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16/06/2022 | FRANCE | N°20/036491

France | France, Cour d'appel de colmar, 4s, 16 juin 2022, 20/036491


MINUTE No 22/541

NOTIFICATION :

Copie aux parties

Clause exécutoire aux :

- avocats
- parties non représentées

Le

Le Greffier
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR
CHAMBRE SOCIALE - SECTION SB

ARRET DU 16 Juin 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : 4 SB No RG 20/03649 - No Portalis DBVW-V-B7E-HOIN

Décision déférée à la Cour : 25 Novembre 2020 par le pôle social du Tribunal Judiciaire de STRASBOURG

APPELANTE :

Madame [S] [E]
[Adresse 2]
[

Localité 6]

Représentée par Me Gulay OZKAN-BAYRAKTAR, avocat au barreau de STRASBOURG

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/5309...

MINUTE No 22/541

NOTIFICATION :

Copie aux parties

Clause exécutoire aux :

- avocats
- parties non représentées

Le

Le Greffier
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR
CHAMBRE SOCIALE - SECTION SB

ARRET DU 16 Juin 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : 4 SB No RG 20/03649 - No Portalis DBVW-V-B7E-HOIN

Décision déférée à la Cour : 25 Novembre 2020 par le pôle social du Tribunal Judiciaire de STRASBOURG

APPELANTE :

Madame [S] [E]
[Adresse 2]
[Localité 6]

Représentée par Me Gulay OZKAN-BAYRAKTAR, avocat au barreau de STRASBOURG

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/5309 du 22/12/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de COLMAR)

INTIMEE :

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU HAUT-RHIN
[Adresse 1]
[Localité 4]

Dispensée de comparution

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 07 Avril 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme FERMAUT, Magistrat honoraire, faisant fonction de Président de chambre,
Mme ARNOUX, Conseiller
Mme HERY, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme WALLAERT, Greffier

ARRET :

- contradictoire
- prononcé par mise à disposition au greffe par Mme FERMAUT, Magistrat honoraire, faisant fonction de Président de chambre,
- signé par Mme FERMAUT, Magistrat honoraire, faisant fonction de Président de chambre et Mme WALLAERT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

FAITS ET PROCEDURE

Le 20 avril 2018 (et non le 20 avril 2008 indiqué par erreur sur la demande), Mme [S] [E], née le [Date naissance 3] 1968, a demandé une pension d'invalidité auprès de la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Haut-Rhin.

Par décision du 29 mai 2018, la CPAM lui a refusé le bénéfice d'une pension d'invalidité, son médecin conseil ayant estimé qu'à la date du 20 avril 2018, elle ne présentait pas une invalidité réduisant des 2/3 au moins sa capacité de travail ou de gain.

Le 10 juillet 2018, Mme [S] [E] a saisi le tribunal du contentieux de l'incapacité (TCI) de Strasbourg d'un recours contre la décision du 29 mai 2018.

Par ordonnance du 8 janvier 2020, le pôle social du tribunal de grande instance (TGI) de Strasbourg remplaçant le TCI a ordonné l'examen médical de Mme [E] lequel a été confié au docteur [N] qui a déposé son rapport le 8 juillet 2020.

Par jugement du 25 novembre 2020, le tribunal judiciaire remplaçant le TGI a :

- déclaré recevable en la forme le recours de Mme [S] [E] ;
- confirmé la décision de la CPAM du Haut-Rhin du 29 mai 2018 ;
- débouté Mme [S] [E] de toutes ses demandes ;
- débouté la CPAM du Haut-Rhin de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- mis les frais de consultation médicale à la charge de la CNAM et au besoin l'y a condamné ;
- condamné Mme [S] [E] aux frais et dépens de la procédure, à l'exception des frais de consultation médicale.

Mme [E] a formé appel à l'encontre de ce jugement par voie électronique le 15 décembre 2020.

L'affaire a été appelée à l'audience du 7 avril 2022, la CPAM ayant été autorisée, sur sa demande, à ne pas y comparaître.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Aux termes de ses conclusions transmises par voie électronique le 20 janvier 2021, Mme [E] demande à la cour de :

- dire et juger que son appel est recevable et bien fondé ;
- infirmer la décision du 25 novembre 2020 du pôle social du tribunal judiciaire de Strasbourg sauf en ce qu'il a débouté la CPAM du Haut-Rhin de sa demande de paiement au titre de l'article 700 code de procédure civile ;

statuant à nouveau :

- annuler la décision de refus médical d'une pension d'invalidité de la CPAM du Haut-Rhin du 29 mai 2018 ;
- lui octroyer une pension d'invalidité de catégorie 2 ;

à titre subsidiaire :

- commettre un expert médical pour effectuer une nouvelle expertise ;

dans tous les cas :

- condamner la CPAM du Haut-Rhin à lui payer la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- débouter la CPAM du Haut-Rhin de ses demandes ;
- condamner la CPAM du Haut-Rhin aux entiers frais et dépens de l'instance ;
- constater sinon ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir.

