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10/02/2022 | FRANCE | N°19/001411

France | France, Cour d'appel de colmar, 4s, 10 février 2022, 19/001411


CF/FA

MINUTE No 22/119

NOTIFICATION :

Copie aux parties

- DRASS

Clause exécutoire aux :

- avocats
- parties non représentées

Le

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR
CHAMBRE SOCIALE - SECTION SB

ARRET DU 10 Février 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : 4 SB No RG 19/00141 - No Portalis DBVW-V-B7D-G7CZ

Décision déférée à la Cour : 14 Novembre 2018 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de STRASBOURG

APPELANTE

:

S.A.R.L. [I] POIDS LOURDS
[Adresse 2]
[Adresse 2]

Représentée par Me Sébastien BENDER, avocat au barreau de STRASBOURG, substitué par Me PHILIPPE, avo...

CF/FA

MINUTE No 22/119

NOTIFICATION :

Copie aux parties

- DRASS

Clause exécutoire aux :

- avocats
- parties non représentées

Le

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR
CHAMBRE SOCIALE - SECTION SB

ARRET DU 10 Février 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : 4 SB No RG 19/00141 - No Portalis DBVW-V-B7D-G7CZ

Décision déférée à la Cour : 14 Novembre 2018 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de STRASBOURG

APPELANTE :

S.A.R.L. [I] POIDS LOURDS
[Adresse 2]
[Adresse 2]

Représentée par Me Sébastien BENDER, avocat au barreau de STRASBOURG, substitué par Me PHILIPPE, avocat au barreau de STRASBOURG

INTIMÉE :

URSSAF ALSACE
TSA 60003
[Adresse 1]

Comparante en la personne de Mme [K] [R], munie d'un pouvoir

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 Novembre 2021, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme FERMAUT, Conseiller, faisant fonction de Présidente de chambre, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme FERMAUT, Conseiller, faisant fonction de Présidente de chambre,
Mme PAÜS, Conseiller
Mme HERY, Conseiller
qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme WALLAERT, Greffier

ARRET :
- contradictoire
- prononcé par mise à disposition au greffe par Mme HERY, Conseiller, en remplacement du Président empêché,
- signé par Mme HERY, Conseiller,en remplacement du Président empêché, et Mme WALLAERT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

FAITS ET PROCÉDURE

La société à responsabilité limitée [I] poids lourds a fait l'objet d'un contrôle de l'application des législations de sécurité sociale, d'assurance chômage et de garantie des salaires portant sur la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014 pour son établissement sis [Adresse 3]), dont il est résulté un rappel de cotisations et contributions de sécurité sociale, d'assurance chômage et d'AGS pour un montant total de 61.488 € qui a été notifié par lettre d'observations du 14 octobre 2015.

Le 14 décembre 2015, après échanges d'observations entre les parties, l'Urssaf d'Alsace a mis en demeure la SàRL [I] poids lourds d'avoir à payer une somme de 70.137 € dont 61.487 € au titre des cotisations pour les années 2012, 2013 et 2014, et 8.650 € de majorations de retard.

Par courrier du 21 décembre 2015, la SàRL [I] poids lourds a saisi la commission de recours amiable de l'Urssaf d'Alsace d'un recours en contestation des chefs de redressement relatifs aux primes de salissure (point no1 de la lettre d'observations), à l'assujettissement des frais professionnels non justifiés des salariés (point no8) et du gérant de la société (point no3) ainsi qu'au montant de la réduction Fillon recalculé en fonction des sommes redressées (point no9).

La commission de recours amiable n'ayant pas statué dans le délai imparti, la SàRL [I] poids lourds a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale du Bas-Rhin d'un recours à l'encontre de la décision implicite de rejet de la commission.

Par décision du 21 mars 2016, la commission de recours amiable a explicitement décidé de rejeter la requête de la société, laquelle a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale du Bas-Rhin par courrier du 20 avril 2016 d'un recours aux fins d'obtenir l'annulation de cette décision.

