La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/05/2022 | FRANCE | N°21/00469

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 4 a, 10 mai 2022, 21/00469


MINUTE N° 22/419





















































NOTIFICATION :



Pôle emploi Alsace ( )







Clause exécutoire aux :

- avocats

- délégués syndicaux

- parties non représentées



Le



Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

CHAMBRE SOCIALE - SEC

TION A



ARRET DU 10 Mai 2022



Numéro d'inscription au répertoire général : 4 A N° RG 21/00469

N° Portalis DBVW-V-B7F-HPKT



Décision déférée à la Cour : 07 Décembre 2020 par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE STRASBOURG



APPELANTE :



Madame [I] [F]

117, avenue du Général de Gaulle

67201 ECKBOLSH...

MINUTE N° 22/419

NOTIFICATION :

Pôle emploi Alsace ( )

Clause exécutoire aux :

- avocats

- délégués syndicaux

- parties non représentées

Le

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

CHAMBRE SOCIALE - SECTION A

ARRET DU 10 Mai 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : 4 A N° RG 21/00469

N° Portalis DBVW-V-B7F-HPKT

Décision déférée à la Cour : 07 Décembre 2020 par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE STRASBOURG

APPELANTE :

Madame [I] [F]

117, avenue du Général de Gaulle

67201 ECKBOLSHEIM

Représentée par Me Elodie HOLZMANN, avocat au barreau de STRASBOURG

INTIMES :

Maître [L] [U] ès qualités de mandataire liquidateur de la société MAEVA ASSURANCES

4A, rue du Périgord

BP 11020

67381 LINGOLSHEIM CEDEX

Non représenté

Association L'UNEDIC, DELEGATION AGS/CGEA DE NANCYAssociation AGS/CGEA DE NANCY, UNEDIC Association déclarée, représentée par sa Directrice nationale,

96 rue Saint Georges - CS 50510

CS 50510

54008 NANCY CEDEX

Représentée par Me Patrick TRUNZER, avocat au barreau de STRASBOURG

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 08 Mars 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme DORSCH, Président de Chambre

M. EL IDRISSI, Conseiller

Mme ARNOUX, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme THOMAS

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition au greffe par Mme DORSCH, Président de Chambre,

- signé par Mme DORSCH, Président de Chambre et Mme THOMAS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

FAITS ET PROCÉDURE

Madame [I] [F] épouse [V], née le 22 septembre 1998, a été engagée par la SARL Maeva Assurances selon contrat de professionnalisation à durée déterminée pour la période du 20 novembre 2017 au 31 juillet 2019 en qualité de «'conseillère commerciale'», moyennent un salaire en dernier lieu de 1.198 € bruts pour de 35 heures hebdomadaires de travail. La convention collective nationale des entreprises de courtage d'assurances et/ou de réassurances du 18 janvier 2002 est applicable.

Par courrier du 04 février 2019, Madame [F] mettait en demeure l'employeur de lui payer ses salaires échus, et de lui transmettre ses bulletins de salaire depuis le mois de septembre 2018.

Par courrier du 15 février 2019, elle a fait l'objet d'une convocation à un entretien préalable à une éventuelle rupture anticipée du contrat de professionnalisation pour faute grave assortie d'une mise à pied conservatoire. Par courrier du 05 mars 2019 l'employeur lui a notifié la rupture anticipée du contrat pour faute grave en raison de 19 absences injustifiées à sa formation entre avril 2018 et février 2019.

Selon jugement de la chambre commerciale du tribunal de grande instance de Strasbourg du 25 mars 2019, la société Maeva Assurances a été admise au bénéfice de la liquidation judiciaire, et Maître [U] a été désigné ès-qualités de liquidateur judiciaire.

Madame [F] a le 20 mai 2019 saisi le conseil de prud'hommes de Strasbourg aux fins d'obtenir la requalification du contrat de professionnalisation à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, la reconnaissance du caractère abusif de la rupture, ainsi que la fixation au passif de la liquidation judiciaire de diverses sommes à caractère salarial, et indemnitaire.

Par jugement du 07 décembre 2020, le conseil de prud'hommes de Strasbourg a fixé la créance de Madame [F] au passif de la liquidation judiciaire de la société Maeva Assurances aux sommes de 2.397,60 € bruts au titre des salaires impayés de janvier et février 2019, outre 239,76 € bruts pour les congés payés afférents, a débouté la demanderesse du surplus, a rappelé les conditions de la garantie de l'AGS, et a condamné Maître [U], ès-qualités de liquidateur judiciaire aux entiers frais et dépens.

Madame [F] a interjeté appel de ce jugement le 08 janvier 2021.

Par dernières conclusions récapitulatives transmises par voie électronique le 09 novembre 2021, Madame [F] demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris sauf en ce qu'il a fixé une créance de 2.397,60 € bruts au titre des salaires impayés de janvier et février 2019, outre 239,76 € bruts au titre des congés payés afférents, l'a déboutée de sa demande de requalification du contrat, et a condamné Maître [U], ès-qualités de liquidateur judiciaire aux entiers frais et dépens de première instance.