Aux termes de ses conclusions reçues le 9 août 2021, la CPAM du Haut-Rhin demande à la cour de :

- confirmer le jugement du 24 novembre 2020 ;
- apprécier l'état de santé au 20 avril 2018 ;
- rejeter la demande de consultation ;
- rejeter l'ensemble des demandes de Mme [E].

En application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément, pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, aux conclusions susvisées et soutenues oralement à l'audience du 7 avril 2022.

MOTIFS DE LA DECISION

Interjeté dans les forme et délai légaux, l'appel est recevable.

Mme [E] expose qu'elle n'a pas immédiatement eu accès au rapport d'expertise du docteur [F] [D] [M], sur lequel s'est basé la CPAM afin de rendre sa décision de refus d'une pension d'invalidité puisqu'il ne lui a été transmis que suite à son recours, par courrier de la CPAM du Haut-Rhin du 4 septembre 2018, le rapport n'indiquant pas comment le médecin conseil a pris sa décision, ni sur quels documents médicaux il s'est basé.

Elle ajoute que le médecin conseil est un généraliste, non spécialisé dans les problèmes de psychiatrie et qu'il n'a pas pris en compte ses autres douleurs et ses conditions de vie pour prendre sa décision.

Elle indique qu'elle bénéficie de l'allocation aux adultes handicapés (AAH) pour la période du 1er février 2017 au 31 janvier 2019 laquelle a été renouvelée, son taux d'incapacité retenu dans ce cadre étant supérieur ou égal à 50% et inférieur à 80%.
S'agissant du rapport du docteur [N], elle conteste avoir été opposante à l'examen médical, rappelant que c'est elle qui l'a demandé et souligne que le médecin, spécialisé dans la médecine physique et de réadaptation mais pas en psychiatrie, ne l'a pas examinée et n'a pas pris en compte ses autres douleurs et ses conditions de vie.

Elle soutient qu'elle présente une invalidité réduisant des 2/3 au moins sa capacité de travail, les documents médicaux qu'elle produit justifiant de ses problèmes médicaux, et notamment de son suivi psychiatrique pour dépression suite à syndrome post-traumatique sévère, accentués par un isolement social et par le fait qu'elle ne parle pas français.

La CPAM répond que Mme [E] ne présente pas une invalidité réduisant des 2/3 au moins sa capacité de travail ou de gain au 20 avril 2018, le docteur [N] ayant pris en compte le syndrome dépressif, Mme [E] ayant des problèmes sociaux.

Elle s'oppose à une nouvelle consultation.

Conformément aux dispositions des articles L.341-1 et R.341-2 du code de la sécurité sociale dans leur version applicable aux faits de l'espèce, l'assuré a droit à une pension d'invalidité lorsqu'il présente une invalidité réduisant de deux tiers sa capacité de travail ou de gain, c'est-à-dire le mettant hors d'état de se procurer, dans une profession quelconque, un salaire supérieur à une fraction de la rémunération normale perçue dans la même région par des travailleurs de la même catégorie, dans la profession qu'il exerçait avant la date de l'interruption de travail suivie d'invalidité ou la date de constatation médicale de l'invalidité si celle-ci résulte de l'usure prématurée de l'organisme.

L'article L.341-4 du même code classe les invalides comme suit :

1o invalides capables d'exercer une activité rémunérée,
2o invalides absolument incapables d'exercer une profession quelconque,
3o invalides qui, étant absolument incapables d'exercer une profession, sont, en outre, dans l'obligation d'avoir recours à l'assistance d'une tierce personne pour effectuer les actes ordinaires de la vie.

Au vu des dispositions de l'article L.341-3 du même code, l'état d'invalidité est apprécié en tenant compte de la capacité de travail restante, de l'état général, de l'âge et des facultés physiques et mentales de l'assuré, ainsi que de ses aptitudes et de sa formation professionnelle :

1o Soit après consolidation de la blessure en cas d'accident non régi par la législation sur les accidents du travail,

2o Soit à l'expiration de la période pendant laquelle l'assuré a bénéficié des prestations en espèces prévues au 5o de l'article L.321-1 (3 ans maximum),

3o Soit après stabilisation de son état intervenue avant l'expiration du délai susmentionné,

4o Soit au moment de la constatation médicale de l'invalidité, lorsque cette invalidité résulte de l'usure prématurée de l'organisme.

