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17/06/2022 | FRANCE | N°20/02904

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 2 a, 17 juin 2022, 20/02904


MINUTE N° 269/2022





























Copie exécutoire à



- Me Patricia CHEVALLIER

-GASCHY



- la SCP CAHN G./CAHN T./

BORGHI





Le 17 juin 2022



Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE



ARRET DU 17 Juin 2022





Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 20/02904 - N°

Portalis DBVW-V-B7E-HNAW



Décision déférée à la cour : 18 Septembre 2020 par le tribunal judiciaire de SAVERNE





APPELANT :



Monsieur [Y] [J]

demeurant [Adresse 2]



représenté par Me Patricia CHEVALLIER-GASCHY, avocat à la cour.





INTIMÉ :



Le Syndicat des...

MINUTE N° 269/2022

Copie exécutoire à

- Me Patricia CHEVALLIER

-GASCHY

- la SCP CAHN G./CAHN T./

BORGHI

Le 17 juin 2022

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE

ARRET DU 17 Juin 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 20/02904 - N° Portalis DBVW-V-B7E-HNAW

Décision déférée à la cour : 18 Septembre 2020 par le tribunal judiciaire de SAVERNE

APPELANT :

Monsieur [Y] [J]

demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Patricia CHEVALLIER-GASCHY, avocat à la cour.

INTIMÉ :

Le Syndicat des copropriétaires LES CLÉS DE LA FORET, pris en la personne de son syndic la SARL AGENCE IMMOBILIERE LAEMMEL devenue IMMOBILIERE DES ROHAN, ayant siège social [Adresse 4], prise en la personne de son représentant légal

sis [Adresse 3]

représenté par la SCP CAHN G./CAHN T./BORGHI, avocats à la cour.

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 08 Avril 2022, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Isabelle DIEPENBROEK, Présidente de chambre

Madame Catherine GARCZYNSKI, Conseiller

Madame Myriam DENORT, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme Dominique DONATH, faisant fonction.

ARRET contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente et Mme Sylvie SCHIRMANN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE et PRÉTENTIONS des PARTIES

M. [J] est copropriétaire au sein de la résidence [Adresse 1]

A l'assemblée générale des copropriétaires du 4 décembre 2019, a été rejetée la résolution n°14, présentée à la demande de M. [J], tendant à voir approuver la prise en charge par la copropriété des travaux de remplacement, dans son logement 'PC3", des 3 robinets de radiateur par de nouveaux robinets thermostatiques, sur la base d'un devis de 733,44 euros ; selon le procès-verbal, le refus est motivé par 'le fait que de nombreux copropriétaires ont par le passé financé par eux mêmes ce même type de travaux dans leur logement'. A également été rejetée la résolution n°15, présentée en cas de rejet de la précédente, tendant à voir adopter le principe que les robinets de radiateurs constituent un équipement privatif accessoire aux radiateurs, 'qui eux sont communs d'après le règlement de copropriété puisque faisant partie intégrante de l'installation de chauffage PC3.'

Soutenant que le rejet de la résolution n° 14 contrevenait au règlement intérieur de la copropriété, M. [J] a saisi, par assignation du 14 février 2019, le tribunal de grande instance de Saverne d'une demande tendant à voir :

- annuler cette résolution n° 14,

- constater qu'en application de l'article 4 du règlement de copropriété, les radiateurs constituent des parties communes,

- condamner le syndicat à prendre en charge les frais d'intervention du remplacement des robinets thermostatiques monotubes de son logement,

- répartir la dépense selon les millièmes concernés.

Par jugement du 18 septembre 2020, le tribunal judiciaire a débouté M. [J] de toutes ses demandes et l'a condamné aux dépens ainsi qu'à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le tribunal a considéré qu'il ressortait de 'l'esprit' du règlement de copropriété que les robinets de radiateur concernaient, non pas l'installation du chauffage central (partie commune selon l'article 4), mais l'usage de celui-ci par les propriétaires de chaque lot, de sorte qu'ils devaient être considérés comme parties privatives ; il s'est appuyé sur l'article 3 du règlement selon lequel, sont des parties privatives 'les parties de canalisation propres à l'usage du local, à l'exclusion de l'installation de chauffage central'.

