MC/AD MINUTE No 06/78 Copie exécutoire à - Me Claude LEVY - Me François-Xavier E... Le 26.01.2006 Le Greffier REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS COUR D'APPEL DE COLMAR DEUXIEME CHAMBRE CIVILE - SECTION A ARRET DU 26 Janvier 2006 Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A 02/03536 Décision déférée à la Cour : 28 Mai 2002 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE COLMAR APPELANTS : demandeurs Monsieur Jacques K... ... Monsieur Lucien K... ... Monsieur Laurent K... 217 Noirgoutte 68370 ORBEY Représentés par Me Claude LEVY avocat au barreau de COLMAR INTIMEE :
défenderesse G... Marie Bernadette K... épouse X... ... par Mes E..., RICHARD-FRICK et CHEVALLIER-GASCHY, avocats au barreau de COLMAR COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 16 Novembre 2005, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. WERL, Président de Chambre
Mme VIEILLEDENT, Conseiller
Madame CONTE, Conseiller qui en ont délibéré. Greffier ad hoc, lors des débats : Mme NEFF, ARRET :
- Contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Nouveau Code de Procédure Civile.
- signé par M. Michel WERL, président et Mme Nathalie NEFF, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.FAITS ET PROCEDURE
Monsieur Alphonse K..., époux divorcé de Madame Marie-Thérèse Y... - de l'union desquels étaient nés huit enfants dont Jacques, Lucien et Laurent K... ainsi que Bernadette K...
épouse X... - est décédé le 30 septembre1996.
De la déclaration de succession signée le 21 mars 1997 par Madame X... il ressortait un actif net de 560.493,52 F soit 85.446,69 ç.
Le 26 février 1998, Maître A..., notaire chargé de liquider la succession, avisait les héritiers qu'il avait eu connaissance de l'existence de comptes ouverts au nom de Monsieur Alphonse K... dans les livres du CREDIT MUTUEL STOCKFELD à STRASBOURG dont les avoirs s'élevaient à la somme de 380.251,58 F, soit 57.968,98 ç et qu'il allait procéder à une déclaration complémentaire de succession. Le 18 novembre 1998 à la requête de Messieurs Jacques, Lucien et Laurent K..., le Tribunal d'Instance de COLMAR ordonnait l'ouverture d'une procédure de partage judiciaire entre les héritiers de Monsieur Alphonse K... et il désignait à cette fin Maître I..., notaire à COLMAR.
Ce dernier dressait le 6 octobre 1999 un procès-verbal de difficultés.
Par exploit introductif d'instance du 29 octobre 1999, Messieurs Jacques, Lucien et Laurent K... ont saisi le Tribunal de grande instance de COLMAR afin de voir Madame X... condamnée à rapporter à la succession tous les fonds retirés sur les comptes de son père dont les sommes de 12.953,59 ç, 117.000 F, 15.000 F et 300.000 F, et afin de voir ordonner une expertise.
Par jugement du 28 mai 2002, le Tribunal de grande instance de COLMAR a : -débouté les consorts K... de leurs prétentions au titre des maniements de fonds sur les comptes bancaires ; -condamné Madame X... à rembourser à la succession la somme de 3.048,98 ç ; -dit que Madame X... devait rapporter à la succession les donations des sommes de 117.000 F et 72.970 F ayant respectivement servi à l'installation d'une véranda et à l'achat d'un véhicule ; -dit que le
paiement d'une prime de 300.000 F pour un contrat d'assurance-vie dont Madame X... était bénéficiaire constituait une donation dispensée de rapport à la succession.
Le 26 juillet 2002 Messieurs K... ont interjeté appel général de ce jugement.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 26 mai 2005. PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Pour un plus ample exposé la Cour se réfère expressément aux dernières conclusions déposées par les parties :
- le 27 janvier 2005 par Messieurs K...,
- le 20 mai 2005 par Madame X....
