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27/05/2022 | FRANCE | N°20/00607

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 2 a, 27 mai 2022, 20/00607


MINUTE N° 248/2022





























Copie exécutoire à



- Me Marion BORGHI



- la SELARL ACVF ASSOCIES





Le 27/05/2022



Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE



ARRET DU 27 Mai 2022





Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 20/00607 - N° Portalis DBVW-V-B7E-HJF5


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APPELANT :



Monsieur [B] [D]

demeurant [Adresse 4]

[Localité 3]



représenté par Me Marion BORGHI, avocat à la cour.

Plaidant : Me SPAETTY, avocat au barreau de Mulhou...

MINUTE N° 248/2022

Copie exécutoire à

- Me Marion BORGHI

- la SELARL ACVF ASSOCIES

Le 27/05/2022

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE

ARRET DU 27 Mai 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 20/00607 - N° Portalis DBVW-V-B7E-HJF5

Décision déférée à la cour : 06 décembre 2019 par le tribunal de grande instance de MULHOUSE

APPELANT :

Monsieur [B] [D]

demeurant [Adresse 4]

[Localité 3]

représenté par Me Marion BORGHI, avocat à la cour.

Plaidant : Me SPAETTY, avocat au barreau de Mulhouse

INTIMÉ :

Maître [M] [Z]

demeurant[Adresse 1]

[Localité 3]

représenté par la SELARL ACVF ASSOCIES, avocat à la cour.

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 17 Mars 2022, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Isabelle DIEPENBROEK, Présidente de chambre

Madame Catherine GARCZYNSKI, Conseiller

Madame Myriam DENORT, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame Dominique DONATH faisant fonction

ARRET contradictoire

- prononcé publiquement après prorogation du 12 mai 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente et Madame Dominique DONATH faisant fonction de greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Par acte authentique dressé le 26 septembre 2013 par Me [Z], notaire à [Localité 3] (68), M. [D] a vendu à M. [J], le lot n°19 dépendant d'un immeuble en copropriété - appartement de deux pièces principales d'une superficie de 68,55 m² et cave -, situé [Adresse 2] moyennant le prix de 113 000 euros.

Le prix n'a pas été payé, bien que Me [Z] ait mentionné dans l'acte ce paiement comptant, ainsi qu'il résultait de sa comptabilité, financé pour la totalité par l'acquéreur au moyen de ses deniers personnels ou assimilés ; Me [Z] s'était contenté de la production d'un justificatif de virement bancaire du Crédit agricole pour la somme de 120 713 euros, lequel n'avait, en réalité, pas été exécuté et s'est révélé par la suite être un faux.

M. [D] a assigné l'acquéreur le 23 décembre 2013 devant le tribunal de grande instance de Mulhouse, qui, par jugement réputé contradictoire du 10 juin 2014, devenu définitif le 17 septembre 2014, a prononcé la résolution de la vente pour défaut de paiement du prix et accordé à M. [D] la somme de 3 500 euros à titre de dommages et intérêts ; ce jugement a été déclaré commun à Me [Z], également assigné à cette fin.

M. [D] a revendu son bien immobilier par acte du 2 juin 2016 pour un prix de 93 000 euros.

M. [J] a été condamné le 2 juillet 2018 par le tribunal correctionnel de Mulhouse, notamment pour escroquerie au préjudice de M. [D], sur opposition à un premier jugement du 1er juin 2017, rendu par défaut à l'égard de M. [J] ; sur l'action civile, il a été condamné à payer à M. [D] les sommes de 20 000 euros et 17 094 euros en réparation de son préjudice matériel (respectivement, au titre de la vente et 'du crédit'), 2 039,86 euros au titre des 'frais bancaires', 1 748 euros au titre des taxes foncières et 3 000 euros au titre de son préjudice moral.

Par acte introductif d'instance déposé le 24 avril 2014 et signifié le 27 mai 2014, M. [D] avait précédemment assigné Me [Z] devant le tribunal de grande instance de Mulhouse en responsabilité et l'affaire avait fait l'objet d'un sursis à statuer dans l'attente du jugement pénal ; M. [D] a repris l'instance le 29 décembre 2017.

