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21/11/2002 | FRANCE | N°JURITEXT000006941351

France | France, Cour d'appel de colmar, Chambre sociale, 21 novembre 2002, JURITEXT000006941351


ML/SD N° RG 99/02253 MINUTE N° 02/1405 NOTIFICATION :

Copie aux parties Clause exécutoire aux : - avocats - parties non représentées - DRASS Le Le Greffier REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS X... D'APPEL DE COLMAR CHAMBRE SOCIALE ARRET DU 21 Novembre 2002 COMPOSITION DE Y... X... LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE : M. SCHILLI, Conseiller, faisant fonction de Président, Mme BRODARD, Conseiller M. LAURAIN, Conseiller GREFFIER PRESENT AUX DEBATS ET AU PRONONCE : M. UTTARD, DEBATS à l'audience publique du 26 Septembre 2002 ARRET DU 21 Novembre 2002 Contradictoire Prononcé

à l'audience publique par le Président. NATURE DE L'AFFAIRE :...

ML/SD N° RG 99/02253 MINUTE N° 02/1405 NOTIFICATION :

Copie aux parties Clause exécutoire aux : - avocats - parties non représentées - DRASS Le Le Greffier REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS X... D'APPEL DE COLMAR CHAMBRE SOCIALE ARRET DU 21 Novembre 2002 COMPOSITION DE Y... X... LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE : M. SCHILLI, Conseiller, faisant fonction de Président, Mme BRODARD, Conseiller M. LAURAIN, Conseiller GREFFIER PRESENT AUX DEBATS ET AU PRONONCE : M. UTTARD, DEBATS à l'audience publique du 26 Septembre 2002 ARRET DU 21 Novembre 2002 Contradictoire Prononcé à l'audience publique par le Président. NATURE DE L'AFFAIRE : Dde en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur APPELANTE ET DEMANDERESSE : Mademoiselle Malika Z... 5 rue de Lattre de Tassigny 67300 SCHILTIGHEIM Représentant : Me JP KAHN (avocat au barreau de STRASBOURG) INTIMEE ET DEFENDERESSE : SA ALSACE CROISIERES, prise en la personne de son PDG 12 rue de la Division Leclerc 67000 STRASBOURG* Représentant : Me Monique LEVA (avocat au barreau de STRASBOURG) MISE EN CAUSE : Y... CPAM DE Y... BATELLERIE, prise en la personne de son Directeur 18 quai d'Austerlitz 75634 PARIS CEDEX 13 représentant : M. A..., muni d'un pouvoir Salariée de la société ALSACE-CROISIERES en qualité d'hôtesse de cabine depuis mars 1990, Mademoiselle Malika Z... a été victime d'un accident du travail le 22 juillet 1993 alors qu'elle travaillait sur le bateau " Petite France " à ce moment en stationnement : en voulant interrompre la fermeture automatique d'une porte coupe-feu, elle a eu la main gauche écrasée et a dû subir l'amputation de l'avant-bras gauche. Mademoiselle Z... a indiqué aux enquêteurs que le commissaire de bord lui avait montré la manouvre à suivre pour désactiver l'alarme de la porte coupe-feu qui s'était déclenchée de manière intempestive, qu'elle s'était trompée de bouton, désactivant l'alarme mais déclenchant la manouvre de fermeture automatique de la

porte au lieu de l'arrêter , qu'elle avait voulu dégager un aspirateur placé en travers de la porte, qui risquait d'être broyé mais que son bras gauche avait été coincé dans la porte. Saisi par la salariée aux fins de reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, le tribunal des affaires de sécurité sociale du Bas-Rhin, par jugement du 31 mars 1999, l'a déboutée de cette demande. Mademoiselle Z... a interjeté appel le 26 avril 1999 de ce jugement qui lui a été notifié le 3 avril 1999. Dans ses écritures du15 octobre 2001, soutenues oralement à l'audience, elle demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris, de dire que l'accident dont elle a été victime est dû à la faute inexcusable de l'employeur, de fixer au maximum le taux de la rente, de fixer à 1.000.000 F le montant des préjudices accessoires, de déclarer l'arrêt opposable à la C.P.A.M. de STRASBOURG et de condamner l'employeur à lui verser la somme de 10.000 F sur le fondement des dispositions de l'article 700 du N.C.P.C. Elle fait valoir, pour l'essentiel, qu'elle n'avait reçu aucune formation à la sécurité et notamment à l'utilisation des portes coupe-feu, que le commissaire de bord du navire, par ailleurs fils du responsable de l'entreprise, lui avait uniquement montré comment manouvrer pour neutraliser l'alarme des portes coupe-feu lorsqu'elles se déclenchaient de manière intempestive, circonstance établie par le témoignage d'une collègue, Sandrine B..., qu'elle a été prise de panique, que ces instructions démontrent la conscience que l'employeur avait du danger de ce déclenchement, que la faute de l'employeur présente le caractère de gravité exceptionnelle et a été la cause déterminante de l'accident, le seul reproche que l'on puisse adresser à la salariée étant d'avoir appliqué les consignes qu'on lui avait données. Y... société ALSACE-CROISIERES a conclu, quant à elle, en déposant des écritures du 13 mars 2002, soutenues oralement à l'audience, par lesquelles

