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07/04/2022 | FRANCE | N°19/044101

France | France, Cour d'appel de colmar, 4s, 07 avril 2022, 19/044101


NH/VD

MINUTE No 22/322

NOTIFICATION :

Copie aux parties

Clause exécutoire aux :

- avocats
- parties non représentées

Le

Le Greffier
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR
CHAMBRE SOCIALE - SECTION SB

ARRET DU 07 Avril 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : 4 SB No RG 19/04410 - No Portalis DBVW-V-B7D-HGLV

Décision déférée à la Cour : 28 Août 2019 par le pôle social du Tribunal de Grande Instance de STRASBOURG

APPELANTE :

Madame [V] [H]<

br>[Adresse 2]
[Localité 3]

Représentée par Me Bernard ALEXANDRE, avocat au barreau de STRASBOURG, substitué par Me EME, avocat à STRASBOURG

INTIMEES :
...

NH/VD

MINUTE No 22/322

NOTIFICATION :

Copie aux parties

Clause exécutoire aux :

- avocats
- parties non représentées

Le

Le Greffier
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR
CHAMBRE SOCIALE - SECTION SB

ARRET DU 07 Avril 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : 4 SB No RG 19/04410 - No Portalis DBVW-V-B7D-HGLV

Décision déférée à la Cour : 28 Août 2019 par le pôle social du Tribunal de Grande Instance de STRASBOURG

APPELANTE :

Madame [V] [H]
[Adresse 2]
[Localité 3]

Représentée par Me Bernard ALEXANDRE, avocat au barreau de STRASBOURG, substitué par Me EME, avocat à STRASBOURG

INTIMEES :

Madame [Y] [T]
[Adresse 4]
[Localité 3]

Représentée par Me Vincent MAJERLE, avocat au barreau de STRASBOURG

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU BAS-RHIN
Service contentieux
[Adresse 1]
[Localité 3]

Comparante en la personne de Mme [G] [M], munie d'un pouvoir

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 10 Février 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme FERMAUT, Magistrat honoraire, faisant fonction de Président de chambre,
Mme ARNOUX, Conseiller
Mme HERY, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme WALLAERT, Greffier

ARRET :
- contradictoire
- prononcé par mise à disposition au greffe par Mme FERMAUT, Magistrat honoraire, faisant fonction de Président de chambre,
- signé par Mme FERMAUT, Magistrat honoraire, faisant fonction de Président de chambre et Mme WALLAERT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

FAITS ET PROCEDURE

Le 2 décembre 2013, Mme [V] [H], médecin généraliste, a établi, à fin de prise en charge par la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Bas-Rhin au titre de la législation professionnelle, une déclaration d'accident du travail (piqûre d'aiguille) dont Mme [Y] [T], salariée comme femme de ménage, a été victime le 17 septembre 2013.

La CPAM du Bas-Rhin a décidé de prendre en charge cet accident au titre de la législation professionnelle.

Mme [Y] [T] a été déclarée guérie de ses lésions à compter du 16 mars 2014 par le médecin conseil de la CPAM.

Par courrier recommandé avec accusé de réception du 19 août 2015, elle a saisi la CPAM du Bas-Rhin d'une demande de reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur.

La conciliation n'ayant pu aboutir, Mme [T], par requête reçue le 25 février 2016, a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale (TASS) du Bas-Rhin afin de faire reconnaître la faute inexcusable de son employeur, Mme [H], dans la survenance de l'accident du travail du 17 septembre 2013.

Par jugement du 28 août 2019, le tribunal de grande instance de Strasbourg remplaçant le TASS a :

- déclaré Mme [Y] [T] recevable en son action ;
- dit que l'accident dont Mme [Y] [T] a été victime le 17 septembre 2013 doit être pris en charge au titre de la législation professionnelle ;
- dit que l'accident du travail dont Mme [Y] [T] a été victime le 17 septembre 2013 est dû à une faute inexcusable de Mme [V] [H], son employeur ;
- condamné Mme [V] [H] au paiement de la somme de 3.000 euros au titre de l'indemnisation du préjudice d'anxiété de Mme [Y] [T] ;
- débouté Mme [Y] [T] de sa demande d'expertise ;
- débouté Mme [Y] [T] de sa demande de provision ;
- condamné Mme [V] [H] à la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné Mme [V] [H] aux dépens ;
- dit n'y avoir lieu à l'exécution provisoire.