Elle demande qu'il soit jugé que la rupture anticipée de son contrat de professionnalisation est abusive, et la fixation d'une créance de 5.994 € de dommages et intérêts au titre de la rupture abusive.

Elle sollicite par ailleurs'la condamnation de Maître [U], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société Maeva assurances à':

- lui remettre les bulletins de paie des mois de septembre 2018 à février 2019 ainsi que l'ensemble des documents de fin de contrat sous astreinte,

- faire apparaître les montants de l'indemnité de précarité ainsi que l'indemnité compensatrice de congés payés sur le solde de tout compte,

- au paiement de la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers frais et dépens.

Selon conclusions d'intimée transmises par voie électronique le 06 juillet 2021, l'AGS-CGEA de Nancy demande à la cour de confirmer le jugement en toutes ses dispositions, de débouter l'appelante de ses demandes, de la condamner aux entiers frais et dépens, et de rappeler les conditions et limites de sa garantie, ainsi que l'arrêt du cours des intérêts légaux au jour d'ouverture de la procédure collective.

Maître [U], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société Maeva Assurances, non représenté à la procédure, s'est vu signifier la déclaration d'appel ainsi que les conclusions d'appel du 06 avril 2021 par voie d'huissier le 22 avril 2021.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 22 février 2022.

Il est, en application de l'article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des faits moyens et prétentions des parties, renvoyé aux conclusions ci-dessus visées.

MOTIFS

La cour constate à titre liminaire que Madame [F] ne conteste pas le jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de requalification du contrat de professionnalisation en contrat de travail à durée indéterminée, et que l'AGS-CGEA de Nancy ne remet pas en cause ce même jugement en ce qu'il a fixé au passif de la liquidation judiciaire de la société Maeva Assurances les sommes correspondant au rappel de salaire des mois de janvier et février 2019 assortis des congés payés afférents.

1) Sur la rupture anticipée du contrat de professionnalisation pour faute grave

La faute grave résulte d'un fait, ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail, ou des relations de travail d'une importance telle, qu'elle rend impossible le maintien du salarié fautif dans l'entreprise.

Il appartient par ailleurs à l'employeur qui l'invoque, de rapporter la preuve de l'existence d'une faute grave.

En l'espèce la société Maeva Assurances a par courrier du 5 mars 2019 prononcé la rupture anticipée du contrat de professionnalisation de Madame [F] pour faute grave en raison de 19 absences injustifiées auprès de l'organisme de formation entre avril 2018 et février 2019, soit : « un sombre particulièrement important », en soulignant « vous n'avez pas pris la peine de justifier ces absences ni auprès de votre organisme de formation, ni auprès de notre société. Leur importance et leur fréquence témoignent de votre manque d'implication dans votre cursus. En mettant à mal le suivi de la formation théorique à laquelle vous êtes astreinte vous compromettez également la bonne exécution du contrat de professionnalisation que nous avons conclu. En effet les deux aspects de votre formation doivent être menés de concert. Nous considérons que ces faits constituent une faute grave'»

Madame [F] ne conteste pas la réalité de ses absences, mais conteste qu'elles constituent une faute grave en invoquant l'absence de toute sanction disciplinaire antérieure, et le fait qu'elles n'ont pas désorganisé l'entreprise, et ne l'ont pas empêcher de se présenter aux épreuves du diplôme. Elle réclame par conséquent la fixation de la somme de 5.994 € correspondant aux salaires qu'elle aurait dû percevoir jusqu'à la fin de son contrat de travail à durée déterminée, soit de mars à juillet 2019.

Selon l'article L 6325-3 alinéas 2 du code du travail le salarié s'engage à travailler pour le compte de l'employeur, et à suivre la formation prévue au contrat.

En l'espèce conformément à ce texte, le contrat de professionnalisation signé par les parties le 07 novembre 2017 dispose que l'employeur s'engage à assurer au titulaire du contrat une formation lui permettant d'acquérir une qualification professionnelle et à lui fournir un emploi en relation avec cet objectif pendant la durée du contrat, et que «' Le titulaire du contrat s'engage à travailler pour le compte de son employeur et à suivre la formation prévue au contrat'».

Ainsi les obligations de la salariée sont de travailler pour le compte de l'employeur, mais également de suivre la formation prévue au contrat, qui apparaît donc comme une obligation essentielle à sa charge. En effet le contrat de professionnalisation a pour finalité l'insertion, ou le retour à l'emploi en permettant au salarié d'acquérir une qualification professionnelle dans le cadre de la formation continue.

Or force est de constater que Madame [F] n'a sur ce point pas respecté son obligation contractuelle. Le nombre important d'absences, soit 19, sur une courte durée de 10 mois, et ce sans aucune justification apparaît être un manquement suffisamment grave pour justifier la rupture du contrat de travail pour faute grave, nonobstant l'absence de passé disciplinaire. La désorganisation de l'entreprise n'est pas une condition nécessaire pour pouvoir invoquer la faute grave. Enfin si Madame [F] soutient, au demeurant sans le prouver, qu'elle s'est présentée à l'examen, elle ne justifie nullement de ses résultats, et notamment de l'obtention du diplôme malgré ses nombreuses absences à la formation théorique.

