MINUTE No 22/538
NOTIFICATION :
Copie aux parties
Clause exécutoire aux :
- avocats
- parties non représentées
Le
Le Greffier
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE COLMAR
CHAMBRE SOCIALE - SECTION SB
ARRET DU 16 Juin 2022
Numéro d'inscription au répertoire général : 4 SB No RG 19/02593 - No Portalis DBVW-V-B7D-HDIZ
Décision déférée à la Cour : 17 Avril 2019 par le pôle social du Tribunal de Grande Instance de STRASBOURG
APPELANT :
Monsieur [V] [S]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représenté par Me Corinne ZIMMERMANN, avocat au barreau de STRASBOURG
INTIMEE :
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU BAS-RHIN
Service contentieux
[Adresse 1]
[Localité 3]
Comparante en la personne de Mme [BM] [NO], munie d'un pouvoir
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 10 Mars 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :
Mme FERMAUT, Magistrat honoraire, faisant fonction de Président de chambre,
Mme ARNOUX, Conseiller
Mme HERY, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Mme WALLAERT, Greffier
ARRET :
- contradictoire
- prononcé par mise à disposition au greffe par Mme FERMAUT, Magistrat honoraire, faisant fonction de Président de chambre,
- signé par Mme FERMAUT, Magistrat honoraire, faisant fonction de Président de chambre et Mme WALLAERT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
* * * * *
FAITS ET PROCÉDURE
M. [V] [S], qui exerce la profession de masseur-kinésithérapeute à titre libéral, a fait l'objet d'un contrôle du service médical de la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Bas-Rhin pour une partie de son activité professionnelle. Ce contrôle a fait apparaître plusieurs anomalies sur les facturations d'actes médicaux pour des soins ayant donné lieu à remboursement sur la période du 7 avril 2014 au 31 décembre 2015.
Par courrier du 9 février 2017, M. [S] a saisi la commission de recours amiable de la CPAM du Bas-Rhin d'une contestation de la décision de la caisse du 14 décembre 2016 lui réclamant le remboursement d'un indu de 35.142,51 euros au titre de plusieurs anomalies de facturation d'actes médicaux, puis le tribunal des affaires de sécurité sociale du Bas-Rhin à l'encontre de la décision implicite de rejet de ladite commission.
Vu l'appel interjeté par M. [S] le 5 juin 2019 par voie électronique (inscrit au répertoire général de la cour sous le no19/2593) à l'encontre du jugement rendu le 17 avril 2019, et notifié le 23 mai 2019, par le pôle social du tribunal de grande instance de Strasbourg auquel le contentieux a été transféré qui, dans l'instance opposant M. [S] à la CPAM du Bas-Rhin, a déclaré le recours du demandeur mal fondé, l'a débouté de sa demande d'expertise judiciaire, a validé le redressement opéré par la CPAM du Bas-Rhin portant sur les anomalies sur les facturations d'actes médicaux pour des soins remboursés au cours de la période allant du 7 avril 2014 au 31 décembre 2015 pour la somme de 34.711,31 euros, a condamné M. [S] à payer cette somme à la CPAM du Bas-Rhin ainsi qu'aux dépens de la procédure et l'a débouté de sa demande de condamnation de la CPAM du Bas-Rhin au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Vu la déclaration d'appel envoyée par M. [S] par voie postale le 13 juin 2019 (inscrit au répertoire général de la cour sous le no19/2754) à l'encontre du même jugement ;
Vu l'ordonnance du magistrat chargé d'instruire les affaires sociales du 6 février 2020 prononçant la jonction des deux affaires sous le noRG 19/2593 ;
Vu les conclusions visées le 1er mars 2022, reprises oralement à l'audience, aux termes desquelles M. [S] demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris dans toutes ses dispositions, à titre principal d'ordonner une expertise judiciaire des tableaux des anomalies établies par la CPAM du Bas-Rhin, subsidiairement de réduire a minima la somme des indus réclamés de 34.808,75 euros et de condamner la CPAM du Bas-Rhin au paiement d'une indemnité de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Vu les conclusions visées le 3 février 2022, reprises oralement à l'audience, aux termes desquelles la caisse primaire d'assurance maladie du Bas-Rhin demande à la cour de rejeter la demande d'expertise médicale judiciaire formulée par M. [S], de dire et juger que M. [S] lui est redevable de la somme de 35.180,90 euros, de rejeter la demande formulée au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de condamner M. [S] à lui rembourser cette somme, et au paiement de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers frais et dépens ;
Vu le dossier de la procédure, les pièces versées aux débats et les conclusions des parties auxquelles il est référé, en application de l'article 455 du code de procédure civile, pour l'exposé de leurs moyens et prétentions ;
MOTIFS
Interjeté dans les forme et délai légaux, l'appel est recevable.
