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10/03/2022 | FRANCE | N°19/017471

France | France, Cour d'appel de colmar, 4s, 10 mars 2022, 19/017471


SA/FA

MINUTE No 22/0209

NOTIFICATION :

Copie aux parties

Clause exécutoire aux :

- avocats
- parties non représentées

Le

Le Greffier
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR
CHAMBRE SOCIALE - SECTION SB

ARRET DU 10 Mars 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : 4 SB No RG 19/01747 - No Portalis DBVW-V-B7D-HBZP

Décision déférée à la Cour : 07 Mars 2019 par le Pôle social du Tribunal de grande instance de MULHOUSE

APPELANTE :

S.A.R.L. SOCIÉTÉ

D'EXPLOITATION DES TRANSPORTS STRAUMANN
[Adresse 3]
[Adresse 3]

Représentée par Me Anne KRUMMEL, avocat au barreau de STRASBOURG

INTIMÉE :

URSSAF D'...

SA/FA

MINUTE No 22/0209

NOTIFICATION :

Copie aux parties

Clause exécutoire aux :

- avocats
- parties non représentées

Le

Le Greffier
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR
CHAMBRE SOCIALE - SECTION SB

ARRET DU 10 Mars 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : 4 SB No RG 19/01747 - No Portalis DBVW-V-B7D-HBZP

Décision déférée à la Cour : 07 Mars 2019 par le Pôle social du Tribunal de grande instance de MULHOUSE

APPELANTE :

S.A.R.L. SOCIÉTÉ D'EXPLOITATION DES TRANSPORTS STRAUMANN
[Adresse 3]
[Adresse 3]

Représentée par Me Anne KRUMMEL, avocat au barreau de STRASBOURG

INTIMÉE :

URSSAF D'ALSACE
TSA 60003
[Localité 2]

Comparante en la personne de M. [I] [R], muni d'un pouvoir

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 13 Janvier 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :
Mme FERMAUT, Magistrat honoraire, faisant fonction de Président de chambre
Mme ARNOUX, Conseiller
Mme HERY, Conseiller
qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme WALLAERT, Greffier

ARRET :
- contradictoire
- prononcé par mise à disposition au greffe par Mme FERMAUT, Magistrat honoraire, faisant fonction de Président de chambre,
- signé par Mme FERMAUT, Magistrat honoraire, faisant fonction de Président de chambre et Mme Caroline WALLAERT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

FAITS ET PROCÉDURE

La société à responsabilité limitée Société d'exploitation des transports Straumann a fait l'objet d'un contrôle de l'application des législations de sécurité sociale, d'assurance chômage et de garantie des salaires portant sur la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2016 pour son établissement situé [Adresse 1].

A l'issue du contrôle, l'Urssaf d'Alsace a notifié une lettre d'observations du 20 juillet 2017 comprenant quatre chefs de redressement dont il est résulté un rappel de cotisations et contributions de sécurité sociale, d'assurance chômage et d'AGS d'un montant total de 106.083 € outre les majorations de retard.

La société contrôlée n'ayant formulé aucune observation à l'issue du contrôle, l'ensemble des cotisations de sécurité sociale, augmenté des majorations de retard, a été réclamé par une mise en demeure du 10 octobre 2017 pour un montant total de 121.201 €, dont 106.086 € de cotisations et 15.115 € de majorations de retard.

Par courrier du 24 octobre 2017, la SARL Société d'exploitation des transports Straumann a saisi la commission de recours amiable de l'Urssaf d'Alsace en contestation des chefs de redressement relatifs aux « frais professionnels – limites d'exonération : frais inhérents à l'utilisation des NTIC » (point no2 de la lettre d'observations), aux frais de repas « frais professionnels non justifiés – principes généraux » (point no3) et aux frais de déplacement « frais professionnels non justifiés – principe généraux » (point no4).

Par décision du 4 décembre 2017 envoyée par courrier du 19 décembre 2017, la commission de recours amiable a décidé de rejeter la requête de la société.

Par recours formé le 16 février 2018, la SARL Société d'exploitation des transports Straumann a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale du Haut-Rhin en contestation de cette décision.

