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09/08/2022 | FRANCE | N°22/02972

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 17 (sc), 09 août 2022, 22/02972


Copie à M. le P.G.



Décision notifiée

aux parties par courriel



Copie à Me CHAMY



le 9 août 2022



La greffière,

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

CHAMBRE 17 (SC)



N° RG 22/02972 - N° Portalis DBVW-V-B7G-H4SE



Minute n° : 51/2022





Ordonnance du 9 août 2022

dans l'affaire entre :





APPELANT :



Monsieur [X] [P]

né le 17 Juillet 1946

[Adresse 5]r>
[Localité 3]

actuellement hospitalisé au centre hospitalier de [Localité 4]



comparant en personne, assisté de Me André CHAMY,

avocat au barreau de MULHOUSE





INTIMES :



Monsieur le Préfet du Haut-Rhin

Préfecture du Haut-Rhi...

Copie à M. le P.G.

Décision notifiée

aux parties par courriel

Copie à Me CHAMY

le 9 août 2022

La greffière,

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

CHAMBRE 17 (SC)

N° RG 22/02972 - N° Portalis DBVW-V-B7G-H4SE

Minute n° : 51/2022

Ordonnance du 9 août 2022

dans l'affaire entre :

APPELANT :

Monsieur [X] [P]

né le 17 Juillet 1946

[Adresse 5]

[Localité 3]

actuellement hospitalisé au centre hospitalier de [Localité 4]

comparant en personne, assisté de Me André CHAMY,

avocat au barreau de MULHOUSE

INTIMES :

Monsieur le Préfet du Haut-Rhin

Préfecture du Haut-Rhin - Secrétariat Général

[Adresse 6]

[Localité 2]

Monsieur le Directeur du Centre hospitalier de [Localité 4]

[Adresse 1]

[Localité 4]

ni comparants, ni représentés

Ministère public auquel la procédure a été communiquée :

M. Jean-Luc JAEG, avocat général

Murielle ROBERT-NICOUD, conseillère à la cour d'appel de Colmar, agissant sur délégation de Madame la première présidente, assistée lors des débats et de la mise à disposition de la décision de Corinne ARMSPACH-SENGLE, greffière, après avoir entendu Monsieur [P] et Maître CHAMY en audience publique du 9 août 2022, statue comme suit par ordonnance réputée contradictoire :

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

M. [X] [P] a été admis, le 18 janvier 2022, en soins psychiatriques sans consentement sous la forme d'une hospitalisation complète au centre hospitalier spécialisé de [Localité 4] suite à un arrêté du Préfet du Haut-Rhin en date du 13 janvier 2022.

Par ordonnance du 27 janvier 2022, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Colmar a confirmé la nécessité de la poursuite de la mesure de soins psychiatriques sans consentement de M. [X] [P] en hospitalisation complète.

Des certificats mensuels ont été établis par des praticiens hospitaliers psychiatres du Centre hospitalier de [Localité 4], les 11 février, 11 mars , 12 avril, 11 mai, 13 juin et 11 juillet 2022.

Le représentant de l'Etat dans le département du Haut-Rhin a décidé du maintien de la mesure en soins psychiatrique de M. [X] [P] au Centre hospitalier de [Localité 4] par arrêté du 11 février 2022, et ce pour une durée de trois mois à compter du 13 février au 13 mai 2022, et par arrêté du 12 mai 2022, et ce pour une durée de six mois du 13 mai 2022 au 13 novembre 2022 inclus.

Par requête du 8 juillet 2022, reçue au greffe du tribunal judiciaire de Colmar le 12 juillet 2022, le représentant de l'Etat dans le département du Haut-Rhin a présenté une requête au juge des libertés et de la détention pour l'examen de la situation à six mois de la mesure de soins en hospitalisation complète après la dernière décision d'une juridiction.

Un avis motivé du 4 juillet 2022 a été émis par le Dr [Z], praticien hospitalier psychiatre, au centre hospitalier de [Localité 4].

Par ordonnance du 25 juillet 2022, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Colmar a confirmé la nécessité de la poursuite des soins de M. [X] [P] en hospitalisation complète.

Par mémoire d'appel daté du 3 août 2002 reçu au greffe de la cour d'appel le 4 août 2022, Maître Chamy pour M. [X] [P] a demandé à Mme la Première Présidente de la cour d'appel d'infirmer l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du 25 juillet 2022, d'ordonner la mainlevée de la mesure d'hospitalisation sans consentement prise à l'encontre de M. [P], et subsidiairement, d'autoriser le retour à domicile de M.[P] en lui imposant un suivi médical par un psychiatre local ou, le cas échéant, par le centre hospitalier de [Localité 4].