*

M. [J] a interjeté appel de ce jugement le 9 octobre 2020.

Par conclusions du 22 juin 2021, il demande à la cour d'infirmer le jugement et de :

- annuler la résolution n° 14,

- constater qu'en application de l'article 4 du règlement de copropriété, les radiateurs constituent des parties communes, de même que les robinets thermostatiques qui en sont l'accessoire nécessaire,

- condamner le syndicat à prendre en charge les frais d'intervention et de remplacement des robinets thermostatiques monotubes de son logement, avec répartition de la dépense selon les millièmes concernés,

- condamner le syndicat aux dépens et au paiement d'un montant de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour la première instance et du même montant pour l'appel, étant rappelé qu'il est dispensé de toute participation à la dépense commune des frais de procédure.

L'appelant fait valoir que le premier juge a dénaturé les clauses du règlement qui sont claires, puisque l'article 3 exclut 'l'installation de chauffage central' des parties privatives, de sorte qu'elles ne peuvent donner lieu à interprétation en se référant à l'esprit du règlement. Il ajoute que l'article 4, définissant les parties communes, emploie le terme de 'notamment' de sorte que la liste n'est pas 'exclusive' et que ce qui y est énuméré est une partie commune.

Il relève en outre que :

- la motivation du rejet de la résolution figure au procès-verbal et est sans rapport avec les dispositions du règlement, puisqu'elle repose sur le fait que de nombreux copropriétaires ont eux-mêmes financé ce type de travaux dans leur logement,

- d'ailleurs, la résolution n° 15, visant à qualifier d'équipement privatif les robinets, a aussi été rejetée, puisqu'une telle résolution imposerait au préalable la modification du règlement et, qu'à défaut, elle serait nulle.

Il invoque enfin une rupture d'égalité, de nombreux copropriétaires ayant déjà obtenu précédemment de la copropriété la prise en charge du remplacement de ces robinets, précisant que les logements ont été équipés en 1991/1992 de robinets thermostatiques, qui ont posé problème au bout d'une quinzaine d'années et ont dû être remplacés par des modèles plus récents. Sur les factures de la société THS concernant les robinets de Mme [K] que le syndicat soutient ne pas avoir pris en charge, il observe que le relevé des dépenses de 2014/2015 produit par le syndicat s'arrête au 30/06/2015 et que leur règlement a pu intervenir après cette date, puisque Mme [K] a refusé de les régler le 31 mars 2015 et que la date à laquelle la société THS s'est adressée au syndic est inconnue. M. [J] ajoute que, si certains copropriétaires ont changé eux-mêmes les robinets de leur logement, ce serait sans l'avoir signalé au syndic

*

Par conclusions du 26 janvier 2021, le syndicat des copropriétaires sollicite la confirmation du jugement entrepris et le débouté des demandes. Il sollicite en outre la condamnation de l'appelant au paiement d'une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le syndicat des copropriétaires fait valoir que les stipulations des articles 3 et 4 du règlement de copropriété doivent être interprétées concernant les robinets thermostatiques et que le critère de l'usage exclusif permet de distinguer parties privatives et communes selon ces articles, comme selon la loi du 10 juillet 1965. Les robinets thermostatiques étant à l'usage exclusif des copropriétaires, qui peuvent seuls les manoeuvrer contrairement à la chaudière, il en déduit qu'ils sont privatifs.

Subsidiairement, il soutient que, si les robinets sont parties communes, c'est à l'assemblée générale de voter les travaux, laquelle est libre de les refuser, et non aux copropriétaires de les décider en demandant seulement que leur financement soit pris en charge par la copropriété. Il conteste la rupture d'égalité invoquée, les factures de la société THS concernant les robinets de Mme [K] pour 403,44 euros ne figurant pas dans les dépenses de 2014/2015.

*

Pour l'exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions notifiées et transmises par voie électronique aux dates susvisées.

La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 7 décembre 2021.

