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12/02/2008 | FRANCE | N°06/05059

France | France, Cour d'appel de colmar, Ct0007, 12 février 2008, 06/05059


MINUTE No

Copie exécutoire à

- Me Laurence FRICK
- Me Joëlle LITOU-WOLFF

Le 12 février 2008

COUR D'APPEL DE COLMARPREMIERE CHAMBRE CIVILE - SECTION A

ARRET DU 12 Février 2008
Numéro d'inscription au répertoire général : 1 A 06/05059
Décision déférée à la Cour : 19 Octobre 2006 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE A COMPETENCE COMMERCIALE DE STRASBOURG
APPELANTE :
SARL HCDB156 rue de l'Avenir 60430 NOAILLES

représentée par Me Laurence FRICK, avocat à la Cour Avocat plaidant : Me BENOIT, avocat à PARIS

INTIMEE :>SA HYPROMAT FRANCE15 rue du Travail 67720 HOERDT

représentée par Me Joëlle LITOU-WOLFF, avocat à la Cour Avocat plaidant : ...

MINUTE No

Copie exécutoire à

- Me Laurence FRICK
- Me Joëlle LITOU-WOLFF

Le 12 février 2008

COUR D'APPEL DE COLMARPREMIERE CHAMBRE CIVILE - SECTION A

ARRET DU 12 Février 2008
Numéro d'inscription au répertoire général : 1 A 06/05059
Décision déférée à la Cour : 19 Octobre 2006 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE A COMPETENCE COMMERCIALE DE STRASBOURG
APPELANTE :
SARL HCDB156 rue de l'Avenir 60430 NOAILLES

représentée par Me Laurence FRICK, avocat à la Cour Avocat plaidant : Me BENOIT, avocat à PARIS

INTIMEE :
SA HYPROMAT FRANCE15 rue du Travail 67720 HOERDT

représentée par Me Joëlle LITOU-WOLFF, avocat à la Cour Avocat plaidant : Me LEVY, avocat à STRASBOURG

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 910 du nouveau Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 08 Janvier 2008, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. HOFFBECK, Président de Chambre, entendu en son rapport, et M. CUENOT, Conseiller.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :M. HOFFBECK, Président de ChambreM. CUENOT, ConseillerM. ALLARD, Conseillerqui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme MUNCH-SCHEBACHER, Greffier
ARRET :- Contradictoire- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Nouveau Code de Procédure Civile.- signé par M. Michel HOFFBECK, président et Mme Christiane MUNCH-SCHEBACHER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. La Société HCDB est propriétaire d'un fonds de commerce de lavage de véhicules qu'elle exploite à MONTATAIRE (Oise).

La Société HYPROMAT FRANCE exploite un réseau de franchise à l'enseigne ELEPHANT BLEU sur tout le territoire français.
En 1990, la Société HCDB a souscrit un contrat de franchise ELEPHANT BLEU.
Elle y a mis fin à l'échéance du 14 janvier 2005.
Selon un acte déposé au greffe le 13 mai 2005, la Société HYPROMAT FRANCE a fait assigner en référé la Société HCDB devant le juge des référés commerciaux près le Tribunal de Grande Instance de Strasbourg.
Dans le dernier état de ses conclusions, elle a demandé que la défenderesse soit condamnée :
- à cesser de commercialiser, sous peine d'astreinte, des jetons de lavage pouvant être utilisés dans le réseau ELEPHANT BLEU ;- à remettre à la demanderesse, sous peine d'astreinte, l'ensemble des factures des jetons de lavage fabriqués jusqu'à ce jour, pour lui permettre de chiffrer son préjudice devant le juge du fond ;- à modifier son inscription au Registre du Commerce et des Sociétés, en y faisant disparaître toute utilisation de la marque HYPROMAT - à restituer les manuels opératoires "Elaboration Construction et Communication Publicité"portant le no 010297 conformément à l'article 14 du contrat de franchise.

