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25/10/2007 | FRANCE | N°07/00202

France | France, Cour d'appel de colmar, Ct0179, 25 octobre 2007, 07/00202


MINUTE No 07 / 1354

NOTIFICATION :

ASSEDIC ()
Copie aux parties
Clause exécutoire aux :- avocats- délégués syndicaux- parties non représentées

COUR D' APPEL DE COLMAR CHAMBRE SOCIALE- SECTION A

ARRET DU 25 Octobre 2007
Numéro d' inscription au répertoire général : 4 A 07 / 00202 Décision déférée à la Cour : 05 Décembre 2006 par le CONSEIL DE PRUD' HOMMES DE STRASBOURG

APPELANTE : Madame Yolande X..., non comparante ......Représentée par Me Valérie REYNAUD (avocat au barreau de STRASBOURG)

INTIME ET APPELANT INCIDENT

: Monsieur Georges Y..., ayant exercé sous l' enseigne PATISSERIE- CONFISERIE OBERMEYER- Y..., non comparant ....

MINUTE No 07 / 1354

NOTIFICATION :

ASSEDIC ()
Copie aux parties
Clause exécutoire aux :- avocats- délégués syndicaux- parties non représentées

COUR D' APPEL DE COLMAR CHAMBRE SOCIALE- SECTION A

ARRET DU 25 Octobre 2007
Numéro d' inscription au répertoire général : 4 A 07 / 00202 Décision déférée à la Cour : 05 Décembre 2006 par le CONSEIL DE PRUD' HOMMES DE STRASBOURG

APPELANTE : Madame Yolande X..., non comparante ......Représentée par Me Valérie REYNAUD (avocat au barreau de STRASBOURG)

INTIME ET APPELANT INCIDENT : Monsieur Georges Y..., ayant exercé sous l' enseigne PATISSERIE- CONFISERIE OBERMEYER- Y..., non comparant ...... Représenté par Me François- Xavier HEICHELBECH (avocat au barreau de COLMAR)

COMPOSITION DE LA COUR : L' affaire a été débattue le 06 Septembre 2007, en audience publique, devant la Cour composée de : Mme RASTEGAR, Président de Chambre Mme SCHNEIDER, Conseiller M. JOBERT, Conseiller qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Melle FRIEH, Greffier

ARRET :- contradictoire- prononcé par mise à disposition au greffe par Mme RASTEGAR, Président de Chambre,- signé par Mme RASTEGAR, Président de Chambre et Melle FRIEH, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Mme X... a été embauchée le 1er septembre 2001 en qualité de responsable des ventes par M. Y... exploitant la pâtisserie Y....

En cours d' année 2003, une discussion a eu lieu entre les parties au regard des heures supplémentaires que Mme X... affirmait effectuer en grand nombre.
Par courrier du 12 mars 20014, M. Y... a reproché à Mme X... son arrivée tardive à son travail le jour- même en l' invitant à se ressaisir. Le 13 mars 2004, M. Y... lui a fait grief d' avoir oublié de lui transmettre certaines commandes, désorganisant ainsi la production en ajoutant " que de sa réaction intelligente dépendrait la continuité de leur collaboration ".

Mme X... a été en arrêt de maladie continu à compter du 15 mars 2004 motivé par une dépression nerveuse.
Par courrier du 17 mars 2004, M. Y... a rappelé ses différents courriers lui reprochant son relâchement professionnel, a fait état d' une baisse continuelle du chiffre d' affaires, le conduisant à recalculer l' intéressement perçu et a réclamé la restitution d' un trop perçu de 7. 322, 46 € qui, à défaut de proposition de paiement, serait retenu par compensation mensuelle sur son salaire.
Le 22 mars 2004, Mme X... a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement avec mise à pied conservatoire, pour le 29 mars 2004, puis licenciée pour faute grave par lettre recommandée du 31 mars aux motifs suivants :
" * Propos attestés par témoin portant atteinte à la probité et l' honnêteté de votre employeur en le présentant comme falsifiant la caisse ou la trésorerie du fonds de commerce *Propos injurieux et diffamants attestés également par témoins à l' encontre de votre employeur en le dénonçant auprès de la clientèle comme non respectueux de vos conditions de travail et de rémunération *Comportement déloyal en tentant d déstabiliser par des propos alarmistes touchant à la survie de l' entreprise, tout en cherchant parallèlement à capter la clientèle au profit d' une future exploitation personnelle que vous entendiez ouvrir prochainement *déstabilisation du personnel attaché à l' exploitation par dénigrement systématique des capacités de votre employeur à maintenir l' emploi *incapacité totale à motiver en tant que responsable de magasin l' équipe sous vos ordres *absences répétées aux heures d' ouverture et horaires de présence fantaisistes (notamment courses privées pendant les heures de travail, réception d' amis dans le local pendant les heures d' ouverture...) *erreurs répétées dans la prise de commande *absence d' implication commerciale et mauvis relationnel avec la clientèle ayant entraîné une baisse de fréquentation de la clientèle et corrélativement une baisse du chiffre d' affaires *poursuite d' un comportement désastreux avec le personnel, la clientèle et le laboratoire de fabrication "

