ARRET N° 08/00016 N° de parquet : 07/01082-M
AFFAIRE : X... Fariel X... Ismaël
NATURE : ASSISTANCE EDUCATIVE COUR D'APPEL DE COLMAR
CHAMBRE SPECIALE DES MINEURS
ARRÊT DU 12 FEVRIER 2008 Audience en Chambre du Conseil
DANS L'AFFAIRE D'ASSISTANCE EDUCATIVE ENTRE :
X... Fariel, né le 06 Septembre 1992 à STRASBOURG X... Ismaël, né le 09 Janvier 1991 à STRASBOURG
- mineurs, non comparants et non représentés
ET
Mme Z... Farida, demeurant ...
mère des mineurs, intimée, comparante et non assistée
ET
M. X... Nagib, demeurant ...
père des mineurs, appelant, comparant, assisté de Maître ROUSSEL Christophe, avocat au barreau de COLMAR, qui a été entendu en sa plaidoirie
ET
SERVICE DE PROTECTION DES MINEURS, Centre Administratif, 1, Place de l'Etoile, 67000 STRASBOURG
organisme gardien, intimé, comparant et représenté par Mme LENTZ, adjointe au chef de service
EN PRESENCE DU MINISTERE PUBLIC
Vu la procédure d'assistance éducative suivie par le Juge des Enfants de STRASBOURG au profit des mineurs :- X... Fariel, né le 06 Septembre 1992,- X... Ismaël, né le 09 Janvier 1991,
Vu la décision du magistrat susvisé en date du 04 avril 2007 qui a ordonné une enquête sociale ;
Vu le jugement de ce même magistrat en date du 25 juillet 2007, notifié au père le 03 août 2007, qui a :
- confié Fariel à sa mère jusqu'à la décision du Juge aux Affaires Familiales ;
- accordé au père un droit de visite et de sortie sur Fariel ;
- ordonné au profit des deux mineurs une mesure d'Assistance Educative en Milieu Ouvert pour un an à compter du 27 juillet 2007 confiée au Service de Protection des Mineurs ;
- ordonné l'exécution provisoire de cette décision.
Vu l'appel interjeté par Monsieur X... Nagib, père des deux mineurs, par lettre recommandée expédiée le 10 août 2007 au Greffe de cette Cour ;
A l'audience des débats du 05 février 2007, après audition du rapport de Monsieur LAPLANE, Magistrat délégué à la Protection de l'Enfance, des déclarations de X... Nagib, Z...Farida, Mme LENTZ, des observations de Maître ROUSSEL Christophe et des réquisitions du Ministère Public,
LA COUR COMPOSÉE DE :
Monsieur LITIQUE, Président de Chambre, Monsieur STEINITZ, Conseiller et Monsieur LAPLANE, Magistrat délégué à la Protection de l'Enfance, En présence de Mlle Rachel FINITZER, élève avocate stagiaire, en présence de Madame MALARA, Substitut Général, assistés de Madame SCHIRMANN, Greffier,
a fixé le prononcé de sa décision au 12 FEVRIER 2008. M. le Président en a avisé les parties.
Ce jour, la Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi,
A STATUE COMME SUIT :
En application de l'article 150 du nouveau code de procédure civile, la décision qui ordonne une mesure d'instruction telle qu'une enquête sociale ne peut être frappée d'appel indépendamment du jugement sur le fond.
Dès lors, l'appel interjeté dans les forme et délai légaux à l'encontre des deux décisions est recevable.
Il résulte du dossier que le Procureur de la République, étant saisi de deux rapports administratifs faisant état de circonstances familiales et d'incident au sein de l'établissement scolaire laissant à penser que, à tout le moins, les conditions d'éducation des mineurs Ismaël et Fariel X... étaient gravement compromises, a par requête du 30 mars 2007 saisi le Juge des Enfants de STRASBOURG sur le fondement des articles 375 et suivants du code civil.
En conséquence c'est à bon droit que ce dernier a ordonné le 04 avril 2007 une enquête sociale, mesure d'instruction indispensable pour vérifier les éléments d'information qui lui étaient ainsi transmis et l'éclairer sur la situation exacte de ces deux mineurs avant de prendre toute décision dans leur intérêt.
Au fond il résultait déjà de l'enquête sociale le refus du père de collaborer avec le travailleur social, l'évolution dans un sens positif de la mère confrontée cependant à des difficultés financières du fait de la présence de Fariel à son domicile sans qu'elle ne touche pour lui des prestations familiales ou une pension alimentaire, la résidence des deux mineurs en cause ayant en 2002 été fixée par le Juge aux Affaires Familiales au domicile du père, l'évolution plutôt favorable de Fariel depuis qu'il était au domicile de sa mère en décembre 2006 et où il avait enfin été confronté aux quelques limites éducatives posées par la mère et son compagnon, enfin l'évolution défavorable d'Ismaël à l'égard duquel le père ne faisait preuve d'aucune autorité, ce qui se traduisait par un mineur brillant par son absentéisme scolaire, sachant être violent et régulièrement en conflit avec son père et son frère, mais étant très accroché à son club où il pratiquait le football.