La jonction des instances a été ordonnée par décision du 7 août 2017.

Vu l'appel interjeté par la SàRL [I] poids lourds le 21 décembre 2018 à l'encontre du jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale du Bas-Rhin du 14 novembre 2018, notifié à la société le 29 novembre 2018, qui, dans l'instance opposant la SàRL [I] poids lourds à l'Urssaf d'Alsace a validé le redressement litigieux au titre des primes de salissure, des frais professionnels et de la réduction Fillon pour leur entier montant, a condamné la SàRL [I] poids lourds à verser à l'Urssaf d'Alsace une somme de 70.137 € au titre du redressement de ses cotisations sociales, assortie des majorations de retard calculées selon les modalités de l'article R243-18 du code de la sécurité sociale et ce jusqu'à complet paiement des sommes dues, a condamné la SàRL [I] poids lourds aux entiers dépens de l'instance et a débouté les parties de leurs autres fins, moyens, demandes et prétentions ;

Vu les conclusions du 28 septembre 2020, visées le 04 novembre 2021, reprises oralement à l'audience, aux termes desquelles la SàRL [I] poids lourds demande à la cour :
- d'infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
- statuant à nouveau d'annuler la décision explicite de rejet de la commission de recours amiable de l'Urssaf d'Alsace notifiée le 8 avril 2016, de prononcer l'annulation du redressement et de la mise en demeure y afférente qui lui a été notifiée le 14 décembre 2015 concernant les redressements sur les primes de salissure, l'assujettissement aux cotisations sociales des frais professionnels de MM. [O], [L], [Z] et [I] et leurs conséquences sur le calcul de la réduction Fillon ;
- en tout état de cause, de condamner l'Urssaf d'Alsace au paiement de la somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers frais et dépens de la procédure ;

Vu les conclusions du 12 janvier 2021, visées le 19 janvier 2021, reprises oralement à l'audience, aux termes desquelles l'Urssaf d'Alsace demande à la cour de :
- débouter la SàRL [I] poids lourds de son recours au fond ;
- confirmer le jugement contesté en toutes ses dispositions ;
- rejeter la demande de condamnation de l'Urssaf au paiement d'une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- rejeter toute autre demande comme mal fondée ;

Vu le dossier de la procédure, les pièces versées aux débats et les conclusions des parties auxquelles il est référé, en application de l'article 455 du code de procédure civile, pour l'exposé de leurs moyens et prétentions ;

MOTIFS

Interjeté dans les forme et délai légaux, l'appel est recevable.

Sur les frais professionnels non justifiés - primes de salissure (point no1 de la lettre d'observations )

Il résulte de la lettre d'observations du 14 octobre 2015 que la SàRL [I] poids lourds versait mensuellement à ses salariés une prime de salissure de 200 € destinée à couvrir les frais de nettoyage et d'entretien de leurs tenues de travail.

Constatant que l'employeur n'a produit aucun document permettant de justifier les dépenses d'entretien réellement engagées par les salariés, l'inspecteur du recouvrement a réintégré ces primes forfaitaires dans l'assiette des cotisations et contributions sociales.

La société appelante reproche aux premiers juges d'avoir considéré, d'une part que le montant de la prime mensuelle est disproportionné au regard des coûts engendrés par le nettoyage à domicile des tenues de travail, d'autre part qu'elle ne justifiait pas de l'utilisation de l'indemnité conformément à son objet et, enfin, de ne pas avoir fixé le coût du nettoyage.

Les dispositions applicables au litige, auxquelles la cour se réfère et renvoie, ont été rappelées avec pertinence par les premiers juges, lesquels après un examen circonstancié des constatations de l'Urssaf au regard des éléments apportés par l'employeur, notamment les attestations versées aux débats et qui sont reproduites à hauteur d'appel, ont exactement décidé du maintien du redressement opéré de ce chef.

