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15/09/2022 | FRANCE | N°20/03033

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 2 a, 15 septembre 2022, 20/03033


MINUTE N° 361/2022





























Copie exécutoire à



- Me Guillaume HARTER



- Me Mathilde SEILLE





Le 15 septembre 2022



Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE



ARRÊT DU 15 Septembre 2022





Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 20/03033 - N° Portalis DBVW-V-B7E-HNHX<

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Décision déférée à la cour : 10 Septembre 2020 par le tribunal judiciaire de STRASBOURG





APPELANTE :



La S.A. ELECTRICITE DE STRASBOURG RESEAUX prise en la personne de son représentant légal

ayant son siège social [Adresse 2] à [Localité 4]



représe...

MINUTE N° 361/2022

Copie exécutoire à

- Me Guillaume HARTER

- Me Mathilde SEILLE

Le 15 septembre 2022

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 15 Septembre 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 20/03033 - N° Portalis DBVW-V-B7E-HNHX

Décision déférée à la cour : 10 Septembre 2020 par le tribunal judiciaire de STRASBOURG

APPELANTE :

La S.A. ELECTRICITE DE STRASBOURG RESEAUX prise en la personne de son représentant légal

ayant son siège social [Adresse 2] à [Localité 4]

représentée par Me Guillaume HARTER, avocat à la cour.

INTIMÉE :

La S.C.I. E.M.E, prise en la personne de son représentant légal

ayant son siège social [Adresse 3] à [Localité 4]

représentée par Me Mathilde SEILLE, avocat à la cour.

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 02 Juin 2022, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Isabelle DIEPENBROEK, Présidente de chambre

Madame Catherine GARCZYNSKI, Conseiller

Madame Myriam DENORT, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie SCHIRMANN

ARRET contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente et Madame Sylvie SCHIRMANN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE, MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Alors que le bâtiment industriel de la SCI EME (ci-après la SCI), situé [Adresse 1] à [Localité 5], était en cours de rénovation, une surtension est survenue le 3 mai 2016 ayant endommagé l'installation électrique du bâtiment, à la suite du changement le même jour par la société Electricité de Strasbourg (ES) du compteur général d'électricité.

Un procès-verbal a été établi le 13 décembre 2016, après une réunion contradictoire d'expertise en date du 28 juillet 2016, et signé par un représentant de la société ES et l'expert du cabinet Texa, désigné par la société Aviva, assureur de la SCI, selon lequel :

- la cause de la surtension est un branchement défectueux du compteur,

- ont été endommagés et doivent être fournis : 48 luminaires 2 X 58W, 8 blocs autonomes d'éclairage de sécurité (BAES) standard, 3 BAES anti-panique et 3 'bloc télécommande BAES',

- les signataires se sont mis d'accord pour une valeur à neuf de ces fournitures, main d'oeuvre comprise (pose, location de nacelle et dépose de l'installation défectueuse), de 7 076 euros HT et une valeur, vétusté de 70% déduite pour les 48 luminaires 2 X 58W, de 4 858 euros HT, seule indemnisation admise par la société ES.

Par acte du 19 avril 2018, la SCI EME a assigné les société ES et ES Réseaux devant le tribunal de grande instance de Strasbourg aux fins d'indemnisation de son préjudice.

Par jugement du 10 septembre 2020, le tribunal judiciaire a condamné la société ES Réseaux à payer à la SCI la somme de 19 106,98 euros (17 980 + 1 126,98), avec intérêts au taux légal à compter du 7 décembre 2016 et capitalisation des intérêts, au titre des travaux de réparation des dommages électriques subis, outre 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens ; elle a débouté la SCI du surplus de sa demande au titre de l'impossibilité de louer ses locaux et la société ES Réseaux de sa demande en dommages et intérêts pour procédure abusive.

Le tribunal a retenu la responsabilité contractuelle de la société ES Réseaux, venant aux droits de la société ES, qui reconnaissait sa faute. Sur l'évaluation du préjudice quant à la réparation des dommages électriques, contestée par la société ES Réseaux qui estimait le montant réclamé excessif, il a considéré que :

- les factures des 6 juin 2016 et 20 septembre 2017 correspondaient parfaitement à l'étendue du préjudice constaté et reconnu par la société ES lors des opérations d'expertise,

- la société ES Réseaux produisait elle-même des devis de 18 852 euros (STI Concept) et 19 200 euros (Ektal).