Mme [H] a formé appel à l'encontre de ce jugement par voie électronique le 4 octobre 2019.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Aux termes de ses conclusions transmises par voie électronique le 4 février 2022, Mme [H] demande à la cour de :

- dire son appel bien fondé ;

y faisant droit :

- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

statuant à nouveau :

- à titre principal, dire et juger que la matérialité de l'accident du 17 septembre 2013 allégué par Mme [T] n'est pas démontrée ;

- à tout le moins :

* dire et juger que la maladresse de Mme [T] est seule à l'origine de l'accident du 17 septembre 2013 dont elle prétend avoir été victime ;

en conséquence :

*déclarer Mme [T] mal fondée en ses demandes ;
* débouter Mme [T] de toutes conclusions contraires ainsi que de l'intégralité de ses fins, moyens et prétentions ;

- à titre infiniment subsidiaire :

* constater l'absence de préjudices allégués par Mme [T] non couverts par le régime forfaitaire de base ;

en conséquence :

* débouter Mme [T] de toutes conclusions contraires ainsi que de l'intégralité de ses fins, moyens et prétentions ;

- en tout état de cause, condamner Mme [T] aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel et à lui payer une somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles de première instance et d'appel.

Aux termes de ses conclusions transmises par voie électronique le 5 janvier 2021, Mme [T] demande à la cour de :

- la dire et juger recevable et bien fondée ;
- confirmer le jugement de première instance du pôle social du tribunal judiciaire de Strasbourg rendu le 28 août 2019 ;

en conséquence :

- dire et juger que son accident du travail du 17 septembre 2013 relève bien de la législation professionnelle et est dû à une faute inexcusable de son employeur, le docteur [V] [H] ;
- dire et juger qu'en cas de fixation du taux d'incapacité de la victime ou de modification ultérieure, la CPAM du Bas-Rhin fixera au maximum la majoration de l'indemnité en capital ou le cas échéant la rente ;
- condamner Mme [V] [H] à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l'indemnisation du préjudice d'anxiété et des souffrances morales ;
- dire et juger que la CPAM du Bas-Rhin lui fera l'avance des dommages et intérêts alloués par la cour de céans et le cas échéant sur la totalité des sommes accordées, sans distinguer celles visant à réparer les préjudices énumérés par l'article L.452-3 du code de la sécurité sociale de celles relatives aux préjudices non couverts par cette disposition ;
- déclarer la décision à intervenir commune et opposable à la CPAM du Bas-Rhin ;

y ajoutant :

- condamner le docteur [V] [H] à lui verser la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel ;

subsidiairement, avant dire droit :

- ordonner la réalisation d'une expertise médicale dont elle détaille la mission aux fins d'évaluer son préjudice ;
- dire et juger que les frais résultant de l'expertise seront mis à la charge de la CPAM du Bas-Rhin compte tenu de l'état de précarité dans lequel elle se trouve.

Aux termes de ses conclusions reçues le 16 décembre 2021, la CPAM demande à la cour de :

- confirmer le jugement du 28 août 2019 en ce qu'il a reconnu le caractère professionnel de l'accident du travail de Mme [T] du 17 septembre 2013 ;
- lui décerner acte de ce qu'elle s'en remet à l'appréciation de la cour sur le point de savoir si l'accident du travail de Mme [T] du 17 septembre 2013 est imputable ou non à une faute inexcusable de son employeur ;

dans l'affirmative :

- confirmer le jugement du 28 août 2019 en ce qu'il a débouté Mme [T] de la majoration de capital ou de rente, son état de santé étant déclaré guéri, et en ce qu'il a condamné Mme [H] à lui rembourser toutes les sommes que celle-ci devrait avancer à Mme [T] au titre de la faute inexcusable de l'employeur ;
- statuer sur la demande de confirmation de l'allocation d'une somme de 3.000 euros au titre d'un préjudice d'anxiété voire de la demande d'expertise formulée par Mme [T], en mettant la charge finale des frais d'expertise à Mme [H] ;
- condamner Mme [H] à régler directement à Mme [T] toute condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile et statuer sur les frais et dépens de la présente instance.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément, pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, aux conclusions susvisées et soutenues oralement à l'audience du 10 février 2022.

MOTIFS DE LA DECISION

Le jugement entrepris ayant été notifié à Mme [H] le 21 septembre 2019, son appel est recevable.

