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25/04/2022 | FRANCE | N°21/02874

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 3 a, 25 avril 2022, 21/02874


MINUTE N° 22/227





























Copie exécutoire à :



- Me Katja MAKOWSKI

- Me Orlane AUER





Le



Le greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

TROISIEME CHAMBRE CIVILE - SECTION A



ARRET DU 25 Avril 2022





Numéro d'inscription au répertoire général : 3 A N° RG 21/02874 - N° Portalis DBVW-V-B7F-HTP5



Décisio

n déférée à la cour : jugement rendu le 11 mai 2021 par le juge des contentieux de la protection de Haguenau



APPELANTS :

Monsieur [T] [B]

[Adresse 5]

[Localité 3]



Représenté par Me Katja MAKOWSKI, avocat au barreau de COLMAR, avocat postulant, et Me Delphine...

MINUTE N° 22/227

Copie exécutoire à :

- Me Katja MAKOWSKI

- Me Orlane AUER

Le

Le greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

TROISIEME CHAMBRE CIVILE - SECTION A

ARRET DU 25 Avril 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : 3 A N° RG 21/02874 - N° Portalis DBVW-V-B7F-HTP5

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 11 mai 2021 par le juge des contentieux de la protection de Haguenau

APPELANTS :

Monsieur [T] [B]

[Adresse 5]

[Localité 3]

Représenté par Me Katja MAKOWSKI, avocat au barreau de COLMAR, avocat postulant, et Me Delphine VIAL, avocat au barreau de STRASBOURG, avocat plaidant

Madame [F] [B]

[Adresse 5]

[Localité 3]

Représentée par Me Katja MAKOWSKI, avocat au barreau de COLMAR, avocat postulant, et Me Delphine VIAL, avocat au barreau de STRASBOURG, avocat plaidant

INTIMES :

Madame [J] [S]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Orlane AUER, avocat au barreau de COLMAR

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/004058 du 07/09/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de COLMAR)

Monsieur [E] [S]

[Adresse 1]

[Localité 4]

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 07 février 2022, en audience publique, devant la cour composée de :

Mme MARTINO, Présidente de chambre

Mme FABREGUETTES, Conseiller

Madame DAYRE, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme HOUSER

ARRET :

- rendu par défaut

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Annie MARTINO, président et Mme Anne HOUSER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

FAITS CONSTANTS ET PROCEDURE

Selon contrat du 11 septembre 2015, Monsieur [T] [B] et Madame [F] [B] ont donné à bail à Monsieur [E] [S] et Madame [J] épouse [S] une maison individuelle située [Adresse 2], moyennant paiement d'un loyer mensuel initial de 1 020 €, outre une avance sur charges de 30 €.

Par lettre du 13 septembre 2019, Monsieur [E] [S] a informé les bailleurs de ce qu'il quitterait le domicile à partir du 31 octobre 2019, Madame [X] restant comme seule locataire.

Faisant valoir que Madame [X] a procédé elle-même à la résiliation du contrat de bail, leur indiquant qu'elle serait effective le 30 avril 2020 à l'expiration du délai de préavis, de ce qu'ils ont en conséquence conclu un nouveau contrat de bail avec d'autres locataires et de ce que Madame [J] épouse [S] refuse de libérer les lieux, Monsieur [T] [B] et Madame [F] [B] ont assigné Madame [J] épouse [S] et Monsieur [E] [S] devant le tribunal de proximité de Haguenau, aux fins de voir constater que le bail signé entre les parties a été résilié successivement par Monsieur [S] et Madame [J] épouse [S], constater que la résiliation du bail est devenue effective au 30 avril 2020, constater que Madame [J] épouse [S] se maintient illégalement dans les lieux et qu'elle est occupante sans droit ni titre depuis le 1er mai 2020, de voir ordonner son expulsion, celle de Monsieur [S] et de tous occupants de leur chef, sous astreinte de 50 € par jour de retard et de voir condamner solidairement les défendeurs au paiement d'une indemnité mensuelle d'occupation égale aux loyers et charges révisés jusqu'à complète évacuation, outre la somme de 2 000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. Ils ont formé une demande additionnelle tendant à la condamnation solidaire des défendeurs au paiement d'une somme de 1 500 € à titre de dommages et intérêts, en réparation du préjudice, notamment moral, né de leurs agissements.

