MINUTE N° 22/479
NOTIFICATION :
Pôle emploi Alsace ( )
Clause exécutoire aux :
- avocats
- délégués syndicaux
- parties non représentées
Le
Le Greffier
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE COLMAR
CHAMBRE SOCIALE - SECTION A
ARRET DU 31 Mai 2022
Numéro d'inscription au répertoire général : 4 A N° RG 21/01434
N° Portalis DBVW-V-B7F-HQ6F
Décision déférée à la Cour : 08 Février 2021 par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE SCHILTIGHEIM
APPELANTE :
Madame [K] [B] épouse [T]
8 rue du Charme
67300 SCHILTIGHEIM
Représentée par Me David FRANCK, avocat au barreau de STRASBOURG
INTIMEE :
S.A.S. SCHILDIS EXPLOITANT SOUS L'ENSEIGNE E.LECLERC
prise en la personne de son représentant légal
90 ROUTE DU GENERAL DE GAULLE
6700 SCHILTIGHEIM
Représentée par Me Sébastien BENDER, avocat au barreau de STRASBOURG
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 08 Mars 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :
Mme DORSCH, Président de Chambre
M. EL IDRISSI, Conseiller
Mme ARNOUX, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Mme THOMAS
ARRET :
- contradictoire
- prononcé par mise à disposition au greffe par Mme DORSCH, Président de Chambre,
- signé par Mme DORSCH, Président de Chambre et Mme THOMAS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCEDURE
Mme [K] [T] née le 26 mai 1954 a été initialement engagée par la COOP d'Alsace le 15 février 1988 en qualité d'hôtesse de caisse. Le contrat de travail a été transféré à la société Schildis exploitant sous l'enseigne E.Leclerc Schiltigheim.
Suivant avenant en date du 18 février 2017, sa rémunération a été fixée à la somme de 1.454,08€ bruts pour un horaire mensuel de 113,75 heures incluant le temps de pause.
La convention collective applicable est celle du commerce de gros et de détails à prédominance alimentaire.
Elle a fait l'objet d'avertissements les 07 juin 2017, 20 novembre 2018 pour retards répétés et 26 mars 2019 pour avoir quitté son poste de travail sans autorisation et avoir commis une erreur de caisse.
Le 17 juin 2019, la médecine du travail a rendu un avis d'inaptitude mentionnant que l'état de santé fait obstacle à tout redressement dans l'entreprise.
Le 19 juin 2019, Mme [K] [T] a été convoquée à un entretien préalable à licenciement fixé au 1er juillet 2019, puis licenciée pour inaptitude d'origine non professionnelle le 08 juillet 2019.
Mme [K] [T] a saisi le conseil de prud'hommes de Strasbourg le 04 juillet 2019, aux fins de résiliation judiciaire de son contrat pour dégradations de ses conditions de travail.
Ce dernier se déclarant territorialement incompétent a transmis le dossier au conseil de prud'hommes de Schiltigheim, qui a rendu un jugement le 08 février 2021 :
-disant que le licenciement pour inaptitude est fondé,
-déboutant Mme [K] [T] de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail,
-déboutant Mme [K] [T] de sa demande d'annulation des avertissements des 20 novembre 2018 et 26 mars 2019,
-condamnant la société Schildis à lui payer :
*1.000€ à titre de dommages et intérêts au titre du non-respect de l'obligation de formation professionnelle,
*1.000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers frais et dépens,
-déboutant Mme [K] [T] de sa demande relative à l'indemnité compensatrice de préavis, de l'indemnité de licenciement, de dommages et intérêts quant à la perte de son emploi, dommages et intérêts au titre du préjudice moral par suite du retard de l'employeur pour procédure aux déclarations auprès de la prévoyance, dommages et intérêts au titre du préjudice moral par suite de la notification des avertissements injustifiés, de sa demande relative à la délivrance des documents de fin de contrat,
Mme [K] [T] a interjeté appel le 13 avril 2021.
Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 30 octobre 2021, Mme [K] [T] demande de :
-constater, dire et juger que l'appel est recevable et bien fondé,
-confirmer le jugement condamnant la société Schildis à lui payer 1.000€ à titre de dommages et intérêts au titre du non-respect de l'obligation de formation professionnelle, la somme de 1.000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers frais et dépens
-infirmer le jugement pour le surplus,
-constater les manquements graves commis par la société Schildis,
-annuler les avertissements des 20 novembre 2018 et 26 mars 2019,
-prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur emportant les conséquences d'un licenciement nul, subsidiairement dénué de toute cause réelle et sérieuse,
-condamner la société Schildis à lui verser les sommes suivantes :
*5.000€ à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral professionnel subi ainsi qu'au titre du non-respect de l'obligation de sécurité de résultat et de la discrimination subie,
*500€ à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice moral subi par suite des avertissements injustifiés,
*2.000€ à titre de dommages et intérêts au titre du non-respect de l'obligation de formation professionnelle,
*2.908,16€ au titre de l'indemnité compensatrice de préavis outre 290,81€ au titre des congés payés afférents,
*13.527,79€ au titre de l'indemnité de licenciement portant intérêts de retard à compter de la demande introductive d'instance,
*35.000€ à titre de dommages et intérêts au titre de la perte d'emploi,
*500€ à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice moral subi par suite du retard de l'employeur pour procédure aux déclarations auprès de la prévoyance,
-réserver la possibilité pour Mme [K] [T] de chiffrer ses demandes concernant le maintien de salaire pendant sa période d'arrêt maladie à titre de dommages et intérêts,
sur l'appel incident
-constater que la société Schildis n'a pas respecté son obligation de formation professionnelle, la déclarer mal fondée et la débouter,
en tout état de cause
-condamner la société Schildis à lui verser la somme de 4.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers frais et dépens.
Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 02 août 2021, la société Schildis demande de :
-confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Mme [K] [T] de sa demande de résiliation judiciaire et de contestation de son licenciement,
-infirmer le jugement en ce qu'il a retenu l'existence d'une faute de la société Schildis au titre de l'obligation de formation,
-débouter Mme [K] [T] de toutes ses fins et demandes,
-condamner Mme [K] [T] au paiement de 1.500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers frais et dépens.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 22 février 2022.
Pour l'exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux dernières conclusions précédemment visées en application de l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS
Sur les avertissements
Selon les dispositions de l'article L1331-1 du code du travail « constitue une sanction toute mesure, autre que les observations verbales, prise par l'employeur à la suite d'un agissement du salarié considéré par l'employeur comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence de l'employé dans l'entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération ».
Aux termes de l'article L1332-4 du code du travail, « aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu à l'exercice de poursuite pénales ».
L'avertissement implique un énoncé d'un ou plusieurs manquements bien identifiés afin que le salarié puisse rectifier la situation.
Si la sanction apparaît irrégulière en la forme, injustifiée ou disproportionnée, elle peut être annulée.
En l'espèce, Mme [K] [T] sollicite l'annulation des avertissements des 20 novembre 2018 et 26 mars 2019.
Sur l'avertissement du 20 novembre 2018
Préalablement, il sera observé qu'il est constant que Mme [K] [T] n'a pas immédiatement contesté les griefs, cependant ce silence ne vaut pas acquiescement.
A ce titre, l'employeur reproche à la salariée des retards répétés entre le 15 octobre 2018 et le 07 novembre 2018 à savoir :
« -jeudi 25 octobre 2018, vous deviez commencer à 8h00 mais vous avez pointé à 8h04
-mercredi 31 octobre 2018,vous deviez commencer à 8h00 mais vous avez pointé à 8h52
-vendredi 2 novembre 2018,vous deviez commencer à 15h45 mais vous avez pointé à 15h49
-mercredi 7 novembre 2018,vous deviez commencer à 8h00 mais vous avez pointé à 8h02
De plus le mardi 6 novembre 2018 à 11h30, vous avez ramené un café sur votre poste de travail. Nous vous rappelons, malgré les remarques de votre supérieur hiérarchique, que toute nourriture ou boisson sont interdites sur le lieu de travail comme stipulé dans le règlement intérieur à l'article 4.3.2 »
Concernant les horaires, l'employeur disposant d'un logiciel de gestion individuel des heures produit les bilans correspondant aux périodes susvisées. Ceux-ci comportent des mentions manuscrites afférentes aux manquements relevés.
Il sera observé qu'en date du 17 septembre 2018, Mme [K] [T] avait été déclarée apte à la reprise du temps de travail à temps partiel à raison de 14h par semaine avec aménagement des horaires permettant la poursuite des soins avec des horaires réguliers du matin et/ou de l'après-midi hors heure de repas.
Devant reprendre son activité à partir du 15 octobre 2018, elle avait réclamé ses horaires de travail par mail en date du 02 octobre 2018 ; mais aucun planning ne lui a été fourni. Or, selon l'avenant du 18 février 2017, la programmation de la durée et l'horaire de travail est établi chaque année pour les 6 prochaines semaines à venir en tenant compte des impératifs du service à rendre et chaque fois que ce sera possible des aspirations des salariés. La durée de travail effective était fixée sur l'année de telle manière que Mme [K] [T] puisse effectuer une moyenne de 26,25 heures de travail par semaine pauses comprises.