Elle a également demandé que lui soit donné acte qu'elle se réserve le droit d'introduire une action devant le juge du fond, afin d'obtenir réparation du préjudice subi.
La Société HCDB a préalablement soulevé l'incompétence du juge des référés de Strasbourg au profit de celui de son siège social.
Par une ordonnance du 19 octobre 2006, accueillant les prétentions de la Société HYPROMAT, le magistrat saisi :
- a rejeté l'exception d'incompétence territoriale ;- a déclaré les demandes recevables ;- a interdit à la Société HCDB, sous astreinte provisoire de 500 Euros par infraction dûment constatée à compter de la signification de la décision, de commercialiser des jetons de lavage pouvant être utilisés dans le réseau ELEPHANT BLEU ;- a enjoint à la Société HCDB, sous astreinte provisoire de 500 Euros par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la signification de la présente décision, de remettre l'ensemble des factures des jetons de lavage fabriqués jusqu'à ce jour et de faire disparaître toute utilisation de la marque HYPROMAT ;- s'est réservée le droit de liquider ces astreintes ;- a donné acte à la Société HCDB de ce qu'elle n'est plus en possession des manuels opératoires fournis par la demanderesse :- a mis à la charge de la défenderesse le paiement d'une somme de 1200 Euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Selon une déclaration enregistrée au greffe le 21 novembre 2006, la Société HCDB a interjeté appel de cette décision.
Par ses dernières conclusions déposées le 24 septembre 2007, elle demande à la Cour de :
Vu les articles 42, 43, 56, 31 et très subsidiairement 872 et 873 du Code de Procédure Civile,- déclarer l'appel recevable ;- le déclarer bien fondé ;- infirmer l'ordonnance entreprise et, statuant à nouveau, dire et juger que le Tribunal de Grande Instance de Strasbourg n'était pas compétent pour statuer sur la demande de la Société HYPROMAT, qui sera renvoyée à mieux se pourvoir devant le tribunal de commerce de BEAUVAIS ;- dire et juger que l'absence de trouble manifestement illicite et l'existence de contestations sérieuses s'opposent à la demande de la Société HYPROMAT, qui sera renvoyée à mieux se pourvoir devant le juge du fond ;- infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle interdit à la Société HCDB de commercialiser des jetons de lavage pouvant être utilisés dans le réseau ELEPHANT BLEU, en ce qu'elle lui a enjoint de remettre ses factures d'achat de jetons, et en ce qu'elle l'a condamnée à faire disparaître toute utilisation de la marque HYPROMAT ;- infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a condamné la Société HCDB sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux frais et dépens ;- débouter la Société HYPROMAT de toutes ses demandes, fins et conclusions ;- confirmer l'ordonnance pour le surplus ;- condamner la Société HYPROMAT au paiement d'une somme de 10.000 Euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux frais et dépens de première instance et d'appel.