Mme X... a contesté son licenciement devant le Conseil de Prud' hommes de STRASBOURG, en soutenant qu' il était nul comme étant la conséquence d' un harcèlement moral, et a réclamé le paiement de dommages- intérêts pour irrégularité de la procédure, des indemnités de rupture, des dommages- intérêts pour licenciement abusif, des dommages- intérêts complémentaires au titre du harcèlement moral, de son salaire durant la mise à pied, des indemnités journalières indûment perçues en avril 2004, ainsi que des heures supplémentaires pour les années 2001 à 2004. M. Y... a formé une demande reconventionnelle portant sur la restitution d' une avance sur l' intéressement au chiffre d' affaires, générant un trop- perçu de 7. 322 €, ainsi que le paiement de marchandises

Par jugement du 5 décembre 2006, le Conseil de Prud' hommes a dit que les agissements décrits ne caractérisaient pas un harcèlement moral, que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse mais non une faute grave, qu' aucune irrégularité de procédure n' avait été commise et que les heures supplémentaires n' étaient pas justifiées. Le Conseil a rejeté la demande de l' employeur en considérant que la salariée était fondée à penser que l' intéressement était incorporé au salaire, et a estimé que les marchandises avaient été payées en espèces par la salariée. Le Conseil a ainsi condamné M. Y... à payer à Mme X... les sommes suivantes :

- 7. 272, 75 € au titre de l' indemnité compensatrice de préavis,- 727, 27 € au titre des congés payés afférents,- 565, 66 € au titre du salaire durant la mise à pied,- 772, 24 € au titre de rappel de salaire du mois de mars 2004,- 776, 79 € au titre des indemnités journalières,- 606, 06 € au titre de l' indemnité de licenciement,- 2. 000 € en application de l' article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile

Mme X... a régulièrement interjeté appel de ce jugement.

Vu les dispositions de l' article 455 du Nouveau Code de Procédure Civile,

Vu les conclusions de l' appelante Mme X... reçues au greffe le 27 août 2007 reprises et développées oralement à l' audience tendant à l' infirmation du jugement déféré, à ce que la Cour dise et juge que le licenciement est nul, subsidiairement dépourvu de cause réelle et sérieuse, constate le caractère irrégulier du licenciement et condamne M. Y... à lui payer les sommes suivantes :
- 7. 272, 75 € en réparation de l' irrégularité de la procédure,- 14. 545, 50 € à titre de dommages- intérêts pour licenciement abusif,- 20. 000 € à titre de dommages- intérêts pour harcèlement moral,- 772, 24 € au titre du rappel de salaire du mois de mars 2004,- 776, 79 € au titre des indemnités journalières indûment perçues en avril 2004,- 8. 453, 76 € au titre des heures supplémentaires effectuées en 2001,- 28. 634, 05 € au titre des heures supplémentaires effectuées en 2002,- 26. 873, 60 € au titre des heures supplémentaires effectuées en 2003,- 6. 539, 04 € au titre des heures supplémentaires effectuées en 2004,- 14. 400 € à titre de dommages- intérêts sur le fondement de l' article L 324- 11- 1 du code du travail,- 3. 000 € en application de l' article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile

Vu les conclusions de l' intimé M. Y... reçues au greffe le 3 août 2007 reprises et développées oralement à l' audience, tendant à la confirmation du jugement sauf au regard des sommes allouées par les premiers juges et sur son appel incident, à ce que la Cour dise et juge que le licenciement de Mme X... repose sur une faute grave, déboute la salariée de toute demande et la condamne u paiement de la somme de 3. 000 euros en application de l' article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

