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28/04/2022 | FRANCE | N°19/03944

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 2 a, 28 avril 2022, 19/03944


MINUTE N° 194/2022





























Copie exécutoire à



- Me Guillaume HARTER



- Me Valérie SPIESER





Le 28/04/2022



Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE



ARRET DU 28 Avril 2022





Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 19/03944 - N° Portalis DBVW-V-B7D-HFTD

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Décision déférée à la cour : 23 Juillet 2019 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE STRASBOURG





APPELANTS :



1/ Monsieur [N] [M]

2/ Madame [A] [X]

demeurant ensemble [Adresse 3]



représentés par Me Guillaume HARTER, avocat à la cour.





INTIMÉS :



1/ Mons...

MINUTE N° 194/2022

Copie exécutoire à

- Me Guillaume HARTER

- Me Valérie SPIESER

Le 28/04/2022

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE

ARRET DU 28 Avril 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 19/03944 - N° Portalis DBVW-V-B7D-HFTD

Décision déférée à la cour : 23 Juillet 2019 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE STRASBOURG

APPELANTS :

1/ Monsieur [N] [M]

2/ Madame [A] [X]

demeurant ensemble [Adresse 3]

représentés par Me Guillaume HARTER, avocat à la cour.

INTIMÉS :

1/ Monsieur [S] [V]

2/ Madame [P] [D] épouse [V]

demeurant ensemble [Adresse 4]

représentés par Me Valérie SPIESER, avocat à la cour.

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 10 Février 2022, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Isabelle DIEPENBROEK, Présidente de chambre

Madame Catherine GARCZYNSKI, Conseiller

Madame Myriam DENORT, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie SCHIRMANN

ARRET contradictoire

- prononcé publiquement après prorogation du 7 avril 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente et Madame Sylvie SCHIRMANN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

M. [M] et Mme [X] d'une part, et les époux [V] d'autre part, sont propriétaires de maisons individuelles avec jardin, dont les terrains (parcelle n°[Cadastre 7] [M]/[X] et parcelle n°[Cadastre 6] [V]) sont contigus, respectivement au [Adresse 2] ; les premiers ont une piscine extérieure, dont la pompe à chaleur 'capotée' air/eau (PAC), aux fins de réchauffage de l'eau, est installée contre la clôture grillagée séparant les deux propriétés, à proximité de la terrasse et de la chambre à coucher des seconds. La PAC est équipée d'une horloge permettant de piloter sa mise en marche.

Les époux [V], se plaignant de nuisances sonores, ont obtenu en référé le 18 août 2015 la désignation d'un expert ; M. [B] a établi son rapport le 6 février 2017, maintenant ses conclusions après les dires adressés par les parties, estimant notamment que le rapport de l'expert privé des consorts [G], M. [I], ne les remettait pas en cause.

L'expert a eu recours à un sapiteur acousticien, M. [U], qui a effectué des mesurages du 'mercredi 22 juin 2016 vers 17 h 00 au vendredi 24 juin vers 15 h 30" selon les modalités suivantes :

- en limite de propriété et sur la terrasse des époux [V], de façon ponctuelle,

- sur un jour et 21 h 00, dans la chambre à coucher des époux [V], fenêtre ouverte, avec mise en route et extinction manuelle de la PAC pour les besoins de l'expertise.

Celui-ci a conclu que :

- les émergences sonores enregistrées étaient conformes à la réglementation de jour [de 5 décibels (dB) max pour un niveau global pondéré A (A) de 7 h à 22 h] mais pas de nuit [de 3 dB (A) max de 22 h à 7 h], en raison d'un dépassement de 0,5 dB (A) sur la fréquence de 500 Hz,

- mais que les émergences mesurées de jour étaient 'très largement' audibles, ce que confirmaient les mesures effectuées sur la terrasse et en limite de propriété et ce qui justifiait, selon lui, la plainte des voisins.

L'expert a repris ces conclusions, concernant le respect de la réglementation de jour mais pas de nuit, au regard du code de la santé publique, mais estimé que 'la responsabilité des nuisances sonores' incombait 'à 100%' à M. [M] et Mme [X], en faisant installer la PAC en limite de propriété, au pied de la terrasse et sous la fenêtre de la chambre à coucher de leurs voisins.

C'est dans ces conditions que les époux [V] ont assigné au fond M. [M] et Mme [X] le 8 juin 2017 aux fins de déplacement de la pompe à chaleur 'bien au delà de la limite de propriété' et de dommages et intérêts sur le fondement du trouble anormal de voisinage.

