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03/03/2022 | FRANCE | N°19/051921

France | France, Cour d'appel de colmar, 4s, 03 mars 2022, 19/051921


NH/FA

MINUTE No 22/0196

NOTIFICATION :

Copie aux parties

- DRASS

Clause exécutoire aux :

- avocats
- parties non représentées

Le

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR
CHAMBRE SOCIALE - SECTION SB

ARRET DU 03 Mars 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : 4 SB No RG 19/05192 - No Portalis DBVW-V-B7D-HHTK

Décision déférée à la Cour : 31 Octobre 2019 Tribunal de Grande Instance de MULHOUSE

APPELANTE :

Madame [H] [X]-[L]


[Adresse 2]
[Localité 4]

Représentée par Me Valérie SPIESER, avocat au barreau de COLMAR

INTIMÉE :

CAISSE D'ALLOCATIONS FAMILIALES DU HAUT-RHIN
[Adresse 1...

NH/FA

MINUTE No 22/0196

NOTIFICATION :

Copie aux parties

- DRASS

Clause exécutoire aux :

- avocats
- parties non représentées

Le

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR
CHAMBRE SOCIALE - SECTION SB

ARRET DU 03 Mars 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : 4 SB No RG 19/05192 - No Portalis DBVW-V-B7D-HHTK

Décision déférée à la Cour : 31 Octobre 2019 Tribunal de Grande Instance de MULHOUSE

APPELANTE :

Madame [H] [X]-[L]
[Adresse 2]
[Localité 4]

Représentée par Me Valérie SPIESER, avocat au barreau de COLMAR

INTIMÉE :

CAISSE D'ALLOCATIONS FAMILIALES DU HAUT-RHIN
[Adresse 1]
[Localité 3]

Comparante en la personne de Mme [W] [N], munie d'un pouvoir

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Décembre 2021, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme HERY, Conseiller, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme FERMAUT, Conseiller, faisant fonction de Présidente de chambre,
Mme PAÜS, Conseiller
Mme HERY, Conseiller
qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme WALLAERT, Greffier

ARRET :
- contradictoire
- prononcé par mise à disposition au greffe par Mme HERY, Conseiller, en remplacement du président empêché
- signé par Mme HERY, Conseiller, en remplacement du président empêché, et Mme WALLAERT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

FAITS ET PROCÉDURE

En date du 8 novembre 2018, la caisse des allocations familiales (CAF) du Haut-Rhin a émis une contrainte à l'encontre de Mme [H] [X] pour un montant de 11.514,53 euros au titre d'un indu d'allocation aux adultes handicapés (AAH) de 11.319,74 euros pour la période du 1er mars 2015 au 28 février 2017 et d'un indu d'allocations familiales d'un montant de 194,79 euros pour la période du 1er février au 31 janvier 2018.

Par lettre recommandée envoyée au secrétariat du tribunal des affaires de sécurité sociale (TASS) du Haut-Rhin en date du 29 novembre 2018, Mme [H] [X] a formé opposition à cette contrainte.

Par jugement du 31 octobre 2019, le tribunal de grande instance de Mulhouse remplaçant le TASS a :

–constaté la régularité de l'opposition formée le 29 novembre 2018 par Mme [H] [X]-[L] à la contrainte délivrée par la CAF du Haut-Rhin le 8 novembre 2018 ;
–déclaré l'opposition recevable ;
–mis à néant la contrainte délivrée le 8 novembre 2018 par la CAF du Haut-Rhin à l'encontre de Mme [H] [X]-[L] ;
et le jugement s'y substituant,
–condamné Mme [H] [X]-[L] à payer à la CAF du Haut-Rhin la somme de 11.514,53 euros au titre d'un indu d'AAH et d'un indu d'allocations familiales ;
–rejeté la demande de dommages et intérêts présentée par Mme [H] [X]-[L] ;
–dit que chaque partie conservera la charge de ses dépens ;
–rejeté la demande présentée par Mme [H] [X]-[L] au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
–constaté l'exécution provisoire.