Vu l'appel interjeté par la SARL Société d'exploitation des transports Straumann le 3 avril 2019 à l'encontre du jugement du 7 mars 2019 rendu par le pôle social du tribunal de grande instance de Mulhouse, auquel le contentieux a été transféré qui, dans l'instance opposant la SARL Société d'exploitation des transports Straumann à l'Urssaf d'Alsace, a :
– dit que les redressements opérés par l'Urssaf d'Alsace sont justifiés ;

– condamné la SARL Société d'exploitation des transports Straumann à payer à l'Urssaf d'Alsace la somme de 121.201 € augmentée des majorations de retard à calculer ;
– dit que chaque partie supportera ses propres dépens ;

Vu les conclusions visées le 21 mai 2021, reprises oralement à l'audience, aux termes desquelles la SARL Société d'exploitation des transports Straumann demande à la cour de :
– infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que les redressements opérés par l'Urssaf d'Alsace sont justifiés et l'a condamnée à payer à l'Urssaf d'Alsace la somme de 121.021 € augmentés des majorations de retard à recalculer ;
– réformer le jugement déféré en toutes ses dispositions ;
– en conséquence, rejeter les demandes de l'Urssaf d'Alsace ;
– condamner l'Urssaf d'Alsace à lui verser la somme de 4.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel ;
– condamner l'Urssaf d'Alsace à l'ensemble des frais et dépens ;

Vu les conclusions visées le 24 mars 2021, reprises oralement à l'audience, aux termes desquelles l'Urssaf d'Alsace demande à la cour de :
– débouter la SARL Société d'exploitation des transports Straumann au fond ;
– confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions ;
– rejeter la demande de condamnation de l'Urssaf au paiement d'une somme de 4.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers frais et dépens ;
– rejeter toute autre demande de la société comme mal fondée ;

Vu le dossier de la procédure, les pièces versées aux débats et les conclusions des parties auxquelles il est référé, en application de l'article 455 du code de procédure civile, pour l'exposé de leurs moyens et prétentions ;

MOTIFS

Interjeté dans les forme et délai légaux, l'appel est recevable.

A titre liminaire, la cour constate que le chef de redressement no1 de la lettre d'observations du 20 juillet 2017 n'est pas contesté et que par l'effet dévolutif de la déclaration d'appel et les dernières conclusions des parties l'entier litige est soumis à une nouvelle appréciation en fait et en droit.

Sur les frais professionnels – limites d'exonération : frais inhérents à l'utilisation des NTIC (point no2 de la lettre d'observations)

L'article L242-1, alinéa premier, du code de la sécurité sociale, dans ses différentes versions applicables au litige, dispose que pour le calcul des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, sont considérées comme rémunérations toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail, notamment les salaires ou gains, les indemnités de congés payés, le montant des retenues pour cotisations ouvrières, les indemnités, primes, gratifications et tous autres avantages en argent, les avantages en nature, ainsi que les sommes perçues directement ou par l'entremise d'un tiers à titre de pourboire.

L'alinéa 3 énonce qu'il ne peut être opéré sur la rémunération ou le gain des intéressés servant au calcul des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, de déduction au titre de frais professionnels que dans les conditions et limites fixées par arrêté interministériel.

Selon l'article premier de l'arrêté du 20 décembre 2002 relatif aux frais professionnels déductibles pour le calcul des cotisations de sécurité sociale, les frais professionnels s'entendent des charges de caractère spécial inhérentes à la fonction ou à l'emploi du travailleur salarié ou assimilé que celui-ci supporte au titre de l'accomplissement de ses missions.

L'article 2, 1o dudit arrêté ministériel, prévoit que lorsque l'indemnisation des frais professionnels s'effectue sous la forme du remboursement des dépenses réellement engagées par le travailleur salarié ou assimilé, l'employeur est tenu de produire les justificatifs y afférents.

Ces remboursements peuvent notamment porter sur les frais prévus aux articles 6, 7 et 8 (3o, 4o et 5o).

En application de l'article 7 de l'arrêté du 20 décembre 2002 précité tel que modifié par l'arrêté du 25 juillet 2005, les frais engagés par le travailleur salarié ou assimilé à des fins professionnelles, pour l'utilisation des outils issus des nouvelles technologies de l'information et de la communication qu'il possède, sont considérés comme des charges de caractère spécial inhérentes à la fonction ou à l'emploi conformément au contrat de travail. Les remboursements effectués par l'employeur doivent être justifiés par la réalité des dépenses professionnelles supportées par le travailleur salarié ou assimilé.

Lorsque l'employeur ne peut pas justifier la réalité des dépenses professionnelles supportées par le travailleur salarié ou assimilé, la part des frais professionnels est déterminée d'après la déclaration faite par le salarié évaluant le nombre d'heures à usage strictement professionnel, dans la limite de 50 % de l'usage total.

En l'espèce, l'inspecteur du recouvrement a constaté que l'employeur remboursait mensuellement une somme forfaitaire de 23 € aux chauffeurs pour l'utilisation de leur téléphone portable personnel et qu'aucun justificatif n'a été demandé par l'employeur aux salariés en amont du versement de ces indemnités.