elle demande à la cour de confirmer le jugement entrepris, , de débouter Mademoiselle Z... de ses demandes et de la condamner à lui verser la somme de 1.524,49 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du N.C.P.C. Elle fait valoir, en substance, que Mademoiselle Z... a été prise de panique lorsqu'après avoir pris l'initiative de désactiver la sonnerie d'alarme de la porte coupe-feu, elle s'est rendue compte qu'un aspirateur était sur la trajectoire de la porte et a voulu le retirer, sans prendre conscience que son bras gauche serait coincé par la porte. Elle ajoute que la plainte pénale qu'elle a déposée le 21 septembre 1993 a fait l'objet d'un non-lieu en raison de la loi d'amnistie. Elle poursuit en indiquant que, selon le rapport de la D.D.T.E. du 28 juillet 1994 , la porte met 37 secondes pour se fermer, cette vitesse de déplacement " devait a priori éviter le type d'accident qui s'est produit, la conformité des installation ne semblait pas en cause, on peut simplement s'étonner de la non-intervention des personnes habilitées à neutraliser l'alarme sonore " et elle ajoute que le contrôleur du travail mandaté par le juge d'instruction n'a pas constaté de problèmes de vétusté du navire, que jamais le commissaire de bord ne l'a chargée de couper l'alarme en cas de déclenchement, que la porte n'a pas pu se fermer " subitement " et que Mademoiselle Z... a commis une grave imprudence en voulant retenir la porte pour éviter que l'aspirateur ne soit broyé étant précisé qu'elle a commencé par se tromper d'armoire électrique, de sorte que la faute inexcusable de l'employeur n'est pas caractérisée. Elle se réfère à l'analyse des premiers juges, lesquels ont rappelé qu'au début de chaque saison se tenait une réunion de sécurité lors de laquelle il était indiqué que seul le personnel de bord pouvait manouvrer les portes étanches, que l'accident était imputable à la panique et à l'imprudence de

Mademoiselle Z... Y... société ALSACE-CROISIERES indique qu'un témoin, Monsieur C..., cuisinier à bord de la " Petite France " a entendu le commissaire de bord faire des remontrances à Mademoiselle Z..., la veille de l'accident, et lui interdire de manouvrer cette porte. Y... C.P.A.M. de ROUEN, qui vient aux droits de la Caisse Primaire NAtionale d'Assurance Maladie de la Batellerie, a déposé des conclusions en date du 18 septembre 2002 tendant à ce qu'il lui soit donné acte de ce qu'elle s'en rapporte à justice et, en cas d'infirmation, à ce que soient précisés les montants des préjudices personnels qui pourraient être alloués à la victime. Les mémoires des parties ont été communiquées à la D.R.A.S.S. qui a été avisée de la date de l'audience. SUR QUOI Y... X... : VU L'ENSEMBLE DE Y... PROCEDURE ET LES PIECES VU L'AVIS D'AUDIENCE A Y... DRASS :

Y... X... rappelle qu'en vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l'employeur est tenu envers ce dernier d'une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les accidents du travail, que le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable, au sens de l'article L 452-1 du Code de la Sécurité Sociale, lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver. Dans le cas d'espèce, il résulte des déclarations de Mademoiselle Z..., recueillies par les policiers enquêteurs, sur commission rogatoire, à la suite de la plainte déposée par la salariée, ( P.V. du 14 novembre 1994 D 55 de la procédure pénale) que l'alarme sonnait de façon intempestive dès la saison de 1992 qu'elle a effectuée sur "Y... Petite France", mais que, comme personne ne lui avait appris à la faire fonctionner, "c'est un responsable du bateau ou quelqu'un d'autre qui venait l'éteindre". Elle a ajouté qu'à la fin du mois d'avril 1993, l'alarme continuait à sonner sans raison et que D... SCHMITTER, son responsable, lui a