VU LES PIÈCES DE LA PROCÉDURE

SUR LA RÉGULARITÉ DE LA PROCÉDURE
Attendu que la convocation datée du 22 mars 2004 et réceptionnée le mardi 23 mars pour un entretien préalable le lundi 29 mars 2004 n' a pas respecté le délai de cinq jours ouvrables requis entre la présentation de la convocation et la date de l' entretien préalable.
Que la notification du licenciement est intervenue le 31 mars 2004 soit un jour franc après la date de l' entretien préalable, conformément aux dispositions de l' article L 122- 14- 1 du code du travail en vigueur avant l' ordonnance du 24 juin 2004 (qui désormais exigent un délai de deux jours ouvrables).
Que la convocation mentionnait la possibilité pour Mme X... d' être assistée par un conseiller extérieur, alors que compte tenu de la présence de représentants du personnel au sein de l' entreprise, la lettre de convocation aurait du indiquer la possibilité d' être assisté par un membre du personnel.
Qu' ainsi la procédure de licenciement est entachée de deux motifs d' irrégularité, qui ont amoindri la défense de ses intérêts et justifient l' octroi d' une indemnité que la Cour chiffre à la somme de 500 €.
SUR LE HARCÈLEMENT MORAL
Attendu que Mme X... soutient que son licenciement est nul comme procédant du harcèlement moral dont elle se dit victime et réclame en outre le paiement de dommages- intérêts au titre du préjudice généré par les agissements de l' employeur.
Que pour démontrer ces agissements répétitifs, elle se prévaut de l' ampleur de ses horaires de travail, des multiples courriers énonçant des griefs injustifiés, ainsi que de la " fable de la morue à la langue fourchue " billet sarcastique de M. Y... ironisant sur son poids, tous agissements qui ont entraîné une dépression nerveuse réactionnelle et auxquels elle attribue le cancer qui a été diagnostiqué en mai 2004.
Attendu que l' existence d' heures supplémentaires susceptibles d' être effectuées même en grand nombre ne caractérise pas des agissements répétés de l' employeur susceptibles d' être qualifiés de harcèlement moral.
Attendu que les lettres de remontrances de l' employeur, au nombre de cinq depuis l' embauche, contiennent certes des formules peu aimables (" devant votre mauvaise volonté à comprendre.. " ".. vos jérémiades nuisent grandement à la bonne ambiance... je vous somme de cesser vos comédies.. ") mais elles relatent néanmoins des griefs précis et non contestés (une mauvaise rédaction des feuilles de stocks, une erreur de commandes, un retard) et ne peuvent de ce fait caractériser un harcèlement moral.
Que la fable illustrée par M. Y... est certes désobligeante pour Mme X... en ce qu' elle ironise sur son poids mais qu' elle constitue néanmoins un fait isolé qui ne constitue pas un fait de harcèlement moral.
Que par voie de conséquence, la dégradation de l' état de santé de Mme X... contemporaine de son licenciement ne peut être imputée à l' employeur.

Que le jugement déféré doit être confirmé en ce qu' il a rejeté la demande d' annulation du licenciement, ainsi que les dommages- intérêts réclamés au titre du harcèlement moral.