Par courrier du 22 avril 2016, la directrice de la CPAM du Bas-Rhin notifiait à M. [S] les griefs retenus par le service du contrôle médical résultant de l'analyse d'une partie de son activité professionnelle.
Dans le cadre du contrôle, M. [S] a sollicité un entretien auprès du service du contrôle médical ; celui-ci s'est déroulé le 20 juin 2016.
Trois types d'anomalies relatives d'une part aux surcotations d'actes, de bilan-diagnostic kinésithérapique (BDK), d'indemnités de déplacement et de durée de séance non conforme à la Nomenclature générale des actes professionnels (NGAP), d'autre part à l'absence de prescription médicale et enfin aux BDK en nombre insuffisant et aux BDK non conformes, ont été retenues à l'examen de l'activité concernant 63 assurés pour un total de 35.142,51 euros.
La procédure de contrôle diligentée par la caisse n'est, en la forme, pas contestée par M. [S]. Ce dernier conteste néanmoins certaines anomalies retenues par la CPAM à l'issue de l'entretien contradictoire et le litige s'est étendu à la demande d'expertise judiciaire.
Sur la demande d'expertise judiciaire
M. [S] forme une demande d'expertise médicale judiciaire au motif qu'il conviendrait de déterminer si le montant réclamé par la caisse est justifié pour chacun des dossiers d'assurés dont la facturation est contestée.
La CPAM du Bas-Rhin, qui se réfère à la motivation du tribunal dans le jugement querellé, conclut au rejet de la demande de l'appelant.
En l'espèce, les questions en litige relèvent de l'appréciation à donner aux mentions figurant sur les prescriptions médicales ainsi qu'à la constatation de leur présence ou de leur absence, de sorte qu'une expertise n'a pas lieu d'être ordonnée.
La décision déférée sera donc confirmée en ce qu'elle a rejeté la demande d'expertise formée par M. [S].
Sur le bien fondé de l'indu réclamé par la caisse
L'article L133-4 du code de la sécurité sociale permet à l'organisme de sécurité sociale qui prend en charge le coût des actes facturés par un professionnel de santé de recouvrer auprès de lui l'indu résultant 'une inobservation des règles de tarification ou de facturation.
En vertu de l'article L162-1-7 du code de la sécurité sociale, dans sa version résultant de la loi no2010-1594 du 20 décembre 2010, la prise en charge ou le remboursement par l'assurance maladie de tout acte ou prestation réalisé par un professionnel de santé est subordonné à son inscription sur une liste, l'inscription sur la liste pouvant elle-même être subordonnée au respect d'indications thérapeutiques ou diagnostiques, à l'état du patient ainsi qu'à des conditions particulières de prescription, d'utilisation ou de réalisation de l'acte ou de la prestation.
Les actes et prestations des professionnels de santé ne sont pris en charge par l'assurance maladie que s'ils figurent sur la liste des actes et prestations et dans les conditions prévues par cette liste.
S'agissant des actes cliniques médicaux des auxiliaires médicaux, la liste visée par l'article précité est la Nomenclature Générale des Actes Professionnels (NGAP).
Le remboursement de l'assurance maladie ne peut intervenir qu'à la double condition qu'il s'agisse d'un acte inscrit à la NGAP, et que sa codification soit conforme à celle définie par cette même nomenclature.
Lorsque les conditions de prise en charge d'un acte prévu à la NGAP ne sont pas respectées, le refus de remboursement par l'assurance maladie est justifié.
Aux termes de l'article 3 de la NGAP, le praticien ou l'auxiliaire médical doit indiquer sur la feuille de maladie non pas la nature de l'acte pratiqué, mais simplement sa codification, comportant le numéro de code de l'acte figurant à la Nomenclature.
Toutefois, à titre transitoire, et jusqu'à la date à compter de laquelle l'obligation de codification deviendra effective, le praticien doit indiquer sur la feuille de soins :
1. la lettre clé prévue à l'article précédent selon le type de l'acte et la qualité de celui qui l'exécute ;
2. immédiatement après le coefficient fixé par la Nomenclature.