Par jugement du 23 juillet 2019, le tribunal a dit que la pompe à chaleur était à l'origine d'un trouble anormal de voisinage et condamné, avec exécution provisoire, les consorts [M] [X] à :

- déplacer la pompe à chaleur et à l'installer, conformément aux préconisations de l'association française pour les pompes à chaleur (AFPAC), à une distance suffisante de la limite de propriété entre leur fonds et celui des époux [V], afin que ceux-ci ne soient plus gênés par le bruit qu'elle générait, ce sous astreinte provisoire de 50 euros par jour de retard à l'issue d'un délai de deux mois suivant la signification de la décision,

- payer aux époux [V] :

* la somme de 3 500 euros à titre de dommages et intérêts pour le trouble de jouissance subi,

* la somme de 2 500 au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens, y compris ceux du référé incluant les frais d'expertise judiciaire.

Le tribunal s'est référé d'une part, au rapport d'expertise judiciaire ayant estimé que les défendeurs devaient s'interdire de faire fonctionner la pompe la nuit, en mettant en place un dispositif fiable comportant une horloge disposant d'un verrouillage, à défaut de quoi ils devraient déplacer la pompe pour l'éloigner de la propriété [V], et d'autre part, à des attestations de personnes ayant séjourné chez les époux [V] en période estivale et été incommodées par le bruit irritant émis par la PAC, non contredites pas les attestations adverses de voisins plus éloignés de l'installation.

Il a jugé que le bruit généré par le pompe constituait un trouble anormal du fait de sa durée, de sa répétition et de son intensité, même en admettant qu'elle ne fonctionnerait que de jour, ce qui n'était pas avéré, et que, les consorts [M] [X] ne proposant pas d'installer l'horloge préconisée, ils devaient déplacer la PAC.

*

M. [M] et Mme [X] ont interjeté appel le 27 août 2019.

Par conclusions du 31 mai 2021, ils sollicitent l'infirmation du jugement aux fins de rejet de l'ensemble des demandes, en l'absence de trouble anormal et compte tenu, subsidiairement, de ce qu'ils ne font pas usage de la pompe en période nocturne de 22 h à 8 h, ce dont il pourra leur être donné acte (proposant dans les motifs que cette utilisation leur soit interdite) ; ils sollicitent la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile .

Ils font valoir que le jugement est fondé sur un constat d'huissier non contradictoire et un rapport d'expertise ne respectant pas les prescriptions de l'ordonnance de référé, puisque les mesures n'ont pas été prises fenêtres fermées, alors qu'elles devaient l'être fenêtres ouvertes et fermées, de sorte qu'elles sont insuffisantes ; que la PAC est insonorisée par un coffre et se trouve dans un jardin, lui-même entouré de maisons individuelles en construction 'équipées de dispositifs similaires' ; qu'ils ont exécuté le jugement en démontant la PAC mais ne peuvent la réinstaller ailleurs pour des raisons techniques ; que le tribunal a fait une mauvaise appréciation de la loi en omettant d'appliquer l'article R1336-7 du code de la santé publique, prévoyant un correctif à appliquer en fonction de la durée cumulée d'apparition du bruit particulier (égal à zéro seulement pour une durée supérieure à 8 h) ; que l'expert n'en a parlé qu'en période diurne pour l'exclure en raison de la durée de plus de 8 h ; qu'il faudrait appliquer un correctif la nuit puisque la pompe ne fonctionnerait pas en continu, de sorte qu'il rend caduc le dépassement incriminé de 0,5 dB(A) selon ce que dit l'expert privé [I] dans son rapport ; que fenêtre fermée, le dépassement de 0,5 dB (A) serait largement absorbé et que, en tout état de cause, la pompe ne fonctionne pas la nuit, ce qui rend inutile le verrouillage de l'horloge préconisé (en réalité un plombage), d'autant qu'il demeurerait sous leur contrôle. Ils précisent que cette horloge, disposant d'un verrouillage horaire, existe déjà dans la mesure où les plages horaires durant laquelle la PAC est susceptible de fonctionner font l'objet d'une programmation.