Concluant à la réformation du jugement entrepris afin de voir :
-constater le refus de Madame X... de déférer à la demande de reddition de compte qu'elle doit effectuer en sa qualité de mandataire du défunt, puis de verser sa déclaration fiscale afférente aux loyers payés par son père ; -condamner Madame X... à payer à la succession les sommes de 3.048,98 ç et 9.904,61 ç correspondant à des chèques établis par celle-là au jour du décès de Monsieur K... ; -dire que constituent des donations devant être rapportées à la succession les sommes de 17.836,54 ç, 2.286,74 ç et 45.734,71 ç correspondant à la facturation de la véranda, aux trois virements au titre des loyers postérieurement au décès et à la prime de l'Assurance-vie ; -reconnaître Madame X... coupable de recel successoral ; -réclamer un "renseignement officiel" à Maître D..., Notaire à NEUF-BRISACH afin de connaître l'objet du versement de la somme de 200.000 F reçu par lui le 20 février 1996 ; -ordonner une expertise en vue de déterminer l'étendue du patrimoine financier de Monsieur K... et toutes les sommes dont a pu bénéficier Madame X..., Messieurs K... ont fait valoir : -que les éléments obtenus auprès des banques où Monsieur K... détenait des avoirs font
ressortir de très importants mouvements de fonds ainsi que des retraits effectués par Madame X... dont elle doit rendre compte, d'autant qu'ils excèdent les besoins de la vie quotidienne du défunt ; -que le Tribunal a exactement soumis à l'obligation de rapport les sommes correspondant aux coûts de la véranda et du véhicule, en l'absence de preuve de volonté contraire du défunt ; -que les loyers ne sauraient être dus à Madame X... au delà du décès de Monsieur K... ; -que le bénéfice d'une assurance-vie constitue une donation déguisée qui doit être rapportée à succession ; -que Madame X... encourt manifestement les sanctions liées au recel successoral ; -qu'ils sont recevables en toutes leurs prétentions en application de l'article 565 du nouveau code de procédure civile ; x x x
Relevant appel incident pour conclure au rejet de toutes les demandes de Messieurs K..., G... X... a répliqué : -que les prétentions tendant à la constatation d'un recel successoral et à l'obtention d'informations détenues par Maître D..., qui sont formées pour la première fois en cause d'appel sont irrecevables ; -que les appelants, qui en leurs qualités d'héritiers peuvent obtenir eux-mêmes toutes informations bancaires ou notariales afférentes à la succession, sont mal fondés à solliciter une expertise ne tendant qu'à pallier leur carence dans l'administration de la preuve ; -qu'elle ne refuse pas de rendre des comptes sur les opérations effectuées en vertu des procurations que lui avait consenties son père mais que la proximité des liens familiaux l'a empêchée d'obtenir un quitus de celui-ci ; -qu'elle produit néanmoins des témoignages établissant l'intention libérale de son père à son endroit pour les sommes dont il est demandé rapport ; -que pour le surplus Monsieur K... disposait de son argent et en particulier des gains qu'il avait obtenu en jouant au loto . MOTIFS
Attendu que dès son introduction, l'action de Messieurs K... a
tendu à faire reconnaître que leur soeur et co-héritière Madame X... avait, dans le but de fausser à son profit les opérations de partage, retenu des informations afférentes à la consistance de l'actif successoral ;
que partant les demandes visant à obtenir des informations d'un notaire et à voir caractériser le recel successoral étaient virtuellement comprises dans celles soumises aux premiers juges, de sorte qu'en application de l'article 566 du nouveau code de procédure civile elles doivent être déclarées recevables ;
Attendu qu'à l'instar de ce qu'ont décidé les premiers juges, puis le Conseiller la Mise en Etat par ordonnance du 18 septembre 2003, alors que la situation des appelants au regard de leur obligation d'administration de la preuve est identique, il convient de rejeter la demande d'expertise comme celle tendant à obtenir des informations de Maître D..., toutes deux se heurtant aux dispositions de l'article 146 du nouveau code de procédure civile ;
qu'en effet en leurs qualités d'héritiers Messieurs K... étaient en mesure d'interroger directement Maître D... sur une éventuelle opération effectuée par leur défunt père ;
qu'ils étaient également autorisés à se voir délivrer par les banques concernées toutes informations sur l'historique des comptes de leur père et sur l'identité des auteurs des virements et retraits apparaissant sur les relevés, ainsi que sur l'origine des fonds ;