Le rapport établi par le médecin conseil de la CPAM a fait état de plusieurs pathologies dont une dépression chronique avec suivi évoluant depuis près de dix ans suite à des problèmes familiaux.

Le médecin consultant a également fait état d'un suivi psychiatrique pour une dépression chronique évoluant depuis plusieurs années suite à des problèmes familiaux mais a également évoqué l'existence d'un stress post-traumatique, tout en soulignant qu'il n'avait aucune précision sur ce traumatisme.

Au regard des spécialités du médecin conseil et du docteur [N] (médecine physique et de réadaptation) et de l'existence d'une syndrome dépressif en lien avec des problèmes familiaux mais également avec un stress-traumatique au sujet duquel le docteur [N] n'a pas été en mesure de produire une quelconque information, il apparaît nécessaire d'ordonner une expertise médicale laquelle doit être confiée à un psychiatre, lequel pourra s'adjoindre les services d'un interprète en langue turque, si Mme [E] en fait la demande et se trouve dans l'impossibilité de se faire accompagner d'un interprète, considération prise de ce que Mme [E] éprouve de réelles difficultés à comprendre et parler la langue française.

Le jugement entrepris est donc infirmé sur la demande d'expertise, les autres demandes, les dépens et frais de procédure étant réservés.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant avant dire droit, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré :

DECLARE l'appel recevable ;

INFIRME le jugement du 25 novembre 2020 rendu par le tribunal judiciaire de Strasbourg en ce qu'il a rejeté la demande d'expertise de Mme [S] [E] ;

ORDONNE une expertise médicale ;

DESIGNE pour y procéder le docteur [O] [U], hôpital du [8] [Adresse 7] [Localité 5] avec pour mission de :

* prendre connaissance des pièces du dossier lesquelles devront lui être transmises à son adresse dans les 15 jours précédant la date de l'examen fixée par l'expert,

* se faire remettre par la CPAM du Haut-Rhin l'intégralité du rapport médical mentionné à l'article L.142-10 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable aux faits de l'espèce,

* convoquer Mme [S] [E], en aviser son conseil et le médecin conseil de la CPAM du Haut-Rhin,

* examiner Mme [S] [E], le cas échéant assistée de son avocat et de son médecin traitant et en présence du médecin conseil de la CPAM du Haut-Rhin, et d'un interprète assermenté en langue turque si Mme [E] en fait la demande et se trouve dans l'impossibilité de se faire accompagner d'un interprète,

* dire si, à la date du 20 avril 2018, Mme [S] [E] présentait une invalidité réduisant de 2/3 au moins sa capacité de travail ou de gain et dire si elle était dans l'impossibilité de travailler ;

DIT que l'expert désigné pourra, en cas de besoin, s'adjoindre le concours de tout spécialiste de son choix, dans un domaine distinct du sien, après en avoir simplement avisé les conseils des parties et le magistrat chargé du contrôle de l'expertise ;

FIXE au 30 novembre 2022, la date limite du dépôt du rapport d'expertise au greffe de la chambre sociale de la cour d'appel (section 4SB), sauf prorogation dûment sollicitée auprès du magistrat chargé du contrôle des opérations d'expertise ;

DIT que l'expert devra déposer ce rapport en deux exemplaires comprenant notamment son avis et ses réponses aux dires et observations éventuels après en avoir adressé un exemplaire à chacune des parties en cause ;

DIT que les frais d'expertise seront versés directement par la Caisse Nationale d'Assurance Maladie (CNAM) au médecin expert ;

DESIGNE la présidente de la section SB -chambre sociale- pour suivre les opérations d'expertise ;

RESERVE les droits des parties, les dépens et les frais de procédure ;

RENVOIE l'examen de l'affaire à l'audience d'instruction du :

Jeudi 2 Mars 2023 à 14h00 - salle 32

DIT que la notification du présent arrêt vaut convocation pour l'audience de renvoi ;

et DIT que les parties devront avoir déposé leurs conclusions et pièces quinze jours avant ladite audience.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de colmar
Formation : 4s
Numéro d'arrêt : 20/036491
Date de la décision : 16/06/2022
Sens de l'arrêt : Expertise

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.colmar;arret;2022-06-16;20.036491 ?
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