Madame [J] épouse [S] a conclu au rejet des demandes, faisant valoir qu'elle était dans l'incapacité de comprendre qu'elle résiliait le contrat de bail en raison de ses difficultés avec la langue française ; qu'il n'est pas prouvé que le courrier dont se prévalent les époux [B] émane d'elle ou qu'elle l'a écrit sans pression ; qu'elle n'avait aucun intérêt à résilier le contrat, puisqu'elle n'avait aucune possibilité de se reloger, alors qu'elle vit avec les deux enfants mineurs issus de son mariage avec Monsieur [S] ; que les demandeurs ne subissent aucun préjudice, dans la mesure où le loyer est payé chaque mois par Monsieur [S], en lieu et place de la pension alimentaire qu'il lui doit.

Monsieur [E] [S] a demandé qu'il soit constaté qu'il s'acquitte régulièrement du montant du loyer entre les mains des bailleurs depuis le 1er février 2020, a conclu au rejet des demandes en paiement des loyers jusqu'à libération complète des lieux par Madame [J] épouse [S] et a demandé subsidiairement qu'il ne soit condamné au paiement des loyers que jusqu'au jour du prononcé du divorce.

Il a fait valoir qu'ayant d'ores et déjà quittés les lieux, il n'est pas concerné par la demande d'expulsion ; qu'une fois le divorce prononcé, il cessera de régler les loyers du fait de l'occupation par Madame Du du bien loué ; qu'il ne peut en tout état de cause être condamné au paiement des loyers jusqu'à complète libération des lieux.

Par jugement du 11 mai 2021, le tribunal de proximité de Haguenau a :

-déclaré recevable la demande de Monsieur [T] [B] et de Madame [F] [B],

-dit que le congé délivré par Monsieur [E] [S] n'est pas opposable à Madame [J] épouse [S] et n'est pas de nature à mettre fin au contrat de bail conclu le 11 septembre 2015 ni à la solidarité avec cette dernière à l'égard de Monsieur [T] [B] et Madame [F] [B] au titre du bail conclu le 11 septembre 2015,

-débouté Monsieur [T] [B] et Madame [F] [B] de leur demande en validation du congé délivré par Madame [J] épouse [S] et en résiliation du bail conclu le 11 septembre 2015,

-débouté Monsieur [T] [B] et Madame [F] [B] de leur demande en expulsion de Madame [J] épouse [S],

-débouté Monsieur [T] [B] et Madame [F] [B] de leur demande en fixation et condamnation à des indemnités d'occupation,

-constaté l'absence de dette locative,

-déclaré le jugement exécutoire de droit à titre de provision et dit n'y avoir lieu de l'écarter,

-dit n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamné solidairement Monsieur [T] [B] et Madame [F] [B] aux entiers dépens de l'instance.

Monsieur [T] [B] et Madame [F] [B] ont interjeté appel de cette décision le 1er juin 2021.

Par écritures notifiées le 7 septembre 2021, ils ont conclu ainsi qu'il suit :

-déclarer le recours recevable et bien fondé,

À titre principal,

-infirmer le jugement rendu le 11 mai 2021 par le juge des contentieux de la protection près le tribunal de proximité de Haguenau en ce qu'il a :

-dit que le congé délivré par Monsieur [E] [S] n'est pas opposable à Madame [J] épouse [S] et n'est pas de nature à mettre fin au contrat de bail conclu le 11 septembre 2015 ni à la solidarité avec cette dernière à l'égard de Monsieur [T] [B] et Madame [F] [B] au titre du bail conclu le 11 septembre 2015,

-débouté Monsieur [T] [B] et Madame [F] [B] de leur demande en validation du congé délivré par Madame [J] épouse [S] et en résiliation du bail conclu le 11 septembre 2015,

-débouté Monsieur [T] [B] et Madame [F] [B] de leur demande en expulsion de Madame [J] épouse [S],

-débouté Monsieur [T] [B] et Madame [F] [B] de leur demande en fixation et condamnation à des indemnités d'occupation,

-condamné solidairement Monsieur [T] [B] et Madame [F] [B] aux entiers dépens de l'instance.

Statuant à nouveau,

À titre principal,

-constater que le bail signé entre les parties le 11 septembre 2015 a été résilié par Monsieur [E] [S] et Madame [J],

-constater que la résiliation de ce bail est devenue effective au 30 avril 2020,

-constater que Madame [J] se maintient désormais illégalement dans les lieux et qu'elle est occupante sans droit ni titre depuis le 1er mai 2020,

À titre subsidiaire,

-déclarer la demande de résiliation judiciaire du contrat de bail formulée par Madame [F] [B] et Monsieur [T] [B] recevable par application des articles 564 et 565 du code de procédure civile,

-constater que Madame [J] ne s'acquitte plus des loyers depuis le mois de juin 2021,

-prononcer la résiliation judiciaire du contrat de bail conclu entre les parties le 11 septembre 2015 aux torts exclusifs de Madame [J], laquelle ne s'est pas acquittée du règlement des loyers dus depuis le mois de juin 2021,

