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02/06/2022 | FRANCE | N°18/041031

France | France, Cour d'appel de colmar, 4s, 02 juin 2022, 18/041031


MINUTE No 22/501

NOTIFICATION :

Copie aux parties

Clause exécutoire aux :

- avocats
- parties non représentées

Le

Le Greffier
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR
CHAMBRE SOCIALE - SECTION SB

ARRET DU 02 Juin 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : 4 SB No RG 18/04103 - No Portalis DBVW-V-B7C-G3TL

Décision déférée à la Cour : 05 Septembre 2018 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale du BAS-RHIN

APPELANTE :

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE

MALADIE DU BAS-RHIN
Service contentieux
[Adresse 1]
[Localité 3]

Comparante en la personne de Mme [X] [F], munie d'un pouvoir

INTIMÉE :

S.A.S...

MINUTE No 22/501

NOTIFICATION :

Copie aux parties

Clause exécutoire aux :

- avocats
- parties non représentées

Le

Le Greffier
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR
CHAMBRE SOCIALE - SECTION SB

ARRET DU 02 Juin 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : 4 SB No RG 18/04103 - No Portalis DBVW-V-B7C-G3TL

Décision déférée à la Cour : 05 Septembre 2018 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale du BAS-RHIN

APPELANTE :

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU BAS-RHIN
Service contentieux
[Adresse 1]
[Localité 3]

Comparante en la personne de Mme [X] [F], munie d'un pouvoir

INTIMÉE :

S.A.S. BONGARD
[Adresse 2]
[Localité 4]

Représentée par Me Laurent SAUTEREL, avocat au barreau de LYON, Dispensée de comparution

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 10 Mars 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :
Mme FERMAUT, Magistrat honoraire, faisant fonction de Président de chambre,
Mme ARNOUX, Conseiller
Mme HERY, Conseiller
qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme WALLAERT, Greffier

ARRET :
- contradictoire
- prononcé par mise à disposition au greffe par Mme FERMAUT, Magistrat honoraire, faisant fonction de Président de chambre,
- signé par Mme FERMAUT, Magistrat honoraire, faisant fonction de Président de chambre, et Mme WALLAERT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Le 26 juillet 2016, M. [K] [G], retraité, anciennement employé - technicien de fabrication de la SAS Bongard, a établi une déclaration de maladie professionnelle, exposant souffrir d'un « mésothéliome pleural malin » sur la foi d'un certificat médical initial établi le 5 septembre 2016 par le docteur [W].

Ce certificat faisait ressortir une exposition à l'amiante de 1959 à 1993 et se référait au tableau no30D des maladies professionnelles.

Après enquête et avis favorable du colloque médico-administratif, la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Bas-Rhin a notifié à la SAS Bongard sa décision de prendre en charge la maladie ainsi déclarée au titre du risque professionnel.

La SAS Bongard a alors saisi la commission de recours amiable qui, le 18 juillet 2017, a confirmé la décision des services administratifs, puis elle a saisi d'un recours le tribunal des affaires de sécurité sociale du Bas-Rhin, lequel par jugement du 5 septembre 2018, a déclaré le recours de la société bien fondé et a ordonné l'inscription des prestations afférentes à la maladie professionnelle de M. [G] au compte spécial.

Par lettre recommandée adressée le 25 septembre 2018 au greffe de la cour, la caisse primaire d'assurance maladie du Bas-Rhin a interjeté appel du jugement.

L'affaire a été appelée à l'audience du 18 mars 2021.
La caisse ayant alors fait connaître à la cour que la CNITAAT, par arrêt du 23 février 2021, avait rejeté le recours de la société Bongard et maintenu l'inscription au compte de l'employeur des conséquences financières de la maladie professionnelle de M. [G], la cour a, par arrêt du 29 juillet 2021, ordonné la réouverture des débats, enjoint aux parties de communiquer l'arrêt de la CNITAAT et de justifier le cas échéant de son caractère définitif ainsi que de conclure selon le calendrier qu'elle a établi.