En effet, si MM. [O], [L] et [Z], salariés de la SàRL [I] poids lourds, occupant respectivement les postes de mécanicien, chef d'atelier et mécanicien au sein de l'entreprise, attestent procéder au lavage de leurs tenues de travail à leur domicile plusieurs fois par semaine, et qu'il n'est pas sérieusement contestable que ces professions sont particulièrement exposées à des risques de salissures liées aux produits manipulés, nécessitant ainsi leur entretien régulier, qui alourdissent les dépenses de nettoyage des salariés et constituent une charge de caractère spécial inhérente à leur emploi, le versement forfaitaire d'une prime mensuelle - en principe le montant des dépenses de lavage peut être librement fixé par l'employeur - uniforme pour chaque salarié de 200 € pour le lavage à domicile d'une tenue de travail est en l'espèce manifestement disproportionné au coût moyen d'un nettoyage en machine à laver d'un particulier et aucun élément n'est versé aux débats afin de justifier de dépenses réellement engagées par les salariés à hauteur du montant versé.

Qui plus est, il n'appartenait pas au tribunal de déterminer le prix d'un nettoyage mais à la société d'apporter la preuve des dépenses de nettoyage et de l'utilisation de la prime versée conformément à son objet, d'autant que les éléments dont entend se prévaloir la société ne permettaient pas aux premiers juges et ne permettent pas davantage à la cour de satisfaire aux demandes de la société du fait de sa propre carence sur le terrain probatoire.

Surtout, la SàRL [I] poids lourds ne démontre aucun caractère variable de la prime de salissure selon le nombre de jours travaillés et l'appelante n'apporte aucun élément contredisant les constatations de l'inspecteur du recouvrement sur son caractère forfaitaire, qui dès lors font foi jusqu'à preuve contraire.

Au surplus, l'appelante ne démontre pas que les extraits du site de l'Urssaf du 18 décembre 2019, dont elle entend se prévaloir, aient été applicables au contrôle litigieux qui s'est clos par l'envoi de la lettre d'observations du 14 octobre 2015.

Par conséquent, c'est à bon droit que le tribunal a jugé que la société n'apporte pas la preuve des dépenses de nettoyage et de l'utilisation de la prime conformément à son objet , de sorte que le jugement qui a validé le redressement sur ce point sera confirmé.

Sur les frais professionnels non justifiés - principes généraux, concernant MM. [O], [L] et [Z] (point no8 de la lettre d'observations )

L'inspecteur du recouvrement a constaté que la société contrôlée procédait au versement de sommes correspondant au remboursement de frais professionnels engagés par trois salariés (MM. [O], [L] et [Z]) et a décidé, en l'absence de tout justificatif, de réintégrer les montants versés à ce titre dans l'assiette des cotisations et contributions sociales.

La SàRL [I] poids lourds fait grief au jugement déféré d'avoir maintenu le redressement opéré de ce chef.

Elle indique, en premier lieu, avoir produit les relevés de frais kilométriques réalisés par les trois salariés durant la phase contradictoire postérieure au contrôle, sans pour autant contester les constatations de l'inspecteur du recouvrement selon lesquelles aucune facture ni aucun document permettant de justifier du caractère professionnel de ces déplacements et remboursements n'a été produit lors des opérations de contrôle.

Elle considère, en second lieu, que ces documents, renseignés et signés par les salariés, qui indiquent la date, le trajet et le nombre de kilomètres parcourus, accompagnés de la copie des cartes grises, mettent en évidence des trajets professionnels de leur domicile vers le dépôt ou le bureau de l'entreprise.

Toutefois, la cour rappelle, en renvoyant aux dispositions applicables au litige exactement visées par le jugement querellé, que lorsqu'il s'agit du trajet domicile-lieu de travail (dépôt ou bureau de la société) - ce qui n'était en outre pas précisé par l'employeur lors du contrôle - il incombe à l'employeur de justifier que l'utilisation du véhicule personnel d'un salarié est motivée par les contraintes horaires ou l'absence de transports en commun.