*

La société ES Réseaux a interjeté appel de ce jugement par déclaration en date du 20 octobre 2020.

Elle demande à la cour d'infirmer le jugement déféré et, à titre principal, de limiter sa condamnation à la somme de 4 858 euros (chiffrage HT réalisé par l'expert comprenant la fourniture, vétusté déduite pour les 48 luminaires 2X58W, et la main d'oeuvre), et à titre subsidiaire, à 5 984,98 euros (4 858 + 1 126,98) ; en tout état de cause, elle sollicite la condamnation de la SCI à lui verser les sommes de 3 000 euros pour procédure abusive et 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

L'appelante fait valoir, sur le préjudice résultant de sa faute, que :

- les luminaires endommagés étaient très anciens et/ou vétustes, et il s'agissait de néons et de tubes fluo de première génération qui auraient, en tout état de cause, été changés dans le cadre des travaux de rénovation de la SCI,

- le premier juge a fait une lecture erronée des pièces, les deux devis de 18 852 euros (STMI Concept) et 19 200 euros (Ektal) étant libellés au nom de la SCI et ayant été sollicités par cette dernière, alors que ceux sollicités par elle, notamment celui de la société Baumgarten (pour 8 280 euros), faisaient état d'un montant bien inférieur,

- les devis qu'elle avait produits (annexe 6) montraient que les prix moyens pratiqués étaient loin de ceux réclamés et, si elle avait produit ceux établis à la demande de la SCI, c'était pour montrer qu'ils étaient disproportionnés par rapport aux prix du marché,

- le prix public d'un luminaire étanche pour hall industriel est entre 80 et 120 euros et, si l'on part d'un montant unitaire HT de 110 euros, on obtient pour 44 luminaires 4 840 euros, soit, avec la main d'oeuvre chiffrée par l'expert à 2 734 euros HT, 8 014 euros HT, soit 9 616,80 euros TTC,

- la SCI n'a déclaré que 44 luminaires et jamais de dégâts dans d'autres parties du bâtiment, de sorte que le devis de 1 126,98 euros ne peut être rattaché à son intervention.

Sur sa demande reconventionnelle pour procédure abusive, elle soutient que la SCI est de mauvaise foi ainsi qu'il ressort du chiffrage exorbitant des réparations et qu'elle a fait preuve de légèreté blâmable en ne faisant pas les démarches auprès de son assureur pour être indemnisée.

*

Par conclusions du 29 mai 2021, la SCI EME demande la confirmation du jugement déféré et, à titre subsidiaire, le débouté des demandes de l'appelante et sa condamnation à lui payer une somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens 'de l'instance'.

Elle fait valoir que :

- les critiques du jugement concernant les devis de 18 852 euros (STMI Concept) et 19 200 euros (Ektal) sont vaines, le motif concernant les factures produites par elle étant suffisant,

- c'est dans le cadre de l'expertise amiable contradictoire qu'avaient été présentés ces devis,

- les devis d'un montant moindre présentés par la société adverse ont été établis à la demande de cette dernière par des sociétés habituelles de son réseau, si bien qu'ils ne reflètent pas la réalité du marché du fait de tarifs préférentiels,

- le devis Baumgarten ne couvre pas l'intégralité de son préjudice (pas de BAES anti-panique, ni de télécommande BAES) et ne distingue pas la main d'oeuvre,

- la marque Ledvance, sur la base de laquelle l'appelante propose un calcul, ne correspond pas à celle des luminaires qu'elle a du acquérir, le nombre de luminaires remplacés est de 48, et non 44, et elle omet dans son calcul la main d'oeuvre et les frais annexes,

- le fait qu'elle aurait nécessairement changé ses luminaires est sans emport, dans la mesure où l'intégralité de son préjudice doit être réparée de sorte que le remboursement de sa facture est de droit,

- c'est également en vain que l'appelante se fonde sur le chiffrage de 4 858 euros HT retenu par l'expert amiable, puisque celui-ci rappelle que les dommages sur l'installation électrique des bureaux et sur la climatisation n'ont pas été retenus, si bien que ce chiffrage ne reflète pas l'intégralité des dommages subis, ce qui explique que son gérant n'ait pas signé le procès-verbal,

- elle a fait établir un devis complémentaire le 20 septembre 2017 pour 'la réfection des luminaires restant' non pris en compte dans la facture, concernant une partie non encore louée lors du sinistre.

