à toute conduite provenant des fonds section [Cadastre 4] n° [Cadastre 13] grevé par la servitude S1, et section [Cadastre 4] n°[Cadastre 19],[Cadastre 20], [Cadastre 21] grevés par la servitude S2 d'alimenter le fonds de M. [H] sans avoir à passer par la propriété de M. [P]. Il n'est enfin nullement établi qu'il existerait un lien quelconque entre le puits situé sur le fonds de M. [P] et les fonds respectivement grevés desdites servitudes.

M. [H] ne pouvant revendiquer une servitude résultant d'un titre ou d'un usage trentenaire, le jugement entrepris doit donc être confirmé en tant qu'il a rejeté ses demandes à ce titre.

Sur la demande reconventionnelle

Il n'est pas contesté que le réservoir situé sur le fonds de M. [P] a été muni d'un cadenas par M. [H] qui en possède seul la clé. Au vu de ce qui précède et du rejet des prétentions de M. [H] quant à l'existence d'une servitude de conduite d'eau bénéficiant à son fonds, M. [P] et Mme [E] sont fondés à solliciter d'une part la condamnation de M. [H] à supprimer ledit cadenas, et d'autre part la réparation de l'atteinte portée à leurs droits de propriétaire et d'usufruitier du fait de la privation de jouissance du réservoir situé sur leur fonds.

M. [H] sera donc condamné à enlever le cadenas qu'il a mis en place, dans les conditions fixées au dispositif du présent arrêt, ainsi qu'à payer à M. [P] et Mme [E], en réparation de leur préjudice de jouissance, une somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts eu égard à la durée du trouble, le jugement entrepris étant infirmé en tant qu'il a rejeté la demande reconventionnelle.

Sur les dépens et les frais exclus des dépens

Le jugement entrepris sera confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et frais exclus des dépens.

M. [H] qui succombe supportera la charge des entiers dépens d'appel et sera débouté de sa demande en application de l'article 700 du code de procédure civile. Il sera en revanche alloué à M. [P] et Mme [E], sur ce fondement, une somme de 2 000 euros.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450, alinéa 2 du code de procédure civile,

CONFIRME le jugement du tribunal de grande instance de Saverne en date du 2 octobre 2015, sauf en ce qu'il a rejeté la demande reconventionnelle de M. [P] et Mme [E] ;

INFIRME le jugement dans cette limite ;

Statuant à nouveau et ajoutant au jugement,

CONDAMNE M. [M] [H] à enlever le cadenas mis en place sur le réservoir situé sur le fonds de M. [P] dans un délai de 15 jours à compter de la signification du présent arrêt, sous peine, passé ce délai, d'une astreinte de 50 (cinquante) euros par jour de retard, pendant un délai de deux mois ;

CONDAMNE M. [M] [H] à payer à M. [W] [P] et Mme [X] [E], ensemble, la somme de 3 000 € (trois mille euros) à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice de jouissance ;

CONDAMNE M. [M] [H] aux entiers dépens d'appel, incluant les frais d'expertise judiciaire, ainsi qu'à payer à M. [W] [P] et Mme [X] [E], ensemble, la somme de 2 000 € (deux mille euros) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

DEBOUTE M. [H] de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

Le greffier,La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 2 a
Numéro d'arrêt : 16/00498
Date de la décision : 07/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-07;16.00498 ?
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