que d'ailleurs par lettre du 24 avril 2003 la SOCIETE GENERALE informait Monsieur Lucien K... des coûts qu'elle facturait en contrepartie des recherches que lui imposeraient les renseignements sollicités ;
que la carence des appelants à obtenir tous les moyens de preuve utiles au soutien de leurs prétentions est avérée et ils ne sauraient la pallier en demandant l'organisation de mesures d'instruction
judiciaires ;
Attendu qu'il sera donc statué, ainsi que l'avaient déjà exactement décidé les premiers juges, en considération des éléments de preuve produits aux débats, sur les seules réclamations dont la nature et le montant sont déterminés ;
que la demande générale de restitution des prélèvements effectués par Madame X... sur les compte du défunt depuis le 21 mai 1996 doit être écartée comme irrecevable ;
Attendu qu'il sera d'emblée observé que Madame X... a produit aux débats sa déclaration de revenus fonciers pour 1996 ainsi que son avis d'imposition pour 1997 (ses pièces nos 24, 30 et 31 figurant sur son bordereau du 20 mai 2005), de sorte que la demande de communication à ce titre doit être écartée comme dépourvue d'objet ; Attendu que c'est à tort que les appelants entendent voir constater le "refus" de Madame X... de rendre compte des actes exécutés sur procuration de son père alors que celle-ci n'exerce que son droit d'opposer des moyens de défense à l'exigence de reddition de compte qui lui est opposée, et dont la pertinence sera ci-après examinée ;
Attendu que c'est donc dans ce cadre juridique qu'il échet d'examiner chacune des difficultés qui ont fait obstacle à la réalisation du partage successoral ;
Attendu qu'il est constant que depuis au moins le divorce du défunt et de son épouse Madame Y... prononcé en 1970 un conflit familial a opposé les appelants et l'intimée ;
que les causes se trouvent être sans emport sur la solution du présent litige ;
qu'il convient seulement d'observer qu'il s'en est suivi, de leur propre aveu, comme de celui de leur mère et de leur soeur AMANDE recueillis par voie d'attestations, une totale rupture de relations
entre les appelants, et leur père ainsi qu'entre ceux-ci et Madame X... ;
qu'en produisant des attestations régulières, circonstanciées et non arguées de faux émanant d'amis de longue date du défunt Madame J... et Monsieur F..., Madame X... établit que depuis le divorce de ses parents elle est toujours demeurée en contacts étroits et fréquents avec son père ;
que ces mêmes témoins ainsi que des voisins les époux C... relatent que depuis la fin de l'année 1995 Monsieur Alphonse K... a habité au domicile de Madame X... jusqu'à son décès ;
que cette situation et les soins prodigués par Madame X... à son père pendant sa maladie, une affection cancéreuse déclarée fin 1995, sont corroborés par les témoignages de Madame Z... et de Monsieur B..., respectivement infirmière et prêtre dans une maison de retraite où Monsieur5, sont corroborés par les témoignages de Madame Z... et de Monsieur B..., respectivement infirmière et prêtre dans une maison de retraite où Monsieur Alphonse K... et sa concubine Madame L... avaient séjourné pendant quelques semaines avant de fixer leur résidence commune chez Madame X... ;
Attendu qu'il apparaît dès pièces du dossier que Monsieur Alphonse K... détenait des compte à la SOGENAL et à la CMDP sur lesquels il avait respectivement les 21 mai 1996 et 15 mars 1996 consenti des procurations générales à Madame X... ;
Attendu qu'en application de l'article 1993 du code civil Madame X... est tenue de rendre compte des opérations effectuées en qualité de mandataire de son père ;
que la preuve du respect par elle des termes et limites de son mandat est admis par tous moyens ;
Attendu que Madame X... soutient d'abord que des retraits réguliers ont été réalisés pour les besoins de la vie courante du couple que
formaient son défunt père avec sa concubine Madame L... - personne également âgée pour être née en 1932 et physiquement handicapée ainsi que cela ressort des témoignages précités et des propres attestations établies régulièrement par celle-ci et non arguées de faux où elle relate avoir subi une attaque cérébrale en 1989 - ;
qu'il n'est pas douteux que l'entretien de deux personnes gravement malades ( il apparaît des bulletins d'hospitalisation que pendant l'année 1996 Monsieur Alphonse K... subissait des traitements ambulatoires fréquents - entraînait des frais importants ;
qu'au surplus Monsieur Alphonse K... pouvait, sans mettre sa situation financière en péril, prétendre bénéficier d'un train de vie confortable et faire profiter de celui-ci Madame L... qui partageait sa vie, de l'aveu de cette dernière, depuis 1972 alors que l'examen de ses relevés de compte fait ressortir des revenus conséquents ;
qu'ainsi - et les témoins déjà cités, ainsi que son ex-épouse, confirment ce fait - Monsieur Alphonse K... était dès avant son divorce employé par l'EDF et il a donc toujours perçu un salaire ;
qu'il ressort des extraits de son compte SOGENAL des 3 juillet 1996 et 3 octobre 1996 qu'il recevait trimestriellement de l'EDF une pension de retraite de 32.161,08 F ;
que Monsieur Alphonse K... s'est également trouvé en possession d'importantes sommes d'argent qu'il a lui-même virées de la SOGENAL au CREDIT MUTUEL ou retirées : 1.640.752,50 F le 10 novembre 1995, 800.000 F le 15 novembre 1995, 1.100.000 F le 17 février 1996, 300.000 F le 17 février 1996 et 600.000 F le 3 avril 1996 ;
que l'allégation selon laquelle il s'agissait de gains du loto est corroborée par le témoignage déjà évoqué de Madame J... qui relate qu'en septembre, octobre ou novembre 1995 Monsieur Alphonse K... lui avait confié avoir gagné le gros lot au loto, ce que confirme aussi Madame L... ;
qu'il appert des documents bancaires produits aux débats que Madame X... a retiré sur les comptes de son père au moyen de la procuration consentie par celui-ci :
. 10.000 F
le 30 novembre 1995,
. 3.000 F
le 13 juin 1996,
. 3.000 F
le 21 mai 1996,
. 12.000 F
le 12 août 1996,
. 2.000 F
le 10 septembre 1996,
ou 8.000 F (photocopie difficilement lisible) ;
qu'il s'évince de toute l'analyse qui précède, et alors que la proximité des liens familiaux et la relation de confiance qui s'ensuivait excluait l'établissement d'écrits entre le défunt et sa fille, que Madame X... a bien effectué ces retraits pour les besoins de la vie courante de son père et de Madame L... ;
Attendu que Messieurs K... font vainement grief à Madame X... de ne pas justifier de l'emploi de la somme de 150.000 F retirée le 26 juillet 1996 à la SOGENAL alors qu'il ne prouve pas que celle-ci est l'auteur de ce retrait ;
qu'ils s'abstiennent de produire, comme pour les retraits précédemment examinés, le document de mouvement interne à la banque qui ferait apparaître si l'opération a été exécutée par le titulaire du compte ou par sa mandataire ;
que s'avère dépourvue à cet égard de valeur probante la lettre du 4 juin 2004 où la SOGENAL se borne à rappeler -ce qui est patent- que seuls Monsieur K... Alphonse et Madame X... pouvaient effectuer
des retraits ;
que la circonstance que Monsieur K... aurait précisément été hospitalisé et dans l'incapacité de faire lui-même une opération bancaire le 26 Juillet 1996 n'est pas autrement établie que par les propres allégations des appelants ;
que la demande de rapport de cette somme doit donc être rejetée ;
Attendu qu'il ressort d'une pièce émanant du CREDIT MUTUEL que le 21 mars 1996 Madame X... a retiré la somme de 300.000 F sur le compte de son père ;
que cependant au moyen de l'attestation régulière et non arguée de faux en date du 23 septembre 2004 où Madame L... relate que Monsieur K... avait demandé à sa fille d'effectuer un retrait de 300.000 F et qu'elle était présente lorsque Madame X... a remis cet argent à son père, l'intimée démontre qu'elle a respecté les termes de son mandat ;
Attendu que les documents de la SOGENAL font encore apparaître que le 30 septembre 1996, jour du décès de son père Madame X... a fait procéder au virement de la somme de 39.800 F sur le compte de Madame L... ;
que Madame X... ne saurait être contrainte de rapporter ce montant dont elle n'a pas bénéficié et alors que d'une part cette opération correspondait manifestement à la volonté du mourant souhaitant gratifier sa concubine, et que d'autre part il n'est pas prouvé, ni seulement soutenu, que Monsieur Alphonse K... aurait subi une altération de ses facultés mentales ;
que la demande à ce titre doit être écartée ;
Attendu que Messieurs K... font également grief à Madame X... de ne pas justifier de l'affectation de la somme de 20.000 F qu'elle a retirée sur le compte de Monsieur K... ouvert à la SOGENAL, le 30 septembre 1996 jour du décès de ce dernier ;
que cependant sur ce point Madame L... dans son attestation régulière et non arguée de faux en date du 3 avril 2003, explique que Monsieur Alphonse K... avait demandé à sa fille de retirer cette somme pour garantir le paiement de quatre mois de loyers afin qu'elle puisse demeurer dans la maison qu'elle occupait étant souligné qu'il s'agissait de la maison appartenant à Madame X... et pour laquelle au moyen d'un virement bancaire automatique le défunt versait à sa fille un loyer mensuel de 5.000 F ;
que Madame L... précise encore que ne disposant que de faibles revenus et ayant dû être temporairement admise en maison de long séjour du fait de son handicap, elle n'était pas en mesure de régler elle-même ce loyer à l'époque du décès de Monsieur K... ;
qu'il est ainsi parfaitement justifié de la destination de ce retrait, ce qui exclut toute obligation de rapport à la charge de Madame X..., d'autant que le dernier virement automatique au titre de ce loyer a été pratiqué sur le compte du défunt le 3 octobre 1996 avant sa clôture et correspondait au mois de septembre 1996 ce qui permet de se convaincre que l'intimée n'a pas indûment reçu deux fois les loyers pour une même période ;
Attendu que les appelants critiquent à tort le fait que Madame X... ait exigé le paiement d'un loyer en contrepartie de la mise à disposition à son père de la maison lui appartenant, alors que le devoir moral d'un enfant envers ses parents n'exclut pas qu'il puisse obtenir une indemnité pour l'aide et l'assistance apportées dans la mesure où, ayant excédé les exigences de piété filiale, la prestation librement fournie réalise à la fois un appauvrissement pour l'enfant et un enrichissement corrélatif des parents, ce qui est le cas en l'espèce d'autant qu'il n'est pas établi, ni seulement soutenu, que le montant du loyer aurait excédé la valeur locative de l'immeuble considéré ;
que ces montants ne sont donc pas sujets à rapport de sorte que la demande à ce titre sera rejetée par voie d'infirmation du jugement entrepris ;
Attendu que, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, ce même raisonnement trouve à s'appliquer pour retenir que la valeur du véhicule - 64.970 F - donnée par le défunt à sa fille est, de la volonté non équivoque de ce dernier, dispensée de rapport ;
qu'ils s'évince là encore du témoignage de Madame L... que Monsieur Alphonse K... qui avait acquis cette voiture quelques mois avant son décès et qui simultanément avait demandé à Madame X... de prendre en charge sa concubine, cette dernière ne pouvant se déplacer autrement que dans un véhicule conduit par une tierce personne, avait nettement, en contrepartie de cette assistance, entendu gratifier sa fille sans l'obliger à rapporter le prix à la succession ;
qu'en infirmant le jugement attaqué il échet de rejeter cette demande ;
Attendu qu'il apparaît du bon de commandé signé par Monsieur K... le 17 juillet 1996 et de la facture acquittée émise à son nom le 19 septembre 1996, que le défunt a commandé et payé la véranda construite devant la maison que lui louait sa fille moyennant le prix de 117.000 F TTC ;
que la circonstance que Madame X... ait consenti à l'exécution de ces travaux n'est pas de nature à écarter l'application de l'article 555 du code civil alors qu'un contrat de bail liait Monsieur Alphonse K... et Madame X... et qu'il n'est argué de l'existence d'aucune convention réglant le sort des constructions réalisées par le locataire ;
que les premiers juges se sont mépris en décidant le contraire d'autant que la véranda qui en l'espèce mesure 9,66 m de large sur
3,50 de profondeur constitue bien un ouvrage de construction ;
qu'il est vainement soutenu par les appelants que Madame X... serait irrecevable à demander que la succession reprenne à ses frais cette véranda aux motifs qu'elle n'aurait introduit aucune action à cette fin contre les héritiers ;
que d'abord la présente procédure a précisément pour objet de statuer sur cette demande de démolition de la véranda litigieuse aux frais de la succession ;
qu'il ne saurait donc être fait grief à Madame X... qui, dès le réunion du 6 octobre 1999 chez Maître H... notaire désigné par le Tribunal d'Instance, a demandé aux copartageants de reprendre cet ouvrage, ce qui s'analyse clairement de la part de Madame X... comme l'exercice de l'option prévue par l'article 555 alinéa 2 du code civil, de ne pas avoir requis l'exécution forcée de cette option, alors qu'elle ne pouvait qu'attendre que ce point constituant une difficulté du partage soit tranchée dans le cadre de la présente action ;
que cette analyse commande d'infirmer le jugement entrepris et de rejeter la demande de rapport de la valeur de la véranda à la succession ;
Attendu que Madame X... reconnaît avoir perçu de son père la somme de 300.000 F qui était la prime d'un contrat d'Assurance Vie ;
qu'il n'est pas discuté qu'il s'agit d'une donation dont il convient seulement de rechercher si le défunt avait manifesté la volonté non équivoque de la dispenser du rapport prévu par l'article 843 du code civil ;
qu'en considération de l'analyse qui a déjà été effectuée de la situation familiale, de l'étroitesse des liens qui unissait Madame X... à son père, des soins qu'elle lui a prodigués ainsi que de l'engagement qu'elle a pris de s'occuper de Madame L... et qu'elle
assume ainsi qu'en atteste cette dernière, il est manifeste que Monsieur Alphonse K... a entendu dispenser sa fille de rapporter cette somme ;
que la confirmation du jugement attaqué s'impose sur ce point ;
Attendu qu'en produisant aux débats les sept autres contrats Assurance-Vie souscrits par Monsieur Alphonse K... auprès du CREDIT MUTUEL (ORCHIDEE Placement assurance-vie) dont il résulte que Madame L... est désignée comme bénéficiaire exclusive, Madame X... rend sans objet les insinuations des appelants quant à un détournement des primes par ses soins ;
Attendu que les appelants soutiennent que Madame X... n'aurait pas déclaré à la succession les meubles détenus par son père ainsi que cela ressortirait d'un chèque émis par celle-là sur le compte de Monsieur Alphonse K... le 2 juin 1996 pour un montant de 15.370 F ;
que Messieurs K... n'établissent pas que cette somme correspondrait à un achat de mobilier conservé par Madame X... ;
qu'elle peut être en revanche le prix de la chambre à coucher que Madame L... déclare avoir reçu en cadeau de Monsieur Alphonse K... "pour mon retour à la maison" visant ainsi la date à laquelle elle a quitté la maison de retraite pour rejoindre son compagnon dans la maison louée par Madame X... ;
qu'à défaut d'autres éléments probants la demande afférente au mobilier sera rejetée ;
Attendu que les appelants qui n'établissent pas que Madame X... ait commis des manoeuvres frauduleuses caractérisées en vu de divertir à leur détriment des effets successoraux, doivent être déboutés de leur demande tendant à voir celle-là reconnue coupable d'un recel prévu par l'article 792 du code civil ;
que le rejet de toutes leurs autres prétentions exclut les fraudes
dont ils entendaient se prévaloir ;
qu'il ne suffit pas que certaines libéralités aient pu être comme en l'espèce déguisées ou indirectes pour que le recel existe ;
que la circonstance -rappelée en exorde de l'arrêt - que Madame X... n'ait pas d'emblée déclaré l'existence des comptes détenus au CREDIT MUTUEL par le défunt, ne permet pas à elle seule de caractériser un fait positif de recel alors que le notaire en a eu connaissance plusieurs mois avant l'ouverture de la procédure de partage judiciaire ;
Attendu que Messieurs K... qui succombent totalement doivent être condamnés aux entiers dépens de première instance et d'appel ainsi qu'au paiement à Madame X... d'une indemnité de 1.500 ç pour frais irrépétibles de première instance et d'appel ;
que le jugement doit donc être infirmé du chef des dépens et frais irrépétibles ;
que les appelants seront déboutés de leurs demandes de frais irrépétibles ;
Attendu qu'il échet d'ordonner le renvoi des parties devant Maître H... notaire aux fins d'établir le partage ; P A R C E S M O T I F S Confirme le jugement entrepris seulement en ce qu'il a rejeté la demande au titre des maniements de fond - sauf à préciser qu'elle est irrecevable - ainsi que celle tendant à l'organisation d'une expertise et en ce qu'il a dit que le paiement à Madame X... d'une prime de 300.000 F - 45.734,71 ç (quarante cinq mille sept cent trente quatre euros et soixante et onze cents) - constitue une donation dispensée du rapport à succession, Infirme toutes les autres dispositions du jugement entrepris, Statuant à nouveau de ces chefs et y ajoutant : Déboute Messieurs Jacques, Lucien et Laurent K... de toutes leurs autres demandes, Condamne Messieurs Jacques, Lucien et Laurent K... à payer à Madame X... une indemnité de 1.500 ç
(mille cinq cents euros) pour frais irrépétibles de première instance et d'appel, Condamne Messieurs Jacques, Lucien et Laurent K... aux entiers dépens de première instance et d'appel, Renvoie les parties devant Maître H... notaire aux fins d'établissement du partage judiciaire conformément aux dispositions du présent arrêt. Le greffier Le président