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13/05/2022 | FRANCE | N°20/02178

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 2 a, 13 mai 2022, 20/02178


MINUTE N° 223/2022





























Copie exécutoire à



- Me Christine LAISSUE-STRAVOPODIS



- Me Anne CROVISIER





Le 13 mai 2022



Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE



ARRET DU 13 Mai 2022





Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 20/02178 - N° Portalis DBVW-V-B7E-HLZOr>


Décision déférée à la cour : 07 Juillet 2020 par le tribunal judiciaire de MULHOUSE



APPELANTE :



L'Association MULHOUSE OLYMPIC NATATION, association de droit local, prise en la personne de son représentant légal

ayant son siège social [Adresse 2]



r...

MINUTE N° 223/2022

Copie exécutoire à

- Me Christine LAISSUE-STRAVOPODIS

- Me Anne CROVISIER

Le 13 mai 2022

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE

ARRET DU 13 Mai 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 20/02178 - N° Portalis DBVW-V-B7E-HLZO

Décision déférée à la cour : 07 Juillet 2020 par le tribunal judiciaire de MULHOUSE

APPELANTE :

L'Association MULHOUSE OLYMPIC NATATION, association de droit local, prise en la personne de son représentant légal

ayant son siège social [Adresse 2]

représentée par Me Christine LAISSUE-STRAVOPODIS, avocat à la cour.

plaidant : Me RIEGEL, avocat au barreau de Strasbourg

INTIMÉS :

Monsieur [W] [T]

demeurant [Adresse 3]

La S.A.R.L. LGY ENTERTAINMENT Représentée par son représentant légal

ayant son siège social [Adresse 1]

représentés par Me Anne CROVISIER, avocat à la cour.

plaidant : Me Nicolas MOHASSEN, avocat à Paris

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 18 Mars 2022, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Isabelle DIEPENBROEK, Présidente de chambre

Madame Myriam DENORT, Conseiller

Madame Nathalie HERY, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme Dominique DONATH faisant fonction

ARRET contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente et Mme Dominique DONATH, faisant fonction de greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE et PRÉTENTIONS des PARTIES

Selon acte sous seing privé non daté, une convention de partenariat a été conclue entre d'une part, l'Association Mulhouse Olympic Natation et d'autre part, M. [W] [T], nageur professionnel, et la société LGY Entertainment, dont il est le dirigeant, ayant pour activité la gestion de ses droits. Cette convention a été conclue pour une durée courant jusqu'à la fin de l'année 2014, avec tacite reconduction d'année en année, pour prendre fin au plus tard le 31 décembre 2016.

Aux termes de cette convention, le club de natation s'engageait à attribuer à M. [T] une aide financière d'un montant de 50 000 euros TTC pour 2014 et de 60 000 euros pour chacune des deux années suivantes, à verser en deux fois, sur présentation de factures à la société LGY Entertainment . En contrepartie, M. [W] [T] autorisait le Club à utiliser son image sur ses outils de communication en tant que 'Club de [W] [T]', et s'engageait notamment, à défendre les couleurs du Club dans toutes les compétitions nationales auxquelles il participait pendant la période contractuelle, ainsi qu'à satisfaire à deux sollicitations par an lors de sa venue au club, selon ses disponibilités.

Exposant que les deux factures émises pour 2016 par la société LGY Entertainment n'avaient pas été honorées, et avoir vainement mis en demeure l'association Mulhouse Olympic Natation de les régler, M. [T] et la société LGY Entertainment l'ont assignée devant le tribunal de grande instance de Mulhouse, le 29 avril 2019, en paiement de ces factures.