C'est donc à juste titre que le Premier Juge a mis en place un soutien éducatif sous la forme d'une mesure d'Assistance Educative en Milieu Ouvert et, au moins pour Fariel, a entériné la situation existante en le confiant à sa mère.
Il est cependant regrettable que le Juge des Enfants ne se soit pas assuré de l'existence d'une procédure devant le Juge aux Affaires Familiales qui à ce jour n'est toujours pas démontrée et ne repose que sur les seules affirmations de la mère.
Cependant l'évolution de ces deux mineurs ne cesse d'inquiéter depuis lors : Fariel est revenu vivre au domicile de son père, sans raison apparente si ce n'est qu'il a préféré retrouver un foyer plus permissif ; Ismaël et Fariel sont, au plan scolaire comme au plan comportemental et de la violence, deux adolescents complètement à la dérive et la mesure d'Assistance Educative en Milieu Ouvert se heurte à un refus de collaboration de M. X... et de ses deux enfants au point que le travailleur social ne peut même plus les rencontrer.
La récente altercation violente entre ces deux mineurs et un professeur du collège et un surveillant qu'ils n'ont pas hésité à agresser tout comme l'absence d'Ismaël à l'audience de la Cour démontrent l'incapacité de M. X..., englué dans ses problèmes personnels, d'assumer ses obligations parentales d'éducation sur ses deux enfants et la dérive de plus en plus préoccupante de ces derniers.
Sans dénier les efforts personnels et éducatifs de la mère notamment auprès de Fariel pendant l'année où il résidait chez elle, l'animosité du père et des deux enfants à son égard rend le maintien de la décision du Premier Juge illusoire.
A moins de compromettre définitivement les conditions d'éducation de ces adolescents déjà grands et à l'avenir déjà compromis, il apparaît que seule une mesure de placement permettant de leur poser des repères et de tenter de les réinsérer au plan scolaire et professionnel avant qu'ils ne sombrent dans la délinquance doit être ordonnée. Les mineurs seront donc confiés au Service de Protection de l'Enfance du Bas-Rhin.
La mère, qui n'a pas démérité, bénéficiera d'un droit de visite et d'hébergement sur ses deux fils et le père s'un simple droit de visite, les modalités précises étant définies par le Juge des Enfants dans le cadre du projet éducatif élaboré par l'organisme gardien.
Compte tenu des difficultés financières de chacun des deux parents, il y a lieu de les dispenser de toute contribution aux frais de placement de leurs deux enfants.
En revanche les prestations familiales auxquelles ceux-ci ouvrent droit seront versées au Département du Bas-Rhin.
Enfin, il y a lieu de maintenir la mesure d'Assistance Educative en Milieu Ouvert au moins jusqu'à la réalisation du placement et au plus tard jusqu'à la majorité d'Ismaël et jusqu'au 09 janvier 1999 pour Fariel.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant en Chambre du Conseil, par arrêt contradictoire, et en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi :
DECLARE l'appel régulier et recevable
CONFIRME l'ordonnance du Juge des Enfants du 04 avril 2007 ordonnant une enquête sociale
INFIRME partiellement le jugement du 25 juillet 2007 et statuant à nouveau,
CONFIE le mineur Fariel à sa mère jusqu'à la date du présent arrêt et DONNE mainlevée de cette décision à compter de ce jour,
CONFIE les mineurs X... Ismaël et Fariel au Service de Protection de l'Enfance du Bas-Rhin à compter de ce jour,
DIT que la mère bénéficiera d'un droit de visite et d'hébergement sur ses deux enfants et le père d'un droit de visite, le tout selon des modalités à définir par le Juge des Enfants en concertation avec l'organisme gardien,
DISPENSE les deux parents de toute contribution aux frais de placement de leurs deux enfants,
ORDONNE le versement au Département du Bas-Rhin des prestations familiales auxquelles les mineurs ouvrent droit,
CONFIRME la mesure d'Assistance Educative en Milieu Ouvert au profit de ces deux mineurs jusqu'à la réalisation effective du placement et au plus tard jusqu'au 9 janvier 2009 et en CONFIE l'exécution au Service de Protection des Mineurs à charge pour celui-ci d'en faire rapport au Juge des Enfants compétent,
LAISSE les dépens à la charge du Trésor Public.
Ainsi jugé et statué par la Chambre Spéciale des Mineurs de la Cour d'appel de COLMAR.
Le présent arrêt a été prononcé en son audience tenue en Chambre du Conseil le 12 FEVRIER 2008 par Monsieur LITIQUE, Président de Chambre, en présence du Ministère Public et de Madame SCHIRMANN, greffier.
L'arrêt a été signé par Monsieur LITIQUE, Président de Chambre, et le greffier présent lors du prononcé.