Mme [X] a formé appel à l'encontre de ce jugement le 29 novembre 2019 par voie électronique.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Aux termes de ses conclusions transmises par voie électronique le 15 septembre 2020, Mme [X] demande à la cour de :

–la déclarer recevable et fondée en son appel ;
–y faisant droit :
–infirmer le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a considéré l'opposition de la concluante régulière et recevable ;
et statuant à nouveau :
–déclarer prescrite la demande portant sur la période antérieure au 13 novembre 2016 subsidiairement au 3 mai 2016 ;
–débouter la CAF du Haut-Rhin de l'intégralité de ses fins et conclusions tant comme irrecevables que mal fondées ;
–condamner la CAF du Haut-Rhin à lui verser des dommages et intérêts équivalents à la condamnation à intervenir et prononcer la compensation des créances réciproques ;
subsidiairement et en tout état de cause :
–lui accorder les plus larges délais de paiement ;
–statuer ce que de droit quant aux dépens.

Aux termes de ses conclusions reçues le 27 janvier 2021, la CAF demande à la cour de :
–déclarer l'appel de Mme [H] [X]-[L] recevable ;
–confirmer le jugement entrepris ;
–débouter Mme [X]-[L] de l'ensemble de ses prétentions.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément, pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, aux conclusions susvisées et soutenues oralement à l'audience du 16 décembre 2021.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Interjeté dans les formes et délai légaux, l'appel est recevable.

Sur la contrainte

Sur la prescription

Mme [X] soutient que, s'agissant de l'indu d'AAH, la prescription biennale est acquise pour la période antérieure au 13 novembre 2016, le délai de prescription ne pouvant être interrompu que par l'envoi d'une lettre recommandée avec demande d'avis de réception, le courrier simple de la CAF du Haut-Rhin du 17 mars 2017 ne produisant pas cet effet interruptif dès lors qu'il ne fait mention d'aucun motif ni de la moindre explication, qu'il ne mentionne pas le détail de la somme réclamée ni le délai imparti pour régler pas plus que les voies et délais de recours.
Elle ajoute que sa demande de remise de dette adressée à CRA ne vaut pas reconnaissance de dette dès lors que cette reconnaissance n'est pas explicite à savoir claire et non équivoque de ses obligations de remboursement à l'égard de la CAF.
Subsidiairement, elle invoque la prescription pour la période antérieure au 3 mai 2016, la mise en demeure datant 3 mai 2018.

La CAF indique que la notification de l'indu constitue la première manifestation de sa part visant à faire courir le délai de prescription, cette dernière pouvant être interrompue pour les causes prévues aux articles 2240 à 2246 du code civil, telle qu'une reconnaissance de dette et ajoutées par la jurisprudence.

Elle se prévaut des dispositions de l'article L.133-4-6 du code de la sécurité sociale qui précise que l'interruption de la prescription peut résulter de l'envoi par un organisme de sécurité sociale d'une lettre recommandée avec demande d'avis de réception.
Elle expose que l'indu d'AAH en cause a fait l'objet d'une notification par lettre du 17 mars 2017, d'une demande de remise de dette par lettre du 6 avril 2017 adressée à la commission de recours amiable de la CAF, d'une mise en demeure par lettre recommandée du 3 mai 2018, d'une récupération sur les prestations mensuelles d'avril 2017 à février 2018 et de la contrainte du 8 novembre 2018.

La contrainte du 8 novembre 2018 porte sur un indu de prestations familiales versées du 1er décembre 2017 au 31 janvier 2018 et sur un indu d'AAH versée du 1er mars 2015 au 28 février 2017.