Sur la contestation du caractère professionnel de l'accident dont Mme [T] a été victime

Mme [H] émet des doutes sur la matérialité de l'accident invoqué à une période où Mme [T] était en conflit avec elle, alors que cette dernière était seule au cabinet médical, les constatations médicales de la piqûre ayant été faites plus d'une heure après le prétendu incident chez un praticien distant de plus de trois kilomètres du cabinet sans que les secours aient, au préalable, été avertis et sans qu'elle en ait été informée.

Elle ajoute que le certificat médical du 17 septembre 2013 établi par le docteur [L] n'est fondé que sur les seules déclarations de Mme [T] et souligne qu'il est impossible que plus d'une heure après une piqûre par une aiguille qualifiée de « petite » par Mme [T], la lésion soit encore visible.

Mme [T] répond que Mme [H] n'a jamais contesté qu'elle travaillait au cabinet médical le jour de l'accident, ni qu'elle stockait des seringues usagées et des déchets médicaux au sein de son cabinet.

Elle indique que le certificat médical initial du docteur [L] a été établi le jour même de l'accident et de ses suites immédiates, que la déclaration de l'accident est explicite et que le type de lésions qui ont été constatées, les fonctions de Mme [T] et le lieu d'exécution de ses missions, à savoir le cabinet médical du docteur [H], permettent de démontrer l'existence d'un fait soudain, daté avec précision, intervenu aux temps et lieu de travail et ayant occasionné une lésion.

La CPAM soutient que la présomption d'imputabilité de l'accident au travail doit jouer.

C'est avec pertinence que le jugement entrepris a retenu qu'étaient remplies les conditions visées par l'article L.411-1 du code de la sécurité sociale pour que joue la présomption d'imputabilité de l'accident au travail à savoir l'existence d'un fait accidentel, d'une lésion et d'un lien de cette lésion avec le travail.

Toutefois, il en a déduit qu'il convenait de dire que l'accident dont Mme [Y] [T] a été victime le 17 septembre 2013 doit être pris en charge au titre de la législation professionnelle, alors qu'il y avait lieu de dire que l'accident dont Mme [T] a été victime le 17 septembre 2013 a un caractère professionnel.

Le jugement entrepris est donc réformé de ce chef.

Sur la faute inexcusable de l'employeur

Sur l'existence de la faute inexcusable

Mme [T] expose qu'il existe une présomption de faute inexcusable dès lors que le risque à l'origine de l'accident a été préalablement signalé, la faute de la victime n'ayant. pas pour effet d'exonérer l'employeur de la responsabilité qu'il encourt en raison de sa faute inexcusable.

Elle ajoute que Mme [H] n'a pas mis à sa disposition des moyens de protection et n'a pas respecté le cadre réglementaire qui s'imposait à elle en matière d'élimination des déchets médicaux posé par les articles R.4127-71, R.1335-1 et R.1335-2 du code de la santé publique, deux arrêtés du 7 septembre 1999 qui définissent les modalités d'entreposage et d'élimination de ces déchets et un arrêté du 24 novembre 2003 relatif aux emballages des déchets d'activités de soins à risques infectieux et assimilés.

Elle souligne que le docteur [H] a été invité par l'Agence régionale de santé (ARS) à se mettre en conformité avec l'ensemble de ses obligations réglementaires et n'a conclu une convention de collecte de déchets médicaux qu'après l'accident.

Mme [H] considère qu'aucune faute inexcusable ne peut lui être reprochée puisque l'accident de Mme [T] est due à sa propre maladresse, la seringue prétendument à l'origine de la piqûre étant stockée dans une boîte hermétique dédiée à cet effet et que Mme [T], qui ne lui a restitué le jeu de clés du cabinet qu'après la conciliation prud'homale, a eu la possibilité d'organiser une mise en scène.

Elle fait valoir que la recommandation de l'ARS dont elle a été destinataire ne portait que sur une obligation réglementaire concernant l'élimination des déchets d'activités de soins à risques infectieux (DASRI), ce qui est sans lien avec l'accident allégué par Mme [T], précisant qu'elle a signé une convention de collecte de déchets médicaux le 20 octobre 2014.

Elle souligne qu'au demeurant, Mme [T] ne prétend pas s'être piquée alors qu'elle manipulait un stockage non conforme à la réglementation et se prévaut d'un témoignage qui démontre que son cabinet était toujours propre, qu'il n'y avait pas de pansement avec du sang qui traînait ni même des seringues usagées.