Elle conteste la demande reconventionnelle alors que l'appelante n'a formulé aucune offre d'indemnisation pendant plus de deux ans, bien qu'en possession du rapport du cabinet TEXA, se contentant d'exposer être dans l'attente du recours subrogatoire de son assureur.

*

L'instruction de l'affaire a été clôturée par ordonnance en date du 4 janvier 2022.

MOTIFS

La SCI ne demande pas l'infirmation du jugement déféré en ce qu'il a rejeté une partie de ses demandes. Il sera donc statué dans cette limite.

Sur le préjudice subi au titre des dommages électriques

La SCI n'ayant pas elle-même signé le procès-verbal établi le 13 décembre 2016 de constatations relatives notamment à l'évaluation des dommages, mais seulement l'expert du cabinet Texa mandaté par son assureur, elle n'est pas liée par l'évaluation des dommages qui y figurent.

En revanche, la société ES l'ayant signé, elle ne peut revenir sur le nombre de luminaires à fournir (48 et non 44), ayant par sa signature - précédée uniquement de la réserve suivante : 'le remboursement se fera vétusté déduite' - donné son accord à cette description des dommages.

La société ES admet elle-même un prix HT de 110 euros pour un luminaire étanche pour hall industriel (supérieur à celui de 66 euros HT retenu par l'expert en valeur à neuf), soit pour 48 luminaires, un montant de 5 280 HT euros, en ce qui concerne la seule fourniture de ces luminaires ; elle justifie de la pertinence de ce prix, notamment au regard du prix public pratiqué par le fabricant Ledvance (109,85), sans se référer au prix inférieur qui lui était proposé compte tenu d'un contrat conclu entre eux. Il n'est pas non plus inférieur au prix retenu par le devis Ektal, produit par la SCI elle-même à l'expert lors des discussions ayant précédé l'évaluation des dommages, qui est de 96,62 euros HT pour chacun des 48 luminaires.

En revanche, le montant facturé par la société BM Electricité générale à la SCI le 6 juin 2016 pour le démontage (48 X 30 € = 1 440 € HT) ainsi que la fourniture et la pose

(48 X 218€ = 10 464 € HT) de 48 foyers lumineux 'Mazda' apparaît disproportionné, au regard notamment du devis Baumgarten produit par la société ES chiffrant 'le remplacement des appareils HS', et notamment à 95 euros HT par luminaire, le démontage/remontage de ces 48 lampes, de sorte que ce coût inclut la fourniture et la main d'oeuvre.

Si le premier juge a retenu cette facture BM Electricité générale pour son montant total de 17 980 euros, c'est parce qu'il a cru à tort que la société ES se prévalait elle-même de deux devis pour des montants supérieurs ; en réalité, ces devis STMI Concept et Ektal se trouvaient dans ses pièces seulement parce qu'il lui avaient été transmis par l'expert mandaté par l'assureur de la SCI, dans le cadre des échanges précités, ainsi qu'il ressort du courriel du 9 novembre 2016, les lui adressant en 'pièces jointes'.

Sera donc retenue la somme de 5 280 HT euros au titre de la fourniture en valeur à neuf de ces 48 luminaires.

Aucune vétusté ne peut en effet être déduite, au regard du principe de réparation intégrale du préjudice causé par la faute de la société ES.

S'ajoutent à ces 48 luminaires, la fourniture de blocs autonomes d'éclairage de sécurité (BAES) standard (8) et anti-panique (3) ainsi que de trois blocs télécommande BAES selon le procès-verbal.