L'article 5 de cette même nomenclature dispose que seuls peuvent être pris en charge ou remboursés par les caisses d'assurance maladie, les actes effectués personnellement par un auxiliaire médical, sous réserve qu'ils aient fait l'objet d'une prescription médicale écrite qualitative et quantitative, et qu'ils soient de sa compétence.
Selon le titre XIV de la nomenclature, les actes de ce titre peuvent être pris en charge ou remboursés par les caisses d'assurance maladie, lorsqu'ils sont personnellement effectués par un masseur-kinésithérapeute, sous réserve qu'ils aient fait l'objet d'une prescription écrite du médecin mentionnant l'indication médicale de l'intervention du masseur-kinésithérapeute ; le médecin peut, s'il le souhaite, préciser sa prescription, qui s'impose alors au masseur-kinésithérapeute.
La durée des séances est, sauf exception, de l'ordre de trente minutes.
Les cotations comprennent les différents actes et techniques utilisés par le masseur-kinésithérapeute pendant la séance à des fins de rééducation, que ce soient des manoeuvres de massage, des actes de gymnastique médicale ou des techniques de physiothérapie.
Sauf exception afférente à la rééducation des maladies respiratoires avec désencombrement urgent conjuguée à la réalisation d'un acte de rééducation d'une autre nature, ces cotations ne sont pas cumulables entre elles.
A chaque séance -excepté le cas précité- s'applique donc une seule cotation, correspondant au traitement de la pathologie ou du territoire anatomique en cause.
La cotation en AMS, AMK ou AMC du bilan est forfaitaire. Elle ne peut être appliquée que pour un nombre de séances égal ou supérieur à 10.
Un bilan-diagnostic kinésithérapique est réalisé pour un nombre de séances compris entre 10 et 20, puis de nouveau toutes les 20 séances pour traitement de rééducation et de réadaptation fonctionnelle figurant au chapitre II ou III, sauf exception.
Un bilan-diagnostic kinésithérapique est réalisé pour un nombre de séances compris entre 10 et 50, puis de nouveau toutes les 50 séances pour traitement de rééducation des conséquences des affections neurologiques et musculaires, en dehors des atteintes périphériques radiculaires ou tronculaires.
Lorsqu'un acte inscrit à la Nomenclature générale des actes professionnels (NGAP) ou à la Classification commune des actes médicaux (CCAM) doit être effectué au domicile du malade, les frais de déplacement du professionnel de santé sont remboursés, en sus de la valeur de l'acte ; ce remboursement est, selon le cas, forfaitaire ou calculé en fonction de la distance parcourue et de la perte de temps subie par le professionnel de santé.
Ainsi, l'indemnité forfaitaire de déplacement (IFD) s'ajoute au montant des honoraires perçus pour les actes effectués au domicile du patient et peut, le cas échéant, se cumuler avec des indemnités kilométriques (IK).
Par dérogation aux dispositions liminaires du titre XIV, dans les cas où l'état du patient nécessite la conjonction d'un acte de rééducation respiratoire (pour un épisode aigu) et d'un acte de rééducation d'une autre nature, les dispositions de l'article 11B des Dispositions générales sont applicables à ces deux actes.
Ainsi, lorsqu'au cours d'une même séance, plusieurs actes inscrits à la nomenclature sont effectués sur un même malade par le même praticien, l'acte du coefficient le plus important est seul inscrit avec son coefficient propre. Le deuxième acte est ensuite noté à 50% de son coefficient
L'article R4127-76, second alinéa, du code de la santé publique précise que tout certificat, ordonnance, attestation ou document délivré par un médecin doit être rédigé lisiblement en langue française et daté, permettre l'identification du praticien dont il émane et être signé par lui. Le médecin peut en remettre une traduction au patient dans la langue de celui-ci.
Enfin, l'article L162-12-8 du code de la sécurité sociale dispose que les masseurs-kinésithérapeutes sont tenus d'effectuer leurs actes dans le respect des dispositions du titre III du livre IV du code de la santé publique et de leurs mesures d'application en observant la plus stricte économie compatible avec l'exécution des prescriptions.
En l'espèce, la caisse produit aux débats en complément du tableau récapitulatif des anomalies constatées pour chaque assuré qu'elle avait joint à la notification d'indu, des extraits du rapport du médecin conseil de la caisse ainsi que certaines prescriptions médicales à l'appui de la facturation de M. [S].