SUR LE LICENCIEMENT
Attendu que la lettre de licenciement notifiée le 31 mars 2004 fait grief pour l' essentiel à Mme X... d' avoir tenu à l' égard de la clientèle des propos injurieux et diffamatoires à l' encontre de son employeur, l' accusant d' avoir falsifié la caisse ou la trésorerie, de ne pas respecter ses conditions de travail et sa rémunération, d' avoir en outre annoncé la faillite prochaine de l' entreprise et d' avoir tenté de capter la clientèle au profit d' une future exploitation personnelle, tous agissements attestés par des clients et employés.
Que l' employeur ayant pris l' initiative d' un licenciement pour faute grave supporte la charge de la preuve.
Attendu que pour démontrer la réalité des griefs, M. Y... produit cinq attestations de témoins émanant de trois vendeuses du magasin et de deux clients.
Que Mme Z... atteste de ce que " Mme X... a à plusieurs reprises mis en doute devant moi l' honnêteté de M. Y... prétendant qu' il ne la payait pas à sa juste valeur... Mme X... a souvent tenu des propos désobligeants contre Monsieur Y... auprès de la clientèle affirmant qu' il ne la payait qu' au SMIC, lui imposait des horaires énormes et qu' elle ouvrirait bientôt son magasin "
Que Mlle A... relate elle aussi que " Mme X... a tenu des propos désobligeants contre M. Y... auprès de la clientèle, disant que c' était un mauvais employeur, qu' il ne la payait qu' au SMIC, lui imposait des horaires énormes et n' était pas correct dans ses comptes. Elle prétendait pouvoir utiliser les différences qu' elle aurait soit- disant constatées lorsque M. Y... venait contrôler la caisse et se vantait de pouvoir l' utiliser comme pression "
Que Mme B... atteste également des " propos désobligeants contre M. Y... auprès de la clientèle.. disant que c' était un très mauvais employeur, qu' il lui imposait des horaires énormes, qu' il n' était pas correct dans ses comptes et qu' il ne la payait qu' au SMIC. Mme X... a à plusieurs reprises mis en doute devant moi l' honnêteté de M. Y..., prétendant avoir constaté des différences lorsqu' il venait contrôler la caisse et se vantait de pouvoir l' utiliser comme moyen de pression ".
Attendu que le rapprochement de ces trois attestations émanant des vendeuses du magasin traduit une similitude absolue des termes employés, reprenant mot pour mot les accusations très graves dont elles affirment avoir été témoins, accusations qu' elles qualifient toutes trois improprement de " propos désobligeants ".
Que pour autant, aucun de ces trois témoins ne relate les circonstances dans lesquelles ces propos auraient été tenus, la seule précision étant que ces propos ont été tenus " à plusieurs reprises ", ni les conditions dans lesquelles elles ont rapporté ces propos à l' employeur.
Qu' en considération du fait que l' employeur a adressé plusieurs lettres de reproche à Mme X..., dont la dernière en date du 17 mars 2004 ne mentionne aucune des accusations graves qui lui auraient été rapportées, il doit en être conclu que ces accusations n' ont pu lui être rapportées qu' au cours de la période du 17 mars 2004 au 22 mars 2004 date de la convocation à l' entretien préalable.
Qu' il est ainsi très surprenant que ces attestations établies les 20 et 21 mars 2004 ne relatent pas les circonstances dans lesquelles ces témoins ont pris l' initiative de dévoiler à leur employeur ces " propos désobligeants tenus à plusieurs reprises " propos que l' employeur ignorait encore le 17 mars 2004.
Attendu que l' examen des attestations de deux clients de la pâtisserie M. C... et Monsieur D... suscite les mêmes interrogations
Que ces deux clients réguliers attestent de ce que Mme X... a " à plusieurs reprises dénigré la qualité des pâtisseries vendues, s' est plainte d' être exploitée, payée au SMIC, a déclaré pouvoir exercer une pression sur M. Y... qui trafiquerait son chiffre d' affaires ou falsifierait les chiffres d' affaires...... et a annoncé son installation prochaine en demandant les cartes visites des clients " Que ces deux clients affirment l' un et l' autre qu' ils " ont été choqués par ces propos et sont allés trouver M. Y... (ou en a fait part à M. Y...) pour le prévenir "