Par mesure de tolérance, il a été demandé à l'employeur de justifier d'une facture téléphonique par salarié au titre de chaque année visée par le contrôle.

Les indemnités versées sans production de justificatif ou dépassant la limite d'exonération ont été réintégrées par l'inspecteur dans l'assiette des cotisations et contributions sociales.

La SARL Société d'exploitation des transports Straumann reproche aux premiers juges d'avoir validé le redressement litigieux sur ce point.

Elle considère que les frais remboursés constituent des frais professionnels liés à l'usage des téléphones portables par les chauffeurs routiers durant leur temps de travail et que l'arrêté du 20 décembre 2002 ne prohibe nullement le remboursement des frais professionnels sur une base forfaitaire.

Or il résulte des articles 2 et 7 de l'arrêté interministériel du 20 décembre 2002 modifié par l'arrêté du 25 juillet 2005 que l'indemnisation des frais engagés par le travailleur salarié ou assimilé à des fins professionnelles pour l'utilisation des outils issus des nouvelles technologies de l'information et de la communication s'effectue uniquement sous la forme du remboursement des dépenses réellement exposées ou, lorsque l'employeur ne peut en justifier, d'après la déclaration faite par les salariés évaluant le nombre d'heures d'utilisation à usage strictement professionnel de ces outils, dans la limite de 50 % de l'usage total.

L'article 2, 2o de l'arrêté précité n'étant pas applicable aux frais définis à l'article 7, cette indemnisation ne peut donc être évaluée forfaitairement.

Bien que certaines factures téléphoniques soient versées aux débats (pièce no5 de l'appelante), les premiers juges ont constaté avec pertinence que les justificatifs produits par la SARL Société d'exploitation des transports Straumann – et ce constat reste valable à hauteur d'appel – ne permettent pas d'établir le montant des dépenses réellement exposées par les salariés à des fins professionnelles – et il suffit d'ajouter sur ce point que les factures ne sont pas détaillées concernant le temps de communication à titre professionnel, – et qu'aucune déclaration des salariés évaluant le nombre d'heures d'utilisation à usage professionnel du téléphone portable n'est produite, ce qui rend impossible toute vérification de la réalité des frais exposés par les salariés pour les besoins de leur activité professionnelle.

Dès lors, c'est à bon droit que le tribunal de grande instance de Mulhouse a validé le redressement litigieux de ce chef, de sorte que le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur les frais professionnels non justifiés – principes généraux (point no3 de la lettre d'observations)

L'article 2, 2o de l'arrêté ministériel du 20 décembre 2002 précité, prévoit que lorsque l'indemnisation des frais professionnels s'effectue sur la base d'allocations forfaitaires, l'employeur est autorisé à déduire leurs montants dans les limites fixées par le présent arrêté, sous réserve de l'utilisation effective de ces allocations forfaitaires conformément à leur objet.

Cette condition est réputée remplie lorsque les allocations sont inférieures ou égales aux montants fixés par le présent arrêté aux articles 3, 4, 5, 8 et 9.

En application de l'article 3 de l'arrêté du 20 décembre 2002 précité, les indemnités liées à des circonstances de fait qui entraînent des dépenses supplémentaires de nourriture sont réputées utilisées conformément à leur objet pour la fraction qui n'excède pas les montants suivants :

1o Indemnité de repas :

Lorsque le travailleur salarié ou assimilé est en déplacement professionnel et empêché de regagner sa résidence ou lieu habituel de travail, l'indemnité destinée à compenser les dépenses supplémentaires de repas est réputée utilisée conformément à son objet pour la fraction qui n'excède pas 15 Euros par repas ;

2o Indemnité de restauration sur le lieu de travail :

Lorsque le travailleur salarié ou assimilé est contraint de prendre une restauration sur son lieu effectif de travail, en raison de conditions particulières d'organisation ou d'horaires de travail, telles que travail en équipe, travail posté, travail continu, travail en horaire décalé ou travail de nuit, l'indemnité destinée à compenser les dépenses supplémentaires de restauration est réputée utilisée conformément à son objet pour la fraction qui n'excède pas 5 Euros ;

3o Indemnité de repas ou de restauration hors des locaux de l'entreprise :

Lorsque le travailleur salarié ou assimilé est en déplacement hors des locaux de l'entreprise ou sur un chantier, et lorsque les conditions de travail lui interdisent de regagner sa résidence ou son lieu habituel de travail pour le repas et qu'il n'est pas démontré que les circonstances ou les usages de la profession l'obligent à prendre ce repas au restaurant, l'indemnité destinée à compenser les dépenses supplémentaires de repas est réputée utilisée conformément à son objet pour la fraction qui n'excède pas 7,5 Euros.