En conséquence et en tout état de cause,

-ordonner l'expulsion de Madame [J] et de tous occupants de son chef, dans les délais de la loi et avec le concours de la force publique et d'un serrurier si besoin est, et ce sous astreinte définitive de 50 € par jour de retard à compter de l'expiration du délai de deux mois qui suivra le commandement d'avoir à libérer les lieux,

-condamner Madame [J] à payer à Madame [F] [B] et Monsieur [T] [B] la somme de 4 200 € correspondant à la dette locative dont elle est redevable, laquelle pourra être actualisée jusqu'à la date de l'audience,

-condamner Madame [J] à payer à Madame [F] [B] et Monsieur [T] [B] une indemnité d'occupation égale au montant des loyers et des charges à compter de la résiliation du bail et jusqu'à complète libération des lieux,

-condamner Madame [J] à payer à Madame [F] [B] et Monsieur [T] [B] une indemnité de 1 500 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice, notamment moral, né de ses agissements,

-condamner Madame [J] à payer à Madame [F] [B] et Monsieur [T] [B] une indemnité de 2 500 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile concernant la première instance,

-condamner Madame [J] à payer à Madame [F] [B] et Monsieur [T] [B] une indemnité de 2 500 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel,

-la condamner en tous les frais et dépens de la procédure ainsi qu'à ceux de première instance.

Ils maintiennent qu'aux termes d'un courrier daté du 1er février 2020, rédigé dans une langue qu'elle maîtrise, Madame [J] leur a fait part de sa volonté de mettre un terme à son contrat de bail à l'expiration d'un préavis de trois mois ; qu'ils ont de ce fait conclu un nouveau contrat de bail à effet au 1er juin 2020 ; que cependant, Madame Du a refusé de quitter le logement ; que si elle a pu se maintenir dans les lieux entre le premier et le 11 mai 2020, compte tenu des mesures de confinement en vigueur, sa position n'est plus justifiable depuis cette date.

Ils font valoir que l'intimée est actuellement sans emploi et sans ressources et ne sera pas en mesure de s'acquitter seule du loyer et des charges ; qu'elle a refusé plusieurs logements qui lui étaient proposés au titre de l'habitat social et a détérioré le bien pris en location ; qu'il n'est prévu aucune faculté de rétractation du locataire qui a donné son congé ; que le bail étant résilié, l'expulsion de l'occupante sans droit ni titre doit être prononcée.

Ils précisent que le divorce de Monsieur [S] et de Madame Du ayant été prononcé par jugement rendu le 6 juillet 2021, ils ne formulent plus aucune demande à l'encontre de Monsieur [E] [S], qui n'est plus tenu solidairement des dettes contractées par son ex-épouse ; que depuis le divorce, Madame Du ne règle plus les échéances de loyer, non plus que Monsieur [S] ; que la dette locative augmente, de sorte qu'ils sont en droit, à titre subsidiaire, de solliciter le prononcé de la résiliation judiciaire du bail ; que cette demande n'est pas irrecevable, puisqu'elle est fondée sur la survenance d'un fait nouveau, à savoir le défaut de paiement des loyers.

Ils soutiennent que le comportement de Madame Du, qui se maintient illégalement dans les lieux dont elle ne prend aucun soin, est de nature à leur causer un préjudice justifiant l'allocation de dommages et intérêts.

Par écritures notifiées le 12 août 2021, Madame [J] épouse [S] a conclu ainsi qu'il suit :

-déclarer la demande de résiliation judiciaire du bail irrecevable,

-déclarer les époux [B] mal fondés en leur appel,

-les en débouter,

En conséquence,

-confirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions,

-condamner les époux [B] aux entiers frais et dépens, outre la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 2° du code de procédure civile.

Elle fait valoir qu'elle n'a jamais signifié à ses bailleurs son intention de résilier le bail ; que le congé doit comporter de manière claire et certaine l'expression de la volonté de celui qui le délivre de mettre fin au contrat de bail ; qu'elle était dans l'incapacité de comprendre qu'elle résiliait le contrat, en raison de ses difficultés avec la langue française ; qu'il ne peut être attesté qu'elle a bien rédigé le courrier de résiliation, ou qu'elle l'aurait rédigé sans aucune pression, étant relevé qu'il n'est pas démontré qu'elle maîtriserait la langue anglaise ; que si sa volonté avait été de mettre fin au contrat de bail, elle l'aurait résilié par l'intermédiaire de son conseil par le biais duquel elle avait pris attache avec les époux [B] à la suite de la dénonciation unilatérale du bail par Monsieur [S] ; qu'elle n'a pu refuser l'une ou l'autre offre de relogement qu'en raison de leur caractère inadapté à l'accueil d'une famille de trois personnes ; que le conflit l'opposant à Monsieur [S] l'oblige à attendre d'obtenir un logement adapté, son ex époux pouvant se saisir de toute opportunité pour demander que la résidence de leurs deux enfants communs soit fixée chez lui ; qu'elle met cependant tout en 'uvre, avec l'aide d'une assistante sociale, pour trouver un logement adapté.