L'employeur n'apportant pas la preuve que les salariés attributaires de cette indemnité se trouvent individuellement contraints d'utiliser leur véhicule personnel à des fins professionnelles, c'est à bon droit que les premiers juges ont validé le redressement sur ce point.

Sur les frais professionnels non justifiés - principes généraux, concernant M. [I] (point no3 de la lettre d'observations )

Les dispositions permettant la résolution du litige ayant été, encore sur ce point, exactement rappelées par le tribunal dans le jugement déféré, il y a lieu de s'y référer.

Il résulte de la lettre d'observations litigieuse que la SàRL [I] poids lourds a versé au gérant des indemnités kilométriques au cours de chacune des années de la période contrôlée.

Contrairement au point no8, il a été produit, lors du contrôle, des relevés de frais ainsi que les copies des cartes grises des véhicules utilisés par le gérant, mais également les adresses concernant sept fournisseurs visités ainsi que celles figurant sur des bons de réparation relatifs aux lieux de dépannage sur lesquels il se serait rendu.

Par courrier du 15 septembre 2015, l'Urssaf a réitéré sa demande de production de pièces permettant de justifier du caractère professionnel des déplacements indemnisés.

En l'absence d'élément nouveau, l'inspecteur du recouvrement a procédé à la réintégration de l'ensemble des sommes versées à ce titre à M. [I] dans l'assiette des cotisations et contributions sociales.

La société appelante reproche aux premiers juges d'avoir validé le redressement sur ce point.

Elle conteste la méthode de l'inspecteur du recouvrement qui, selon elle, n'a pas opéré de tri entre les frais justifiés et les frais rejetés et elle reproche à l'Urssaf de ne pas tenir compte du kilométrage indiqué sur le compteur des véhicules utilisés alors que M. [I] est un dirigeant de terrain et qu'il se déplace pour se rendre à sa holding sans devoir y être convoqué.

Pourtant, la société ne produit aucune nouvelle pièce aux débats de nature à justifier autrement que par de simples allégations des déplacements et kilométrages effectués par M. [I] dans le cadre professionnel avec ses véhicules personnels.

Par conséquent, le jugement qui a validé le redressement au titre des frais professionnels de M. [I] pour son entier montant sera confirmé.

Sur le recalcul de la réduction Fillon (point no9 de la lettre d'observations )

Les chefs de redressement contestés ayant été validés, il n'y a pas lieu de recalculer le montant de la réduction Fillon, d'autant que le calcul effectué par l'inspecteur du recouvrement n'est pas contesté.

Ainsi, la demande présentée par la SàRL [I] poids lourds sera sur ce point rejetée.

Il résulte de l'ensemble des développements qui précèdent ainsi que de l'absence de paiement par la société appelante des sommes réclamées par l'Urssaf que le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions.

Partie qui succombe, la SàRL [I] poids lourds sera condamnée aux dépens éventuellement exposés postérieurement au 31 décembre 2018 et sera déboutée de ses demandes tendant à la condamnation de l'Urssaf d'Alsace au paiement d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers frais et dépens de la procédure.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire, en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la Loi,

DECLARE l'appel recevable ;

CONFIRME le jugement du 14 novembre 2018 en toutes ses dispositions ;

REJETTE la demande de la SàRL [I] poids lourds tendant à la condamnation de l'Urssaf d'Alsace au paiement d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers frais et dépens de la procédure ;

CONDAMNE la SàRL [I] poids lourds aux dépens éventuellement exposés postérieurement au 31 décembre 2018.

Le Greffier, Pour le Président empêché


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de colmar
Formation : 4s
Numéro d'arrêt : 19/001411
Date de la décision : 10/02/2022
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : Tribunal des affaires de sécurité sociale du Bas-Rhin, 14 novembre 2018


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.colmar;arret;2022-02-10;19.001411 ?
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