Au soutien de son appel, la Société HCDB fait valoir :
- qu'au visa des articles 42 et 43 du Code de Procédure Civile, le tribunal de commerce de BEAUVAIS est seul compétent pour statuer sur la demande de la Société HYPROMAT, puisqu'il s'agit de la juridiction territorialement compétente au regard du "lieu où demeure le défendeur" qui, en tant que personne morale, a son siège social dans le ressort du Tribunal de Commerce de BEAUVAIS ; que c'est à tort que la partie adverse revendique l'application d'une clause attributive de compétence ;- que la Société HYPROMAT n'est pas recevable à agir, puisqu'elle n'est pas propriétaire des jetons en discussion, ni propriétaire des centres de lavage franchisés qui seraient susceptibles d'être concernés par cette discussion ,- qu'à tout le moins, la recevabilité de la demande se heurte à de sérieuses contestations et à une évidente absence de trouble manifestement illicite ;- que c'est à tort que le premier juge a interdit à la concluante de commercialiser les nouveaux jetons qu'elle a fait fabriquer lorsqu'elle est sortie du réseau ELEPHANT BLEU, alors que ces jetons sont totalement différents de ceux du réseau adverse ;- qu'en particulier, le jeton HCDB ne comporte aucune des caractéristiques du jeton ELEPHANT BLEU ; qu'il n'y a donc aucune contrefaçon de ce jeton, ni même imitation ;- que les caractéristiques électroniques du jeton HCDB sont en outre différentes, de sorte que celui-ci ne fonctionne pas dans les monnayeurs du réseau ELEPHANT BLEU ;- que la concluante n'utilise pas ses jetons dans les monnayeurs ELEPHANT BLEU, ce qui ne lui permet donc pas "d'obtenir des prestations de lavage dans l'ensemble du réseau", comme l'affirme faussement HYPROMAT ;- que la Société HCDB achète ses propres jetons qu'elle revend à ses clients ; que ces derniers les utilisent dans les monnayeurs de la concluante où ils viennent faire leur lavage;- que si un client de la Société HCDB, qui est propriétaire de son jeton qu'il a acheté, utilise un jour ce jeton dans un autre monnayeur, ce choix relève de sa seule responsabilité;- que la concluante n'est pas responsable de l'utilisation des jetons faite par ses clients;

- que la Société HYPROMAT ne rapporte pas la preuve qu'il y aurait eu des jetons appartenant à la Société HCDB dans ses monnayeurs ELEPHANT BLEU ;- que c'est à tort que le juge des référés a déduit des termes des articles 14 et 15 du contrat de franchise une interdiction des franchisés d'utiliser des jetons aux mêmes caractéristiques que les jetons ELEPHANT BLEU ;- que faire droit à la demande adverse reviendrait à reconnaître que la responsabilité contractuelle de la Société HCDB serait engagée, ce qui relève exclusivement de la compétence du juge du fond ;- que par conséquent, le juge des référés, juge de l'évidence, est incompétent pour statuer sur la demande de la Société HYPROMAT.

La Société HCDB ajoute encore :
- qu'en tout état de cause la demande de la Société HYPROMAT se heurte à de nombreuses contestations sérieuses et à l'absence de trouble manifestement illicite ;- qu'en effet, en l'absence de protection du jeton ELEPHANT BLEU, aucun acte de concurrence déloyale ne peut être reproché à la Société HCDB ; que le jeton ELEPHANT BLEU n'a pas de "signature" particulière, contrairement à ce que prétend HYPROMAT ; qu'il s'agit d'un jeton banal quant à sa masse volumique ; que si l'une des deux parties est fautive, c'est la seule Société HYPROMAT qui, en tant que franchiseur d'un réseau, aurait dû créer un jeton qui soit original, spécifique et propre, et qui n'aurait pu être utilisé que dans des monnayeurs spéciaux ; que la partie adverse ne bénéficie d'aucun monopole dans l'utilisation des jetons de lavage ;- que la Société HYPROMAT commercialise volontairement un jeton aux caractéristiques communes pour qu'il puisse être utilisé dans les monnayeurs autres que ceux du réseau ELEPHANT BLEU ;- que la Société HCDB doit pouvoir utiliser librement ses propres monnayeurs ; qu'il est de jurisprudence qu'à partir du moment où des raisons techniques imposent certaines normes ou composants, comme en l'espèce, toute idée de concurrence déloyale est exclue ;- que dès lors que les jetons de la Société HCDB étaient clairement différenciés de ceux du réseau ELEPHANT BLEU, aucun acte de concurrence déloyale ou de parasitisme ne saurait être reproché à la concluante ; qu'aucune confusion ne pouvait se faire dans l'esprit du consommateur ;- que la commercialisation des jetons de la Société HCDB n'était accompagnée d'aucune manoeuvre ;- qu'enfin, la Société HYPROMAT n'a subi aucun trouble ou préjudice en raison de la commercialisation des jetons de la Société HCDB.