Elle réfute l'existence d'un arriéré de loyer qui ne serait nullement justifié et fait valoir en tout état de cause que la demande de résiliation judiciaire du bail, formée pour la première fois à hauteur d'appel, est irrecevable ; que contrairement à ce qu'ils soutiennent, les appelants n'ont subi aucun préjudice, les loyers ayant été réglés par Monsieur [S] en lieu et place de la pension alimentaire qu'il lui devait ; que la demande de dommages-intérêts justifiée par la prétendue absence d'entretien du logement ne peut pas plus prospérer, dans la mesure où, étant toujours locataire, elle peut jouir des lieux comme bon lui semble.

Monsieur [E] [S], à qui la déclaration d'appel et les conclusions d'appel ont été notifiées par acte du 8 juillet 2021 remis à personne et par acte du 13 juillet 2021 remis en l'étude d'huissier, n'a pas constitué avocat.

MOTIFS

Sur la demande en constatation de la résiliation du bail :

En vertu des dispositions de l'article 15 de la loi du 6 juillet 1989, 'lorsqu'il émane du locataire, le délai de préavis applicable au congé est de trois mois'. A l'expiration du délai de préavis, le locataire est déchu de tout titre d'occupation des locaux loués.

Il résulte en l'espèce des pièces versées aux débats que Monsieur [E] [S] avait dans un premier temps résilié le bail de la maison objet du contrat de location consenti par les époux [B] ; que par lettre du 13 septembre 2019, il a déclaré souhaiter annuler la résiliation du bail et a informé en revanche les bailleurs de ce qu'il quitterait le domicile à partir du 31 octobre 2019, Madame Du restant comme seule locataire.

Par lettre du 23 août 2019, le conseil de Madame Du épouse [S] avait en effet fait part au bailleur de ce que sa mandante, qui avait appris que Monsieur [S] leur avait écrit le 24 juillet 2019 afin de résilier le bail, souhaitait au contraire pouvoir rester dans les lieux. Il leur a rappelé à cet égard les règles prévues à l'article 1751 du code civil, protégeant le domicile conjugal et leur a précisé que la résiliation voulue par Monsieur [S] était sans effet sur le contrat les liant à Madame Du ; que cependant, Monsieur [S] restait solidairement tenu au paiement des loyers pendant la durée du mariage.

Le 1er février 2020, Madame [J] a adressé à Monsieur et Madame [B] une lettre dactylographiée ainsi libellée : « Objet : Termination of the lease, Dear Miss, Dear Sir, I am currently renting Your House located [Adresse 2] and I would like to terminate the lease. I have noted in accordance with the lease agreement the 3 months notice to be taken into account. I will contact you again to fix the date of the inventory and delivery of keys. Best regards ».

Ce courrier porte la signature de Madame [X], ainsi que la mention manuscrite de ce qu'il a été reçu en main propre le 1er février 2020 et qu'il emporte résiliation du contrat de location au 30 mars 2020.

Madame [J] n'a pas contesté que la signature portée sur ce courrier écrit à son nom soit de sa main, de sorte qu'elle ne peut arguer de ce qu'aucun élément ne permettrait d'attester qu'elle l'a bien rédigé, dans la mesure où par sa signature, elle s'en est approprié les termes.

Au demeurant, l'intimée ne verse aux débats aucun élément de nature à démontrer que ce document aurait été rédigé par un tiers, ou de ce que des pressions auraient été exercées sur elle pour obtenir son congé.

Les motifs retenus par le premier juge pour invalider ce congé, selon lesquels Madame Du ne parle et ne comprend pas le français, sont sans emport sur sa validité, le courrier de congé étant précisément rédigé en langue anglaise et non en français. De même, le fait que le document dactylographié, porte la même date que celle à laquelle il aurait été remis en main propre, ne permet nullement de conclure qu'il a été établi par un tiers et soumis à la signature de Madame Du avec grande insistance, sans qu'elle en comprenne la portée exacte de son contenu, ainsi que l'a retenu le premier juge de façon erronée, alors qu'aucun élément du dossier ne permettait de conclure à une quelconque intervention d'un tiers et à de quelconques pressions ou insistance exercées sur la locataire.