M. [S] conteste les indus réclamés par la caisse concernant plusieurs patients.
Sur les patients no16, 19, 25, 35 et 45
La caisse indique que M. [S] n'a pas contesté les anomalies de facturation relevées pour ces patients devant la commission de recours amiable, ni devant le tribunal. Elle n'en tire toutefois aucune conséquence juridique et ne formule aucune prétention sur la recevabilité de cette contestation.
Au fond, l'intimée fait valoir que lorsqu'un caractère d'urgence dans le cadre d'une poussée aiguë au cours d'une pathologie respiratoire chronique a pu être retrouvée (traitement antibiotiques, visites du médecin plus fréquentes voire hospitalisation) la cotation AMK8 a été acceptée dans le respect de l'article 11B des dispositions générales sus-cité ; l'acceptation de cette cotation étant nécessairement limitée dans le temps.
Concernant le patient no16 -Mme [J] [P]-, M. [S] conteste l'indu retenu par la caisse mais n'apporte pas d'autres éléments ou explications que ceux fournis au cours du contrôle qui ont conduit le médecin conseil à écarter la facturation des séances AMS 9,5 + AMK 8 + IFO et à retenir la cotation AMK 10 + IFN, voire dans certains cas la cotation AMK 10 + AMK 8/2 + IFN.
Concernant le patient no19 -M. [I] [W], M. [S] conteste l'indu retenu par la caisse mais n'apporte strictement aucun élément ni explications autres que ceux fournis au cours du contrôle qui ont conduit le médecin conseil à écarter la facturation des séances AMK 8 +AMK 10 et à ne retenir que la cotation AMK 10.
Concernant le patient no25 -Mme [C] [G]-, M. [S] conteste l'indu retenu par la caisse mais se réfère à une ordonnance du 28 mars 2014 qu'il ne joint pas.
Concernant le patient no35 -M. [EE] [R], M. [S] conteste l'indu retenu par la caisse mais fait simplement valoir que « la facture du 07/11/2014 était valide » alors que la validité de celle-ci n'est pas en cause, mais que son libellé (« 30 séances de mobilisations + K né respiratoire à domicile, dimanches et jours fériés si nécessaire, à renouveler 3X ») a conduit le médecin conseil à écarter la cotation AMS 9,5 + AMK 8 pour n'admettre que la cotation AMS 9,5.
Concernant le patient no45 -M. [ZW] [D]-, M. [S] conteste l'indu retenu par la caisse mais n'apporte pas d'élément qui le contredise, produisant même l'ordonnance du 5 janvier 2015 qui prescrivait des « séances de kinésithérapie spécifiquement adaptée à la maladie de Parkinson » et a conduit le médecin conseil à écarter 12 cotations AMK 8.
Du tout il se déduit que M. [S] n'est pas fondé à contester l'indu concernant ces patients.
Sur le patient no2 (Mme [E] [O])
S'appuyant sur les ordonnances des 10 mars 2014 et 30 juin 2014 pour justifier de l'application de la cotation AMS 9.5 + IFO, M. [S] prétend que le médecin prescripteur a commis une erreur en répondant à une question du service du contrôle médical de la caisse et que les bilans produits mettent en évidence la nécessité du travail musculaire des quatre membres.
Si le masseur-kinésithérapeute s'engage personnellement à assurer au patient des soins consciencieux, attentifs et fondés sur les données acquises de la science, les ordonnances devaient permettre la rééducation de la déambulation du sujet âgé, né en 1914, soit l'application de la cotation AMK 6, aucun élément ne justifiant une rééducation des conséquences des affections orthopédiques et rhumatologiques.
Cet acte ne relevant pas de l'article premier du titre XIV de la NGAP, il n'autorise pas la facturation de l'indemnité forfaitaire prévue par la convention nationale des masseurs-kinésithérapeutes, mais ouvre droit au versement de l'indemnité forfaitaire de déplacement prévue par la NGAP.
En outre, la fréquence prescrite est de deux à trois fois par semaine ainsi que l'a affirmé le médecin prescripteur dans sa réponse.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté M. [S] de sa contestation d'indu dans le cas du patient no2.
Sur le patient no7 (Mme [U] [B])
Les 12 séances prescrites le 5 mai 2014 ont été facturées du 7 mai 2014 au 6 juin 2014. 5 séances supplémentaires ont été facturées entre le 9 et le 13 juin 2014, sans qu'elles ne soient davantage justifiées à hauteur d'appel autrement qu'en référence à l'ordonnance du 30 octobre 2013 qui a été rédigée sept mois plus tôt.
