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19/08/2022 | FRANCE | N°21/00013

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 2 a, 19 août 2022, 21/00013


MINUTE N° 333/2022





























Copie exécutoire à



- Me Thierry CAHN



- Me Anne CROVISIER





Le 19 août 2022



Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE



ARRET DU 19 Août 2022





Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 21/00013 - N° Portalis DBVW-V-B7F-HOSJ


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Décision déférée à la cour : 26 Novembre 2020 par le Tribunal judiciaire de STRASBOURG







APPELANTE :



La DIRECTION REGIONALE DES FINANCES PUBLIQUES D'ILE DE FRANCE, prise en la personne de son Directeur

ayant son siège [Adresse 1])



représentée par Me Thierry C...

MINUTE N° 333/2022

Copie exécutoire à

- Me Thierry CAHN

- Me Anne CROVISIER

Le 19 août 2022

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE

ARRET DU 19 Août 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 21/00013 - N° Portalis DBVW-V-B7F-HOSJ

Décision déférée à la cour : 26 Novembre 2020 par le Tribunal judiciaire de STRASBOURG

APPELANTE :

La DIRECTION REGIONALE DES FINANCES PUBLIQUES D'ILE DE FRANCE, prise en la personne de son Directeur

ayant son siège [Adresse 1])

représentée par Me Thierry CAHN, avocat à la cour.

INTIMÉE :

Madame [Z] [N]

demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Anne CROVISIER, avocat à la cour.

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 04 Février 2022, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Isabelle DIEPENBROEK, Présidente de chambre,

Madame Myriam DENORT, Conseiller

Mme Nathalie HERY, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme Dominique DONATH, faisant fonction.

ARRET contradictoire

- prononcé publiquement après prorogation du 1er avril 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente et Mme Sylvie SCHIRMANN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE et PRÉTENTIONS des PARTIES

Madame [Z] [N] détient :

- 99,58% des parts de la société de droit français Escal dans laquelle elle exerce les fonctions de directeur général délégué et d'administrateur ;

- 33,33% des parts de la société de droit roumain Rolux, par ailleurs détenue à 33,33% par chacun de ses deux enfants ;

- 10% des parts de la société de droit allemand Nutrana, par ailleurs détenue à 90% par la société de droit français Escal, dont elle est la gérante.

Le 14 juin 2017, Madame [N] a déposé une déclaration au titre de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) pour l'année 2017 dans laquelle la totalité de sa participation au capital de la société roumaine Rolux était valorisée à 600 000 euros pour l'assiette des droits.

Le 6 juin 2019, Mme [N] a formé une réclamation contentieuse au motif qu'elle pouvait prétendre au bénéfice d'une exonération partielle de 75 % de la valeur des titres Rolux à la faveur du dispositif défini à l'article 885 I quater du code général des impôts en raison de l'existence de liens de dépendance économique et managériale avec les sociétés Escal et Nutrana dans lesquelles elle exerce des fonctions de dirigeante.

Cette réclamation a été rejetée par l'administration par décision du 18 juillet 2019.

Par exploit du 9 septembre 2019, Mme [N] a saisi le tribunal de grande instance de Strasbourg d'une demande tendant à voir déclarer non fondée la décision de rejet de sa réclamation du 18 juillet 2019 et à obtenir le dégrèvement de l'ISF au titre de l'année 2017, à hauteur de la somme de 5 555 euros.

Par jugement du 26 novembre 2020, le tribunal judiciaire de Strasbourg a infirmé la décision de rejet du 18 juillet 2019 émanant de la direction régionale des finances publiques d'Ile de France portant sur la demande formulée par Mme [N], prononcé un dégrèvement de l'ISF de Mme [N] au titre de l'année 2017 à hauteur d'un montant de 5 555 euros, outre intérêts au taux légal à compter du jugement, condamnant en outre l'administration aux dépens et rejetant les demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Après avoir rappelé les dispositions de l'article 885 I quater du code général des impôts, alinéas 4 et 5, le tribunal a considéré que Mme [N] pouvait bénéficier du régime d'exonération partielle prévu par ce texte lorsque le contribuable démontre exercer des fonctions de direction dans une société appartenant à un groupe de sociétés ayant des liens d'interdépendance ou une communauté d'intérêts, au regard des liens capitalistiques existant entre les sociétés Escal, dont Mme [N] détient 99,58 % du capital, et Nutrana, et du fait que ces trois sociétés travaillaient de concert, la société Escal qui produit et commercialise des produits alimentaires surgelés se fournissant auprès de la société Rolux en matières premières d'escargot, et lui sous-traitant la fabrication de produits semi-finis à base d'escargots, et la société,

Nutrana étant la filiale allemande de la société Escal. Il a considéré que les sociétés Nutrana et Rolux travaillant exclusivement pour la société Escal, qui est leur société mère, et la société Rolux étant dépendante de la société Escal dont Mme [N] est l'associée majoritaire et la dirigeante, il devait être considéré qu'elle exerçait une direction de fait sur la société Rolux.

Par déclaration du 15 décembre 2020, l'administration a interjeté appel de cette décision .

Par conclusions transmises par voie électronique le 15 mars 2021, le directeur des finances publiques d'Ile de France et de [Localité 3] demande à la cour de le recevoir en son appel, et de l'y déclarer fondé, d'infirmer le jugement en ce qu'il a ordonné la restitution d'une somme de 5 555 euros à Mme [N] et de la condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Il soutient que Mme [N], simple associée de la société Rolux, n'exerçait, en 2017, aucune activité comme salariée ou mandataire social au sein de la société, de sorte que la première des conditions posée à l'alinéa 1 du I de l'article 885 I quater du code général des impôts pour que les titres détenus bénéficient de l'exonération de 75% prévue à cet article n'est pas remplie.