Ainsi, l'employeur ne produit aucun planning détaillé mettant en exergue les heures de début et de fin de travail de Mme [K] [T] conformément aux préconisations de la médecine du travail, il n'est donc pas possible de déterminer avec exactitude les horaires de travail de cette dernière.
Tout comme il n'est pas démontré que les retards invoqués de 2 à 4 minutes pour trois d'entre-eux ont occasionné de graves perturbations au sein de la société justifiant une telle sanction.
Quant au fait du 06 novembre 2018, d'une part le règlement intérieur dont se prévaut l'employeur, n'est pas produit ne permettant pas à la cour de vérifier l'interdiction susvisée et d'autre part ce manquement n'est ni consigné, ni attesté par le supérieur hiérarchique.
Il s'ensuit que les manquements reprochés à Mme [K] [T] ne sont pas caractérisés. Il y a donc lieu d'annuler cette sanction. Le jugement entrepris sera donc infirmé sur ce point.
Sur l'avertissement du 26 mars 2019
L'employeur reproche à la salariée d'avoir le 18 février 2019 : « sans autorisation quitter votre poste de travail à 18h25 au lieu de 19 heures. Lorsque votre chef vous a fait la remarque, vous vous êtes même permise de lui répondre je gère mon temps. Une telle attitude n'est plus acceptable. A cela, nous avons constaté que le vendredi 1er mars 2019 à 11h50 vous avez fait une erreur dans le rendu de la monnaie à un client pour une somme de dix euros. »
Mme [K] [T] a contesté cet avertissement le 04 avril 2019 soutenant avoir quitté son poste de travail à 19 h et précisant qu'elles étaient deux à travailler sur le fond de caisse le 1er mars 2019.
En premier lieu, l'employeur reproche à Mme [K] [T] d'avoir quitté son poste de travail avant la fin de son service et d'avoir répondu à son supérieur qui le lui faisait remarquer. Pour autant, il ne produit aucun élément corroborant ses dires.
En second lieu, il est fait grief à Mme [K] [T] d'avoir commis une erreur de caisse d'un montant de 10 euros. A ce titre, il est produit les duplicatas des tickets de caisse tant par l'employeur que la salariée.
Toutefois, considérant que deux personnes étaient présentes sur ce fond de caisse et au regard du montant, de l'ancienneté de Mme [K] [T], qui n'a jamais fait l'objet de rappel ou de sanction sur ce point, cette sanction est disproportionnée. Par suite, Mme [K] [T] est fondée à invoquer la nullité de cet avertissement. En conséquence, le jugement entrepris sera infirmé sur ce point.
Quant aux dommages et intérêts sollicités à ce titre, le préjudice subi par Mme [K] [T] du fait de ces deux avertissements injustifiés peut être évalué à 500€. Le jugement sera donc infirmé en ce sens.
Sur le harcèlement
L'article L1152-1 du code du travail dispose qu'aucun salarié ne doit subir les agissements répétés du harcèlement qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de se conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
En vertu de l'article L1154-1 du code du travail, dans sa rédaction résultant de la loi n°2016-1088 du 8 août 2016 entrée en vigueur le 10 août 2016, lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L1152-1 à L1152-3 et L1153-1 à L1153-4, le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement et, au vu de ces éléments, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Il résulte de ces dispositions que, pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il faut examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si ces éléments de faits, pris dans leur ensemble laissent supposer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L1152-1 du code du travail.
En l'espèce, Mme [K] [T] soutient avoir été « la cible de sanctions disciplinaires dont les faits sont inexacts, fallacieux, voire disproportionnés » destinées à faire pression pour qu'elle quitte l'entreprise. Ces agissements ont eu une conséquence sur son état de santé et l'employeur n'a pris aucune mesure de prévention pour faire cesser cette situation de souffrance.
A l'appui de ses prétentions, elle produit une attestation d'une ancienne salariée adjointe chef de caisse absente de l'entreprise depuis 2017 auprès de laquelle Mme [K] [T] s'est confiée et qui fait état de conditions de travail dégradées depuis l'arrivée de M.[S] dont « le souci principal était de réduire la masse salariale » selon ses termes.
Sans conteste deux avertissements ont été annulés dans le cadre de la présente procédure, il n'en demeure pas moins que dans le cadre de son pouvoir de direction Mme [K] [T] avait déjà fait l'objet de sanctions et que les avertissements susvisés ont été sans conséquence sur son état de santé ; d'ailleurs aucun élément médical n'est produit hormis l'avis d'inaptitude.