Concernant les séances effectuées du 16 décembre 2014 au 4 février 2015, celles-ci devaient bénéficier de la cotation relative à la rééducation de la marche pour le maintien de l'autonomie de la personne âgée AMK 6 + IFD compte-tenu des objectifs des séances considérées en regard de la feuille de suivi de rééducation fonctionnelle et de la fiche de rééducation fonctionnelle en EHPAD toutes deux complétées par M. [S]. Contrairement à ce que soutient ce dernier, les séances n'ont pas été supprimées mais la cotation retenue a été modifiée conformément à l'état du patient et des prescriptions médicales.
Enfin, la cotation AMK 8 a été acceptée par la caisse à compter du 5 février 2015 et M. [S] ne peut réclamer un cumul des cotations AMK 8 et AMS 9,5 ni une cotation AMS 9,5 + AMK 8/2, en l'absence de toute situation de poussée aiguë de bronchite caractérisée, l'appelant indiquant lui-même dans ses conclusions la manifestation de cette pathologie comme hypothétique.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté M. [S] de sa contestation d'indu dans le cas du patient no7.
Sur le patient no8 (M. [L] [A])
Les soins facturés pour ce patient ont été mis en rapport avec onze dates de prescription différentes, étant observé que seules 6 ordonnances différentes ont été jointes ou fournies a posteriori par M. [S], dont 3 non datées.
M. [S] estime que le remboursement des prestations par la caisse suppose nécessairement l'existence des ordonnances. Il considère que la preuve de l'absence de prescription incombe à la caisse.
La caisse ne conteste pas l'existence d'une prescription médicale déclarée par M. [S]. La cour ajoute que l'existence d'un service du contrôle médical est notamment justifiée en raison du système déclaratif à la base duquel sont effectués les remboursements aux professionnels de santé. Ce contrôle permet de détecter les anomalies.
Au total, au regard des prescriptions fournies, la caisse a accepté la facturation de 130 séances de rééducation cotées AMK 10 + IFN alors que par l'effet des réutilisations de prescriptions 256 séances ont été facturées par M. [S].
Ce dernier se borne à affirmer que 119 séances ont été retirées injustement et que « l'ensemble des ordonnances est produit aux débats pour justifier de l'ensemble des prescriptions ».
Toutefois seules quatre prescriptions médicales sont versées aux débats, dont une ordonnance non datée, une ordonnance du 19 février 2014, un duplicata d'une ordonnance du 19 mai 2014 et une ordonnance du docteur [H] du 3 octobre 2014 sur laquelle la mention « AR 1x » a manifestement été rajoutée et dont la caisse a relevé qu'elle avait été fournie avec des factures d'actes renseignés comme ayant été prescrits le 15 septembre 2014, puis le 4 novembre 2014 et le 30 décembre 2014.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté M. [S] de sa contestation d'indu dans le cas du patient no8.
Sur le patient no9 (Mme [L] [X])
Seules 6 ordonnances ont été jointes par M. [S] alors que celui-ci a renseigné 13 dates de prescription différentes.
Devant la cour, M. [S] se borne à affirmer avoir effectué « 310 séances » mais n'en justifie pas. Il a en revanche été relevé lors du contrôle que seules trois des six ordonnances étaient datées et que celles qui ne l'étaient pas ont été réutilisées à plusieurs reprises en modifiant la date de prescription.
De plus, d'après le témoignage de la patiente recueilli par le médecin conseil, celle-ci était suivie par M. [S] trois fois par semaine depuis quatre ans et les séances de kinésithérapie correspondaient à des séances de rééducation respiratoire relevant de la cotation AMK 8 + IFP / séance -ce que confirme une attestation du docteur [N] de sorte que M. [S] a facturé à tort les séances sous la cotation AMS 9,5 + AMK 8 + IFO.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté M. [S] de sa contestation d'indu dans le cas du patient no9.
Sur le patient no31 (Mme [GB] [K])
Devant la cour, M. [S] soutient que toutes les séances facturées étaient en rapport avec une prescription et que l'indu n'est pas fondé.
Or sur les cinq dates de prescription renseignées par M. [S], ce dernier n'a été en mesure de produire au service du contrôle médical que deux ordonnances, une ordonnance datée du 3 janvier 2014 et une ordonnance non datée.