Ils ajoutent que les anciens propriétaires n'ont jamais été dérangés ; que de manière objective, le son de la PAC n'est pas susceptible d'être qualifié de trouble de voisinage puisqu'en conformité avec les normes réglementaires ; que l'analyse in concreto qui doit être faite implique de prendre en compte le bruit dans son environnement global ; que le sapiteur a fait arrêter la filtration pendant la prise des mesures (car génératrice de clapotis), ce qui a réduit le bruit résiduel et augmenté l'émergence ; qu'il a lui-même noté différent bruits dans l'environnement (D 111, D 932, autoroute A35 et trafic aérien d'[Localité 10]) ; que plusieurs constructions sont en cours autour des maisons, ce qui va réduire l'émergence sonore de la PAC ; que leurs nouveaux voisins ont déjà installé une PAC pour chauffer et climatiser leur maison, fonctionnant jour et nuit ; qu'eux-mêmes ne font fonctionner la leur en moyenne que de mi-mai à mi-septembre et pas quand ils sont absents, soit 4 semaines et 4 week ends sur la période, les époux [V] étant eux-mêmes absents un certain nombres de jours ; que la PAC s'arrête quand la température est atteinte (25°), ce qui dépend de la température extérieure, et qu'ils recouvrent la piscine la nuit par une bâche à bulles pour éviter les déperditions de chaleur, de sorte qu'au total la prétendue gêne est limitée en moyenne à une vingtaine de jours par an, sur une plage horaire limitée de 10 h à 17 h, et ce de façon discontinue et ponctuelle, en fonction de la température atteinte.

Ils ajoutent que le premier juge a donné force probante à des attestations relatant un bruit antérieur à l'encoffrement et l'isolement phonique de la PAC.

Ils contestent le préjudice admis par le premier juge en l'absence de trouble anormal et alors qu'en tout état de cause, la PAC n'a jamais fonctionné la nuit.

*

Par conclusions du 24 février 2021, les époux [V] sollicitent la confirmation du jugement déféré, outre la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Ils précisent avoir vendu leur bien le 9 novembre 2020, l'acquéreur étant subrogé dans leurs droits concernant la procédure, eux-mêmes en supportant toutes les conséquences financières.

Ils soutiennent qu'il ne suffit pas que les émergences soient conformes en période diurne pour qu'il n'y ait pas de trouble de voisinage, d'autres critères devant être pris en compte comme l'a fait le tribunal ; que la question du correctif à appliquer la nuit a été débattue lors de l'expertise et que l'expert a estimé qu'un correctif n'avait pas à être retenu ; qu'il a répondu aux dires à ce sujet ; qu'il est étonnant qu'aucune contre-expertise ne soit demandée ; que, si les mesures ont seulement été prises fenêtre ouverte dans la chambre, elles ne sont pas pour autant insuffisantes, alors que la piscine a vocation à être utilisée lorsqu'il fait chaud et qu'il est nécessaire d'ouvrir les fenêtres ; qu'ils établissent par des attestations le caractère gênant du bruit généré par la PAC et que, si elle ne fonctionne qu'une partie de l'année, c'est précisément celle où il est plaisant de profiter de sa terrasse ou de laisser les fenêtres ouvertes.

MOTIFS

Sur la critique du rapport d'expertise

Si les mesures de bruit n'ont été prises dans la chambre à coucher des intimés que fenêtres ouvertes, alors qu'elles devaient l'être fenêtres ouvertes et fermées selon l'ordonnance de référé, elles demeurent pertinentes pour l'évaluation du trouble subi lorsque les fenêtres sont ouvertes. Force est de constater que les appelants ne forment aucune demande de retour du dossier à l'expert pour que des mesures soient prises fenêtres fermées et qu'ils ne soulèvent aucune nullité du rapport d'expertise.

S'agissant de l'absence d'application, pour les mesures nocturnes, d'un correctif en fonction de la durée cumulée d'apparition du bruit particulier prévu à l'article R1336-7 du code de la santé publique - lequel est égal à zéro seulement pour une durée supérieure à 8 heures alors qu'en l'espèce le mesurage n'a été fait que durant 20 mn -, l'expert a indiqué qu'il s'agissait uniquement d'appréhender le niveau sonore induit par la PAC et a renvoyé à la réponse de son sapiteur sur l'absence d'application d'un correctif selon laquelle : 'si la PAC devait fonctionner la nuit, elle pourrait potentiellement fonctionner plus de 8 h. Aucun terme correctif ne serait applicable'.

Il en résulte que c'est seulement si la pompe fonctionnait plus de huit heures la nuit (entre 22 h et 7 h) qu'il existerait un dépassement de 0,5 dB(A) du seuil d'émergence légal sur la fréquence de 500 Hz.

En tout état de cause, il n'est pas établi que la pompe fonctionne sur une telle durée la nuit ; l'expert a d'ailleurs pris soin de préciser avoir fait ces enregistrements nocturnes parce que les époux [V] affirmaient que la PAC fonctionnait la nuit, ce que les consorts [M] [X] contestaient.