Ces éléments pris dans leur ensemble ne font dès lors pas supposer une situation de harcèlement au préjudice de Mme [K] [T].
Il s'ensuit que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a dit et jugé que les faits de harcèlement moral ne sont pas caractérisés et rejeté la demande de dommages et intérêts présentée à ce titre.
Mme [K] [T] ayant notamment sollicité des dommages et intérêts au titre du non respect de l'obligation de sécurité de résultat et de la discrimination subie. Il convient d'examiner les demandes présentées sur ces deux fondements.
S'agissant du non respect de l'obligation de sécurité et de résultat, conformément aux dispositions des articles L4121-1 et L4121-2, l'employeur est tenu à l'égard de ses salariés, d'une obligation de sécurité dont il lui appartient d'assurer l'effectivité.
A cet égard, Mme [K] [T] affirme avoir rappelé à son employeur que les conditions de travail portaient atteinte à son intégrité physique et que ce dernier n'ayant pris aucune mesure de prévention n'a pas fait cessé cette situation. Pour en justifier, elle produit le mail adressé le 02 octobre 2018 à l'employeur ayant pour objet « reprise après visite médicale » aux termes duquel elle rappelle son statut d'invalidité 1ère catégorie, ses conditions de reprise et demande d'horaires de travail (pièce n°3).
Effectivement ce mail intitulé « reprise après visite médicale du 17.09.2018-demande d'horaire » fait état de son statut d'invalidité 1ère catégorie.
Mais, pour autant ce seul élément ainsi que l'avis d'inaptitude en date du 17 juin 2019 ne permettent pas d'établir que la société Schildis a failli dans son obligation de sécurité au regard de conditions de travail qualifiées de « délétères » par Mme [K] [T].
S'agissant de la discrimination, Mme [K] [T] n'explique pas, de quelle manière la discrimination se serait manifestée à son encontre et elle n'établit pas avoir été victime de mesure discriminatoire. En effet, elle n'apporte aucun élément laissant supposer une éventuelle discrimination en raison de son statut.
Ce qui implique le rejet des demandes présentées sur ces fondements et la confirmation du jugement entrepris à ce titre.
Sur l'absence de formation professionnelle
Il ressort des dispositions de l'article L6111-1 du code du travail que la « formation professionnelle tout au long de la vie constitue une obligation nationale. Elle vise à permettre à chaque personne, indépendamment de son statut, d'acquérir et d'actualiser des connaissances et des compétences favorisant son évolution professionnelle, ainsi que de progresser d'au moins un niveau de qualification au cours de sa vie professionnelle ».
Aux termes de l'article L6312-1 du code du travail applicable jusqu'au 31 décembre 2018, l'accès des salariés à des accès de formation professionnelle continue est assuré à l'initiative de l'employeur, à l'initiative du salarié notamment par la mobilisation du compte personnel, dans le cadre des périodes de professionnalisation prévues à l'article L6324-1 ou contrats de professionnalisation prévus à l'article L6325-1.
L'article L6321-1 dispose notamment que l'employeur assure l'adaptation des salariés à leur poste de travail. Il veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l'évolution des emplois, des technologies et des organisations.
C'est à l'employeur qu'il appartient de prouver qu'il a bien assuré cette obligation que ce soit au titre de l'employabilité interne ou externe. Or, aucun élément n'est produit par la société Schildis étant rappelé que la salariée a une ancienneté de plus de 30 ans.
Par conséquent, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a été alloué à la salariée la somme de 1.000€ à titre de dommages et intérêts.
Sur la tardiveté des déclarations de prévoyance
Selon Mme [K] [T], l'employeur a tardé dans les déclarations vis-à-vis de la prévoyance l'exposant à subir des retards de paiement. Ce dernier a reconnu qu'un entretien avait été organisé afin de régler cette difficulté.
Cependant, Mme [K] [T] ne démontre pas avoir subi un préjudice. Il s'ensuit que cette demande sera rejetée et le jugement entrepris confirmé de ce chef.
Sur la rupture du contrat de travail
Lorsqu'un salarié a demandé la résiliation judiciaire de son contrat de travail et que son employeur le licencie ultérieurement, le juge doit d'abord rechercher si la demande de résiliation était fondée ; c'est seulement s'il ne l'estime pas fondée qu'il doit statuer sur le licenciement.