La mention « AR x2 » a été rajoutée a posteriori sur l'ordonnance du 3 janvier 2014 par une autre main que celle du médecin prescripteur.
L'ordonnance non datée vise « 15 séances de rééducation des membres inférieurs et de la marche à domicile + kiné respiratoire si nécessaire. A renouveler 2x » et est identique à celle versée en annexe par M. [S] sur laquelle la date du « 27.11.13 » apparaît avoir été ajoutée.
M. [S] produit aussi une ordonnance supportant la date du « 2.6 14 » ; cette date a manifestement été ajoutée a posteriori et la mention du nombre de séances « 18 séances de réadaptation à la marche. A domicile » sur l'ordonnance apparaît manifestement surchargée.
Le docteur [N], médecin prescripteur, atteste avoir autorisé le praticien kinésithérapeute à mentionner un renouvellement sur certaines ordonnances (cf. attestation du docteur [N] du 11 mai 2016), sans préciser lesquelles, étant encore observé que la patiente a été vue à six reprises par le docteur [N] entre les mois de janvier et septembre 2014, sans interruption d'activité. Au regard de la fréquence des rendez-vous médicaux de cette patiente avec le docteur [N] et de l'attestation insuffisamment circonstanciée de ce dernier, mais encore d'un seul bilan diagnostic kinésithérapique réalisé au cours des 109 séances facturées, il n'y a pas lieu de retenir les renouvellements écrits de la main de M. [S].
Dans ces conditions, vu la seule ordonnance prescrivant 45 séances, utilisée à plusieurs reprises par M. [S] sur la période contrôlée, la caisse a pu retenir la cotation de 45 AMK 6 + IFD et rejeter la cotation AMS 9,5 + AMK 8 + IFO puisqu'il s'agissait de séances de rééducation des membres inférieurs et de la marche avec de la kinésithérapie respiratoire si nécessaire dans le cadre d'une affection chronique.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté M. [S] de sa contestation d'indu dans le cas du patient no31.
Sur le patient no33 (Mme [JV] [G])
Le médecin traitant de la patiente a indiqué dans un courrier adressé à la caisse que l'objectif des trois séances hebdomadaire consistait à faire marcher la patiente de 89 ans et à assurer le maintien à domicile du sujet âgé.
Selon l'article 9 du chapitre II du titre XIV de la NGAP, la rééducation de la déambulation dans le cadre du maintien de l'autonomie de la personne âgée (séance d'une durée de l'ordre de vingt minutes) se cote AMK 6.
Du 2 au 21 mars 2015, la caisse a accepté la facturation d'une rééducation respiratoire AMK 8 en association avec l'AMK 6 de rééducation à la marche en raison d'une surinfection bronchique aiguë qui cependant doit respecter les termes de l'article 11 de la NGAP selon lequel, d'une part, l'acte au coefficient le plus important est seul inscrit avec son coefficient propre et, d'autre part, l'autre acte est noté à 50 % de son coefficient.
En ce cas, il devait être fait application de la cotation AMK 8 + AMK 6/2 ainsi qu'en a décidé le tribunal.
M. [S] n'apportant pas d'éléments qui contredisent les observations de la caisse, le jugement sera donc confirmé en ce qu'il l'a débouté de sa contestation d'indu dans le cas du patient no33.
Sur le patient no36 (M. [SI] [WC])
En l'absence d'épisode aigu nécessitant un désencombrement urgent chez ce patient âgé de 83 ans atteint d'hémiplégie et de bronchite chronique, la cotation relative à la rééducation à l'hémiplégie AMK 9 + IFN trouve à s'appliquer conformément à l'article 4, chapitre 2, titre XIV de la NGAP.
En l'absence de précision de fréquence de soins en matière de kinésithérapie respiratoire portée sur la prescription du 15 septembre 2014 ("30 séances de rééducation fonctionnelle des membres inférieurs plus kiné respiratoire si besoin à domicile"), la caisse a accepté la prise en charge des 56 séances facturées en AMK 9 dont 10 séances avec la cotation supplémentaire AMK 8/2 + IFN et une séance avec AMK 8.
M. [S] estime que « l'ordonnance » -sans qu'il ne précise laquelle- est mal rédigée. Si le docteur [M], qui n'est pas le docteur [I] à l'origine des prescriptions versées aux débats, certifie que le patient nécessite des soins de kinésithérapie en continu, cette attestation a été rédigée en mai 2016 et ne vise pas le besoin de rééducation neurologique et respiratoire en continu au titre de la période concernée par la répétition de l'indu.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté M. [S] de sa contestation d'indu dans le cas du patient no36.