Vu les conclusions visées le 30 août 2021, reprises oralement à l'audience du 10 mars 2022, aux termes desquelles la CPAM du Bas-Rhin demande à la cour de :

- lui décerner acte de ce qu'elle a fait une exacte application des textes en vigueur,
- constater que la maladie professionnelle déclarée par M. [G] ne figurait pas au tableau no30 lors de sa précédente exposition au risque, de 1959 à 1961,
- constater que M. [G] était employé par la SAS Bongard lors du point de départ du délai de prise en charge, soit en 1976,
- constater que par arrêt du 13 février 2020, la CNITAAT a débouté la SAS Bongard de son recours visant à l'inscription au compte spécial des conséquences financières de la maladie professionnelle du 5 septembre 2016 de M. [G],

- en conséquence déclarer la décision de prise en charge, au titre du risque professionnel, de la maladie et du décès le 10 avril 2017 de M. [G] pleinement opposable à la société Bongard,
- infirmer purement et simplement le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale du 5 septembre 2018 ;

Vu les conclusions visées le 23 février 2022, dont la SAS Bongard, dispensée sur sa demande de comparaître à l'audience, sollicite le bénéfice, demandant à la cour de :

- à titre principal, vu l'article D242-6-7 du code de la sécurité sociale, confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 5 septembre 2018 ;
- à titre subsidiaire, vu l'article L461-1 du code de la sécurité sociale, lui dire inopposable la décision de prise en charge de la maladie du 5 septembre 2016 de M. [G], au motif d'une part que la caisse ne rapporte pas la preuve de l'exposition au risque du tableau concerné, d'autre part que le délai de prise en charge était manifestement dépassé au jour de la constatation médicale et que la caisse n'a pas saisi le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles ;

Vu le dossier de la procédure, les pièces versées aux débats et les conclusions des parties auxquelles il est référé, en application de l'article 455 du code de procédure civile, pour l'exposé de leurs moyens et prétentions ;

MOTIFS

Interjeté dans les forme et délai légaux, l'appel est recevable.

Sur la demande d'inscription au compte spécial

L'article D242-6-7 du code de la sécurité sociale dispose que les maladies professionnelles constatées ou contractées dans des conditions fixées par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale et du ministre chargé du budget ne sont pas imputées au compte de l'employeur mais inscrites à un compte spécial.

Selon l'article 2 de l'arrêté du 16 octobre 1995, pris pour l'application de l'article D242-6-7 précité, sont inscrites au compte spécial les dépenses afférentes à des maladies professionnelles constatées ou contractées dans les conditions suivantes :
« 4o La victime de la maladie professionnelle a été exposée au risque successivement dans plusieurs établissements d'entreprises différentes sans qu'il soit possible de déterminer celle dans laquelle l'exposition au risque a provoqué la maladie ».

M. [K] [G] a déclaré le 26 juillet 2016 souffrir d'un « mésothéliome pleural malin », maladie inscrite au tableau no30 (30D) des maladies professionnelles « affections professionnelles consécutives à l'inhalation des poussières d'amiante » depuis le décret no 76-34 du 5 janvier 1976, maladie qui a été prise en charge au titre du risque professionnel à compter du 5 septembre 2016.

Considérant que dans le cadre de l'enquête administrative de la CPAM, M. [G] a indiqué avoir été exposé à l'amiante en tant qu'ouvrier monteur en chauffage central employé par la société SOGECA de 1959 à 1961, avant son embauche en 1961 par la société Bongard, et qu'il n'était pas établi que la CARSAT avait notifié le taux de cotisation à l'employeur, les premiers juges ont ordonné l'inscription des prestations afférentes à la maladie professionnelle de M. [G] au compte spécial.

Or il est constant que par arrêt du 13 février 2020, la CNITAAT (cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail) a déclaré recevable mais mal fondé le recours formé par la société Bongard contre la décision de la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail (CARSAT) d'Alsace-Moselle, ayant imputé sur ses comptes employeur de 2016 et 2017 les frais relatifs à la maladie professionnelle de M. [K] [G] du 5 septembre 2016, au titre de l'assurance des accidents du travail et des maladies professionnelles, et a débouté la société Bongard de toutes ses demandes.

