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07/07/2022 | FRANCE | N°20/02581

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 2 a, 07 juillet 2022, 20/02581


MINUTE N° 314/2022





























Copie exécutoire à



- la SELARL HARTER-LEXAVOUE COLMAR



- Me Nadine HEICHELBECH





Le 07/07/2022



Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE



ARRET DU 07 JUILLET 2022





Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 20/02581 - N° Portalis DBVW-V-B7E

-HMPW



Décision déférée à la cour : 07 Juillet 2020 par le Tribunal judiciaire de MULHOUSE





APPELANT et intimé incident :



LE SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE LA RESIDENCE PORTE JEUNE EXTENSION, prise en la personne de son syndic Mme [Y] [D]

ayant son ...

MINUTE N° 314/2022

Copie exécutoire à

- la SELARL HARTER-LEXAVOUE COLMAR

- Me Nadine HEICHELBECH

Le 07/07/2022

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE

ARRET DU 07 JUILLET 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 20/02581 - N° Portalis DBVW-V-B7E-HMPW

Décision déférée à la cour : 07 Juillet 2020 par le Tribunal judiciaire de MULHOUSE

APPELANT et intimé incident :

LE SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE LA RESIDENCE PORTE JEUNE EXTENSION, prise en la personne de son syndic Mme [Y] [D]

ayant son siège [Adresse 3]

représenté par la SELARL HARTER-LEXAVOUE COLMAR, avocat à la cour.

INTIMÉE et appelante incidente :

La S.A.S. CITYA ETIGE LOGEMENT, représentée par son représentant légal audit siège.

ayant son siège social [Adresse 4]

représentée par Me Nadine HEICHELBECH, avocat à la cour.

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 03 Mars 2022, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Isabelle DIEPENBROEK, Présidente de chambre

Madame Catherine GARCZYNSKI, Conseiller

Madame Myriam DENORT, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie SCHIRMANN

ARRET contradictoire

- prononcé publiquement après prorogation du 5 mai 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente et Madame Sylvie SCHIRMANN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE et PRÉTENTIONS des PARTIES

La SAS Citya Etige Logement a été le syndic de la copropriété Porte Jeune (sous le n°560) et de la copropriété Porte Jeune Extension (sous le n°561) jusqu'au 31 mars 2013.

La société Sodim a ensuite été désignée comme syndic de la copropriété Porte Jeune Extension à compter du 1er avril 2013 et n'a pas poursuivi son mandat au-delà du 13 novembre 2014.

La copropriété Porte Jeune a été divisée en quatre copropriétés désignées « Porte Jeune A1 » à « Porte Jeune A4 ».

Un administrateur ad hoc a été désigné à la requête du syndicat des copropriétaires de la résidence Porte Jeune Extension, et ce jusqu'au 19 mai 2015.

Une assemblée générale des copropriétaires de la résidence Porte Jeune Extension du 24 février 2015 a élu Mme [D] en qualité de syndic de la copropriété.

Le syndicat des copropriétaires de la résidence Porte Jeune Extension a saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Mulhouse d'une demande dirigée contre la société Citya Etige Logement, afin d'obtenir la transmission des différents documents comptables afférents à la gestion de la copropriété. Suite à la transmission de ces documents, il s'est désisté de cette demande.

Par assignation délivrée le 1er juillet 2019, il a saisi le tribunal de grande instance de Mulhouse d'une demande en paiement de la somme de 30 591,64 euros à l'encontre de la société Citya Etige Logement, sur le fondement de l'enrichissement sans cause.

Postérieurement à l'ordonnance de clôture, le président de la chambre a soulevé d'office le moyen tiré du caractère inapproprié du fondement de l'enrichissement sans cause et indiqué qu'il entendait trancher le litige par application des règles de la responsabilité contractuelle liée au mandat unissant le syndic au syndicat des copropriétaires, invitant les parties à formuler toutes observations utiles, via, le cas échéant, une note en délibéré.