Que ces deux témoins ne sont pas plus précis sur les circonstances dans lesquelles ces propos ont été tenus par Mme X... " à plusieurs reprises " ni sur les circonstances dans lesquelles ils ont rapporté ces faits à M. Y....
Qu' il est surprenant à cet égard qu' aucun de ces deux clients réguliers n' ait immédiatement rapporté ces accusations graves à l' employeur, sachant que ces faits auraient nécessairement eu lieu avant le 15 septembre 2004, date de l' arrêt de maladie de Mme X....
Que ces deux mêmes témoins ont respectivement les 10 et 12 août 2007 renouvelé leurs attestations en précisant " les propos dégradants et la demande de carte de visite aux clients et autres faits se sont tenus jusqu' au dernier jours de présence de Madame X... " (M. C...) ou " les agissements cités sont allés crescendo dans les semaines précédant la décision de M. Y... de licencier Mme X... " (M. D...), déclarations qui sont tout aussi peu circonstanciées que celles initialement délivrées.
Attendu qu' enfin Mme E..., ayant assisté Mme X... lors de l' entretien préalable relate précisément les reproches invoqués par M. Y... dont celui de " remise de carte de visite des clients en vue du montage d' une affaire personnelle " mais ne mentionne pas les accusations de falsification des comptes ou de non respect des horaires légaux tenues en présence de la clientèle.
Attendu que pour le surplus, le grief de " déstabilisation du personnel par dénigrement systématique des capacités de l' employeur à maintenir l' emploi " n' est pas justifié par les pièces produites, " l' incapacité à motiver l' équipe sous ses ordres " ne repose sur aucun fait précis, de même que " l' absence d' implication commerciale " ou le " mauvais relationnel avec la clientèle ", et " l' omission de faire parvenir des commandes par fax " a fait l' objet d' une mise en garde du 13 mars 2004, de même que son arrivée tardive sur son lieu de travail le 12 mars 2004.
Que l' employeur ayant très récemment adressé des mises en garde écrites et circonstanciées à chaque incident (notamment les 12 mars, 13 mars et 17 mars 2004), il est surprenant que Mme X... absente pour maladie à compter du 15 mars 2004 fasse l' objet d' une telle avalanche de nouveaux griefs.
Que cette escalade s' est ainsi concrétisée dans l' envoi le 17 mars 2004 d' une mise en demeure de restituer un " trop- perçu " sur salaire de 7. 322, 46 € sous peine de le compenser mensuellement dès le salaire du mois de mars, puis le jour même de la réception de l' arrêt de travail motivé par une " dépression nerveuse suite à harcèlement de son employeur ", par la convocation à un entretien préalable à un licenciement pour faute grave.
Attendu qu' au regard de ces observations, et des attestations produites par Madame X... de clients réguliers louant son amabilité et ses qualités professionnelles (Madame F..., Mme G..., Mme H..., M. I..., M. J..., Mme K...) il convient d' en déduire qu' il existe un doute sérieux de la réalité des griefs énoncés dans la lettre de licenciement.
Que le doute doit profiter à la salariée, et qu' ainsi le licenciement doit être jugé dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Qu' il y a lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu' il a condamné l' employeur au paiement de l' indemnité compensatrice de préavis, des congés payés afférents, du salaire durant la mise à pied et de l' indemnité de licenciement, dont les montant ne sont pas discutés.
Qu' il y a lieu de l' infirmer en revanche en ce qu' il a rejeté la demande de dommages- intérêts fondée sur les dispositions de l' article L 122- 14- 4 du code du travail et de faire droit à la demande en paiement de la somme de 14. 544 € en considération de l' ancienneté de la salariée, des circonstances du licenciement, et du préjudice né de la perte de son emploi.
Attendu qu' il y a lieu d' ordonner le remboursement par M. Y... aux organismes concernés, des indemnités de chômage payées à la salariée, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé par le Conseil de Prud' hommes, dans la limite de 6 mois d' indemnités de chômage.
SUR LES HEURES SUPPLÉMENTAIRES
Attendu que l' échange de correspondance entre les parties démontre que cette revendication préexistait au licenciement, puisqu' elle sous- tend le courrier de l' employeur du 25 avril 2003.
Attendu que Mme X... affirme qu' elle disposait seule des clés du magasin, et qu' ainsi l' amplitude de sa journée de travail se confondait avec les horaires d' ouverture de l' établissement, de sorte qu' elle réclame le paiement des heures supplémentaires du mois de septembre 2001 jusqu' à son licenciement sur la base de 65 heures de travail hebdomadaires.
Attendu que le contrat de travail indique que " la salariée se conformera à l' horaire de travail applicable à l' entreprise ", qu' il est admis que les horaires de l' entreprise étaient les suivants " Du mardi au samedi de 7 h 30 à 12 h 45 et de 14 h à 19 h (18 h 30 à compter du 6 mars 2003) et le dimanche de 8 h à 18 h " et qu' en sa qualité de responsable des ventes, Mme X... disposait seule des clés du magasin.
Que sous l' angle du simple calcul mathématique, il doit être déduit de ces observations que l' amplitude de travail hebdomadaire de Mme X... s' établissait à 61 heures, puis 59 heures à compter du 6 mars 2003.
Que si l' employeur admet " qu' en apparence, Mme X... effectuait plus de 50 h de travail par semaine " (cf courrier du 25 avril 2003), en revanche il soutient qu' elle ne travaillait pas les jeudis après- midi et qu' elle était fréquemment vue en ville promenant son chien ou effectuant ses achats personnels, ou qu' elle prenait ses repas et recevait sa famille ou ses amis au magasin.
Qu' il résulte des attestations de M. O..., chef de cuisine et de M. L... chef pâtissier, que Mme X... prenait congé le jeudi après- midi (sans préciser la période considérée) ce que la salariée admet, mais uniquement à compter du mois de janvier 2004.
Que M. Y... n' est pas en mesure de justifier des horaires de travail effectifs de Mme X... et que ceux- ci ne peuvent se déduire des attestations de M. M... indiquant qu' il la croisait quotidiennement quand il promenait son chien, pas plus que de l' attestation de M. N... indiquant qu' il " la croisait souvent au marché de la place de Bordeaux ".
Qu' au vu des observations des parties, il convient à partir d' une amplitude de travail de 61 heures, puis de 59 heures à compter du mois de mars 2003, de retenir que Madame X... a pu vaquer à quelques occupations personnelles telles que promener son chien ou effectuer des courses personnelles, pour ensuite rejoindre son lieu de travail et assurer la fermeture des locaux, ou prendre son petit déjeuner, voire une après- midi de congés, de sorte qu' il sera retenu forfaitairement 50 heures de travail puis 48 heures hebdomadaires à compter du mois de mars 2003.
Qu' il sera également tenu compte des périodes de congés payés et d' absence pour maladie, ainsi que des heures supplémentaires qui ont été payées par l' employeur en cours d' année 2003.
Qu' au bénéfice de ces observations, le montant du par l' employeur s' établit comme suit :
1) année 2001 : 50 heures effectuées sur 16 semaines moyennant le paiement de 39 heures, d' où 11 heures supplémentaires majorées les 8 premières au taux de 25 %, et les suivantes au taux de 50 % ((14, 28 € X 25 % X 8) + (14, 28 € X 50 % X 3)) X 16 = 3. 312, 96 €