Par jugement en date du 6 décembre 2019, le tribunal a condamné, avec exécution provisoire, Me [Z] à payer à M. [D] les sommes suivantes :

- 2 000 euros au titre de la perte de chance (selon les motifs, 'de ne pas contracter et de contracter à un prix supérieur à 93 000 euros'),

- 508,64 euros au titre de la quote-part de la taxe foncière 2013 (qui était due par l'acquéreur selon l'acte de vente du 26 septembre 2013),

- 1 548 euros au titre du solde impayé de charges de copropriété au 30 septembre 2014 (l'acquéreur devant acquitter les charges à compter de la signature de l'acte de vente du 26 septembre 2013),

-1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Il a rejeté le surplus de la demande.

Le tribunal a estimé, pour l'essentiel, après avoir rappelé que 'le notaire n'ayant pas assuré l'effectivité d'une vente' engageait sa responsabilité délictuelle, que :

- la faute était admise par Me [Z] qui reconnaissait ne pas avoir vérifié la validité de l'ordre de virement,

- le dommage s'analysait en une perte de chance de ne pas contracter et de contracter à des conditions plus avantageuses que celles finalement obtenues (le 2 juin 2016),

- M. [D] ne pouvait obtenir l'indemnisation du même préjudice que celui réparé par le tribunal correctionnel, sauf à démontrer le caractère irrécouvrable des sommes obtenues, relevant que la somme demandée au titre du crédit était exactement la même que celle déjà allouée (17 094 euros),

- il ne justifiait pas que sa demande au titre des frais bancaires était distincte de celle examinée par le tribunal correctionnel, ni du surcoût causé par le report de la vente concernant les deux échéances de prêt d'octobre et novembre 2014, qu'il avait pu payer le 2 juin 2016, faute de produire le tableau d'amortissement de ce prêt,

- le lien de causalité entre le paiement des taxes foncières de 2015 et 2016 avec la faute du notaire n'était pas établi,

- en revanche, il existait un lien de causalité entre la faute et la somme de 1 548 euros due au titre du solde des charges de copropriété au 30 septembre 2014, du fait de la dépossession de l'immeuble suite à la vente avant le prononcé de sa résolution.

*

M. [D] a interjeté appel du jugement par déclaration du 30 janvier 2020.

Par conclusions du 11 janvier 2021, il sollicite l'infirmation partielle du jugement et la condamnation de Me [Z] à lui payer les sommes suivantes :

- 20 000 euros au titre de 'la perte de chance' (différence de prix entre les deux actes de vente),

- 17 094 euros au titre du prêt (ayant servi à sa propre acquisition du bien, au regard des 33 mensualités de 518 euros chacune échues entre octobre 2013 et juin 2016),

- 3 074,25 euros au titre des taxes foncières (224 + 874 + 908 = 2006 euros) et d'habitation (218,25 + 850 = 1068,25 euros) payées de septembre 2013 à 2016,

- 4 620 euros au titre des charges de copropriété,

- 1 816,93 euros (agios du 01/10/2013 au 31/12/2018 pour découvert en compte courant) et 6 416,45 euros ('report crédit relais, découvert exceptionnel, prêt in fine et intérêts imputés') au titre des frais bancaires,

- 7 000 euros au titre du préjudice moral,

- 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il demande d'abord la différence de prix entre celui qu'il aurait dû percevoir et celui finalement perçu, se prévalant de mandats de vente postérieurs à la vente initiale pour des montants avoisinant le prix initial et de ce qu'il souhaitait vendre le bien dans les mêmes conditions, ce qui n'a pas été possible, compte tenu de la baisse du marché immobilier entre 2013 et 2016.

