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05/06/2008 | FRANCE | N°06/02176

France | France, Cour d'appel de colmar, Ct0107, 05 juin 2008, 06/02176


MINUTE N° 08 / 0839
COUR D'APPEL DE COLMAR CHAMBRE SOCIALE-SECTION A

ARRÊT DU 05 Juin 2008

Numéro d'inscription au répertoire général : 4 A 06 / 02176 Décision déférée à la Cour : 28 Mars 2006 par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE MULHOUSE

APPELANTE :

Madame Marie Christine X..., non comparante, ...... Représentée par Me Jean-Luc VONFELT, avocat au barreau de MULHOUSE,

INTIMÉE :

SOCIÉTÉ SOLEA SAEML, prise en la personne de son représentant légal, non comparant, 97 rue de la Mertzau BP 3148 68063 MULHOUSE CEDEX Représentée par M

e Nicolas FREZARD, avocat au barreau de MULHOUSE de la SCP SIMON-WURMSER-SCHWACH-BOUDIAS-FREZARD, avocats ...

MINUTE N° 08 / 0839
COUR D'APPEL DE COLMAR CHAMBRE SOCIALE-SECTION A

ARRÊT DU 05 Juin 2008

Numéro d'inscription au répertoire général : 4 A 06 / 02176 Décision déférée à la Cour : 28 Mars 2006 par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE MULHOUSE

APPELANTE :

Madame Marie Christine X..., non comparante, ...... Représentée par Me Jean-Luc VONFELT, avocat au barreau de MULHOUSE,

INTIMÉE :

SOCIÉTÉ SOLEA SAEML, prise en la personne de son représentant légal, non comparant, 97 rue de la Mertzau BP 3148 68063 MULHOUSE CEDEX Représentée par Me Nicolas FREZARD, avocat au barreau de MULHOUSE de la SCP SIMON-WURMSER-SCHWACH-BOUDIAS-FREZARD, avocats aux barreaux de STRASBOURG, MULHOUSE et PARIS,

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 06 Mai 2008, en audience publique, devant la Cour composée de : M. VALLENS, Président de Chambre Mme SCHNEIDER, Conseiller M. JOBERT, Conseiller qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Melle FRIEH, Greffier

ARRÊT :- contradictoire- prononcé par mise à disposition au greffe par M. VALLENS, Président de Chambre,- signé par M. VALLENS, Président de Chambre et Melle FRIEH, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE :

Par contrat en date du 24 septembre 1979, Madame Marie-Christine X... a été embauchée par la SAEML SOLEA en qualité de conductrice-receveuse de bus.

Au terme de deux visites médicales qui ont eu lieu les 13 et 28 novembre 2003, le médecin du travail l'a déclarée définitivement inapte à la conduite de bus mais apte à un poste aménagé avec les restrictions suivantes : pas de station assise prolongée, pas de station debout prolongée, pas de manutention lourde, pas de conduite de véhicule léger prolongée et pas de déplacement à pied prolongé.
Le 17 février 2004, l'employeur a licencié Madame X... pour inaptitude et impossibilité de reclassement.
Celle-ci a porté l'affaire devant le Conseil de Prud'hommes de MULHOUSE qui, par jugement du 28 mars 2008, a dit que son licenciement était intervenu en période de suspension dû pour maladie en l'absence de visite de reprise auprès du médecin de travail, était dépourvu de cause réelle et sérieuse et présentait un caractère abusif.
L'employeur a été condamné à payer à Madame X... les sommes de 11. 787 € de dommages et intérêts et 500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Les premiers juges ont considéré que les deux visites médicales des 13 et 28 novembre 2003 n'étaient que des visites de pré-reprise et que par conséquent, le licenciement pour inaptitude intervenu en l'absence de visite de reprise était nul.
En revanche, la salariée a été déboutée de ses demandes en paiement de dommages et intérêts pour non consultation des délégués du personnel et pour absence de notification écrite de l'impossibilité de reclassement.
Par déclaration adressée le 25 avril 2008 au greffe de la Cour, Madame X... a interjeté appel de ce jugement.
Selon des écritures récapitulatives reçues le 4 décembre 2006 au greffe de la Cour et reprises oralement à l'audience, l'appelante conclut à l'infirmation du jugement entrepris en ce qu'il a jugé que la suspension du contrat de travail pour maladie n'était pas consécutive à une maladie professionnelle, de le confirmer en ce qu'il a jugé que son licenciement était nul, de l'infirmer en revanche en ce qu'il a condamné l'employeur à lui payer la somme de 11. 787 € de dommages et intérêts.
Elle demande à la Cour de condamner l'employeur à lui payer la somme de 47. 148, 48 € de dommages et intérêts.
A titre subsidiaire, l'appelante demande à la Cour d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé que la formalité de consultation des délégués du personnel n'avait pas été accomplie, de le confirmé en ce qu'il a jugé que l'employeur n'avait pas respecté son obligation de reclassement, de condamner l'employeur à lui payer la somme de 47. 148, 48 € de dommages et intérêts.
En tout état de cause, elle sollicite la condamnation de l'intimée à lui payer la somme de 3. 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
A l'appui de son recours, l'appelante fait valoir en substance que :
- contrairement à ce que les premiers juges ont indiqué dans leur jugement, le caractère professionnel de sa maladie a été reconnue par décision de la CPAM du 27 octobre 2003,
- elle était toujours en arrêt maladie les 13 et 28 novembre 2003 de sorte que les visites médicales qui ont eu lieu ces jours là ne pouvaient être qualifiées de visites de reprise,
- l'employeur n'a ni consulté les représentants du personnel ni notifié par écrit l'impossibilité de la reclasser dans l'entreprise,
- il n'a pas exécuté son obligation de reclassement,
- compte tenu des manquements de l'employeur à ses obligations, à son ancienneté dans l'entreprise (25 ans), elle peut revendiquer une indemnité qui ne saurait être inférieure à deux ans de salaire.