Par une note en délibéré, le syndicat des copropriétaires de la résidence Porte Jeune Extension a indiqué maintenir ses demandes, tant sur le fondement de la responsabilité contractuelle que sur celui de l'enrichissement sans cause.

Par jugement du 7 juillet 2020, le tribunal, devenu le tribunal judiciaire de Mulhouse a déclaré recevable la note en délibéré datée du 23 juin 2020, produite par le syndicat des copropriétaires, pris en la personne de ses représentants légaux, qu'il a débouté de l'ensemble de ses demandes, le condamnant aux dépens ainsi qu'au paiement, à la société Citya Etige Logement, de la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le tribunal a relevé en premier lieu que les règles de l'enrichissement sans cause ne pouvaient être invoquées que de manière subsidiaire, en l'absence d'autres actions possibles, et qu'elles ne pouvaient s'appliquer si, comme en l'espèce, la créance alléguée résultait d'un contrat liant la personne qui se prétendait créancier à celle qu'elle estimait bénéficiaire d'un enrichissement. Le syndicat des copropriétaires reprochant à la société Citya Etige Logement des négligences dans la gestion comptable et financière de la copropriété, c'était donc sur le fondement de la responsabilité contractuelle que le litige devait se trancher.

Le tribunal s'est fondé sur les articles 1991 et 1992 relatifs à la responsabilité du mandataire concernant les fautes commises dans sa gestion, et sur l'article 18 de la loi du 10 juillet 1965 relatif à la responsabilité du syndic concernant sa gestion financière et comptable de la copropriété, ce dernier devant répondre de ses erreurs et négligences et présenter notamment une comptabilité régulière, avec ouverture d'un compte séparé au nom du syndicat des copropriétaires concerné.

Il a cependant observé que les pièces produites par le syndicat des copropriétaires étaient insuffisantes à démontrer des erreurs de gestion commises par la société Citya Etige Logement au titre des mouvements de fonds ayant eu lieu en 2010, s'agissant de la copropriété Porte Jeune Extension.

De plus, il n'était produit aucun procès-verbal d'assemblée générale portant approbation ou rejet des comptes des exercices 2010 et 2011, aucun quitus au syndic de sa gestion, de même qu'aucun élément financier établi par le successeur de la société Citya Etige Logement à compter de 2013, lequel aurait pu relever certaines irrégularités.

Concernant les exercices comptables postérieurs, si les comptes de la copropriété n'avaient pu être validés et un administrateur provisoire avait été nommé, du 14 novembre 2014 au 24 mai 2015, aucun élément ne permettait toutefois de retenir que ces difficultés étaient en lien avec la gestion de la défenderesse ni que le prélèvement allégué, à le supposer établi, n'ait pas été régularisé sur les exercices postérieurs à 2010.

En outre, la société Citya Etige Logement affirmait avoir reversé au demandeur, soit directement, soit par le biais de la société Sodim, l'ensemble des sommes lui revenant, et elle justifiait de plusieurs virements ainsi que de la remise d'un chèque.

Le tribunal a retenu que, si une certaine confusion régnait incontestablement dans la comptabilisation des sommes dues aux et par les copropriétés gérées par la société Citya Etige Logement, liée notamment à l'absence de compte bancaire séparé pour les deux copropriétés gérées avant 2011, il n'était pas pour autant démontré que la société Citya Etige Logement ait commis des fautes de gestion et tenu une comptabilité irrégulière ayant causé une perte de 30 591,64 euros au syndicat des copropriétaires.

Le syndicat des copropriétaires de la résidence Porte Jeune Extension, représenté par son syndic, a interjeté appel de ce jugement par déclaration datée du 9 septembre 2020.

Par ses conclusions récapitulatives transmises par voie électronique le 4 mai 2021, il sollicite que son appel soit déclaré recevable et bien fondé, qu'en conséquence, le jugement déféré rejetant ses demandes soit infirmé et que la société Citya Etige Logement soit condamnée à lui régler un montant de 30 519,64 euros avec intérêts de droit à compter du jugement du 7 juillet 2020.