Elle ajoute qu'il est incompréhensible que Mme [T] ait manipulé la boite de stockage des seringues alors que cela n'entrait pas dans le cadre de sa mission, soulignant que sa salariée disposait de l'ensemble du matériel nécessaire à l'accomplissement de sa mission y compris des gants de protection, ce dont elle déduit que seul un geste maladroit, involontaire et imprévisible de la salariée, alors qu'elle nettoyait l'évier, a fait tomber le conteneur à seringues, Mme [T] s'étant piquée en voulant le rattraper, ce qui ne relève pas d'une faute inexcusable de l'employeur.

Elle fait également valoir qu'aucune formation théorique ou pratique n'était de nature à être dispensée à sa salariée afin de permettre d'éviter ce type d'accident imprévisible, de sorte que l'employeur ne pouvait avoir conscience du danger auquel cette dernière était exposée.

Aux termes du code du travail, l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Ces mesures comprennent des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail, des actions d'information et de formation et la mise en place d'une organisation et de moyens adaptés. L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes.

Par application des dispositions combinées des articles L.452-1 du code de la sécurité sociale, L.4121-1 et L.4121-2 du code du travail, le manquement à l'obligation légale de sécurité et de protection de la santé à laquelle l'employeur est tenu envers le travailleur a le caractère d'une faute inexcusable lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était soumis le travailleur et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver.

Il est indifférent que la faute inexcusable commise par l'employeur ait été l'origine déterminante de l'accident du travail dont a été victime le salarié mais il suffit qu'elle en soit une cause nécessaire pour que sa responsabilité soit engagée, alors même que d'autres fautes y compris la faute d'imprudence de la victime, auraient concouru au dommage.

Il incombe à Mme [T] de prouver que Mme [H], son employeur, qui devait avoir conscience du danger auquel elle était exposée, n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver.

Mme [T] a été engagée par Mme [H] à compter du 27 octobre 2008 en qualité de femme de ménage.

Dans le cadre de ses tâches, Mme [T] était amenée à manipuler et déplacer des objets au sein du cabinet médical de Mme [H], laquelle, dans le cadre de l'exercice de sa profession, utilise des seringues, de sorte que cette dernière avait ou devait nécessairement avoir conscience du danger auquel elle exposait Mme [T] dans l'hypothèse où celle-ci se retrouvait en présence d'aiguilles de seringue.

Il a d'ores et déjà été retenu que l'accident dont Mme [T] a été victime le 17 septembre 2013 avait un caractère professionnel, celle-ci ayant subi une lésion (piqûre) occasionnée par l'aiguille d'une seringue, ce qui tend à démontrer que Mme [H] n'a pas pris les dispositions nécessaires pour protéger sa salariée du risque de piqûre occasionné par l'aiguille d'une seringue, dont il n'est pas contesté qu'elle devait être entreposée dans un conteneur à seringues dont le mécanisme de fermeture hermétique obligatoire n'a, à l'évidence, pas ou mal été actionné par Mme [H], seule utilisatrice de ce conteneur puisqu'une aiguille de seringue s'en est échappée et a blessé Mme [T].

En outre, il n'est pas contesté que Mme [T] ne portait pas de gants de protection à la date de l'accident dont elle a été victime. Mme [H] soutient que des gants avaient été mis à disposition de Mme [T] mais elle n'en justifie pas, aucune consigne expresse ne lui ayant été donnée sur la nécessité de porter de telles protections et sur les précautions à prendre en cas de manipulation des conteneurs à aiguilles.

Les conditions de la faute inexcusable étant remplies, il y a lieu de confirmer le jugement entrepris de ce chef.

Sur les conséquences de la faute inexcusable

Mme [T] expose qu'à la suite de son accident du travail, elle a dû se soumettre à une surveillance médicale spécifique nécessitant le suivi d'un protocole de dépistage de maladies infectieuses et des vaccinations, ce qui a généré des souffrances morales et un état dépressif, le doute quant à l'absence de contamination n'ayant été levé que longtemps après.

Elle se dit en accord avec la somme de 3.000 euros allouée par le jugement entrepris au titre des souffrances psychologiques et du préjudice d'anxiété.

Mme [H] fait valoir que Mme [T] ne justifie pas de son préjudice et que le jugement entrepris a statué ultra petita en retenant d'office un préjudice d'anxiété non évoqué par cette dernière et non débattu contradictoirement.