Le coût de leur fourniture a été évalué par l'expert à la somme respective de 544 euros, 300 euros et 330 euros, soit, au total, une somme de 1 174 euros HT, qui peut être retenue au regard des devis produits par la société ES, alors que la facture précitée du 6 juin 2016, concernant la fourniture de 8 blocs secours, pose incluse (2 592 euros HT), et le démontage de 8 blocs (336 euros HT), apparaît également disproportionnée par rapport aux prix du marché et notamment au devis Baumgarten (1 840 euros HT au total pour les mêmes prestations).

Par ailleurs, selon le procès-verbal, la main d'oeuvre est évaluée pour la pose des luminaires et 'BAES'et la dépose de l'installation défectueuse à un prix de 2 064 euros HT avec le détail du nombre d'heures et du coût horaire, lequel n'est pas remis en cause par les devis versés aux débats. Le coût de la location de nacelle retenu pour 670 euros HT par le procès-verbal doit enfin être admis, alors que les propres devis produits par la SCI à l'expert la chiffraient à 658 euros HT (devis STMI concept) et 688,51 euros HT(devis société Ektal).

Dès lors le montant de l'indemnisation des dommages visés au procès-verbal se chiffre à la somme de :

5 280 +1 174 + 2 064+ 670 = 9 188 euros HT, soit 11 025,6 euros TTC (9 188 + 1 837,6).

Le jugement déféré sera donc infirmé en ce qu'il a accordé une somme de 17 980 euros à ce titre.

Par ailleurs, ne peut être pris en compte le devis complémentaire du 20 septembre 2017 pour 1 126,98 euros au titre de la pose de 10 luminaires étanches et la location de nacelle durant 2 jours (il s'agit d'un devis et non d'une facture, contrairement à ce qu'a indiqué le premier juge) .

Il n'est en effet pas établi que ces travaux aient été rendus nécessaires par la surtension survenue le 3 mai 2016, dont la société ES a admis la responsabilité.

Il est seulement noté au paragraphe du procès-verbal intitulé 'évaluation des dommages', sous le tableau les décrivant et les chiffrant, que le gérant de la SCI a 'également évoqué des dommages sur l'installation électrique des bureaux et sur la climatisation. Ceux-ci étaient en cours de travaux lors du sinistre.(...)'; mais ces dommages ne sont pas décrits, ni chiffrés dans le procès-verbal, et ils ne sont pas non plus démontrés par d'autres éléments.

En conséquence, le jugement déféré sera également infirmé en ce qu'il a accordé une somme de 1 126,98 euros à la SCI.

Il conviendra donc de condamner la société ES à payer à la SCI la somme de 11 025,60 euros, assortie des intérêts légaux à compter du 7 décembre 2016, le jugement déféré n'étant pas critiqué en ce qui concerne le point de départ des intérêts.

Sur la demande reconventionnelle en dommages et intérêts pour procédure abusive

La preuve de la mauvaise foi de la SCI ou de sa légèreté blâmable n'est pas rapportée.

Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté cette demande de la société ES.

Sur les dépens et les frais exclus des dépens

Le jugement déféré étant confirmé sur le principe de la créance de la SCI, il sera confirmé en ses dispositions afférentes aux dépens et aux frais non compris dans les dépens.

Compte tenu de l'issue de l'appel en revanche, chacune des parties gardera la charge de ses propres dépens d'appel et de ses frais non compris dans les dépens ; les demandes respectives fondées sur l'article 700 du code de procédure civile seront donc rejetées.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, conformément à l'article 450, alinéa 2 du code de procédure civile,

INFIRME le jugement déféré en ce qu'il a condamné la société Electricité de Strasbourg Réseaux à payer à la SCI EME la somme de 19 106,98 euros, avec intérêts légaux à compter du 7 décembre 2016, au titre des travaux de réparation des dommages électriques subis ;

Statuant à nouveau de ce chef,

CONDAMNE la société Electricité de Strasbourg Réseaux à payer à la SCI EME la somme de 11 025,60 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 7 décembre 2016, au titre des travaux de réparation des dommages électriques subis ;

CONFIRME le jugement déféré pour le surplus dans la limite de l'appel,

Y ajoutant,

DÉBOUTE les parties de leurs demandes respectives formées en cause d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

DIT que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens d'appel.

Le greffier,La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 2 a
Numéro d'arrêt : 20/03033
Date de la décision : 15/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-15;20.03033 ?
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