Sur l'appel incident de la société Citya Etige Logement, il sollicite le rejet de toutes les conclusions de cette dernière et, en tout état de cause, sa condamnation aux entiers frais et dépens de la procédure, y compris à hauteur d'appel, ainsi qu'à lui payer la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur la prescription de son action soulevée par la société Citya Etige Logement, le syndicat des copropriétaires soutient que :

- le délai de prescription courant à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer, lui-même a été dans l'incapacité d'agir par suite d'un empêchement résultant de la force majeure, prévu par les dispositions de l'article 2234 du code civil, faute de transmission d'éléments comptables suffisants, qui n'avaient toujours pas été transmis en 2018, malgré les demandes ;

- la prescription a été interrompue par l'assignation en référé aux fins de transmission de pièces comptables de mai 2018,

- cette fin de non-recevoir aurait dû être soulevée devant le conseiller de la mise en état.

Sur le fondement juridique de la demande, le syndicat des copropriétaires admet que la théorie de l'enrichissement sans cause a vocation à ne s'appliquer que subsidiairement. Mais il soutient qu'il est démontré que le patrimoine de la société Citya Etige Logement s'est enrichi à son détriment et qu'il ne résultait pas du contrat de syndic que cette société devait garder par-devers elle la somme en cause de 30 591,64 euros, ce qui résultait d'une mauvaise affectation des comptes au sein de sa gestion, une imprudence ou une négligence ne privant pas une partie du recours fondé sur l'enrichissement sans cause.

Cependant, il admet que, si l'on considère que la négligence relève de l'application du contrat de syndic confié à la société Citya Etige Logement, les règles de la responsabilité contractuelle de l'ancien article 1147 du code civil, devenu les articles 1231-1 et suivants, auraient vocation à s'appliquer, précisant ne pas reprocher de faute volontaire à son ancien syndic.

Sur les négligences reprochées à la société Citya Etige Logement, le syndicat des copropriétaires observe que, si celle-ci a admis l'existence, sur les comptes, d'une somme initiale de 31 452,17 euros, soutenant que 519,60 euros auraient été virés au profit de la copropriété Porte Jeune Extension, et le solde, de 30 663,46 euros, viré au profit de la copropriété Porte Jeune, via le syndic Sodim, elle n'en justifie que par un état de rapprochement bancaire du 31 décembre 2010, largement insuffisant à cet égard.

Il ajoute que :

- les explications de l'intimée sont incompréhensibles au vu des extraits de compte produits,

- la société Sodim, syndic du 1er avril 2013 au 13 novembre 2014, n'a pu valider les comptes car elle ne parvenait pas à justifier de la comptabilité auprès des copropriétaires, ce qui a entraîné la désignation de Me [B], mandataire judiciaire, pour procéder à la désignation d'un nouveau syndic,

- la société Citya Etige Logement ne peut contester toute négligence, alors que, dans un contentieux relatif à la chaufferie Porte de Bâle, un rapport établi par un expert judiciaire a mis en évidence une différence de 104 352,52 euros dans les comptes.

Le syndicat des copropriétaires reproche à la société Citya Etige Logement de ne pouvoir justifier du compte vers lequel elle a opéré un virement de 25 000 euros en mars 2010, cette somme ne se retrouvant sur aucun compte connu du syndic, qui est aussi celui des autres copropriétés Porte Jeune, et son incapacité à justifier de la perte du montant de 31 179,70 euros pour le compte de la copropriété.

Par ses conclusions récapitulatives transmises par voie électronique le 8 février 2021, la société Citya Etige Logement sollicite la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a débouté le syndicat des copropriétaires de l'ensemble de ses demandes et l'a condamné aux dépens ainsi qu'au paiement de la somme de 1 200 euros du code de procédure civile, et son infirmation en ce qu'il a déclaré la demande du syndicat recevable.