En présence d'un courrier dont les termes clairs ne laissent place à aucune équivoque quant à la volonté de son auteur de mettre un terme au contrat de bail qui la liait aux époux [B] à l'issue d'un préavis de trois mois, le jugement déféré doit être infirmé en ce qu'il a rejeté la demande des appelants tendant à voir constater la résiliation du bail au 30 avril 2020 par l'effet du congé délivré par la locataire. Il sera relevé au surplus que Madame Du n'a jamais informé les bailleurs de sa volonté de se rétracter de ce congé, de sorte que ces derniers ont légitimement pu conclure avec de nouveaux locataires un contrat de bail le 3 avril 2020, à effet au 15 mai 2020, portant sur les locaux que l'intimée a indûment continué à occuper.

Il convient en conséquence, constatant la résiliation du contrat de bail au 30 avril 2020, d'ordonner l'expulsion de Madame [J] et de tous occupants de son chef à l'expiration du délai de deux mois qui suivra le commandement d'avoir à libérer les lieux. Le refus actuel de l'intimée de libérer les locaux ne permet pas de présumer de son refus de se soumettre à ce congé, dans la mesure où l'intimée contestait le principe même de la résiliation du bail. Il n'y a pas lieu en conséquence d'assortir la condamnation à évacuer les lieux d'une astreinte.

L'indemnité d'occupation courant à compter de la résiliation du bail et jusqu'à complète libération des lieux sera fixée au montant des loyers et des charges qui auraient été dus si le bail s'était poursuivi.

La demande formée à titre principal par Monsieur et Madame [B] étant admise, il n'y a pas lieu de statuer sur la demande en résiliation judiciaire du bail formée à titre subsidiaire, non plus que sur la demande en paiement d'un arriéré locatif à compter de juin 2021.

Sur la demande en dommages et intérêts :

Par son comportement fautif, ayant consisté à se maintenir dans les lieux alors qu'elle avait donné congé, Madame Du a causé un préjudice à Monsieur et Madame [B], qui n'ont pu donner effet au nouveau contrat de bail qu'ils avaient conclu avec des tiers et les a obligés à multiplier des démarches pour pouvoir reprendre possession de leur bien.

La réparation du préjudice causé en relation avec la faute de l'intimée justifie la condamnation de celle-ci au paiement d'une somme de 500 € à titre de dommages et intérêts, portant intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.

Sur les frais et dépens :

Les dispositions du jugement déféré quant aux frais et dépens seront infirmées.

Partie perdante, Madame Du sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel, par application de l'article 696 du code de procédure civile et sera déboutée de sa demande formée au titre de l'article 700 2° du même code formée en appel.

Il sera en revanche fait droit à la demande au titre des frais non compris dans les dépens que les époux [B] ont dû exposer pour faire valoir leurs droits, à hauteur d'une somme de 500 € pour la première instance et de 800 € pour l'instance d'appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement, par arrêt par défaut,

INFIRME le jugement déféré dans les limites de l'appel,

Statuant à nouveau,

CONSTATE la résiliation au 30 avril 2020 du bail signé entre les parties le 11 septembre 2015 par l'effet du congé délivré par la locataire,

CONDAMNE Madame [J] à évacuer, de corps et de biens et de tous occupants de son chef, la maison d'habitation située [Adresse 2], à l'expiration du délai de deux mois suivant le commandement d'avoir libéré les lieux,

DIT n'y avoir lieu d'assortir cette condamnation d'une astreinte,

CONDAMNE Madame [J] à payer à Monsieur [T] [B] et Madame [F] [B] une indemnité d'occupation mensuelle égale au montant du loyer et des charges qui auraient été dus si le bail s'était poursuivi, à compter de la résiliation du bail et jusqu'à complète libération des lieux,

CONDAMNE Madame [J] à payer à Monsieur [T] [B] et Madame [F] [B] une somme de 500 € à titre de dommages-intérêts, portant intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

CONDAMNE Madame [J] à payer à Monsieur [T] [B] et Madame [F] [B] une somme de 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE Madame [J] aux dépens de première instance,

Y ajoutant,

CONDAMNE Madame [J] à payer à Monsieur [T] [B] et Madame [F] [B] la somme de 800 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel,

DEBOUTE Madame [J] de sa demande fondée sur l'article 700 2° du code de procédure civile,

CONDAMNE Madame [J] aux dépens de l'instance d'appel.

La GreffièreLa Présidente de chambre


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 3 a
Numéro d'arrêt : 21/02874
Date de la décision : 25/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-25;21.02874 ?
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