Lorsque le travailleur salarié ou assimilé est placé simultanément au cours d'une même période de travail dans des conditions particulières de travail énoncées aux 1o, 2o et 3o, une seule indemnité peut ouvrir droit à déduction.

En l'espèce, il résulte de la lettre d'observations que l'employeur a versé des indemnités forfaitaires de repas fixées conventionnellement à différentes catégories de personnel, à savoir les chauffeurs en situation de déplacement ou en situation de travail en atelier ainsi que les salariés sédentaires (mécaniciens, employés administratifs).

Considérant que les salariés occupant des fonctions administratives et les chauffeurs travaillant en atelier n'étaient pas en situation de déplacement professionnel, l'inspecteur en charge du contrôle a réintégré les indemnités versées à ces salariés dans l'assiette des cotisations et contributions sociales.

La SARL Société d'exploitation des transports Straumann reproche aux premiers juges de ne pas avoir reconnu le caractère professionnel des indemnités de repas versées tant au personnel roulant en déplacement qu'au personnel roulant en atelier et au personnel sédentaire.

Elle fait valoir en premier lieu que le personnel roulant devait bénéficier de la classification d'ouvriers de la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport du 21 décembre 1950 et que l'indemnité versée est inférieure à 15 € par repas, considérant ainsi que les conditions fixées par l'article 3 de l'arrêté du 20 décembre 2002 sont respectées.

A cet égard, l'Urssaf rétorque que les développements afférents au personnel roulant en déplacement sont sans objet, ce qu'il convient d'approuver puisqu'il résulte de la lettre d'observations que seules les indemnités versées aux chauffeurs en situation de travail en atelier et au personnel administratif, dûment listés en annexe no3 de la lettre d'observations, sont concernées par le redressement.

La SARL Société d'exploitation des transports Straumann expose en second lieu que les conditions particulières d'organisation du travail du personnel sédentaire et du personnel roulant travaillant en atelier, dont la pause méridienne pour le déjeuner est

limitée à 45 minutes, et le montant de l'indemnité spéciale de repas inférieure à 5 € par repas sur la période contrôlée permet à l'employeur de retenir la qualification de frais professionnels.

L'intimée réplique à bon droit que, concernant les indemnités versées aux chauffeurs en situation de travail en atelier et au personnel sédentaire, la SARL Société d'exploitation des transports Straumann ne justifie pas que l'article 7 du protocole du 30 avril 1974 de l'annexe no1 Ouvrier de la convention collective relatif à l'indemnité spéciale pour le personnel ouvrier disposant d'une amplitude particulière de travail serait appliqué à l'ensemble des salariés concernés par le présent chef de redressement.

En outre, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, la société ne produit aucun contrat de travail ni bulletin de paie ou tout autre élément de nature à établir l'amplitude de travail couvrant les périodes comprises entre 11h et 14h30 ou entre 18h30 et 22h visées par les dispositions conventionnelles.

Faute pour la société appelante d'établir que les salariés sédentaires et les chauffeurs travaillant en atelier répondent aux conditions de l'article 3 de l'arrêté du 20 décembre 2002, c'est à bon droit que le tribunal a validé le redressement de ce chef, de sorte que le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur les frais professionnels non justifiés – principe généraux (point no4 de la lettre d'observations)

Les premiers juges ont exactement visé, rappelé et reproduit les dispositions applicables au litige auxquelles il convient de se référer.

Au cas d'espèce, des indemnités de déplacement ont été versées à M. [S] [Y], salarié de la SARL Société d'exploitation des transports Straumann, à hauteur de 12.000 € en 2015 et 20.000 € en 2016.

La répartition des frais de déplacement entre le gérant et M. [S] [Y] n'ayant pu être déterminée par l'inspecteur du recouvrement au titre de l'année 2014, ce dernier a affecté les 69.000 € des écritures comptables au salarié.

Des états de frais ont été produits par l'entreprise lors des opérations de contrôle pour des montants inférieurs aux frais de déplacement résultant des écritures comptables.

L'appelante sollicite la réformation du jugement entrepris au motif que M. [S] [Y] effectue pour le compte de la société différentes activités nécessitant des déplacements professionnels tels que des reconnaissances d'itinéraires, la restitution de comptes-rendus pour des clients ou la recherche de pièces mécaniques.