Elle sollicite que la cour, statuant à nouveau :

- déclare irrecevable la demande du syndicat des copropriétaires et déboute ce dernier de toutes ses demandes,

- condamne le syndicat des copropriétaires aux dépens de première instance et d'appel ainsi qu'à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur la prescription de la demande du syndicat, la société Citya Etige Logement fait valoir que son mandat a expiré le 30 avril 2013, le dossier ayant été transmis à la société Sodim, le nouveau syndic, le 14 mai 2013, et l'assignation au fond ayant été délivrée le 1er juillet 2019, date à laquelle l'action du syndicat des copropriétaires était prescrite, en application de l'article 2224 du code civil.

Subsidiairement, au fond, la société Citya Etige Logement expose que le compte n°10190271816, qui regroupait à l'époque les avoirs des deux copropriétés, Porte Jeune et Porte Jeune Extension, présentait un solde créditeur de 31 600,33 euros au 5 janvier 2011, montant qui appartenait aux deux copropriétés.

Or, au 8 décembre 2010, les avoirs étaient répartis entre les deux copropriétés à raison de 30 663,46 euros pour la copropriété Porte Jeune et -519,06 euro pour la copropriété Porte Jeune Extension, et aucune différence ne pouvait être constatée d'après le rapprochement bancaire du 31 décembre 2010.

Elle ajoute avoir ouvert deux comptes séparés auprès de la Banque Populaire Val de France, début 2011, ayant transféré les fonds appartenant aux deux copropriétés sur leurs comptes respectifs. C'est ainsi qu'elle explique le virement de 25 000 euros effectué le 10 mars 2011 du compte commun ouvert à la Banque Populaire d'Alsace vers le compte du syndicat Porte Jeune.

Elle affirme avoir transféré au nouveau syndic les avoirs bancaires de la copropriété, en 2013, avoir transmis les archives du syndicat et notamment les pièces comptables à la société Sodim dès le 14 mai 2013 et elle affirme ne pas s'être enrichie au détriment du syndicat, soutenant que ce dernier n'apporte aucune preuve contraire, ne sollicitant pas même une expertise judiciaire comptable.

*

Pour l'exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions notifiées et transmises aux dates susvisées.

La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 04 janvier 2022.

MOTIFS

I ' Sur la demande du syndicat des copropriétaires

A- Sur la recevabilité de la demande

Tout d'abord, c'est à bon droit que le tribunal a rappelé que, selon les règles légales applicables en l'espèce, l'enrichissement sans cause ne peut être invoqué que de manière subsidiaire, en l'absence d'autre action possible, et que ses règles ne peuvent notamment être mises en oeuvre lorsque l'appauvrissement et l'enrichissement allégués trouvent leur application dans l'exécution d'une convention conclue entre les parties.

Le syndicat des copropriétaires reprochant à la société Cytia Etige Logement des négligences fautives dans la gestion comptable et financière de la copropriété, ce sont bien les règles de la responsabilité contractuelle qui sont applicables en l'espèce, comme l'a retenu le premier juge.

En application de l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

Il peut être observé que si l'appelant soutient, dans les motifs de ses écritures, que la fin de non-recevoir tirée de la prescription de son action, soulevée par l'intimée, aurait dû l'être devant le conseiller chargé de la mise en état, il n'en a tiré aucune conclusion dans le dispositif de ses écritures. Il n'y a donc pas lieu, pour la cour, de statuer sur ce point.

Dans la situation présente, le syndicat des copropriétaires n'a pu agir contre la société Cytia Etige Logement que lorsqu'il a eu connaissance de ce qu'il pouvait considérer comme d'éventuelles irrégularités dans la gestion de la copropriété par cette dernière et il n'a pu avoir cette réelle connaissance que lorsqu'il y a eu entre les mains l'ensemble des documents comptables relatifs à cette gestion.

Or, si, selon un document intitulé « Bordereau de remise de pièce » signé par les représentants de la société Cytia Etige Logement et du syndic qui lui a succédé, la société Sodim, le 14 mai 2013, 26 documents ou dossiers ont été remis de l'une à l'autre, le syndicat des copropriétaires a dû agir en référé, par assignation délivrée le 17 mai 2018 à la société Cytia Etige Logement, pour obtenir de cette dernière la remise du grand livre de reprise du 30 septembre 2011, les extraits du compte Banque Populaire n°0002218070 à compter du 1er avril 2013 et les extraits du compte Banque Populaire n°10190271816, et enfin les souches des chéquiers correspondant aux dépenses établies sur la même période.