Sur la résiliation judiciaire
Initialement, Mme [K] [T] a saisi le conseil de prud'hommes aux fins de résiliation judiciaire de son contrat de travail après l'entretien préalable à un licenciement pour inaptitude. Elle invoque les manquements suivants : harcèlement moral et discrimination, non respect du maintien de salaire, tardiveté dans les déclarations à l'organisme de prévoyance, exécution déloyale du contrat de travail, absence de formation professionnelle.
ll résulte des dispositions de l'article L1231-1 du code du travail que le salarié peut demander au conseil de prud'hommes la résiliation judiciaire de son contrat de travail en cas de manquement de l'employeur à ses obligations. Les manquements sont souverainement appréciés par les juges, qui peuvent tenir compte de toutes les circonstances intervenues jusqu'au jour du jugement.
Les faits allégués doivent présenter une gravité suffisante pour justifier la résiliation du contrat de travail. C'est au salarié qui invoque la résiliation judiciaire aux torts de l'employeur de justifier des faits ou manquements invoqués à l'encontre de ce dernier et de ce qu'ils sont d'une gravité suffisante pour empêcher la poursuite du contrat de travail.
Il n'est pas contesté que l'employeur a manqué aux obligations suivantes : tardiveté dans les déclarations à l'organisme de prévoyance et absence de formation professionnelle.
Concernant le non respect du maintien de salaire, aucune demande chiffrée n'est faite par la salariée dans le cadre de la présente instance et ce manquement n'est pas établi.
Quant à l'exécution déloyale du contrat de travail, hormis les manquements retenus, il n'est cependant pas établi que ceux-ci empêchaient le maintien du contrat de travail et justifient le prononcé d'une résiliation judiciaire.
Par conséquent, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il n'a pas fait droit à cette demande.
Sur le licenciement
Aux termes des dispositions de l'article L1226-2 du code du travail, le salarié victime d'une maladie ou d'un accident non professionnel est déclaré inapte par le médecin du travail en application de l'article L4624-4 à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités, au sein de l'entreprise ou des entreprises du groupe auquel il appartient le cas échéant, situées sur le territoire national et dont l'organisation, les activités ou l'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel. [...] Cette proposition prend en compte, après avis du comité social et économique lorsqu'il existe, des conclusions écrites du médecin du travail et des indications qu'il formule sur les capacités du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise. Le médecin du travail formule également des indications sur la capacité du salarié à bénéficier d'une formation le préparant à occuper un poste adapté. L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en 'uvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de poste existant ou aménagement du temps de travail.
L'article L1226-2-1 du code du travail dispose que lorsqu'il est impossible à l'employeur de proposer un autre emploi au salarié, il lui fait connaître par écrit les motifs qui s'opposent à ce reclassement. L'employeur ne peut rompre le contrat de travail que s'il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l'article L1226-2, soit du refus par le salarié de l'emploi proposé dans ces conditions, soit la mention expresse dans l'avis du médecin du travail que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi.
S'il prononce le licenciement, l'employeur respecte la procédure applicable au licenciement pour motif personnel.
En l'espèce, Mme [K] [T] a été déclarée inapte à tous postes avec dispense de reclassement: « l'état de santé faisant obstacle à tout reclassement dans l'entreprise », et cet avis n'est pas contesté.
Par suite, conformément aux dispositions susvisées Mme [K] [T] a été licenciée pour inaptitude non professionnelle.
Par conséquent, le licenciement repose bien sur une cause réelle et sérieuse, ce qui implique la confirmation du jugement entrepris de ce chef et en ce qu'il a rejeté les demandes indemnitaires présentées à ce titre.
Sur les demandes accessoires
Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a condamné la société Schildis aux dépens et à verser à Mme [K] [T] la somme de 1.000€ au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Succombant très partiellement dans le cadre de la présente procédure, la société Schildis sera condamnée aux dépens de la procédure d'appel compte tenu de la solution du litige l'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile, au bénéficie de l'une ou de l'autre parties.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant par mise à disposition au greffe par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la Loi,
Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Mme [K] [T] de ses demandes d'annulation des avertissements et dommages et intérêts y afférents ;
statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant :
Annule les avertissements en date du 20 novembre 2018 et 26 mars 2019 ;
Condamne la société Schildis à verser à Mme [K] [T] la somme de 500€ (cinq cents euros) à titre de dommages et intérêts ;
Confirme le jugement entrepris pour le surplus ;
Rejette les demandes respectives des parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la SAS Schildis aux dépens de la procédure d'appel ;
Ledit arrêt a été prononcé par mise à disposition au greffe le 31 mai 2022, signé par Madame Christine Dorsch, Président de Chambre et Madame Martine Thomas, (Greffier.
Le Greffier, Le Président,