Sur le patient no50 (Mme [HY] [Y])
Aucune des prescriptions versées aux débats tant par la caisse, laquelle a rendu illisible le nom du patient, que par M. [S], sur lesquelles aucune date n'est précisée ni même ajoutée à la main contrairement à d'autres prescriptions dont il entend se prévaloir, ne concerne de manière certaine la patiente no50 au titre de l'année 2014.
Pour l'année 2015, le médecin de la patiente a prescrit 30 séances de kinésithérapie à domicile pour rééducation des Mlf et messages antalgiques du rachis à compter du 13 janvier 2015.
Trente séances de kinésithérapie à domicile ont à nouveau été prescrites le 6 mars 2015 (massages antalgiques et décontracturants de l'épaule et du bras droits) avec renouvellement une fois.
La cotation a retenir conformément à l'article premier, chapitre 2, titre XIV de la NGAP, est AMS 7,5 + IFD (rééducation d'un membre et de sa racine des conséquences des affections orthopédiques et rhumatologiques / actes affectés de la lettre clé AMS).
Si M. [S] estime que seule la différence entre la cotation appliquée et la cotation applicable doit être remboursée à la caisse, l'appelant ne justifie pas que les séances invalidées par la caisse ont toutes été prescrites, celui-ci ne versant aux débats que les deux prescriptions médicales des 13 janvier 2015 et 6 mars 2015.
Quant à la double facturation qui lui est reprochée par la caisse, M. [S] se borne à faire valoir que la caisse n'apporte aucune preuve de la volonté délibérée d'utiliser deux fois, par son associé et lui-même, la même ordonnance sans pour autant contester le fait.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté M. [S] de sa contestation d'indu dans le cas du patient no50.
Sur le patient no52 (Mme [CH] [LS])
Sur la base des deux prescriptions des 23 avril 2014 et 19 juillet 2014 valables chacune pour 20 séances, M. [S] a facturé 50 séances cotées AMS 9,5 + IFO au lieu de 40.
Il reproche à la CPAM de ne pas tenir compte de son libre choix du nombre de séances.
Les dispositions liminaires du titre XIV de la NGAP prévoient cependant expressément que par dérogation à l'article 5 des dispositions générales, les actes du titre XIV peuvent être pris en charge ou remboursés par les caisses d'assurance maladie, lorsqu'ils sont personnellement effectués par un masseur-kinésithérapeute, sous réserve qu'ils aient fait l'objet d'une prescription écrite du médecin mentionnant l'indication médicale de l'intervention du masseur-kinésithérapeute ;
le médecin peut, s'il le souhaite, préciser sa prescription, qui s'impose alors au masseur-kinésithérapeute.
Les dix séances ayant été facturées en sus des deux prescriptions, c'est à bon droit que la CPAM du Bas-Rhin a refusé la prise en charge de ces dix séances non prescrites, la preuve de la concordance des éléments déclarés par M. [S] incombant à celui-ci.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté M. [S] de sa contestation d'indu dans le cas du patient no52.
Sur le patient no53 (Mme [UF] [PL] [T])
Lors de l'entretien du 20 juin 2016, M. [S] n'a pas contesté les cotations retenues par le médecin conseil de la caisse.
Il tente vainement de remettre en cause les cotations retenues par la caisse et validées par le tribunal. Ce dernier a justement considéré qu'au regard des mentions de la prescription médicale du 12 décembre 2014, la rééducation à la marche et à l'équilibre après hospitalisation conduit à retenir une cotation AMK 8 au lieu de AMS 9,5 + IFO.
Les prescriptions du 14 mars 2014 ne sont pas versées aux débats, mais le médecin traitant a précisé que l'objectif thérapeutique était le maintien de l'autonomie de la patiente âgée de 90 ans, séances qui devaient être facturées sous la cotation AMK 6 + IFD conformément à l'article 9, chapitre 2, titre XIV de la NGAP. En cas de rééducation respiratoire associée, la cotation à retenir est AMK 8 + AMK 6/2 + IFP (prescriptions du 14 mars 2014 et du 9 janvier 2015). L'appelant ne justifie pas d'une rééducation pour ce patient au coefficient 9,5.