Par un jugement du 7 juillet 2020, assorti de l'exécution provisoire, l'association Mulhouse Olympic Natation a été condamnée à payer à M. [W] [T] et à la société LGY Entertainment la somme de 60 000 euros en paiement des factures numéros 2016.0009 et 2016.0012, majorée des intérêts de retard à compter du 29 avril 2019, ainsi que la somme de 80 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de recouvrement, et enfin, une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le tribunal a considéré que l'association Mulhouse Olympic Natation ne pouvait s'opposer au paiement des factures en invoquant le fait que M. [T] aurait mis fin à sa saison sportive, voire à sa carrière au 20 juin 2015, alors que les pièces produites démontraient seulement une fin anticipée de la saison 2015 par le refus de l'athlète de participer aux championnats du monde en Russie en août 2015, et que les factures concernaient l'année 2016, pendant laquelle M. [T] avait continué à participer à plusieurs compétitions nationales sous les couleurs du club. Il avait notamment participé au championnat de France en mars 2016, puis aux jeux olympiques de [Localité 10] en août 2016, et ce n'est qu'après les Jeux olympiques qu'il avait mis un terme à sa carrière sportive.

Le tribunal a en outre relevé que l'association Mulhouse Olympic Natation ne démontrait pas avoir mis en demeure M. [T] de respecter ses engagements, ni l'avoir informé de sa volonté de résilier le contrat, motif pris de ce qu'il aurait mis prématurément un terme à sa carrière sportive, et a estimé que le club ne pouvait opposer aucune exception d'inexécution, ni exciper d'une

quelconque résiliation anticipée du contrat, de sorte que la demande en paiement devait être accueillie tant au titre du principal que de l'indemnité forfaitaire de 40 euros par facture prévue par les articles L.441-6 et D.441-5 du code de commerce.

Le tribunal a par contre rejeté la demande de dommages et intérêts complémentaires, en l'absence de preuve d'un préjudice autre que celui résultant du défaut de paiement, et de preuve du caractère déloyal ou abusif de la résistance du Club.

L'association Mulhouse Olympic Natation a interjeté appel de ce jugement, le 30 juillet 2020,en toutes ses dispositions.

Par conclusions transmises par voie électronique le 1er octobre 2021, elle demande à la cour d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement prononcé par le tribunal judiciaire de Mulhouse, en date du 7 juillet 2020, de déclarer M. [W] [T] et la société LGY Entertainment mal fondés en leurs demandes et les en débouter, et de les condamner solidairement et conjointement aux entiers frais et dépens, ainsi qu'au paiement d'une somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle invoque une rupture du contrat à l'initiative de M. [T] qui a diffusé un communiqué de presse le 29 juin 2015, annonçant qu'il mettait un terme à sa saison sportive et ne participerait donc pas au championnat du monde de natation à [Localité 6] en Russie du 1er août au 8 août 2015, et considère qu'en mettant un terme à sa saison sportive, le 29 juin 2015, M. [T] a de fait contrevenu à ses obligations contractuelles. En outre, en annonçant son retrait du circuit national et international de natation, il a mis un terme par anticipation aux relations contractuelles, de sorte que le défaut d'exécution du contrat lui est exclusivement imputable.

L'association Mulhouse Olympic Natation considère donc être fondée à opposer l'exception d'inexécution en application des articles 1220 et suivants du code civil, étant légitime à suspendre tout paiement au profit du nageur dans la mesure où ce dernier ne fournissait plus aucune prestation au bénéfice du club, ou seulement des prestations démesurément faibles rendant tout paiement de prestation totalement disproportionné et créant ainsi un enrichissement sans cause.

Elle soutient en outre que M. [W] [T] ayant mis fin prématurément à la saison 2015 en juin, sans justifier des problèmes de santé qu'il invoque, et ayant mis fin à sa carrière de sportif de haut niveau en août 2016, le contrat a pris fin de son fait, et qu'aucune rémunération n'est donc due, et ce d'autant plus qu'il ne respectait plus ses engagements de représentation du club, de sorte que les paiements seraient dépourvus de toute contrepartie.

L'appelante évoque enfin un courrier électronique émanant de la mère de M. [T] selon lequel il aurait accepté de ramener sa rétribution pour l'année 2016 à 40 000 euros, ce qui constituerait un aveu judiciaire, la mère de l'intimé étant investie d'un mandat, à tout le moins apparent, pour gérer les affaires de son fils.