MOTIFS :

1- sur la nullité du licenciement de Madame X... :

A / sur l'absence de visites de reprise :

Attendu qu'aux termes de l'article R. 241- 51 de l'ancien Code du travail, devenu l'article R. 4624-23 du nouveau Code du travail, la visite de pré-reprise a pour objet de préparer le retour du salarié dans l'entreprise " lorsqu'une modification de l'aptitude au travail est prévisible " ;
Attendu toutefois que tel n'a pas été l'objet des deux visites médicales des 13 et 28 novembre 2003, aux termes desquelles le médecin du travail s'est clairement prononcé sur l'inaptitude définitive de Madame X... sans faire état d'une évolution prévisible de son aptitude au travail ;
Attendu de plus que ces deux visites médicales ont été qualifiées de visite de reprise par le médecin du travail lui-même qui s'est placé dans une perspective de constatation de l'inaptitude de la salariée avec ses conséquences et non de préparation de son retour dans l'entreprise ;
Attendu enfin que la salariée s'est soumise sans protester à ces deux examens médicaux dont elle ne pouvait ignorer qu'ils visaient à apprécier son aptitude au travail et non à évaluer sa capacité future à travailler compte tenu de l'évolution de son état de santé ;
Attendu qu'elle a accepté ses visites de reprise en connaissance de cause ;
Attendu que l'inaptitude de la salariée a donc bien été constatée au vu des deux visites médicales du médecin du travail exigées par la loi ;
Attendu que ce double examen médical a mis de plein droit un terme à la période de suspension du contrat de travail, peu important que la salariée ait continué à bénéficier d'un arrêt de travail de son médecin traitant prononcé le 8 octobre 2002 et jusqu'au 31 décembre 2004 ;
Attendu que le jugement entrepris doit donc être infirmé en ce qu'il dit et jugé que le licenciement de Madame X... était " intervenu en période de suspension pour maladie en l'absence de visite de reprise auprès du médecin du travail " et condamné l'employeur à lui payer la somme de 11. 787 € de dommages et intérêts au motif que " le licenciement pour inaptitude fondé sur l'avis d'une visite de pré-reprise (...) Est tout simplement nul " ;
Attendu que, statuant à nouveau, la salariée doit être déboutée de sa demande en paiements de dommages et intérêts pour nullité du licenciement au motif que la procédure de constatation de l'inaptitude de la salariée n'aurait pas été respectée ;

B / sur le défaut de consultation des délégués du personne :