Concernant la prescription du 9 février 2015, des séances de kinésithérapie ont été délivrées au titre de la rééducation fonctionnelle et de la kinésithérapie respiratoire, actes cotés AMK 8 + AMK 6/2 + IFO. En dehors de la kinésithérapie respiratoire, les séances devaient être facturées sous la cotation AMK 6 + IFD.
M. [S] ne conteste pas l'application d'un seul déplacement par jour pour ce patient étant encore observé que le cumul des facturations IFP et IFO est interdit.
M. [S] n'apportant pas d'éléments qui contredisent les observations du médecin conseil de la caisse dans le cadre du contrôle, le jugement sera donc confirmé en ce qu'il l'a débouté de sa contestation d'indu dans le cas du patient no53.
Sur le patient no55 (M. [XS] [F])
M. [S] a produit des ordonnances non datées pour les séances facturées au titre de la période contrôlée, dont certaines ont été surchargées (renouvellement).
La caisse a validé 191 séances en prenant en compte chaque ordonnance une seule fois. L'appelant ne produit pas l'ensemble des ordonnances visées dans ses déclarations ni l'attestation du médecin traitant à laquelle il fait allusion et aucune explication n'est fournie sur le remploi des ordonnances ainsi que l'ont constaté les premiers juges.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté M. [S] de sa contestation d'indu dans le cas du patient no55.
Sur le patient no63 (M. [AP] [Z])
Les différentes prescriptions médicales versées aux débats précisent que les séances de kinésithérapie ont pour objectif la rééducation à la marche dont la cotation applicable à ce type d'acte est AMK 6 + IFD lorsque la séance est effectuée à domicile.
M. [S] fait valoir qu'un kinésithérapeute doit rééduquer le patient dans son ensemble de sorte qu'un travail global des quatre membres et du tronc doit être réalisé lorsque la maladie d'Alzheimer, comme tel est le cas de ce patient, est à l'origine de la perte de la marche.
Cette affection neurologique n'entre cependant pas dans le champ de l'article 4, chapitre 2, titre XIV de la NGAP et M. [S] n'était pas autorisé à retenir une autre cotation que celle prévue pour la rééducation de la déambulation du sujet âgé.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté M. [S] de sa contestation d'indu dans le cas du patient no63.
* * *
Il résulte de l'ensemble des développements qui précèdent que la demande de répétition d'indu de la caisse est en son principe fondée.
Il y a lieu d'observer que l'indu, réclamé et notifié par la CPAM du Bas-Rhin le 14 décembre 2016 à hauteur de la somme de 35.142,51 euros, a été finalement arrêté par la caisse à la somme de 35.180,90 euros selon son tableau récapitulatif rectifié en annexe no4, établi après prise en compte des observations de M. [S].
Tel était le montant réclamé par la caisse à M. [S] dans ses conclusions développées devant les premiers juges.
Le jugement sera donc infirmé quant au montant de l'indu et M. [S] sera condamné à verser à la CPAM du Bas-Rhin la somme de 35.180,90 euros.
Les dispositions du jugement déféré sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile seront confirmées.
M. [S] supportera les dépens de l'instance d'appel et sera condamné à régler à la CPAM du Bas-Rhin la somme de 1.000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel, sa propre demande de ce chef étant rejetée.
PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe, après en avoir délibéré conformément à la Loi,
DECLARE l'appel recevable ;
CONFIRME le jugement déféré du 17 avril 2019 du tribunal de grande instance de Strasbourg sauf en ce qu'il a validé le redressement opéré par la caisse primaire d'assurance maladie du Bas-Rhin pour la somme de 34.711,31 euros et condamné M. [V] [S] à payer ce montant à la caisse primaire d'assurance maladie du Bas-Rhin ;
VALIDE le redressement opéré par la caisse primaire d'assurance maladie du Bas-Rhin portant sur les anomalies de facturation des actes médicaux pour des soins remboursés au cours de la période allant du 7 avril 2014 au 31 décembre 2015 à la somme de 35.180,90 euros ;
CONDAMNE M. [V] [S] à payer à la caisse primaire d'assurance maladie du Bas-Rhin la somme de 35.180,90 euros (trente cinq mille cent quatre vingts euros et quatre vingt dix centimes) ;
Ajoutant au jugement,
CONDAMNE M. [V] [S] aux dépens d'appel ;
CONDAMNE M. [V] [S] à régler à la caisse primaire d'assurance maladie du Bas-Rhin la somme de 1.000 euros (mille euros) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et REJETTE sa propre demande présentée à ce titre.
Le Greffier,Le Président,