Aux termes des dispositions des articles L.553-1 et L.821-5 du code de la sécurité sociale, l'action intentée par un organisme payeur en recouvrement des prestations et de l'AAH indûment payées, sauf en cas de manoeuvre frauduleuse ou de fausse déclaration, est de deux ans.
Le 17 mars 2017, la CAF a adressé à Mme [X] un courrier aux termes duquel elle l'a informée de ce qu'elle avait procédé à la régularisation de ses droits à prestations familiales et qu'après étude de ses droits, de ce que ces derniers changeaient à compter du 1er mars 2015. Dans ce même courrier, la CAF a indiqué à l'allocataire qu'elle avait perçu, à tort, la somme de 13.976, 29 euros pour l'AAH et le complément de ressources et que cette somme lui était due et devait être remboursée.

Le 3 mai 2018, la CAF a adressé à Mme [X] une mise en demeure de payer l'indu afférent à l'AAH. Cette mise en demeure correspond en tous points aux dispositions de l'article R.133-9-2 du code de la sécurité sociale qui en fait le premier acte de l'action en recouvrement, ce qui n'est pas le cas du courrier du 17 mars 2017 qualifié par la CAF de simple notification de dette dont il s'agit de déterminer, s'il constitue une cause d'interruption de prescription.

Aux termes des dispositions de l'article L.133-4-6 du code de la sécurité sociale, la prescription est interrompue par une des causes prévues par le code civil. A l'exception des taxes, cotisations et contributions dues ou recouvrées par les organismes chargés du recouvrement, l'interruption de la prescription peut, en outre, résulter de l'envoi d'une lettre recommandée avec demande d'avis de réception, quels qu'en aient été les modes de délivrance.

Force est de constater que le courrier du 17 mars 2017 en cause n'a pas été adressé à Mme [X] par lettre recommandée avec demande d'avis de réception et ne vaut pas acte d'exécution forcée au sens des dispositions de l'article 2244 du code civil, de sorte que le cours de la prescription n'a pas été interrompu par ce courrier.

L'article 2240 du code civil définit la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait comme une cause interruptive du délai de prescription.

Le 6 avril 2017, suite au courrier du 17 mars 2017, Mme [X] a adressé à la CAF une demande de saisine de la commission de recours amiable, ce courrier ayant été transmis le jour même à cette commission par la CAF à fin de remise gracieuse de la totalité de la dette.

L'analyse du courrier du 6 avril 2017 permet de constater que Mme [X], bien que sollicitant en fin de courrier une remise de dette, y a indiqué qu'elle ne comprenait

pas les raisons pour lesquelles la CAF lui supprimait ses prestations, de sorte que ce courrier ne vaut pas reconnaissance de dette et n'a pas d'effet interruptif de la prescription.

Le premier acte ayant effet interruptif de la prescription se rattache à la mise en demeure du 3 mai 2018 qui répond aux conditions imposées par les dispositions de l'article R.133-9-2 du code de la sécurité sociale.

Dès lors, il y a lieu de déclarer la CAF irrecevable en sa demande de répétition de l'indu d'AAH pour cause de prescription pour la période allant du 1er mars 2015 au 2 mai 2016 mais recevable pour le surplus de la période concernée.

Sur les sommes dues

Mme [X] indique qu'elle bénéficie d'une pension d'invalidité de deuxième catégorie depuis le 1er février 2012, son taux d'invalidité étant supérieur à 80% et que c'est l'assistante sociale qui l'aidait qui a sollicité l'AAH auprès de la CAF qui lui a versé cette allocation alors qu'elle disposait de tous les documents nécessaires, y compris son avis d'imposition. Elle se dit de bonne foi et considère que l'erreur de versement ne lui est pas imputable mais relève de la faute de la CAF.

La CAF répond que sa demande de répétition de l'indu n'est pas entachée d'erreur et qu'elle n'a commis aucune faute rappelant que Mme [X] a une obligation de déclaration.