Enfin, s'agissant d'un avenant auquel la partie adverse fait référence, la Société HCDB fait observer :- qu'elle n'a jamais signé cet avenant, lequel ne lui est donc pas opposable ;- qu'en tout état de cause, le contrat de franchise ne met aucune obligation relative aux jetons, après la fin des relations contractuelles, à la charge du franchisé ;- que la SA HYPROMAT ne fait d'ailleurs aucune mention ni allusion aux jetons de lavage dans sa lettre du 21 octobre 2004, rappelant les obligations de la Société HCDB à la fin du contrat.

Par ses dernières conclusions déposées le 6 juillet 2007, la Société HYPROMAT FRANCE demande à la Cour de rejeter l'appel comme irrecevable et en tout état de cause mal fondé. Elle réclame en outre le paiement d'une somme de 4000 Euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile au titre de la procédure d'appel.
Elle fait observer en réplique :
- qu'elle a pu constater que la partie adverse a fait fabriquer et a commercialisé des jetons de lavage d'un profil et de caractéristiques électroniques identiques aux jetons de lavage universels ELEPHANT BLEU ; qu'il s'agit-là d'une situation extrêmement grave, car les clients de la Société HCDB peuvent se servir de ces jetons pour laver leurs véhicules dans tous les centres ELEPHANT BLEU, alors que cette société en a encaissé le prix ;- que le contrat de franchise, en son article 4, stipulait que l'ancien franchisé s'obligeait à cesser immédiatement toute utilisation, de quelque manière que ce soit, "des méthodes liées à la franchise HYPROMAT qui lui auront été communiquées par le franchiseur"; que l'article 15 lui imposait de "poursuivre loyalement son activité" ;- que la partie adverse contrevient à l'obligation contractuelle de poursuivre loyalement son activité en commercialisant un jeton d'un profil identique au jeton universel ELEPHANT BLEU ;- que si la Société HCDB indique ne pas avoir été signataire d'un avenant relatif au jeton universel ELEPHANT BLEU, cette question est sans intérêt dans le cadre du présent litige, puisqu'il est reproché à l'ancien franchisé de commercialiser un jeton contrefaisant et non pas de respecter les termes de cet avenant ;- qu'en tout état de cause, il est faux d'indiquer que ce document prévoit la conversion des jetons ELEPHANT BLEU un an après l'expiration du contrat ; qu'en effet, le document stipule uniquement qu'à l'issue du délai de 12 mois "les monnayeurs seront reprogrammés afin de ne plus recevoir le jeton universel ELEPHANT BLEU ; les modifications seront aux frais exclusifs du franchisé"; que l'interprétation qui est faite de ce texte est manifestement erronée ;- que la Société HCDB a fait fabriquer un jeton pour se livrer à une véritable escroquerie consistant à vendre le moyen d'obtenir des lavages fournis et payés par des tiers.

SUR CE, LA COUR
Vu le dossier de la procédure, les pièces régulièrement versées aux débats et les conclusions des parties auxquelles la Cour se réfère pour plus ample exposé des faits et moyens ;
Sur la recevabilité de l'appel :
Attendu préalablement que, tout en concluant dans le dispositif de ses conclusions à l'irrecevabilité de l'appel, la Société HYPROMAT n'expose aucun moyen pour la soutenir;
Attendu dès lors que, en l'absence de motif d'ordre public susceptible d'être soulevé d'office, il y a lieu de déclarer l'appel recevable ;
Sur la compétence territoriale :
Attendu que l'article 17 du contrat de franchise ayant lié les parties stipule que : "En cas de difficultés survenant pour l'interprétation et l'exécution du présent contrat ou par suite de sa résiliation pour quelque cause que ce soit...le tribunal de commerce de Strasbourg sera seul compétent";
Attendu ainsi que les parties avaient prévu, par cette clause attributive de juridiction, de donner compétence à la Chambre commerciale près le Tribunal de Grande Instance de Strasbourg pour tout litige lié à la rupture de leurs relations contractuelles ;
Attendu que tel est le cas dans la présente procédure, la Société HYPROMAT reprochant notamment à la Société HCDB d'avoir, au mépris tant des dispositions de l'article 14 du contrat de franchise ("le franchisé cessera immédiatement toute utilisation , de quelque manière que ce soit, des méthodes liées à la franchise HYPROMAT Eléphant Bleu, vis-à-vis de tous tiers") et de l'article 15 qui impose à l'ancien franchisé de "poursuivre loyalement son activité", d'avoir commercialisé des jetons de lavage pouvant être utilisés dans le réseau ELEPHANT BLEU postérieurement à la rupture des relations contractuelles ;
Attendu dès lors que la Société HYPROMAT était en droit de saisir la juridiction commerciale de Strasbourg et de s'affranchir des dispositions des articles 42 et 43 du Code de Procédure Civile ;