Il ne demande pas le coût du report de deux échéances évoqué par le premier juge, mais toutes les échéances payées entre la première vente en 2013 et la vente intervenue en 2016 ; il soutient qu'une fois le jugement ayant résolu la vente devenu définitif, le 17 septembre 2014, il a dû procéder encore aux formalités de transcription et qu'il a tenté de vendre le bien 'pendant cette période'. Il précise qu'il n'a pu recouvrer les montants alloués par le tribunal correctionnel, ni ceux alloués par le tribunal de grande instance, M. [J] étant insolvable, de sorte qu'il ne percevra pas de double indemnisation.

*

Par conclusions du 9 juillet 2020, Me [Z] demande à la cour d'écarter des débats les pièces 15 et suivantes visées au bordereau adverse du 13 mai 2020, non communiquées, de confirmer le jugement déféré et de condamner l'appelant aux dépens des deux instances ainsi qu'à lui payer la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur la perte de chance de vendre le bien au prix de 113 000 euros, il fait valoir que les prix figurant aux mandats produits par l'appelant ne correspondent pas au prix réel mais à celui fixé par le vendeur et que l'article de l'Express versé aux débats n'est pas significatif de la valeur des immeubles à [Localité 3], ni de la baisse prétendue du marché immobilier.

Sur les autres frais, il relève que l'appelant n'a été privé de la jouissance de son bien que jusqu'au jour où le jugement, ayant prononcé la résolution de la vente, a acquis force de chose jugée, sans que la transcription au Livre foncier ait eu une incidence, ne permettant que l'opposabilité aux tiers ; il relève que M. [D] ne justifie pas de la manière dont il a utilisé le bien pendant deux ans entre le moment où il en a repris possession et sa revente. Il estime non indemnisable les mensualités réclamées ou déjà indemnisées puisque l'intéressé 'n'a pas eu à rembourser à la banque l'ensemble des 33 mensualités' et qu'elles 'auraient dû être payées à la banque, donc déduites du montant perçu par M. [D]'. Sur les frais bancaires, il oppose l'indemnisation accordée par le tribunal correctionnel et le fait que l'appelant doit justifier de l'impécuniosité de M. [J]. Enfin, il conteste le préjudice moral allégué, alors que lui-même a été victime de l'escroquerie commise par M. [J].

*

L'ordonnance de clôture a été rendue le 1er juin 2021.

A l'audience de plaidoiries, le conseil de Me [Z], sur question du magistrat rapporteur, a indiqué qu'il n'existait plus de difficultés de communication de pièces.

MOTIFS

La faute du notaire, qui n'a pas vérifié la validité de l'ordre de virement et n'a ainsi pas assuré l'effectivité de l'acte de vente, n'est pas contestée. Sont seuls en discussion devant la cour, le préjudice et le lien de causalité avec la faute retenue.

Sur l'analyse du préjudice résultant de la faute du notaire

Du fait de la faute du notaire, M. [D] a dû engager une procédure pour obtenir la résolution de la vente, dont il est constant qu'elle a été définitivement prononcée le 17 septembre 2014 ; c'est bien cette date, et non celle de la transcription du jugement au Livre foncier, qui doit être prise en compte pour apprécier la date à laquelle M. [D] a repris possession de son bien immobilier.

Sur la demande au titre de la différence de prix de vente

Il résulte de ce qui précède que l'appelant a perdu 12 mois pour vendre son bien.

En effet, sans la faute du notaire, il n'aurait pas passé la vente avec M. [J] le 26 septembre 2013 et aurait pu rechercher immédiatement un nouvel acquéreur.

S'agissant du prix obtenu lors de la vente réalisée le 2 juin 2016, il appartient donc à l'appelant de démontrer sa perte de chance de vendre le bien à un prix supérieur, s'il avait pu le remettre en vente 12 mois plus tôt.

Or il ne démontre pas quelle était la valeur du bien en 2013 ; le prix de 113 000 euros accepté par M. [J], sans l'entremise d'un agent immobilier, n'est pas à lui seul significatif de cette valeur, d'autant que M. [J] n'avait pas l'intention de le payer, s'agissant d'une escroquerie, et étant relevé que le bien était déjà en vente depuis le 19 août 2011 pour 129 000 euros net vendeur, au vu du mandat donné à l'agence IB Immo à cette date.