alors montré comment il fallait faire pour l'éteindre et elle a poursuivi en indiquant que P. SCHMITTER lui avait demandé de l'éteindre quand elle se mettait à sonner, de sorte qu'elle avait pris l'habitude d'effectuer la manoeuvre. Elle a précisé qu'une réunion de sécurité était organisée en début de saison lors de laquelle P. SCHMITTER "a montré à tout le monde le fonctionnement de l'alarme" et elle conteste avoir été menacée d'un avertissement pour le cas où elle continuerait à manoeuvrer cette porte. Elle a déclaré le 20 octobre 1993 (D 44) que c'est la carence des agents chargés de neutraliser l'alarme et la préoccupation de ne pas importuner la clientèle qui l'avaient poussée à intervenir, ajoutant : " il n'était nullement dans mes fonctions de m'occuper de la neutralisation de l'alarme". Ces déclarations ont été confirmées, pour l'essentiel, devant le magistrat instructeur. (D 81-D82) Plusieurs témoins ont été entendus dans le cadre de l'information: Sandrine GOURGACHE (D 80) a affirmé qu'après l'accident, D... SCHMITTER, auquel Malika Z... reprochait de lui avoir appris à manier la porte coupe-feu, a reconnu ce fait. En revanche, Hassena KAOURI a indiqué que si le fonctionnement de la porte était bien décrit par les responsables du bateau lors de la réunion de sécurité au début de chaque saison, ces derniers précisaient que le personnel ne devait pas y toucher, le fonctionnement de la porte incombant au commandant de bord, au responsable ou au matelot et elle ajouté que " l'accent a toujours été mis sur le caractère dangereux de cette porte" (D 63). Ces déclarations ont été confirmées en tout point par Dominique LOTZ, matelot à bord de "Y... Petite France" (D 61), par Dominique DOPPLER, animatrice (D 71) et par Malika DIFFALAH, serveuse (D 60). Elles sont corroborées par celles du commandant de bord, Jacob HUIZENGA (D 67) Le cuisinier du navire, André C..., a témoigné en ces termes "un jour, avant l'accident, je ne me souviens plus quand, alors que je me

trouvais en cabine, j'ai entendu Monsieur SCHMITTER D... faire des remontrances à Malika Z... et lui interdire de faire manoeuvrer cette porte" (D 28) Au demeurant, D... SCHMITTER a indiqué qu'en effet, il avait dû menacer la salariée d'une lettre d'avertissement car elle continuait à toucher à cette porte malgré ses mises en garde (D 38) Il résulte de l'ensemble de ces déclarations que Malika Z... avait certes été informée de la manière dont se manoeuvrait la porte mais que , comme l'ensemble du personnel, à l'exception des responsables et des matelots, elle avait reçu la consigne de ne pas faire fonctionner cette porte, dont les dangers avaient été décrits lors des séances d'information de début de saison. Ces consignes et mises en garde lui avaient été personnellement réitérées lors de l'entretien auquel André C... a été présent. C'est, au demeurant, en ce sens que sont libellées les consignes écrites destinées au personnel (D 34 à D 36). Quant aux séances d'information sur la sécurité, le nom et le paraphe de Malika Z... figurent sur les listes des membres du personnel présent. (Séances du 27 mars 1992,du 12 juin 1992,du 31 mars 1993). L'accident du travail dont a été victime l'appelante n'est donc pas la conséquence d'une faute inexcusable de l'employeur. A cet égard, la complexité de la manoeuvre elle-même qu'a entreprise Malika Z... n'est pas de nature à caractériser cette faute dans la mesure où la salariée savait qu'elle ne devait pas actionner cette porte. De même, le fait que l'alarme se déclenche en cas de roulis et, en tout cas, de manière intempestive, et qu'elle ait voulu préserver la quiétude des passagers que cette alarme pouvait déranger ou alerter n'est pas davantage décisif: il appartenait aux personnes en charge du fonctionnement de la porte d'intervenir, à charge pour eux en cas d'intervention tardive et de plainte des passagers, d'en assumer les conséquences. Enfin, le Directeur Départemental du Travail a adressé

au Procureur de la République du tribunal de grande instance de STRASBOURG un rapport en date du 28 juillet 1994 retraçant les constatations d'un contrôleur ayant enquêté sur place à plusieurs reprises. