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09/03/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000006949195

France | France, Cour d'appel de colmar, Chambre civile 1, 09 mars 2006, JURITEXT000006949195


JML/SD MINUTE No Copie exécutoire à : - la SCP WEMAERE - LEVEN - Me François-Xavier HEICHELBECH Le 10.03.2006 Le Greffier REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS COUR D'APPEL DE COLMAR PREMIERE CHAMBRE CIVILE - SECTION B X... DU 09 Mars 2006 Numéro d'inscription au répertoire général : 1 B 05/00987 Décision déférée à la Cour : 23 Mars 2004 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MULHOUSE APPELANTES : Mademoiselle Véronique Y... 34 rue du 19 novembre 68870 BARTENHEIM Madame Charlotte Y... 34 rue du 19 novembre 68870 BARTENHEIM représentées par la SCP WEMAERE - LEVEN, avocats

à la Cour INTIME : Monsieur Z... A... 26 rue de l'Espérance 6...

JML/SD MINUTE No Copie exécutoire à : - la SCP WEMAERE - LEVEN - Me François-Xavier HEICHELBECH Le 10.03.2006 Le Greffier REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS COUR D'APPEL DE COLMAR PREMIERE CHAMBRE CIVILE - SECTION B X... DU 09 Mars 2006 Numéro d'inscription au répertoire général : 1 B 05/00987 Décision déférée à la Cour : 23 Mars 2004 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MULHOUSE APPELANTES : Mademoiselle Véronique Y... 34 rue du 19 novembre 68870 BARTENHEIM Madame Charlotte Y... 34 rue du 19 novembre 68870 BARTENHEIM représentées par la SCP WEMAERE - LEVEN, avocats à la Cour INTIME : Monsieur Z... A... 26 rue de l'Espérance 68700 UFFHOLTZ représenté par Me François-Xavier HEICHELBECH, avocat à la Cour COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 04 Janvier 2006, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. LITIQUE, Président de Chambre

Mme MAZARIN, Conseiller

M. ALLARD, Conseiller, qui en ont délibéré. Greffier, lors des débats : Mme MUNCH X... :

- Contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Nouveau Code de Procédure Civile.

- signé par M. Jean-Marie LITIQUE, président et Mme Corinne ARMSPACH-SENGLE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Aux termes de deux actes sous seing privé des 20 janvier 1999 et 4 mai 2000, Véronique Y... a reconnu devoir à M. Z... A... les sommes respectives de 103.972 frs et 20.000 frs qu'elle s'est engagée à rembourser en 60 mensualités de 2.500 frs au taux de 16 % entre le 20 janvier 1999 et le 20 février 2004 pour la première et en 26

mensualités de 1.000 frs, la dernière étant de 332 frs, au taux de 16 %.

Par actes séparés du même jour, Mme Charlotte Y... s'est portée caution solidaire du débiteur au profit de M. Z... A... à hauteur de 103.972 frs et 20.000 frs, outre les intérêts de 16 %.

Les règlements n'ayant pas été effectués comme convenu, M. Z... A... a réclamé au débiteur principal et à la caution paiement d'un montant de 23.769,93 euros selon lettre recommandée du 7 août 2002 (accusé réception signé le 8 août 2002) de l'huissier ROMINGER constatant la déchéance du terme et valant mise en demeure, en vain. Selon demande en la procédure spéciale sur titre déposée le 10 février 2003, M. Z... A... a fait citer devant le Tribunal de Grande Instance de MULHOUSE Mme Véronique Y... et Mme Charlotte Y... aux fins de condamnation conjointe et solidaire des deux défenderesses à lui payer 22.332,24 euros avec les intérêts conventionnels à compter du mois d'août 2002, outre 2.000 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Véronique Y... et Mme Charlotte Y... concluaient, au rejet de la demande et à la condamnation du demandeur au paiement, outre les dépens, d'un montant de 1.000 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Par jugement du 23 mars 2004, la juridiction saisie, considérant que les actes litigieux répondaient aux exigences de forme de l'article 1326 du code civil et constituaient des titres au sens des articles 592 et suivants du code de procédure civile locale, enfin que malgré la multiplicité, les prêts accordés par M. Z... A... entre particuliers constituaient, en raison de leur forme simpliste et au bénéfice essentiellement de trois familles, des opérations circonstancielles ne relevant pas des dispositions des articles

L311-2 et L 313-7 du code de la consommation si bien que les actes de cautionnement étaient réguliers, a statué comme suit :

"CONSTATE que Z... A... ne formule de prétentions à l'égard de Daniel Y... CONDAMNE Charlotte Y... à payer à Z... A... la somme de 22.345,59 euros (vingt deux mille trois cent quarante cinq euros cinquante neuf centimes) assortie des intérêts conventionnels à compter du 7 août 2002. RESERVE les droits de Charlotte Y... en la procédure ordinaire. ORDONNE l'exécution provisoire du jugement. CONDAMNE Charlotte Y... aux dépens ainsi qu'au paiement à Z... A... d'une somme de 600 euros (six cents euros) au titre de l'article 700 du NCPC."

A l'encontre de ce jugement, Mme Véronique Y... et Mme Charlotte Y... ont interjeté appel selon déclaration déposée le 19 mai 2004 au greffe de la Cour.

L'affaire était radiée le 27 septembre 2004.

L'instance était reprise par Mesdames Charlotte et Véronique Y... le 10 février 2005.

Se référant à leursderniers écrits du 10 février 2005 déposés le 14 février 2005, elles demandent à la Cour de : "DECLARER Mme Charlotte Y... recevable et bien fondée en son appel, Y faisant droit, INFIRMER le jugement entrepris, Et statuant à nouveau, CONSTATER que la procédure engagée sur le fondement du droit local est irrecevable et en tout état de cause mal fondée, CONSTATER la nullité de l'acte souscrit par Mme Charlotte Y... B... conséquence, DEBOUTER M. Z...

A... de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions, comme étant mal fondées CONSTATER que la demande de M. Z... A... se heurte en tout état de cause à la forclusion par application de l'article L.311-37 du code de la consommation. Subsidiairement, DIRE ET JUGER que M. Z... A... a commis une faute sur le fondement de l'article 1382, subsidiairement 1383 du code civil, B... conséquence, CONDAMNER M. Z... A... au paiement de la somme de 22.500 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du jugement à intervenir, B... tant que de besoin, ORDONNER la compensation des montants Très subsidiairement, ACCORDER à Mme Charlotte Y... les plus larges délais de paiement, en application de l'article 1244-1 du code civil. Sur les frais, CONDAMNER M. Z... A... au paiement de la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du NCPC, Le CONDAMNER aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel, y compris ceux du référé REJETER ses demandes à ces titres." Au soutien de leur appel, elles font valoir que :

- les reconnaissances de dette invoquées ne constituent pas des titres conformes aux dispositions de l'article 592 du code de procédure civile locale ;

- M. Z... A..., bien qu'étant un particulier, a la qualité de prêteur au sens de l'article L.311-1 du code de la consommation, dont les dispositions auraient dû s'appliquer ;

- le procédé utilisé visait manifestement à contourner la loi et à favoriser le surendettement des particuliers ;

- la reconnaissance de dette servant de fondement à l'action est nulle ;

- subsidiairement l'action a été engagée plus de deux ans après le non-paiement du prêt si bien que M. Z... A... est forclos ;

- à titre très subsidiaire sont réclamés des dommages et intérêts

pour soutien abusif de crédit ;

- à titre infiniment subsidiaire sont réclamés des délais de paiement.

Se référant à ses derniers écrits du 26 juillet 2005, l'intimé demande à la Cour la confirmation du jugement et la condamnation de celle-ci au paiement, outre les dépens, d'un montant de 1.000 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, en soutenant en substance que :

- les reconnaissances de dette sont conformes aux exigences de l'article 1326 du code civil et peuvent servir de fondement à une procédure spéciale sur titre ;

- le fait d'avoir prêté de l'argent à des amis, et notamment à certains membres d'une même famille, n'en fait pas un prêteur habituel au sens de l'article L.311-1 du code de la consommation ;

- cette argumentation relève de la procédure ordinaire et les modes de preuve à l'encontre d'un titre sont strictement limités par le code de procédure civile locale. SUR QUOI LA COUR : Vu la procédure, les pièces régulièrement versées aux débats et les écrits des parties auxquels il est référé pour plus ample exposé de leurs moyens et arguments :

L'appel de Mesdames Charlotte et Véronique Y..., interjeté dans des conditions de forme et de délai dont la validité n'est pas contestée, est recevable. 1) Sur la notion de titre au sens de l'article 592 du code de procédure civile locale: L'article 592 du Code de procédure locale dispose : "Il est possible de faire valoir dans la procédure spéciale sur titres une demande ayant pour objet le paiement d'une somme d'argent déterminée (...) lorsque tous les faits justifiant la demande peuvent être prouvés par des titres. (...)"

Le Code de procédure locale ne précise pas ce qu'il convient d'entendre par "titre", mais par référence aux dispositions du Code

civil, il convient de retenir tout écrit daté et signé constituant un mode de preuve indiscutable.

B... l'occurrence les actes dont se prévaut M. Z... A... sont datés et signés, ils précisent la nature de l'engagement de la partie qui s'oblige, le montant de cette obligation, les conditions et modalités de paiement. Ils comportent en outre la mention manuscrite : - "Lu et approuvé. Bon pour la somme de.... (exprimée en chiffres et en lettres)" : pour la débitrice principale ; - "Lu et approuvé. Bon pour caution solidaire de la somme de ...(exprimée en chiffres et en lettres) plus intérêts au taux de ... (taux mentionné)" : pour la caution.

Ils répondent en conséquence parfaitement à cette définition. 2) Sur la contestation de ce titre :

Aux termes de l'article 595 du code de procédure civile locale, dans la procédure sur titre, les titres et la délation du serment sont seuls admis comme moyens de preuve pour établir la sincérité ou la fausseté d'un titre.

Mais dès lors que la partie attraite en paiement selon la procédure sur titre soutient que le titre invoqué par le demandeur est entaché de nullité, la preuve de la nullité du titre n'a pas à être offerte par les moyens de preuve admissibles en la procédure sur titre dès lors que cette partie tire de son titre le moyen de nullité qu'elle entend opposer à la partie adverse (Civ 06/03/91).

Tel est bien le cas en l'espèce, l'établissement de la reconnaissance de dette n'étant que la conséquence du prêt octroyé par M. Z... A... dans des conditions dont il est argué qu'elles sont contraires

champ d'application des articles L.311-8 et suivants du code de la consommation qui visent "toute opération de crédit ainsi que son cautionnement éventuel, consentie à titre habituel par des personnes physiques ou morales, que ce soit à titre onéreux ou gratuit".

Or il est constant que, là encore, le moyen soulevé par l'appelante est recevable en la procédure sur titre.

Sur le fait de savoir si ces documents établissent la qualité de prêteur habituel de M. Z... A..., il convient de relever que sont versées aux débats : - 12 reconnaissances de dettes et 7 engagements de caution établis au profit de M. Z... A... par les quatre membres de la famille Y... entre 1995 et 2000 - 9 reconnaissances de dettes et 3 engagements de caution établis au profit de la même personne, par les membres de la famille MARSALETTA-CONTERNO entre 1996 et 1999 - 3 reconnaissances de dettes établies au profit de la même personne par MM. C... et ARCOS en 1995-1996.

Ces documents sont tous établis en la forme dactylographiée sur la base d'un même modèle-type dont les blancs sont remplis à la main d'une écriture identique, l'un ou l'autre étant rédigés au profit de Claudine ou Francis A..., respectivement fille et fils de Z... A... Il s'en évince que les prêts ont été consentis par une seule et même personne, M. Z... A...

Ces circonstances suffisent bien à établir que l'intimé avait la qualité de prêteur habituel, ce que ne contredit pas le fait que les bénéficiaires soient apparentés.

Il en résulte que les prêts consentis par ce dernier entrent dans le champ d'application des articles L.311-8 et suivants du code de la consommation qui visent "toute opération de crédit ainsi que son cautionnement éventuel, consentie à titre habituel par des personnes physiques ou morales, que ce soit à titre onéreux ou gratuit".

Or il est constant que

Or il est constant que les prêts litigieux ne répondent pas aux exigences posées par ces textes (pas d'offre préalable) en sorte qu'ils ne sauraient servir de justification à une demande en la procédure spéciale sur titre.

Pour le surplus, il appartiendra aux parties de saisir la juridiction compétente au fond.

Il convient donc d'infirmer le jugement entrepris et de rejeter l'intégralité de la demande de M. A....

L'intimé succombant supportera les dépens des deux instances.

B... revanche, aucune considération d'équité ne milite en faveur de l'application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile au profit de l'une ou l'autre des parties dont la demande respective à ce titre sera rejetée. P A R C E D... M O T I F D...

LA COUR,

- DECLARE l'appel de Mesdames Charlotte et Véronique Y... régulier et recevable en la forme

- INFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Et statuant à nouveau,

- DEBOUTE M. Z... A... de l'ensemble de ses prétentions en la procédure spéciale sur titre

- Le CONDAMNE aux dépens des deux instances

- DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile au profit de l'une ou l'autre des parties.

LE GREFFIER,

LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de colmar
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006949195
Date de la décision : 09/03/2006
Type d'affaire : Civile

Analyses

ALSACE-LORRAINE - Procédure civile - Code de procédure civile local.

1 Dans la procédure sur titre, l'article 592 du Code de procédure civile local ne précise pas ce qu'il faut entendre par "titre". Par référence aux dispositions du Code civil, il convient de retenir tout écrit daté et signé constituant un mode de preuve indiscutable.

ALSACE-LORRAINE - Procédure civile - Code de procédure civile local.

2 Aux termes de l'article 595 du Code de procédure civile locale, dans la procédure sur titre, les titres et la délation de serment sont seuls admis comme moyens de preuve pour établir la sincérité ou la fausseté d'un titre. Toutefois, la preuve de la nullité du titre n'a pas à être offerte par les moyens de preuve admissibles dans la procédure sur titre lorsque la partie attraite en paiement tire de ce titre le moyen de nullité qu'elle entend opposer à la partie adverse. C'est ainsi que l'emprunteur qui affirme que les dispositions protectrices du Code de la consommation ont été violées est fondé à démontrer la nullité du titre invoqué par le demandeur en établissant la qualité de prêteur habituel de ce dernier au sens de l'article L.311-1 du Code de la consommation, au moyen d'autres actes souscrits par des tiers auprès de lui.


Références :

code de la consommation, article L. 311-1
code de procédure civile local, articles 592, 595

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.colmar;arret;2006-03-09;juritext000006949195 ?
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