Elle expose que M. [S] [Y], qui disposait de la qualité de chauffeur poids-lourds, était régulièrement en déplacements professionnels, qu'il était empêché de regagner sa résidence habituelle dans les conditions visées à l'article 5, 1o de l'arrêté du 20 décembre 2002, ce qui justifierait selon elle le versement des indemnités kilométriques et des indemnités de grand déplacement en franchise de cotisations.

La SARL Société d'exploitation des transports Straumann conteste également la réintégration des frais exposés par M. [Z] [Y], gérant de la société, alors que

l'examen des comptes courants d'associés aurait permis à l'Urssaf de connaître les frais de déplacement exposés par chacun.

Sur ce dernier point, il y a lieu de rappeler qu'un compte courant d'associé représente une avance de fonds dans une entreprise de sorte que les frais kilométriques d'un associé, non remboursés par la société, ne sauraient être confondus avec les frais kilométriques ayant donné lieu à remboursement et comptabilisés sur le « compte 6251 ».

Comme l'a pertinemment constaté le tribunal, la société ne conteste pas qu'au moins une partie de la somme affectée au « compte 6251 » concerne les frais de déplacement de M. [S] [Y] et à hauteur d'appel aucun élément supplémentaire produit aux débats ne permet de justifier des seuls montants attribués à M. [S] [Y].

La comptabilisation de ces frais sur le « compte 6251 » ne permet pas d'en retenir d'autres tels que les frais de repas ou des frais de découcher.

En outre, en application de l'article 5, 1o de l'arrêté du 20 décembre 2002 précité, pour bénéficier d'une déduction sur les indemnités forfaitaires de grand déplacement versées à ses salariés, l'employeur doit justifier que ces indemnités sont destinées à compenser des dépenses supplémentaires de repas et de logement, la présomption d'utilisation conforme dans les limites fixées réglementairement ne pouvant jouer qu'une fois cette preuve apportée.

Or les tableaux déclaratifs présentés par la société concernant les déplacements effectués par M. [S] [Y] sont incohérents avec les frais de déplacement perçus par le salarié.

Ils ne permettent pas davantage de distinguer les montants des différents frais remboursés au titre de l'indemnité kilométrique, du forfait repas ou encore de la nuitée.

Enfin, ces tableaux, dont il existe deux versions différentes, ne sont corroborés par aucun élément justificatif.

Ils sont, en outre, imprécis en ce qu'ils se bornent – et il suffit de reprendre les constatations de l'inspecteur du recouvrement pour déterminer la version des tableaux qui lui a été présentée –, à préciser le lieu de départ, le lieu d'arrivée, le kilométrage parcouru et le montant à défrayer. N'étaient donc pas mentionnés dans la version présentée à l'inspecteur le barème kilométrique utilisé ni le motif du déplacement, étant en outre constaté que cette mention n'apparaît que dans la seconde version des tableaux produits.

Il doit ainsi être considéré que ces derniers éléments ne permettent pas de démontrer que l'allocation forfaitaire a été utilisée conformément à son objet.

La société appelante n'apportant pas la preuve de dépenses supplémentaires de repas et de logement supportés par le salarié ni même du caractère professionnel des déplacements ayant été indemnisés alors qu'il lui appartenait de rapporter la preuve que les forfaits versés au titre des déplacements professionnels correspondent bien à leur objet, le redressement est donc justifié pour le montant retenu par le tribunal et le jugement sera ainsi confirmé sur ce point.

En l'absence de tout paiement de la créance de 121.201 € notifiée par la mise en demeure du 10 octobre 2017 et compte-tenu de la confirmation du jugement sur les chefs de redressement litigieux, la confirmation du jugement s'impose encore sur la condamnation de la SARL Société d'exploitation des transports Straumann à payer cette somme à l'Urssaf d'Alsace augmentée des majorations de retard à calculer.

La SARL Société d'exploitation des transports Straumann, qui succombe en son recours, sera condamnée aux dépens de première instance -le jugement étant réformé sur ce point- et aux dépens d'appel et déboutée de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire, en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la Loi,

DÉCLARE l'appel recevable ;

CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions à l'exclusion des dépens ;

Y ajoutant,

DÉBOUTE la SARL Société d'exploitation des transports Straumann de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la SARL Société d'exploitation des transports Straumann aux dépens de première instance et d'appel.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de colmar
Formation : 4s
Numéro d'arrêt : 19/017471
Date de la décision : 10/03/2022
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : Tribunal des affaires de sécurité sociale du Haut-Rhin, 07 mars 2019


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.colmar;arret;2022-03-10;19.017471 ?
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