En substance, il fait valoir le litige qui aurait existé concernant sa propriété ce qui l'aurait incité à détruire la récolte s'y trouvant, qu'il n'a jamais été dangereux, que rien ne permet d'affirmer qu'il a subi une altération de ses capacités psychiques ou mentales, qu'il ressort de la décision du Préfet qu'il s'est appuyé sur les certificats médicaux de médecins psychiatres faisant partie du Centre hospitalier de [Localité 4], et que même si l'on devait admettre qu'un psychiatre ne faisant pas partie du centre hospitalier de [Localité 4] soit intervenu pour établir un certificat justifiant l'hospitalisation, il met en doute la validité des conclusions médicales, ajoutant que des contradictions existent dans les conclusions des psychiatres et que rien ne justifie l'hospitalisation sans consentement.

Les avis d'audience ont été transmis aux parties et au conseil de l'appelant le 5 août 2022.

Par avis du 5 août 2022, communiqué aux parties le même jour, le ministère public a indiqué s'en rapporter.

Un certificat de situation du 8 août 2022 a été émis par le Dr [K], praticien hospitalier psychiatre, au centre hospitalier de [Localité 4] et a été communiqué aux parties le même jour.

A l'audience, le 9 août 2022 à 15 heures, l'appelant et son avocat ont été entendus en leurs observations.

MOTIFS DE LA DECISION

L'appel est recevable, pour avoir été formé dans les formes et délais prescrits.

Le contrôle de la régularité de la poursuite des soins de l'intéressé en hospitalisation complète comprend notamment le contrôle du bien fondé des décisions administratives, le juge judiciaire devant rechercher si les certificats médicaux produits sont suffisamment précis et circonstanciés au regard des conditions légales exigées pour des soins sans consentement.

Cependant, le juge des libertés et de la détention n'a pas à se substituer à l'autorité médicale notamment sur l'évaluation du consentement, du diagnostic ou des soins.

Le présent appel ne concerne pas l'ordonnance du 27 janvier 2022. En outre, à peine d'irrecevabilité, prononcée d'office, aucune irrégularité de la procédure, antérieure à une audience à l'issue de laquelle le juge des libertés et de la détention se prononce sur la mesure de soins, ne peut être soulevée lors d'une instance ultérieure devant ce même juge ou le premier président de la cour d'appel statuant à sa suite, notamment dans le cadre du présent contrôle à six mois de la mesure de soins en hospitalisation complète après la dernière décision d'une juridiction. En tout état de cause, l'ordonnance du 27 janvier 2022 évoque un certificat initial du Dr [H] du 4 janvier 2022 dont il n'est pas établi qu'il s'agit d'un psychiatre exerçant dans le centre hospitalier accueillant l'intéressé.

Le présent appel vise à contrôler la nécessité du maintien de la mesure d'admission en soins psychiatriques en hospitalisation complète, avant l'expiration du délai de six mois à compter de la décision du juge des libertés et de la détention du 27 janvier 2022.

S'agissant des certificats médicaux mensuels, émis après l'admission en soins psychiatriques, l'article L.3213-3 du code de la santé publique prévoit qu'ils sont émis par un psychiatre de l'établissement d'accueil, de sorte que les certificats précités des 11 février, 11 mars ,

12 avril, 11 mai, 13 juin et 11 juillet 2022, émis par de tels psychiatres, sont réguliers.

Ces certificats médicaux mensuels, établis depuis l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du 27 janvier 2022, attestent tous que les soins psychiatriques sans consentement sous forme d'hospitalisation complète sont toujours justifiés et que la mesure doit être maintenue conformément aux dispositions de l'article L.3213-4.

Ils font notamment ressortir que M. [P] est atteint d'idées de complot et de syndrome persécutif, avec des troubles graves de la personnalité de type rigide, entière, peu enclin à la moindre remise en question, étant souligné qu'il avait, également, été constaté, dans le certificat du 11 mars 2022, qu'il s'emporte encore avec passion dans le même discours stérotypé et circulaire paranoïaque mais cependant avec moins de véhémence, puis, dans le certificat du 11 mai 2022, que le traitement atténue la sthénicité et l'impulsivité, mais que le contenu de la pensée reste envahie par 'l'affaire', qu'il s'adapte et ne refuse pas le traitement, est discret mais apathique et, dans le certificat du 13 juin 2022, une douleur avec un fort sentiment d'incompréhension qui se traduit notamment par une altération de l'humeur, outre que l'état clinique reste ainsi globalement très fragile nécessitant une poursuite de l'hospitalisation.

Le certificat mensuel du 11 juillet 2022 précise que 'malgré une hospitalisation qui perdure de longs mois l'association d'un traitement anti-dépresseur vu le retentissement affectif et d'un traitement anti-psychotique vu l'envahissement psychique par une conviction inébranlable, l'état mental reste globalement inchangé, sauf une diminution de l'impulsivité verbale, de l'opposition aux soins. L'humeur reste cependant combative sans état dépressif et le risque de passage à l'acte hétéro-agressif reste minime.' Il ajoute que le patient reste complètement hermétique.