Il n'est pas contesté que cette assignation a été signifiée à la société Cytia Etige Logement après une vaine sommation délivrée par Mme [D], le nouveau syndic de la copropriété élu en 2015.

Il en résulte que le délai de prescription n'a couru qu'à compter de la transmission des documents réclamés dans cette assignation en référé, qui a eu lieu postérieurement à cette dernière et avant toute décision du juge saisi, un désistement étant intervenu de ce fait.

En conséquence, le délai de prescription de l'action du syndicat des copropriétaires était loin d'être écoulé lorsque ce dernier a saisi le juge du fond par l'assignation du 1er juillet 2019. Aucune fin de non-recevoir tirée de cette prescription n'ayant été soulevée par la société Cytia Etige Logement en première instance, il convient d'ajouter au jugement déféré en déclarant recevable comme étant non prescrite la demande du syndicat des copropriétaires.

B - Sur le fond

En préalable, ainsi que l'a relevé le tribunal, le mandataire qu'est le syndic à l'égard du syndicat des copropriétaires, son mandant, doit répondre, vis-à-vis de ce dernier, des fautes qu'il commet dans sa gestion.

En premier lieu, il est souligné que, si le syndicat des copropriétaires reproche à la société Cytia Etige Logement de ne pas justifier de la « perte », pour le compte de la copropriété, de la somme de 31 179,70 euros, il ne fournit aucune explication lui permettant de parvenir à un tel montant, qui ne se retrouve précisément, directement ou indirectement, dans aucun de ses développements. Il en est de même du montant de 30 519,64 euros qui figure quant à lui dans son dispositif.

En second lieu, il résulte des écritures de l'intimée et des pièces produites que, comme l'a observé le tribunal, cette dernière a géré les comptes des copropriétés de l'ensemble immobilier « Porte Jeune » dans une certaine confusion, en ouvrant initialement un seul compte bancaire (n°10190271816) pour les copropriétés « Porte Jeune » et « Porte Jeune Extension », notamment, n'ayant recouru à des comptes séparés que courant 2011, où un compte n°30221842070 a notamment été ouvert au nom du syndicat des copropriétaires « 561 », représentant d'après elle la copropriété « Porte Jeune Extension », ce qui n'est pas contredit par l'appelant.

Dans ce contexte et au vu des extraits de comptes et de Grand Livre produits, rien ne permet de remettre en cause les explications de la société Cytia Etige Logement selon lesquelles, si le compte commun n°10190271816 était créditeur de 31 110,70 euros au 29 décembre 2010 et de 31 600,33 euros au 4 janvier 2011, la répartition des avoirs entre les deux copropriétés se déclinait ainsi, au 8 décembre 2010 :

+ 30 663,46 euros pour la copropriété « Porte Jeune »,

- 519,06 euros pour la copropriété « Porte Jeune Extension »,

selon les indications figurant sur le Grand Livre, dont la société Cytia Etige Logement précise qu'il s'agit des soldes des comptes « banque ».

Il en résulte que le fait que le solde de ce compte bancaire commun n°1[XXXXXXXXXX01] ait été créditeur de 31 600,33 euros au 1er janvier 2011 ne signifiait nullement que le syndicat des copropriétaires « Porte Jeune Extension » était titulaire d'un tel montant, que la société Cytia Etige Logement aurait ultérieurement détourné.

S'agissant du virement de 25 000 euros au débit du compte de la copropriété Porte Jeune Extension, le syndicat des copropriétaires produit le relevé du compte n°10190271816 encore commun aux deux copropriétés, sur lequel ce virement apparaît, à la date du 10 mars 2011, y étant inscrit comme étant un virement externe « SDC Porte Jeune ».