Attendu que l'origine professionnelle de l'inaptitude de la salariée n'est pas subordonnée à la reconnaissance par la CPAM du lien de causalité entre la maladie ou l'accident dont le salarié a été victime et son inaptitude ;
Attendu ainsi que même si par décision du 3 février 2004, la CPAM de MULHOUSE a refusé de prendre en charge la maladie de Madame X... au titre de la législation relative aux risques professionnels, il convient de rechercher si son inaptitude a ou non une origine professionnelle ;
Attendu toutefois qu'il y a lieu de constater que le médecin du travail n'a pas mentionné que l'inaptitude de la salariée avait une origine professionnelle ;
Attendu que le certificat médical d'arrêt de travail du médecin traitant de la salariée du 8 octobre 2002 fait état de ce que cet arrêt de travail serait en rapport avec une maladie professionnelle ;
Attendu cependant que ce certificat médical a été contesté comme en atteste la décision de la CPAM de MULHOUSE qui, si elle ne s'impose pas à la Cour, n'en constitue pas moins un indice à prendre en compte pour l'appréciation de l'origine professionnelle ou non de l'inaptitude de la salariée ;
Attendu dans ces conditions que ce certificat médical ne suffit pas à lui seul à établir que l'inaptitude de la salariée trouve sa source dans une maladie professionnelle ou un accident du travail ;
Attendu qu'à défaut pour Madame X... de justifier d'autres éléments constituant un faisceau d'indices précis et concordants de l'origine professionnelle de son inaptitude, il convient de dire que les dispositions de l'article L. 122-32-5 de l'ancien Code du travail devenu l'article L. 1226-10 du nouveau Code du travail, dont notamment la consultation des délégués du personnel, n'avaient pas à s'appliquer ;
Attendu que le jugement entrepris doit donc être confirmé en ce qu'il débouté la salariée de sa demande en paiement de dommages et intérêts fondée sur l'article L. 122-32-7 de l'ancien Code du travail devenu l'article L. 1226-15 du nouveau Code du travail ;

2- sur le défaut d'indication par écrit des motifs qui s'opposent au reclassement du salarié :

Attendu que l'obligation pour l'employeur d'informer le salarié inapte des motifs qui s'opposent à son reclassement prévue à l'article L. 122-32-5 alinéa 2 de l'ancien Code du travail devenu l'article L. 1226-12 du nouveau Code du travail, est réservée aux salariés dont l'inaptitude a pour origine un accident du travail ou une maladie professionnelle, ce qui n'est pas le cas de Madame X... ;
Attendu que le jugement entrepris doit donc être confirmé en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour non respect de cette obligation ;

3- sur le caractère réel et sérieux du licenciement de Madame X... :

Attendu que le salarié inapte ne peut être licencié que pour impossibilité de reclassement démontrée par l'employeur et mentionnée dans la lettre de licenciement ;
Attendu que le médecin du travail a déclaré la salariée inapte à un poste de conductrice de bus mais apte à un poste aménagé à la condition qu'il ne comprenne ni station debout ni station assise prolongée, ni manutention lourde ni conduite prolongée d'un véhicule léger ni déplacement à pied prolongé ;
Attendu qu'il préconisait " un poste sédentaire pouvant s'effectuer en alternance assis / debout " ;
Attendu que le profil de poste recommandé par le médecin du travail présentait des caractéristiques telles que les opportunités de reclassement étaient nécessairement restreintes même en recourant à des mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail ;
Attendu en effet que les postes sédentaires où le salarié est alternativement assis puis debout sans qu'il s'agisse de situations prolongées, sont rares et difficiles à aménager ;
Attendu que l'employeur justifie avoir fait des recherches de reclassement dans ses différents services qui ont tous répondu par la négative ;
Attendu en outre qu'il ressort d'une lettre que l'employeur a adressée à la salariée le 24 décembre 2003, qu'après une première prospection qui n'avait pas donné de résultats, il avait relancé des recherches de reclassement après un entretien qu'il avait eu avec elle le 22 décembre 2003 ;
Attendu qu'il a ainsi épuisé son obligation de reclassement ;
Attendu dans ces conditions que l'impossibilité de reclassement de Madame X... est démontrée si bien que son licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse ;
Attendu qu'il s'ensuit qu'elle doit être déboutée de tous ses chefs de demande ;
Attendu que le jugement entrepris doit donc être infirmé en ce qu'il a condamné l'employeur à payer à la salariée la somme de 500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et à supporter les dépens de première instance ;
Attendu que, statuant à nouveau sur ce point, Madame X... doit être déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et condamnée à supporter les dépens de première instance en tant que partie perdante ;
Attendu qu'il est équitable de laisser à la charge de l'employeur les frais irrépétibles exposés dans la procédure si bien qu'il doit être débouté de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
attendu que la salariée, partie perdante, supportera les dépens d'appel ;

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi,
INFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
DÉBOUTE Madame Marie-Christine X... de tous ses chefs de demande,
DÉBOUTE la SAEML SOLEA de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
CONDAMNE Madame Marie-Christine X... aux dépens de première instance et d'appel.
Et le présent arrêt a été signé par Mr VALLENS, Président et Melle FRIEH, Greffier.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de colmar
Formation : Ct0107
Numéro d'arrêt : 06/02176
Date de la décision : 05/06/2008

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Mulhouse, 28 mars 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.colmar;arret;2008-06-05;06.02176 ?
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