Attendu que le premier juge a donc à bon droit retenu sa compétence territoriale ;
Sur la recevabilité de la demande en référé :
Attendu que la Société HCDB estime que la Société HYPROMAT ne dispose d'aucun intérêt légitime à agir, comme n'étant ni propriétaire des jetons litigieux, ni propriétaire des centres de lavage franchisés qui seraient concernés par la discussion ;
Attendu cependant que la Société HYPROMAT, qui se plaint de la commercialisation par la défenderesse de jetons de lavage pouvant être utilisés dans l'ensemble du réseau ELEPHANT BLEU, et qui invoque l'existence d'un trouble manifestement illicite dans la mesure où les clients de la défenderesse peuvent se servir de ces jetons pour laver leurs véhicules dans les centres ELEPHANT BLEU, alors que c'est la Société HCDB qui en aurait encaissé le prix, est recevable à agir sur le fondement de l'article 873 alinéa 1er du Code de Procédure Civile, sous réserve évidemment du bien fondé de la demande ;
Sur le bien fondé de la demande d'interdiction de la commercialisation de jetons susceptibles d'être utilisés dans le réseau ELEPHANT BLEU :
Attendu qu'il sera préalablement observé que le débat n'est pas celui de la commercialisation par l'ancien franchisé de jetons de lavage qui ressembleraient, par leur aspect extérieur, à ceux de l'ancien franchiseur, mais celui de l'utilisation de jetons propres à l'ancien franchisé et pouvant être utilisés, en raison de leurs caractéristiques physiques, dans le réseau ELEPHANT BLEU ;
Attendu au demeurant qu'il ressort du constat d'huissier dressé le 27 avril 2005, soit trois mois après la cessation du contrat de franchise, que la Société HCDB disposait de jetons de lavage dont l'aspect extérieur ne permettait aucune confusion avec ceux du réseau ELEPHANT BLEU (notamment en raison des mentions qui y étaient inscrites) ;
Attendu que l'officier ministériel a surtout constaté d'une part que, après deux essais infructueux, les nouveaux jetons commercialisés par la Société HCDB permettaient encore de mettre en route le lavage des centres ELEPHANT BLEU, et que d'autre part, également après deux essais infructueux, les jetons ELEPHANT BLEU permettaient eux-mêmes d'actionner le lavage de la station HCDB ;
Attendu qu'il est ainsi établi qu'à la date du 27 avril 2005, si la Société HCDB avait modifié l'aspect extérieur des nouveaux jetons commercialisés par elle, elle n'en avait pas encore modifié les caractéristiques physiques, seules susceptibles d'empêcher leur utilisation dans le réseau ELEPHANT BLEU (compte tenu de la lecture électronique qui en est faite) ; que cela signifiait que sa clientèle pouvait utiliser, à cette date, dans les monnayeurs de la Société HCDB à la fois les nouveaux jetons acquis auprès cette société et les anciens jetons du réseau ELEPHANT BLEU ;
Attendu qu'il sera préalablement observé que la SA HYPROMAT, qui se plaint seule de cette situation, n'avait introduit dans le contrat de franchise préparé par elle et signé par le franchisé, aucune stipulation relative au délai à l'issue duquel les monnayeurs de l'ancien franchisé devaient être réglés pour ne plus recevoir des jetons ELEPHANT BLEU ; que cela est d'autant plus étonnant que le contrat de franchise réglementait précisément les autres modalités de la rupture ;
Attendu néanmoins que la SA HYPROMAT verse aux débats un "avenant au contrat de franchise", dont la première page porte le nom de la Société HCDB, mais qui n'est ni daté ni signé ; qu'elle prétend dans ses écrits que ce document aurait été remis à la Société HCDB;
Attendu que ledit document comporte une clause libellée en ces termes (article 5 alinéa 2) :
"De même, les parties conviennent que la dotation initiale d'échange sera également restituée au franchiseur. Le franchisé s'engage à restituer l'ensemble des jetons universels dans un délai de 12 mois. A l'issue de ce délai, les monnayeurs seront reprogrammés afin de ne plus recevoir le jeton universel Eléphant Bleu. Les modifications seront aux frais exclusifs du franchisé";
Attendu que, si cet avenant n'est manifestement pas entré dans le champ contractuel, puisque n'ayant pas été signé par les parties, il n'en demeure pas moins que les informations qu'il donne, permettent d'apprécier ce qui constituait, au moins pour la SA HYPROMAT qui l'a produit en annexes, la durée raisonnable au cours de laquelle les monnayeurs de l'ancien franchisé pouvaient simultanément recevoir, après la rupture du contrat de franchise, des jetons propres au nouveau franchisé et des jetons ELEPHANT BLEU, soit le terme à l'issue duquel l'on pouvait considérer que les clients ayant acheté des jetons avant le changement d'enseigne avaient eu raisonnablement le temps de les utiliser auprès du centre de lavage où ils les avaient achetés ;