Sur le trouble de voisinage

Il est de principe que nul ne doit causer à autrui des troubles excédant les inconvénients normaux du voisinage.

L'anormalité du trouble doit être apprécié in concreto et l'absence de faute n'est pas exonératoire, celle-ci n'étant pas une condition de la responsabilité du propriétaire en la matière.

En l'espèce, l'expert a commencé par faire vérifier par le sapiteur l'efficacité acoustique du capotage phonique (encoffrement) mis en place en juillet 2015 ; celui-ci a pris les mesures nécessaires à cette vérification, à un mètre de la machine, et indiqué que ce capotage avait entraîné un affaiblissement phonique de 6 dB (A) environ.

Le sapiteur acousticien a ensuite procédé aux autres mesures acoustiques, capotage phonique fermé.

Il a d'abord pris des mesures à un moment donné de la journée (avec passage d'un avion) ; il en a déduit, après extinction de la filtration et de la PAC pour le calcul du bruit résiduel, une émergence de 13 dB (A) en limite de propriété et de 4 dB (A) sur la terrasse ainsi que dans la chambre à coucher des époux [V], fenêtre ouverte.

Puis il a procédé à des mesures et analyses plus détaillées, dans le cadre réglementaire du décret 2006-1099 du 31 août 2006 relatif à la lutte contre les bruits de voisinage, sur une durée d'un jour et 21 h, entre le 22 juin et le 24 juin 2016, depuis la chambre à coucher, fenêtre ouverte.

S'il est constant qu'il résulte des mesures effectuées dans ce cadre réglementaire que le seuil légal d'émergence n'est pas dépassé en journée dans la chambre fenêtre ouverte, cette circonstance ne suffit toutefois pas à écarter tout trouble anormal, lequel résulte de l'installation de la PAC en limite de propriété et à proximité de la terrasse (3 mètres) ainsi que de la chambre à coucher des intimés, et ce malgré le capotage phonique mis en place en juillet 2015, qui n'a pas été suffisant.

Le fait qu'il existe d'autres bruits dans l'environnement ne retire pas au trouble créé par le fonctionnement de la pompe son caractère anormal ; ils ont été pris en compte dans le calcul de l'émergence - qui est importante sur certaines fréquences, même si elle reste inférieure au seuil légal, au vu de la synthèse des résultats d'analyse mettant en évidence que, sur les fréquences de 125 et 250 Hz, elle est de 6,5 pour une émergence admissible de 7-, puisqu'elle correspond à la différence entre le niveau de bruit ambiant, qui comprend l'ensemble des bruits dont le bruit particulier en cause, et le niveau de bruit résiduel, constitué par l'ensemble des bruits habituels, en l'absence de ce bruit particulier.

Le sapiteur acousticien a lui-même conclu son rapport en indiquant que même si les émergences étaient inférieures aux limites réglementaires admissibles, les plaintes étaient compréhensibles. L'expert [B] a également conclu son rapport en indiquant que 'la responsabilité des nuisances sonores incombait à 100%' aux intimés, en faisant installer la PAC en limite de propriété au pied de la terrasse et sous la fenêtre de la chambre à coucher, la conformité des émergences ayant été exprimée seulement 'au sens du code de la santé publique'.

Si M. [Z], ancien propriétaire de l'immeuble des époux [V], a attesté en date du 7 août 2015 ne pas avoir été dérangé, ni sa fille occupant 'la chambre dont la fenêtre donne au dessus de la PAC', par le bruit provoqué par le fonctionnement de celle-ci, il indique lui-même qu'elle a été installée 'quelques mois' avant son départ ; selon l'expertise, elle a été installée en février 2013 et il ressort de l'acte de vente du bien par les époux [V], que M. [Z] le leur a vendu le 05 septembre 2013. Ainsi l'ancien propriétaire n'a pas été exposé longtemps au fonctionnement de la pompe, d'autant qu'il a pu être absent une partie des vacances d'été ; de plus, il n'est pas un témoin objectif, ayant un intérêt à contester l'existence d'un trouble, en tant que vendeur du bien, ce qui ressort de son affirmation sans nuance selon laquelle le bruit provoqué 'ne peut certainement pas être considéré comme un trouble de voisinage'.

M. [Z] atteste également que les époux [V] ont eu l'occasion d'entendre la PAC lors de 'leurs multiples visites' de la maison et 'ont fait des tests dans plusieurs pièces avec les fenêtres ouvertes' ; il en déduit qu'ils ont acheté la maison 'en toute connaissance de cause' et qu'ils ont conclu que le bruit n'était pas gênant.