Par conclusions transmises par voie électronique le 23 septembre 2021, M. [W] [T] et la société LGY Entertainment demandent à la cour de confirmer le jugement entrepris, de débouter l'association Mulhouse Olympic Natation de l'intégralité de ses demandes et de la condamner au paiement d'une somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance d'appel en ce compris les frais d'exécution forcée du jugement de première instance avancés par les intimés s'élevant à la somme de 2 964 euros.

M. [T] conteste avoir mis fin à sa carrière sportive le 29 juin 2015, ayant seulement mis fin à sa saison sportive internationale, pour raisons médicales, et ce en plein accord avec le club et son entraîneur, tout en indiquant qu'il reprendrait l'entraînement pour préparer les jeux olympiques de [Localité 10] en 2016. Il indique avoir ainsi participé sous les couleurs du club et de l'équipe de France à la coupe du monde à Doha en novembre 2015, au championnat de France 2016 et aux jeux olympiques d'août 2016.

Il relève que, dans un premier temps, l'association Mulhouse Olympic Natation avait prétendu que la première facture aurait été partiellement payée ce qui contredit la thèse d'une rupture du contrat à son initiative.

Il ajoute avoir continué à nager sous les couleurs du club en 2016, qu'il a participé à plusieurs compétitions - 29 entre novembre 2015 et août 2016 - ainsi qu'il en justifie par différentes coupures de presse et des extraits du site internet de la Fédération française de natation, et relève que l'association Mulhouse Olympic Natation ne lui a jamais reproché, avant mars 2021, la moindre inexécution contractuelle, et n'en justifie pas.

Enfin, le message électronique invoqué tardivement par l'appelante selon lequel il aurait accepté de limiter à 40 000 euros la somme due par le club pour 2016, outre qu'il émane de sa mère qui tenait la comptabilité de la société LGY et n'avait pas le pouvoir de le représenter ni de gérer ses intérêts, n'est en tout état de cause qu'une simple proposition, qui n'a jamais été acceptée par l'association Mulhouse Olympic Natation et n'est plus d'actualité.

Pour l'exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions notifiées et transmises par voie électronique aux dates susvisées.

La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 5 octobre 2021.

MOTIFS

A titre liminaire, il convient de rappeler que l'exception d'inexécution est un moyen offert à un des cocontractants pour refuser l'exécution de sa propre prestation, en cours d'exécution du contrat, mais qu'elle ne peut plus être invoquée lorsque le contrat a pris fin, la partie s'étant prévalue de cette exception devant alors démontrer qu'elle était légitime à l'opposer ou à résilier le contrat.

À hauteur de cour, il n'est plus discuté que les deux factures dont le paiement est sollicité par les intimés sont datées respectivement des 6 avril et 1er juillet 2016 et concernent donc l'année 2016. Par voie de conséquence, l'association Mulhouse Olympic Natation ne peut, pour s'opposer au paiement desdites factures, se prévaloir utilement de manquements qu'aurait prétendument commis M. [T] en 2015, ni invoquer une rupture des relations contractuelles en juin 2015, alors que les relations se sont poursuivies en 2016, qu'elle n'a pas estimé devoir résilier le contrat de partenariat du fait de ces prétendus manquements, et qu'elle n'a pas davantage adressé à M. [T] la moindre mise en demeure de respecter ses engagements.

En outre, ainsi que l'a exactement relevé le tribunal, l'association Mulhouse Olympic Natation ne démontre pas les manquements qu'elle allègue s'agissant de l'année 2016, puisqu'il est établi que M. [T] a continué à nager, sous les couleurs de l'association Mulhouse Olympic Natation, à tout le moins jusqu'en août 2016.

Il importe à cet égard de rappeler qu'aux termes des stipulations contractuelles, si M. [T] s'engageait à défendre les couleurs du club dans toutes les compétitions nationales auxquelles il participait, le contrat ne lui imposait aucune obligation de participer à un nombre déterminé de compétitions nationales. Or il est établi qu'outre sa participation à des compétitions internationales - championnat d'Europe à Londres en mai 2016 et jeux olympiques de [Localité 10] en août 2016 -, M. [T] a participé, sous les couleurs du club, les 26 et 27 février 2016 au meeting de [Localité 5], les 4, 5 et 6 mars 2016 à [Localité 7], au Golden tour Camille Muffat, le 30 mars 2016 aux championnats de France de natation à [Localité 8], en juillet 2016 à l'open de France de natation à [Localité 11], ainsi qu'à des compétitions en juin 2016 à [Localité 9] et à [Localité 4].