Alors même que Mme [X] sollicite l'infirmation du jugement entrepris pour l'ensemble des sommes visées par la répétition de l'indu, il s'avère que, dans ses conclusions, elle ne fait valoir aucun moyen sur la répétition de la somme de 259,72 euros concernant les prestations familiales et, s'agissant de l'AAH, elle ne conteste pas le montant de l'indu.

Considérant que l'opposition à contrainte n'a pas pour effet de mettre à néant la contrainte décernée, il y a lieu d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a mis à néant cette contrainte et a dit qu'il se substituait à la contrainte.

Le jugement entrepris est également infirmé en ce qu'il a condamné Mme [X] à payer à la CAF du Haut-Rhin la somme de 11.514,53 euros au titre de l'indu d'AAH et d'allocations familiales. Il y a lieu de valider la contrainte en cause pour l'indu afférent aux prestations familiales et pour l'indu afférent à l'allocation aux adultes handicapés, pour la période allant du 3 mai 2016 au 28 février 2017.

La CAF devra procéder aux régularisations nécessaires en résultant.

Sur la demande de dommages et intérêts

Considération prise de la pertinence des motifs du jugement entrepris, il y a lieu de le confirmer de ce chef, étant souligné qu'il appartient à Mme [X] de démontrer que les conditions de l'article 1240 du code civil sont remplies, ce qu'elle ne parvient pas à faire.

Sur la demande de délais de paiement

L'article 1244-1 du code civil n'étant pas applicable devant la juridiction du contentieux général de la sécurité sociale saisie aux fins de paiement des cotisations

et contributions sociales instituées par la loi, il y a lieu de rejeter la demande de Mme [X].

Sur les dépens

Le jugement entrepris est confirmé de ce chef.

A hauteur d'appel, il y a lieu de dire que Mme [X] en supportera la moitié et la CAF l'autre moitié.

PAR CES MOTIFS
La cour, statuant, publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et en avoir délibéré :

DÉCLARE l'appel recevable ;

INFIRME le jugement du tribunal de grande instance de Mulhouse du 31 octobre 2019 en ce qu'il a :

- mis à néant la contrainte délivrée le 8 novembre 2018 par la CAF du Haut-Rhin à l'encontre de Mme [H] [X]-[L] et dit qu'il s'y substituait ;
- condamné Mme [H] [X]-[L] à payer à la CAF du Haut-Rhin la somme de 11.514,53 euros au titre d'un indu d'AAH et d'un indu d'allocations familiales ;

CONFIRME pour le surplus, dans les limites de l'appel, le jugement du tribunal de grande instance de Mulhouse du 31 octobre 2019 ;

Statuant de nouveau sur les points infirmés et y ajoutant :

DÉCLARE la CAF du Haut-Rhin irrecevable en sa demande de répétition de l'indu de l'allocation aux adultes handicapés pour la période allant du 1er mars 2015 au 2 mai 2016 ;

DÉCLARE la CAF du Haut-Rhin recevable en sa demande de répétition de l'indu de l'allocation aux adultes handicapés pour la période allant du 3 mai 2016 au 28 février 2017 ;

VALIDE la contrainte du 8 novembre 2008 pour l'indu afférent aux prestations familiales et pour l'indu afférent à l'allocation aux adultes handicapés, pour la période allant du 3 mai 2016 au 28 février 2017 ;

DIT que la CAF du Haut-Rhin devra procéder aux régularisations nécessaires en résultant ;

REJETTE la demande de délais de paiement ;

FAIT MASSE des dépens d'appel et CONDAMNE Mme [H] [X] à supporter la moitié des dépens de la procédure d'appel et la CAF du Haut-Rhin à supporter l'autre moitié de ces dépens.

Le Greffier,Pour le Président empêché,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de colmar
Formation : 4s
Numéro d'arrêt : 19/051921
Date de la décision : 03/03/2022
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Mulhouse, 31 octobre 2019


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.colmar;arret;2022-03-03;19.051921 ?
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