Il n'établit pas non plus la baisse du marché immobilier entre septembre 2013 et septembre 2014. S'il a signé un mandat de vente le 9 septembre 2014 à un prix de 105 000 euros net vendeur (110 000 euros dont 5 000 euros de commission,) c'est à dire un prix inférieur au dernier mandat du 9 septembre 2012 auprès de l'agence Gutzler immobilier pour 120 000 euros net vendeur (128 000 euros dont 8 000 de commission) et au prix de vente de septembre 2013, il n'en résulte pas pour autant la baisse du marché immobilier, s'agissant, pour les mandats, de prix de mise en vente, dont il n'est pas établi qu'ils représentent la valeur vénale du bien à la date de leur conclusion, et du prix non significatif de la vente passée avec M. [J], comme il a été dit ci-dessus.

Par ailleurs, aucun article paru dans l'Express, qui ferait état d'une baisse du marché immobilier, n'est produit, ni ne figure au bordereau de pièces de Me [X], qui ne comporte en annexe 29, intitulé 'éléments sur le passé pénal de M. [J]', qu'un extrait de 'dna.fr'publié le 9 novembre 2013.

En conséquence, le jugement déféré sera confirmé, faute de preuve que la perte de chance de vendre le bien à un prix supérieur ait excédé le montant alloué par le premier juge de 2 000 euros, lequel n'est pas remis en cause par l'intimé.

Sur la demande au titre du prêt

M. [D] demande l'indemnisation de 33 mensualités de 518 euros chacune, échues entre octobre 2013 et juin 2016, qu'il indique avoir continué à payer, soit au total une somme de 17 094 euros.

Du fait de la faute du notaire, M. [D] a, comme relevé par l'intimé, été privé de la jouissance de son bien du 26 septembre 2013 au 17 septembre 2014, outre qu'il a perdu une chance de rembourser le prêt ayant servi à son acquisition plus tôt et donc de ne pas payer intérêts et frais pendant 12 mois, du fait de l'impossibilité de remettre le bien en vente pendant cette période.

Il justifie, par ses relevés de compte, du paiement d'octobre 2013 à septembre 2014 des échéances du prêt, pour 518,78 euros jusqu'en avril 2014, puis 519 euros à compter de mai 2014 ; cependant, il ne peut être indemnisé de la part des échéances ayant servi à rembourser le capital qui lui a été prêté, mais, au plus, des intérêts et frais exposés alors qu'il ne jouissait pas du bien ; or il ne produit que le tableau d'amortissement réaménagé à partir du 30 septembre 2014, soit pour une période à laquelle il avait repris possession de son bien, laquelle ne peut donner lieu à indemnisation.

En conséquence, cette demande ne peut qu'être rejetée, l'appelant ne justifiant pas des montants versés au titre des intérêts.

Sur la demande au titre des frais bancaires

M. [D] invoque un prêt relais qu'il devait rembourser avec le montant de la vente à M. [J]. Il soutient que le paiement de ce prêt relais, qu'il n'a donc pu rembourser, et du prêt précité contracté pour l'acquisition du bien, l'ont placé en situation de découvert, de sorte qu'il réclame le remboursement des agios qu'il a payés du 01 octobre 2013 au 31 décembre 2018 pour 1 816,93 euros. Il réclame aussi d'autres frais liés au 'report du crédit relais, au découvert exceptionnel, au prêt in fine et aux intérêts imputés' pour 6 146,45 euros, dont il ne précise pas le détail, se contentant d'affirmer que 'ces montants sont caractérisés'.

S'agissant des agios, il produit une attestation du Crédit mutuel d'agios facturés pour un total de 1 816,93 euros.

Cependant il ne peut être imputé à la faute du notaire l'absence de remboursement du crédit relais avec le prix de vente, mais seulement le retard de 12 mois pris pour trouver un acquéreur et partant, rembourser le prêt relais avec le prix de vente. De plus, il n'est pas démontré que le découvert résulte de la charge financière des deux prêts, ni d'ailleurs quel est le montant des frais résultant du retard de seulement 12 mois imputable au notaire, le montant des agios facturés étant globalisé d'octobre 2013 à juin 2016 et de juin 2016 à fin 2018. En conséquence le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.