Cet arrêt n'a pas été frappé de pourvoi.

Il s'impose donc d'infirmer le jugement déféré et de constater que la demande initiée par la société Bongard devant le tribunal des affaires de sécurité sociale du Bas-Rhin est devenue sans objet.

Sur la demande d'inopposabilité de la décision de la CPAM de prise en charge de la maladie

En vertu de l'article L461-1 du code de la sécurité sociale, est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau.

Pour être reconnue comme maladie professionnelle, la pathologie doit donc :
- être inscrite dans un tableau,
- être constatée à l'intérieur d'un délai de prise en charge,
- correspondre à l'exécution de travaux identifiés comme susceptibles de provoquer l'affection en cause.

En cas de contestation par l'employeur de la décision de prise en charge d'une affection au titre d'un tableau de maladies professionnelles, il incombe à l'organisme social de rapporter la preuve de la réunion des conditions exigées par le tableau à peine d'inopposabilité de sa décision.

Pour voir reconnaître à titre subsidiaire que la décision de la caisse de prendre en charge la maladie au titre du risque professionnel, la société Bongard soutient qu'il n'est pas établi que la pathologie a été diagnostiquée moins de 40 ans après la fin de l'exposition au risque.

Le tableau 30D fixe à 40 ans le délai de prise en charge de la maladie désignée « mésothéliome malin primitif de la plèvre, du péritoine, du péricarde ».

Or il ressort de l'enquête administrative menée tant auprès de la société Bongard -M. [S], directeur des ressources humaines- que du salarié, que M. [G], retraité le 1er novembre 1995, a été employé par la société Bongard de 1961 à 1993 et y a occupé successivement les postes de technicien de fabrication (poste comportant des travaux de soudure, de montage et d'assemblage de fours avec tâches de découpage, poinçonnage et cisaillage de plaques amiantées) et d'adjoint méthodes/outillage (avec présence constante dans l'atelier) au cours de la période 1961-1985, puis de 1985 à 1993, le poste de responsable de magasin (avec selon les besoins des ateliers de montage, la découpe de tresses amiantées).

M. [G] a donc exécuté des travaux de fabrication à base de produits contenant de l'amiante pendant sa carrière professionnelle chez la société Bongard et été exposé au risque visé par le tableau 30D jusqu'en 1993.

La date de la première constatation médicale de la maladie déclarée le 26 juillet 2016, sur la foi d'un certificat médical du 5 septembre 2016, a été fixée par le médecin conseil près la caisse au 3 février 2016, date correspondant à la réalisation d'un examen « Angio IRM thx 03/02/16 ».

A la date de la première constatation médicale, en février 2016, le délai de prise en charge maximal depuis la fin de l'exposition au risque en 1993 était ainsi pleinement respecté.

Il s'ensuit donc que le moyen soulevé par la société Bongard n'est pas sérieux, et que la décision de prise en charge de la maladie doit être déclarée opposable à la société Bongard.

Partie perdante, la société Bongard sera condamnée aux dépens exposés postérieurement au 31 décembre 2018.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire, en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la Loi,

Vu l'arrêt de la cour du 29 juillet 2021,

INFIRME le jugement entrepris ;

CONSTATE que la demande initiée par la société Bongard tendant à l'inscription au compte spécial des prestations afférentes à la maladie du 5 septembre 2016 de M. [K] [G] est devenue sans objet ;

DÉCLARE la décision de la caisse primaire d'assurance maladie du Bas-Rhin de prendre en charge au titre du risque professionnel la maladie du 5 septembre 2016 et le décès de M. [K] [G] opposable à la SAS Bongard ;

CONDAMNE la SAS Bongard aux dépens exposés postérieurement au 31 décembre 2018.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de colmar
Formation : 4s
Numéro d'arrêt : 18/041031
Date de la décision : 02/06/2022
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.colmar;arret;2022-06-02;18.041031 ?
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