Par conséquent le jugement sera confirmé en ce qu'il a validé la rupture pour faute grave, et rejeté la demande de fixation au passif de la liquidation judiciaire des salaires restant dus jusqu'à la fin du contrat.

2) Sur la délivrance des bulletins de paie de septembre 2018 à février 2019

Il est constant que Mme [F] a réclamé d'abord auprès de la société Maeva Assurances (courrier recommandé avec accusé de réception du 04 février 2019), puis du liquidateur judiciaire (courriel du 08 avril 2019) la délivrance des bulletins de paie des mois de septembre 2018 à février 2019.

Aucun élément du dossier n'établit que ces bulletins de paye, qu'elle réclame légitimement, lui ont bien été envoyés, de sorte qu'il est fait droit à sa demande, le jugement étant infirmé sur ce point. Le prononcé d'une astreinte n'est cependant pas justifié en l'état.

3) Sur la transmission des documents de fin de contrat

Sur ce point, l'appelante justifie encore avoir sollicité la délivrance des documents de fin de contrat par courrier du 26 mars 2019 adressé à la société Maeva Assurances, puis par courriel envoyé par l'intermédiaire de son conseil au liquidateur judiciaire le 08 avril 2019. Ces documents doivent lui être adressés par le liquidateur judiciaire, sans que là non plus le prononcé d'une astreinte ne soit en l'état justifié.

Mme [F] sollicite que les sommes correspondant à 28 jours de congés payés restants non pris, et non payés, ainsi que l'indemnité de précarité figurent sur le solde de tout compte.

L'indemnité de précarité de 2.446,79 € ne fait l'objet d'aucune contestation et devra donc être portée sur le solde de tout compte.

En revanche s'agissant des jours de congés payés non pris, il résulte du bulletin de salaire d'août 2018 que la salariée était alors créditrice de 5,5 jours de congés au titre de l'année N -1, et de 7,5 au titre de l'année N, soit un total de 13 jours. Elle bénéficie ensuite de 2,5 jours de congés par mois de travail soit 12,5 jours supplémentaires jusqu'à fin février 2019, soit un total de 25,5 jours, et non de 28  jours tels que réclamé.

Il apparaît en outre que lors de ses 13 absences injustifiées d'octobre 2018 à février 2019, parfois pour deux heures de cours, d'autres fois pour la journée complète la salariée n'a pas généré de congés payés.

Par conséquent il y a lieu de retenir 24 jours de congés soit (1.198,80'/28 x 24) 1.027,54 € bruts qui devront être portés sur le solde de tout compte.

4) Sur les autres demandes

L'AGS doit sa garantie en l'absence de fonds disponibles et dans la limite des dispositions légales et réglementaires, le jugement est donc confirmé sur ce point. Il doit par ailleurs être complété en ce que le cours des intérêts légaux est arrêté au jour de l'ouverture de la procédure collective.

Le jugement est confirmé s'agissant de la condamnation du liquidateur judiciaire es qualité aux entiers frais et dépens.

Mme [F], qui à hauteur de cour succombe pour l'essentiel, est condamnée aux dépens de la procédure d'appel, et sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et rejetée.

PAR CES MOTIFS

La Cour, Chambre sociale, statuant par arrêt réputé contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré

CONFIRME le jugement rendu le 07 décembre 2020'par le conseil des prud'hommes de Strasbourg en toutes ses dispositions SAUF en ce qu'il rejette les demandes de Madame [F] concernant la remise par le liquidateur judiciaire des bulletins de paye, et des documents de fin de contrat';

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et Y ajoutant';

DIT et JUGE que le cours des intérêts légaux est arrêté au jour d'ouverture de la procédure collective de la SARL Maéva Assurances';

CONDAMNE Maître [L] [U] es qualité de liquidateur judiciaire de la SARL Maéva Assurances à délivrer à Madame [I] [F] dans le délai d'un mois à compter de la demande de la salariée':

- les bulletins de salaire des mois de septembre 2018 à février 2019,

- le certificat de travail,

- l'attestation pôle emploi,

- le solde de tout compte faisant apparaître l'indemnité de précarité de 2.446,79 € (deux mille quatre cent quarante six euros et soixante dix neuf centimes), et l'indemnité compensatrice de congés payés de 1.027,54 € bruts (mille vingt sept euros et cinquante quatre centimes)';

DEBOUTE Madame [I] [F] de sa demande d'astreinte ;

DEBOUTE Madame [I] [F] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile';

CONDAMNE Madame [I] [F] aux entiers frais et dépens de la procédure d'appel.

LEDIT ARRÊT a été prononcé par mise à disposition au greffe le 10 mai 2022, et signé par Mme Christine DORSCH, Président de Chambre, et par Mme Martine THOMAS, Greffier.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 4 a
Numéro d'arrêt : 21/00469
Date de la décision : 10/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-10;21.00469 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award