Attendu en effet que, à travers ce document, la SA HYPROMAT admet que l'ancien franchisé ne devait adapter ses monnayeurs, pour exclure la réception des jetons ELEPHANT BLEU, qu'à l'issue d'un délai de 12 mois ;
Attendu que l'ancien franchisé avait d'ailleurs tout intérêt à ce qu'il en soit ainsi, puisqu'il souhaitait évidemment conserver la clientèle auprès de laquelle il avait vendu jusqu'au dernier jour des jetons ELEPHANT BLEU, et à laquelle il espérait vendre des jetons à son nom tout en assurant une continuité dans les prestations de lavage ;
Attendu que l'acceptation de la SA HYPROMAT d'un délai pour que l'ancien franchisé adapte le réglage de ses monnayeurs se trouve d'ailleurs implicitement confirmée à travers les termes d'un courrier adressé le 21 octobre 2004 à la Société HCDB, dans lequel le franchiseur donne acte au franchisé de sa volonté de ne plus renouveler le contrat à son échéance du 14 janvier 2005 ; qu'en effet, dans l'énumération précise des différentes obligations mises à la charge de la Société HCDB, consécutives à la rupture, la SA HYPROMAT ne prévoyait ni le sort des jetons ni le réglage des monnayeurs ;
Attendu ensuite que la société intimée ne saurait laisser entendre que le fait qu'elle ait toléré l'usage des jetons ELEPHANT BLEU dans les monnayeurs de la Société HCDB pendant 12 mois après la rupture, n'impliquerait pas qu'elle ait accepté l'utilisation des jetons HCDB dans ses propres monnayeurs pendant ce même délai ; qu'en effet, les monnayeurs fonctionnant sur la base d'une reconnaissance électronique, il en résulte que si un jeton ELEPHANT BLEU fonctionne dans un monnayeur HCDB, le jeton HCDB, fabriqué après la rupture, présentera inéluctablement les mêmes caractéristiques physiques pour être lu par le monnayeur de la Société HCDB ; qu'ainsi, l'acceptation par la SA HYPROMAT du délai sus-visé de 12 mois emportait par là-même l'acceptation par elle des jetons adverses qui présentaient, du moins pour cette même période, des caractéristiques intrinsèques identiques à ceux de la SA HYPROMAT ;
Attendu en tout état de cause que la SA HYPROMAT ne démontre pas qu'à la date de l'assignation en référé, elle pouvait exiger de la Société HCDB une adaptation de ses monnayeurs ;
Attendu qu'elle n'établit pas davantage qu'à la date où le juge des référés a rendu la décision entreprise, soit après l'expiration du délai d'un an suivant la rupture du contrat de franchise, la Société HCDB n'avait pas procédé au réglage de ses monnayeurs pour que ceux-ci n'acceptent plus les jetons du réseau ELEPHANT BLEU ;
Attendu qu'elle n'était donc pas fondée à réclamer une mesure conservatoire ou de remise en état indispensable pour prévenir un dommage imminent ou pour faire cesser un trouble manifestement illicite sur le fondement de l'article 873 alinéa 1er du Code de Procédure Civile ;
Attendu en conséquence qu'il convient d'infirmer l'ordonnance entreprise et de rejeter la demande tendant à obtenir l'interdiction de commercialisation de jetons de lavage pouvant être utilisés dans le réseau ELEPHANT BLEU;
Attendu que l'ordonnance attaquée sera dès lors également infirmée en ce qu'elle a ordonné la remise sous astreinte de l'ensemble des factures des jetons de lavage fabriqués jusqu'à ce jour ;
Sur le bien fondé de la demande tendant à obtenir l'interdiction d'utiliser la marque HYPROMAT :
Attendu qu'il est constant que la Société HCDB avait maintenu la mention HYPROMAT sur certains documents, notamment au Registre du Commerce et des Sociétés, et que ces infractions, selon les propres affirmations de la société intimée, ont cessé en cours de procédure devant le juge des référés ;
Attendu dès lors qu'il sera constaté que cette prétention n'a plus d'objet, même si elle était initialement fondée ;
Sur les dépens et l'article l'article 700 du Code de Procédure Civile :
Attendu que la procédure n'était initialement fondée que pour autant qu'elle visait à obtenir l'interdiction d'utiliser la marque HYPROMAT ; qu'il est cependant constant que la Société HCDB s'est mise en conformité au cours de la procédure de première instance ;