La CPAM indique qu'il n'y a pas lieu à majoration de rente dès lors que Mme [T] ne s'est pas vu attribuer de rente.

Aux termes des dispositions de l'article L.452-3 du code de la sécurité sociale, indépendamment de la majoration de rente qu'elle reçoit en vertu de l'article précédent, la victime a le droit de demander à l'employeur devant la juridiction de sécurité sociale la réparation notamment du préjudice causé par les souffrances morales par elle endurées. La réparation de ces préjudices est versée directement au bénéficiaire par la caisse qui en récupère le montant auprès de l'employeur.

Le jugement entrepris est confirmé sur la somme allouée pour indemniser Mme [T] de son préjudice, étant souligné qu'elle produit des documents médicaux qui témoignent du protocole médical auquel elle a dû se soumettre à la suite de l'accident du travail dont elle a été victime.

Selon les dispositions de l'article L.452-2 du code de la sécurité sociale, la victime reçoit une majoration des indemnités dues en vertu du livre IV dudit code traitant des accidents du travail et des maladies professionnelles.

Lorsqu'une indemnité en capital a été attribuée à la victime, le montant de la majoration ne peut dépasser le montant de ladite indemnité.

Lorsqu'une rente a été attribuée à la victime, le montant de la majoration est fixé de telle sorte que la rente majorée allouée à la victime ne puisse excéder, soit la fraction du salaire annuel correspondant à la réduction de capacité, soit le montant de ce salaire dans le cas d'incapacité totale.

Le salaire annuel et la majoration visée au troisième et au quatrième alinéa du présent article sont soumis à la revalorisation prévue pour les rentes par l'article L.434-17.

La majoration est payée par la caisse, qui en récupère le capital représentatif auprès de l'employeur dans des conditions déterminées par décret.

Le jugement entrepris a omis de statuer dans son dispositif sur la demande de majoration au maximum de l'indemnité en capital ou de la rente.

Mme [T] ne s'étant pas vu octroyer une rente par la CPAM, sa demande de majoration est rejetée.

Mme [H] s'est vu notifier sa guérison le 6 juin 2014 par la CPAM et n'a bénéficié d'aucune somme en capital, de sorte que sa demande de majoration est rejetée.

Le jugement entrepris est complété en ce sens.

Sur l'action récursoire de la caisse

Par application des dispositions des articles L.452-2 et L.452-3 du code de la sécurité sociale, il y a lieu de dire que la CPAM du Bas-Rhin bénéficie d'une action récursoire à l'encontre de Mme [H] afin de récupérer les sommes qu'elle aura versées à Mme [T] au titre de l'indemnisation complémentaire du fait de la faute inexcusable de son l'employeur.

Le jugement entrepris est donc confirmé de ce chef.

Sur les dépens et les frais de procédure

Le jugement entrepris est confirmé de ces chefs.

A hauteur d'appel, Mme [H] est condamnée aux dépens ainsi qu'à payer à Mme [T] la somme de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Mme [H] est déboutée de sa demande d'indemnité faite sur le même fondement.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant, publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et en avoir délibéré :

DECLARE l'appel recevable ;

REFORME le jugement du 28 août 2019 rendu par le tribunal de grande instance de Strasbourg en ce qu'il a dit que l'accident dont Mme [Y] [T] a été victime le 17 septembre 2013 doit être pris en charge au titre de la législation professionnelle ;

Statuant de nouveau sur ce seul point :

DIT que l'accident dont Mme [Y] [T] a été victime le 17 septembre 2013 a un caractère professionnel ;

CONFIRME pour le surplus le jugement du 28 août 2019 rendu par le tribunal de grande instance de Strasbourg ;

COMPLETE le jugement du 28 août 2019 rendu par le tribunal de grande instance de Strasbourg et DEBOUTE Mme [Y] [T] de sa demande de majoration de capital et de rente ;

Ajoutant au jugement :

CONDAMNE Mme [V] [H] aux dépens de la procédure d'appel ;

CONDAMNE Mme [V] [H] à payer à Mme [Y] [T] la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour ses frais exposés à hauteur d'appel ;

DEBOUTE Mme [V] [H] de sa demande d'indemnité fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour ses frais de procédure d'appel.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de colmar
Formation : 4s
Numéro d'arrêt : 19/044101
Date de la décision : 07/04/2022
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Strasbourg, 28 août 2019


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.colmar;arret;2022-04-07;19.044101 ?
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