En outre, l'avis motivé du 4 juillet 2022 et le certificat de situation du 8 août 2022 émis par des psychiatres de l'établissement d'accueil sont également réguliers par application de l'article L.3211-12-1 II du code de la santé publique.

L'avis motivé du 4 juillet 2022 évoque au titre des éléments cliniques : 'délire paranoïaque de préjudice, de complot, psychorigidité et déni, perte d'autonomie psychique et décisionnelle, une altération chronique du jugement, situation sociale dégradée du fait de ces troubles psychopathologiques' et conclut que l'état clinique de M. [P] nécessite la poursuite de la prise en charge en hospitalisation complète.

Le certificat de situation du 8 août 2022 indique notamment constater la présence d'une angoisse et d'une tristesse d'intensité moyenne sans idées noires ni de velléité suicidaire, ces troubles étant en lien avec son enfermement. Il ajoute ne pas retrouver de véritable éléments délirants, cependant le patient dit qu'il est victime d'un complot avec des personnes influentes. Il précise que le patient critique son trouble du comportement et ne pensait pas que cela allait prendre une telle ampleur. Le psychiatre ajoute ne pas retrouver aujourd'hui de psychorigidité caractéristique qui avait été précédemment relevée, et note que le patient est sous traitement psychotrope ce qui a probablement amendé la symptomatologie psychotique observée au début de son hospitalisation. Il indique que l'état clinique du patient lui semble compatible avec une sortie définitive après mise en route d'un programme de soins. Il conclut que, dans ces conditions, les soins psychiatriques sans consentement sous forme d'hospitalisation complète sont toujours justifiés et que la mesure doit être maintenue conformément aux dispositions de l'article L.3213-4.

Il résulte de la lecture de ces certificats et avis médicaux, notamment eu égard aux éléments qui viennent d'être rappelés, que, sans contenir de contradictions, ils sont précis et circonstanciés sur le fait que M. [P] présente des troubles mentaux nécessitant des soins psychiatriques sans consentement sous la forme d'une hospitalisation complète.

Aucun moyen ni élément ne permet de remettre en cause lesdits constats médicaux

Il résulte également de ces certificats et avis médicaux et notamment de celui du 8 août 2022, que l'intéressé présente toujours à ce jour des troubles mentaux nécessitant des soins, qui compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte de façon grave à l'ordre public, étant relevé que le 11 juillet 2022, un risque de passage à l'acte hétéro-agressif, fût-il minime, était encore constaté, et l'absence d'observation, le 8 août 2022, d'idée noire ou de velléité suicidaire, n'est pas de nature à écarter ce risque en l'absence de soins, puisque l'avis médical du 8 août 2022 indique que ce traitement a probablement amendé la symptomatologie psychotique.

Certes, il ressort également de ces certificats et avis médicaux, notamment des 11 juillet et 8 août 2022, une certaine évolution plutôt favorable, laquelle est cependant extrêmement récente, de certains troubles constatés, étant observé que le certificat du 8 août évoque un lien probable avec la prise du traitement médical.

D'ailleurs, l'avis du 4 juillet 2022 et le certificat du 11 juillet 2022 font mention de l'existence d'un travail sur un projet de vie à la sortie de l'hôpital en collaboration avec un mandataire spécial, avec l'attente d'un relogement sous couvert de programme de soins, avec la précision que les conditions matérielles ne sont pas encore réunies et d'une situation sociale précaire.

L'évolution précitée extrêmement récente de certains troubles constatés permet d'expliquer que si le certificat médical du 8 août indique que l'état clinique du patient lui semble compatible avec une sortie définitive après mise en route d'un programme de soins, il conclut tout de même que les soins psychiatriques sans consentement sous forme d'hospitalisation complète sont toujours justifiés et que la mesure doit être maintenue conformément aux dispositions de l'article L.3213-4.

Ainsi, il résulte des certificats médicaux, y compris celui du 8 août, que la mise en place d'un programme de soins à très bref délai, de surcroît dans un délai de 24 heures, apparaît comme étant prématurée, et en tous les cas non justifiée, à ce jour, par les éléments du dossier, et qu'en revanche, les troubles précités justifient la poursuite de la mesure d'hospitalisation sans consentement sous forme complète, seule mesure de nature à assurer, à ce jour, la poursuite des soins nécessaires, et ce dans l'attente de la mise en place du programme de soins envisagé.

Les conditions légales posées par l'article L.3211-12-1 du code de la santé publique pour la poursuite de l'hospitalisation complète se trouvant réunies, la décision déférée sera confirmée et les demandes de M. [P] seront rejetées.

PAR CES MOTIFS

Confirme l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Colmar du 25 juillet 2022 ;

Rejette les demandes de M. [P] ;

Laisse les dépens à la charge du Trésor Public.

La greffière,Laconseillère,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 17 (sc)
Numéro d'arrêt : 22/02972
Date de la décision : 09/08/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-08-09;22.02972 ?
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