2) année 2002 : 50 heures effectuées sur 47 semaines, moyennant le paiement de 35 heures, d' où 15 heures supplémentaires majorées au taux de 10 % les 4 premières heures de la 35ème à la 39 ème heure, de 25 % de la 40ème à la 43ème heure puis de 50 % les heures suivantes ((14, 34 € X 10 % X 4) + (14, 34 € x 25 % X 4) + (14, 34 € X 50 % X 7)) X 47 = 13. 411, 92 €

3) année 2003
* janvier et février 2003 : 50 heures effectuées sur 6 semaines (période de 8 semaines dont 2 de congés payés) moyennant le paiement de 35 heures, d' où 15 heures supplémentaires majorées au taux de 25 % de la 36ème à la 43ème heure, puis de 50 % pour les heures suivantes (13, 60 € X 25 % X 8) + (13, 60 € X 50 % X 7) X 6 = 1. 672, 80 €

* mars à décembre 2003 : 48 heures hebdomadaires effectuées sur 37 semaines (période de 44 semaines dont 3 semaines de congés payés et 4 semaines de congé de maladie), dont à déduire les heures supplémentaires payées (26 heures majorées au taux de 100 % d' avril 2003 à novembre 2003 soit 364 €) ((13, 60 € X 25 % X 8) + (13, 60 X 50 % X 5) X 37)- 364 € = 8. 442 €

4) année 2004 : du 1er janvier au 2 avril 2004 : 48 heures hebdomadaires effectuées pendant 8 semaines (12 semaines dont 4 semaines de congés payés et arrêt de travail) (14, 34 € X 25 % X8) + (14, 34 € X 50 % X 5) X 10 = 2. 007, 60 €

Qu' ainsi il y a lieu d' infirmer le jugement déféré et de condamner l' employeur au paiement des heures supplémentaires de la période de septembre 2001 à fin mars 2004 soit la somme de 28. 847, 28 €
Attendu que la matérialité des heures supplémentaires effectuées en grand nombre ne suffit pas à caractériser l' intention de l' employeur de se soustraire volontairement au paiement des cotisations sociales et d' ainsi dissimuler l' emploi de sa salariée. Que cette demande nouvelle doit être rejetée.