MOTIFS

Sur l'annulation de la décision prise par l'assemblée générale sur la résolution n° 14

Si l'article 3 du règlement de copropriété énonce que tous les éléments à usage privatif inclus à l'intérieur des locaux, affectés à l'usage exclusif du propriétaire d'un lot, constituent des parties privatives, il énumère de façon non limitative ('notamment') un certain nombre de ces éléments, dont 'les parties de canalisations propres à l'usage du local, à l'exclusion de l'installation de chauffage central' ; et l'article 4 inclut cette installation 'y compris les éléments de chauffage (radiateurs) et toutes les canalisations situées à l'intérieur des locaux privatifs' dans la liste non limitative des parties communes, définies comme 'celles qui ne sont pas affectées à l'usage exclusif d'un propriétaire déterminé'.

L'article 4 ayant pris soin de préciser que les éléments de chauffage dont les radiateurs, situés dans les locaux privatifs, étaient parties communes, il est clair que les robinets de ces derniers le sont aussi, puisqu'ils servent à régler leur température.

En conséquence, l'assemblée générale ne pouvait rejeter la résolution au motif qu'il appartenait à M. [J] de financer lui-même ces travaux puisque, s'agissant d'une partie commune, c'était bien au syndicat de les financer.

Le jugement entrepris sera donc infirmé en ce qu'il a débouté M. [J] de sa demande d'annulation du rejet de cette résolution et il sera fait droit à cette demande.

Sur les conséquences de l'annulation

Il sera dit qu'en application de l'article 4 du règlement de copropriété, les robinets thermostatiques des radiateurs, comme les radiateurs eux-mêmes, constituent des parties communes.

En revanche, seule l'assemblée générale a le pouvoir d'ordonner les travaux sur parties communes.

La cour ne peut se substituer à elle.

Dès lors, la cour ne peut condamner le syndicat à prendre en charge les frais d'intervention et de remplacement de robinets de radiateurs dont l'assemblée générale n'a pas décidé du remplacement.

M. [J] sera donc débouté de cette demande ; il lui appartiendra de saisir l'assemblée générale d'une demande d'autorisation de ces travaux, étant rappelé que l'assemblée générale exerce ses pouvoirs dans les limites de l'abus de majorité.

Sur les dépens et frais exclus des dépens

Le syndicat succombant sur la qualification des robinets de radiateur, le jugement déféré sera infirmé en ses dispositions relatives aux dépens et frais exclus des dépens ; le syndicat sera condamné aux dépens de première instance et d'appel ainsi qu'à payer à M. [J] la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais qu'il a exposés en première instance et en appel, lui-même étant débouté de ses propres demandes de ce chef. M. [J] sera dispensé de toute participation à la dépense commune des frais de procédure, dont la charge sera répartie entre les autres copropriétaires, en application de l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450, alinéa 2 du code de procédure civile,

INFIRME en toutes ses dispositions le jugement déféré ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

ANNULE la décision de rejet de la résolution n° 14 prise par l'assemblée générale des copropriétaires de l'immeuble 'Les clés de la forêt' du 4 décembre 2019 ;

DIT qu'en application de l'article 4 du règlement de copropriété, les robinets thermostatiques des radiateurs constituent, comme les radiateurs eux-mêmes, des parties communes,

DEBOUTE M. [Y] [J] de sa demande tendant à voir condamner le syndicat des copropriétaires 'Les clés de la forêt' à prendre en charge les frais d'intervention et de remplacement des robinets de radiateurs de son logement,

CONDAMNE le syndicat des copropriétaires 'Les clés de la forêt' à payer à M. [Y] [J] la somme de 2 000 euros (deux mille euros) en application de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais qu'il a exposés en première instance et en appel,

DEBOUTE le syndicat des copropriétaires 'Les clés de la forêt' de ses demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile, en première instance et en appel,

CONDAMNE le syndicat des copropriétaires 'Les clés de la forêt' aux dépens de première instance et d'appel,

DISPENSE M. [Y] [J] de toute participation à la dépense commune des frais de procédure, dont la charge sera répartie entre les autres copropriétaires, en application de l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965.

Le greffier, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 2 a
Numéro d'arrêt : 20/02904
Date de la décision : 17/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-17;20.02904 ?
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