Il considère par ailleurs que Mme [N] ne peut pas se prévaloir de l'article 885 I quater alinéa 4 qui suppose que le redevable exerce une activité éligible au dispositif de l'article 885 I quater dans chaque société, alors qu'elle n'exerce personnellement aucune activité salariée ou de mandataire social dans la société Rolux ; qu'elle ne peut pas non plus invoquer l'aliéna 5 de ce texte, en l'absence de lien capitalistique, et donc de lien de dépendance en droit, entre d'une part, les deux sociétés Escal et Nutrana dans lesquelles elle exerce des fonctions de direction, et d'autre part la société Rolux dont elle est simplement associée, les sociétés Escal et Nutrana ne détenant aucune participation indirecte au capital de la société Rolux dont le capital est détenu à parts égales par Mme [N] et ses deux enfants.

Il estime enfin que les relations commerciales exclusives existant entre les sociétés Escal et Nutrana, d'une part et la société Rolux, d'autre part, qui est économiquement dépendante des deux premières pour les débouchés de sa production, ne sont pas pour autant de nature à caractériser un contrôle de fait de la société Rolux, au sens de l'article 39, 12- a du code général des impôts auquel renvoie le texte susvisé.

Par conclusions transmises par voie électronique le 7 juin 2021, Mme [N] demande à la cour de confirmer le jugement en toutes ses dispositions et de condamner la Direction Régionale des Finances publiques d'Île-de-France et de [Localité 3] à payer à l'intimée la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle se prévaut des dispositions de l'alinéa 5 de l'article 885 I quater du code général des impôts, et invoque la doctrine fiscale qui considère que l'existence de liens de dépendance résulte soit d'un critère de droit - la détention directe ou indirecte de la majorité du capital -, soit d'un critère de fait - la détention directe ou indirecte du pouvoir de décision -.

Elle soutient que la doctrine fiscale admet que des liens de dépendance sont réputés exister dans l'hypothèse où deux sociétés sont placées sous le contrôle du redevable qui détient, directement ou indirectement, la majorité du capital des deux sociétés, et considère notamment qu'un lien de dépendance peut résulter du fait qu'un même groupe d'actionnaires majoritaires détient le pouvoir de décision dans deux entreprises distinctes l'une de l'autre, en raison de la communauté d'intérêts impliquée par cette situation qui crée un lien de dépendance entre les deux entreprises en cause, ce qui est le cas en l'espèce.

En effet, la société roumaine Rolux est à la fois un abattoir fournisseur de matières premières d'escargots de la société Escal et un sous-traitant de cette dernière pour des fabrications de produits semi-finis à base d'escargots et travaille sur la base de volumes définis par la société Escal qui est son seul client, la société Escal étant elle-même dépendante de la société Rolux pour une partie de son approvisionnement en matières premières d'escargots et pour l'intégralité des escargots préparés en sous-traitance, ainsi que la société Nutrana, filiale allemande de la société Escal qui assure la commercialisation des produits de celle-ci. Le groupe d'actionnaires formé par Mme [N] et ses deux enfants, qui est majoritaire, détient donc bien le pouvoir de décision dans des entreprises distinctes, Mme [N] détenant, par l'intermédiaire de son groupe d'actionnaires familial, la totalité des sociétés Escal, Rolux et Nutrana, qui sont donc placées sous le contrôle de ce groupe d'actionnaires majoritaires.

Elle soutient enfin que la loi ne requiert pas que le redevable exerce des fonctions ou activités dans la société dans laquelle il détient des titres lorsque celle-ci a des liens de dépendance avec une ou des sociétés dans lesquelles le redevable exerce des fonctions ou activités et ne prévoit pas non plus l'existence d'une collaboration étroite, l'administration ajoutant à cet égard une condition.

Pour l'exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions notifiées et transmises par voie électronique aux dates susvisées.

La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 5 octobre 2021.

MOTIFS

En application des dispositions des articles 562 et 954, alinéa 3 du code de procédure civile l'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent, et la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions.

En l'occurrence, si la déclaration d'appel vise tous les chefs du jugement, la cour, aux termes des dernières conclusions de l'appelante qui ne tendent pas à l'annulation du jugement, est seulement saisie d'une demande d'infirmation du jugement en ce qu'il a ordonné la restitution de la somme de 5 555 euros à Mme [N].

La cour n'est donc saisie d'aucune prétention tendant à l'infirmation du jugement en ce qu'il a 'infirmé la décision de rejet du 18 juillet 2019 émanant de la direction régionale des finances publiques d'Ile de France portant sur la demande formulée par Mme [N]', ni d'aucune demande de confirmation de la décision de rejet de la réclamation de Mme [N].

La cour ne peut, dans ces conditions, que confirmer le jugement, le dégrèvement prononcé par le tribunal n'étant en effet que la conséquence nécessaire de l'infirmation préalable de la décision de rejet de la réclamation contentieuse présentée par Mme [N].

Le jugement entrepris étant confirmé en ses dispositions principales, il le sera également en celles relatives aux dépens et aux frais de procédure.

L'appelante qui succombe en son appel supportera la charge des dépens d'appel. Il sera alloué à Mme [N] une indemnité de procédure de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles qu'elle a exposés en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450, alinéa 2 du code de procédure civile,

CONFIRME le jugement du tribunal de grande instance de Strasbourg en date du 26 novembre 2020 ;

Y ajoutant,

CONDAMNE le directeur régional des finances publiques d'Ile de France aux entiers dépens d'appel ainsi qu'à payer à Mme [Z] [N] la somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 2 a
Numéro d'arrêt : 21/00013
Date de la décision : 19/08/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-08-19;21.00013 ?
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