SUR LE RAPPEL DE SALAIRE ET LES INDEMNITÉS JOURNALIÈRES
Attendu que pour le mois de mars 2004, M. Y... n' a versé qu' un montant de 782, 56 €, laissant subsister un solde impayé de 772, 24 € après déduction des indemnités journalières versées.
Attendu qu' en outre, l' employeur a perçu les indemnités journalières se rapportant à l' arrêt de travail du 1er au 22 avril 2004 sans les reverser à Mme X..., de sorte que le jugement doit être confirmé en ce qu' il a condamné l' employeur au paiement de la somme de 767, 79 €.
SUR LA DEMANDE EN PAIEMENT DE MARCHANDISES
Attendu que M. Y... revendique le paiement de marchandises à hauteur de 904, 86 euros en produisant les factures d' achat de pâtisseries. Que Mme X... oppose à cette demande l' incompétence de la juridiction prud' homale ainsi que la prescription de la demande en application de l' article 2271 du Code Civil.

Attendu que la demande de l' employeur en paiement de marchandises ne s' inscrit pas dans le cadre des demandes dérivant du contrat de travail au sens de l' article L 511- 1 du code du travail, de sorte que la juridiction du travail n' est pas compétente pour en connaître.
Que le jugement déféré doit être infirmé en ce sens.
Attendu qu' il paraît inéquitable de laisser à la charge de Mme X... la totalité des frais exposés et non compris dans les dépens. Qu' il y a lieu de lui allouer la somme de 2. 000 € en application de l' article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Déclare les appels recevables,
Au fond,
Rejette l' appel incident.
Dit l' appel principal partiellement fondé.

Confirme le jugement déféré en ce qu' il a condamné M. Y... à payer à Madame X... l' indemnité compensatrice de préavis, les congés payés afférents, le salaire durant la mise à pied, l' indemnité de licenciement, le rappel de salaire du mois de mars 2004, les indemnités journalières du mois d' avril 2004, l' indemnité fondée sur les dispositions de l' article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, ainsi que les frais et dépens.

Le confirme également en ce qu' il a rejeté la demande d' annulation du licenciement et la demande de dommages- intérêts pour harcèlement moral.
Le confirme enfin en ce qu' il a rejeté la demande reconventionnelle de M. Y... en restitution d' une somme de 7. 322, 46 € (sept mille trois cent vingt- deux euros et quarante- six centimes).
L' infirme pour le surplus et, statuant à nouveau,

Se déclare incompétente pour statuer sur la demande de l' employeur en paiement de marchandises.
Dit que le licenciement de Mme X... est irrégulier en la forme et dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Condamne M. Y... à payer à Mme X... les sommes suivantes :
- 500 € (cinq cents euros) à titre d' indemnité pour irrégularité de procédure,- 14. 544 € (quatorze mille cinq cent quarante- quatre euros) à titre de dommages- intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ces sommes étant majorées des intérêts au taux légal à compter de ce jour.

Condamne M. Y... à payer à Mme X... la somme de 28. 847, 28 € (vingt- huit mille huit cent quarante- sept euros et vingt- huit centimes) au titre des heures supplémentaires de la période de septembre 2001 à fin mars 2004 avec intérêts au taux légal à compter du 3 juin 2004 date de la demande en justice.
Rejette la demande nouvelle de Mme X... fondée sur les dispositions de l' article L324- 11- 1 du code du travail.
Ordonne le remboursement par M. Y... aux organismes concernés, des indemnités de chômage payées à la salariée licenciée, du jour de son licenciement au jour du présent arrêt, dans la limite de 6 mois d' indemnités de chômage.
Condamne M. Y... à payer à Mme X... la somme de 2. 000 € (deux mille euros) en application de l' article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Condamne M. Y... aux entiers dépens d' appel.
Et le présent arrêt a été signé par Mme RASTEGAR, Président et Mlle FRIEH, greffier.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de colmar
Formation : Ct0179
Numéro d'arrêt : 07/00202
Date de la décision : 25/10/2007

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Strasbourg, 05 décembre 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.colmar;arret;2007-10-25;07.00202 ?
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