De même, si M. [T] s'engageait, pendant la période contractuelle, à satisfaire à deux sollicitations par an lors de sa venue au club et selon ses disponibilités, il est justifié de sa participation à une rencontre avec les cadres administratifs de la Fédération française de natation au centre d'entraînement de l'association Mulhouse Olympic Natation, le17 février 2016, et il n'est pas démontré, ni même soutenu, qu'il aurait refusé de répondre à d'autres sollicitations du club, alors que le fait qu'il ait annoncé mettre un terme à sa carrière de sportif de haut niveau à l'issue des jeux olympiques de [Localité 10], en août 2016, ne l'empêchait pas de pouvoir continuer à promouvoir la natation, notamment auprès des jeunes, compte tenu de la notoriété qu'il avait acquise. Enfin, aux termes du contrat M. [T] autorisait le Club à utiliser son image sur ses outils de communication en tant que 'Club de [W] [T]', cette utilisation pouvant parfaitement perdurer après cette annonce, de sorte qu'il ne peut être soutenu que les factures litigieuses seraient dépourvues de toute contrepartie.

Il n'est pas non plus démontré que M. [T] aurait rompu unilatéralement le contrat de partenariat de manière abusive, les circonstances dans lesquelles l'association Mulhouse Olympic Natation a appris sa décision de mettre un terme à sa carrière sportive étant discutées, et cette décision n'étant pas, en elle même, de nature à priver de toute contrepartie le contrat ainsi que cela a été évoqué ci-dessus.

Le jugement doit donc être approuvé en ce qu'il a retenu que la preuve d'un manquement de M. [T] à ses obligations n'était pas rapportée pas plus que celle d'une résiliation unilatérale fautive du contrat, lequel a pris fin à son échéance contractuelle, au 31 décembre 2016.

C'est tout aussi vainement que l'association Mulhouse Olympic Natation invoque le courrier électronique de Mme [P], mère de M. [T], relatif aux factures 2016, dans lequel elle indiquait « nous vous confirmons être d'accord sur la proposition de [B] pour ramener la somme annuelle à 40 000 € », ce courriel ne pouvant valoir aveu judiciaire, en ce que d'une part, il a été établi en dehors de toute procédure judiciaire, et n'émane pas d'une partie à la procédure, l'existence d'un mandat de représentation confié à Mme [P] par M. [T] ou la société LGY, fût-il apparent, étant contestée, et d'autre part, ne constituerait qu'une proposition transactionnelle, laquelle n'a pas été suivie d'effet par la société LGY Entertainment qui n'a émis aucun avoir, ni par l'association Mulhouse Olympic Natation qui ne peut donc s'en prévaloir.

Le jugement entrepris sera donc confirmé en toutes ses dispositions frappées d'appel, y compris celles relatives aux dépens et frais irrépétibles.

L'association Mulhouse Olympic Natation qui succombe en son appel, supportera la charge des dépens d'appel, qui comprennent les frais d'exécution de la décision en application de l'article 695 du code de procédure civile, et sera débouté de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. Il sera en revanche alloué aux intimés, sur ce fondement, une somme de 2 000 euros pour les frais irrépétibles exposés en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450, alinéa 2 du code de procédure civile,

CONFIRME dans les limites de l'appel le jugement du tribunal judiciaire de Mulhouse en date du 7 juillet 2020 ;

Y ajoutant,

DEBOUTE l'association Mulhouse Olympic Natation de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE l'association Mulhouse Olympic Natation aux entiers dépens d'appel, comprenant les frais d'exécution forcée, ainsi qu'à payer à M. [W] [T] et à la société LGY Entertainment, ensemble, la somme de 2 000 euros (deux mille euros) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

Le greffier, La présidente de chambre,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 2 a
Numéro d'arrêt : 20/02178
Date de la décision : 13/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-13;20.02178 ?
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