Attendu toutefois qu'il n'est pas soutenu que la Société HCDB avait été préalablement mise en demeure à cette fin et que la procédure de référé s'était avérée indispensable pour mettre fin à l'usage abusif de la marque HYPROMAT ;
Attendu en tout état de cause que la SA HYPROMAT se voit déboutée de ses prétentions essentielles qui portaient sur l'interdiction de la commercialisation de jetons pouvant être utilisés dans le réseau ELEPHANT BLEU ;
Attendu dans ces conditions qu'il convient de lui laisser l'entière charge des dépens de première instance et d'appel ;
Attendu enfin qu'il serait inéquitable de laisser à la Société HCDB la charge de ses frais relevant de l'article 700 du Code de Procédure Civile à hauteur de la somme de 2500 Euros ;
PAR CES MOTIFS

LA COUR,
Reçoit l'appel, régulier en la forme ;

Le déclarant également bien fondé,
Infirme l'ordonnance entreprise et, statuant à nouveau,
Rejette les prétentions formées en référé par la SA HYPROMAT ;
Condamne la SA HYPROMAT à payer à la Société HCDB une somme de 2500 Euros (deux mille cinq cents euros) sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
La condamne aux dépens de première instance et d'appel.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de colmar
Formation : Ct0007
Numéro d'arrêt : 06/05059
Date de la décision : 12/02/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Strasbourg, 19 octobre 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.colmar;arret;2008-02-12;06.05059 ?
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