Pour la somme de 6 146,45 euros, il n'est produit aucun décompte, mais diverses offres d'avenant au crédit relais d'un montant initial de 22 000 euros, destiné au financement d'un bien immobilier (maison ancienne avec travaux d'amélioration), des autorisations de découvert des 6 août 2016 et 28 octobre 2016 ainsi qu' un 'prêt in fine' du 19 avril 2016 (20 000 euros sur 20 mois) et un 'prêt in fine' du 8 juillet 2016 (crédit personnel de 25 500 euros sur deux ans).

Il n'est pas établi que ces autorisations de découvert et ces prêts in fine soient en lien avec la faute du notaire, vu leur date et leur objet.

S'agissant des offres d'avenant au crédit relais, il est justifié des offres suivantes :

- offre du 29 octobre 2013 : la durée du prêt est augmentée de deux mois à compter du 1er novembre 2013 ; l'échéance en capital sera de 23 614,90 au 31/12/2013 et le coût du crédit est de 112,22 euros,

- offre du 17 décembre 2013 : la durée du prêt est augmentée de 6 mois à compter du 1er janvier 2014 ; l'échéance en capital sera de 23 614,90 euros au 30 juin 2014 et le coût du crédit est de 443,60 euros,

- offre du 27 juin 2014 : la durée du prêt est augmentée de six mois à compter du 1er juillet 2014, soit jusqu'au 31 décembre 2014 ; le coût du crédit est de 868,41 euros, dont 752,57 euros d'intérêts, 100 euros de frais d'avenant et 15,84 euros de cotisation assurance décès,

- offre du 1er juillet 2015 concernant l'échéance impayée du 30 juin 2015 de 24 753,46 euros, prorogée au 31/12/2015.

Du fait de la faute du notaire, M. [D] a perdu une chance de ne pas supporter le coût du crédit relais sur l'année où le bien vendu n'était plus sa propriété et où il n'a pu rechercher de nouvel acquéreur ; ce coût est, au vu de ce qui précède, de : 112,22 + 443,60 + 484 (montant estimé à fin septembre 2014, tenant compte de la totalité des frais et de la moitié des intérêts et de la cotisation) = 1 039,82 euros ; la cour estime à 80 % la perte de chance qu'il a subie de ne pas supporter un tel coût supplémentaire, soit 1 039,82 x 80 % = 831,86 euros.

Cette somme n'est pas comprise dans celle de 2 039,86 euros allouée par le jugement du tribunal correctionnel du 2 juillet 2018 au titre des frais bancaires. En effet, il ressort du jugement de ce tribunal rendu par défaut le 1er juin 2017, que M. [D] avait demandé initialement, non seulement la somme de 2 039,86 euros au titre des frais bancaires, mais également celle de 6 994,57 euros au titre du 'prix du report d'échéances de prêt' et qu'il avait été débouté de cette seconde demande, au motif que le tribunal ne pouvait vérifier le décompte au vu des pièces produites ; suite à l'opposition de M. [J], M. [D] n'a repris que la demande à hauteur de 2 039,86 euros, à laquelle le tribunal a fait droit.

Il n'existe donc pas de difficulté du fait de la condamnation prononcée par le tribunal correctionnel.

Dès lors, il sera fait droit à la demande à hauteur de 831,86 euros et le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a rejeté cette demande en totalité.

Sur la demande au titre des taxes foncières et d'habitation

Me [Z] ne conteste pas le jugement déféré en ce qu'il a accordé à M. [D] la quote part de la taxe foncière 2013 due par l'acquéreur selon l'acte de vente, soit 508,64 euros, laquelle inclut manifestement la taxe d'habitation 2013.

Comme en première instance, M. [D] ne demande rien au titre des taxes foncières et d'habitation 2014, ayant été exonéré de leur paiement.