Cependant, outre l'absence d'objectivité de M. [Z] en tant que vendeur, soulignée ci-dessus, les époux [V] ne pouvaient pas se rendre compte, à l'occasion de simples visites ponctuelles du bien, du trouble engendré au quotidien pendant la période d'utilisation de la piscine, compte tenu de sa durée et de sa répétition.

Si les époux [C], voisins des appelants (occupants de la parcelle [Cadastre 8] au n°[Adresse 1]), ont attesté le 25 mai 2018 n'entendre jamais le bruit de la pompe à chaleur, celle-ci n'est pas implantée en limite de leur terrain, qui se situe du côté opposé. Quant à Mme [R], son habitation au [Adresse 9] (parcelle [Cadastre 5]) est séparée de la parcelle [M]/[X] par la [Adresse 3] et sa chambre à coucher qu'elle dit 'orientée du côté de la pompe à chaleur' n'est pas dans la même situation de proximité par rapport à la pompe que celle des époux [V] ; en tout état de cause, elle ne fait que certifier ne pas entendre la pompe 'la nuit'.

Au contraire, les époux [V] produisent des attestations de visiteurs ayant été gênés par le bruit de la pompe à chaleur, qualifié d''irritant', de 'persistant et agaçant' ou de 'bourdonnement constant' durant l'été 2016 ([K] [Y]) ou en juin 2017 ([O] [H] et [F] [T]), soit après l'encoffrement.

Il n'est pas établi par la production d'une simple photographie d'une maison en construction montrant un appareil posé le long d'un mur extérieur, devant une fenêtre, que de nouveaux voisins des appelants auraient installé une PAC, ni qu'elle serait en limite de propriété, ni qu'elle fonctionnerait jour et nuit, comme soutenu ; et l'éventuel trouble anormal que subiraient les appelants pourrait donner lieu à réparation, ne rendant pas pour autant normal celui subi par les intimés.

Enfin, les appelants ne démontrent pas que les époux [V] ne seraient gênés en moyenne qu'une vingtaine de jours par an et seulement ponctuellement en journée, compte tenu de leurs absences respectives de leur domicile et de ce que la pompe ne fonctionne plus quand la température de 25° est atteinte.

Par ailleurs, le trouble anormal existant de jour, empêcher le fonctionnement de la PAC la nuit serait sans incidence sur celui-ci, de sorte que la proposition subsidiaire des appelants est insuffisante.

M. [M] et Mme [X] ne justifient pas de l'impossibilité technique alléguée de déplacer la PAC, ne produisant qu'un courrier d'une société Amazone 2 (Alliance piscines) les informant de ce qu'il est 'compliqué' de déplacer la pompe, 'sachant que de gros travaux sont à prévoir et que cela s'avérera très coûteux'.

Au vu de ces éléments, il convient de confirmer le jugement déféré ayant retenu l'existence d'un trouble anormal de voisinage et condamné les appelants à déplacer leur pompe à chaleur.

Le jugement déféré sera également confirmé en ce qu'il a alloué la somme de 3 500 euros aux époux [V] au titre du trouble de jouissance subi ; en effet cette disposition du jugement n'est critiquée qu'au motif de l'absence de trouble anormal et de fonctionnement de la PAC la nuit. Cependant le trouble anormal a été retenu par la cour au regard du seul fonctionnement de la PAC de jour et la somme allouée apparaît justifiée.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Le jugement étant confirmé, il le sera également en ces dispositions sur les dépens, y compris ceux du référé, et l'article 700 du code de procédure civile.

Les appelants succombant en leur appel, seront condamnés aux dépens d'appel et à payer aux intimés la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais non compris dans les dépens qu'ils ont exposés en cause d'appel, eux-mêmes étant déboutés de leur propre demande de ce chef.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, rendu publiquement par mise à disposition au greffe, conformément à l'article 450, aloinéa 2 du code de procédure civile,

DÉBOUTE M. [N] [M] et Mme [A] [X] de leur demande subsidiaire tendant à ce qu'il leur soit donné acte de ce qu'ils ne font pas usage de la pompe en période nocturne,

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

CONDAMNE M. [N] [M] et Mme [A] [X], in solidum à payer à M. [S] [V] et Mme [P] [D] épouse [V], ensemble, la somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) en application de l'article 700 du code de procédure civile, au titre de leurs frais non compris dans les dépens exposés en cause d'appel

CONDAMNE M. [N] [M] et Mme [A] [X], in solidum, aux dépens d'appel et les déboute de leur demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier,La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 2 a
Numéro d'arrêt : 19/03944
Date de la décision : 28/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-28;19.03944 ?
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