Si l'intimée affirme qu'il s'agit d'un transfert du compte commun vers le compte distinct du syndicat de la copropriété « Porte Jeune », l'appelant affirme que ce virement ne se retrouve au crédit d'aucun compte connu de son syndic, dont il précise qu'il est aussi le syndic des autres copropriétés « Porte Jeune ». Cependant, il n'en justifie nullement, alors qu'il est le seul en mesure de le faire. Il n'est pas démontré que la société Cytia Etige Logement ait encore en sa possession le moindre document comptable lui permettant d'apporter la preuve contraire et elle n'est pas susceptible d'obtenir, auprès des autres copropriétés « Porte Jeune », les relevés de compte nécessaires à cette fin.

De plus, les Grands Livres des autres copropriétés ne sont pas produits et, pour cette date, seul est versé aux débats, outre la page 1 du Grand Livre manifestement commun aux deux copropriétés initiales, du 1er novembre 2010 au 8 décembre 2010, copie de la page 70 du Grand Livre du « [Adresse 2] » du 1er octobre 2010 au 30 octobre 2011 « par date d'affectation ».

Si, sous la mention du compte n°10190271816, le virement de 25 000 euros n'y figure pas, aucune des opérations figurant sur les relevés de ce compte du 5 janvier 2011 et du 16 mars 2011 n'y sont non plus inscrites, ce qui laisse à penser que l'affectation de ces mouvements a pu avoir lieu à d'autres périodes, l'extrait du Grand Livre produit étant très restreint.

Par ailleurs, ainsi que l'a relevé le tribunal, des chèques ont été remis par la société Cytia Etige Logement au nouveau syndic, la société Sodim, en mai 2013, d'un montant total de 14 431,45 euros, et un virement de 1 666,20 euros a été opéré le 17 avril 2014, correspondant à des provisions sur charges perçues sur le compte n°30221842070. Ces versements confirment les allégations de l'intimée selon lesquelles, lorsqu'elle a perdu son mandat, elle a transféré au syndicat des copropriétaires, en la personne de son nouveau syndic, les avoirs bancaires de la copropriété en sa possession, ce qui ne constitue pas un signe de négligence.

En tout état de cause, il n'est nullement démontré que la société Cytia Etige Logement ait, à un moment quelconque de l'exercice de son mandat ou après le terme de celui-ci, retenu ou provoqué la perte, pour le syndicat des copropriétaires « Porte Jeune Extension », du montant de 30 179,70 euros ou d'un autre montant quelconque lui revenant.

Il en résulte qu'il n'est rapporté la preuve d'aucune faute de l'intimée ayant entraîné pour l'appelant le préjudice dont ce dernier sollicite la réparation et que le jugement déféré doit être confirmé en ce qu'il a rejeté sa demande.

II - Sur les dépens et les frais non compris dans les dépens

Le jugement déféré étant confirmé en ses dispositions principales, il le sera également en celles relatives aux dépens et aux frais exclus des dépens de première instance.

Cependant, compte tenu de la situation créée par le manque de rigueur de la société Cytia Etige Logement, qui n'a pas pris soin d'ouvrir des comptes distincts pour chaque copropriété de l'ensemble « Porte Jeune » dont elle était syndic, il convient de laisser à chaque partie la charge de ses dépens de l'appel et des frais non compris dans les dépens qu'elle a également engagés en appel. En conséquence, les demandes réciproques des parties fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile seront rejetées.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, publiquement, par mise à disposition de l'arrêt au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450, alinéa 2 du code de procédure civile,

DECLARE recevable comme étant non prescrite la demande du syndicat des copropriétaires de la Résidence Porte Jeune Extension,

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement rendu entre les parties par le tribunal judiciaire de Mulhouse le 7 juillet 2020,

Y ajoutant,

CONDAMNE chaque partie à conserver à sa charge ses dépens d'appel,

REJETTE les demandes réciproques des parties présentées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais exclus des dépens qu'elles ont engagés en appel.

Le greffier,La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 2 a
Numéro d'arrêt : 20/02581
Date de la décision : 07/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-07;20.02581 ?
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