Il réclame en revanche les taxes foncières 2015 et 2016 et la taxe d'habitation 2015 ; cependant, leur paiement est sans lien avec la faute du notaire comme l'a dit le premier juge.

En conséquence, le jugement déféré sera confirmé en ce qui concerne ces taxes.

Sur la demande au titre des charges de copropriété

Me [Z] ne conteste pas le jugement déféré en ce qu'il a accordé à M. [D] le solde impayé des charges de copropriété au 30 septembre 2014 pour 1 548 euros.

Il ne peut lui être accordé davantage, vu ce qui a été dit précédemment, en l'absence de lien de causalité entre la faute du notaire et les charges de copropriété dues par l'appelant pour une période postérieure.

Le jugement déféré sera donc confirmé sur ce point.

Sur la demande au titre du préjudice moral

Si le premier juge a rejeté la demande au titre du préjudice moral, c'est faute de preuve que le préjudice réclamé était distinct de celui déjà indemnisé tant par la juridiction civile, ayant prononcé la résolution de la vente, que par la juridiction pénale.

Devant la cour, M. [D] invoque sa détresse psychologique et sa situation financière difficile l'ayant contraint à solliciter diverses aides.

Il ressort du jugement du 10 juin 2014, qui a prononcé la résolution de la vente, que les dommages et intérêts alloués ne tenaient pas compte du prêt relais et de la situation délicate qu'il avait invoqués au motif qu'il n'en rapportait pas la preuve.

Par ailleurs, les dommages et intérêts alloués par le tribunal correctionnel ont réparé le préjudice moral découlant de l'escroquerie, distinct de celui réclamé devant la cour.

Le fait que Me [Z] ait lui-même été victime des faits d'escroquerie est sans emport, au regard de la propre faute qu'il a commise à l'égard de M. [D].

M. [D] justifie de l'impact psychologique et financier de la situation dans lequel l'a placé la faute du notaire, au vu de ses arrêts maladie du 24 juin au 15 septembre 2014 pour syndrome anxio-dépressif et de l'attestation de l'assistante sociale du SDIS 68 (service départemental incendie secours où il travaille comme sapeur pompier professionnel), indiquant lui avoir attribué des bons alimentaires pour faire face à ses besoins de première nécessité en avril et mai 2014, en lien avec ses difficultés liées au remboursement de ses deux prêts immobiliers de façon simultanée, outre les attestations de plusieurs personnes lui ayant prêté diverses sommes pour un total de 2 740 euros en décembre 2013, janvier, mars et avril 2014.

Il en résulte que M. [D] a subi un préjudice moral distinct de ceux déjà indemnisés que la cour évalue à 3 000 euros.

Il convient en conséquence d'infirmer le jugement déféré et de condamner Me [Z] au paiement de cette somme.

Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile

Compte tenu de l'issue de l'appel, le jugement déféré sera confirmé en ses dispositions sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile. M. [Z], succombant partiellement en appel, sera également condamné aux dépens d'appel et à payer la somme de 1 500 euros à l'appelant sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, lui-même étant débouté de sa propre demande de ce chef.

PAR CES MOTIFS:

La cour, statuant par arrêt contradictoire, rendu publiquement par mise à disposition au greffe, conformément à l'article 450, alinéa 2 du code de procédure civile,

CONFIRME le jugement déféré, sauf en ce qu'il a débouté M. [B] [D] de sa demande d'indemnisation au titre des frais bancaires et d'un préjudice moral ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

CONDAMNE Me [M] [Z] à payer à M. [B] [D] à titre de dommages et intérêts les sommes suivantes :

- 831,86 euros (huit cent trente et un euros et quatre-vingt six centimes au titre du coût supplémentaire de prêt relais supporté,

- 3 000 euros (trois mille euros) au titre de son préjudice moral ;

Ajoutant au jugement déféré,

CONDAMNE Me [M] [Z] à payer à M. [B] [D] la somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel ;

CONDAMNE Me [M] [Z] à supporter les dépens d'appel et le déboute de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier,La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 2 a
Numéro d'arrêt : 20/00607
Date de la décision : 27/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-27;20.00607 ?
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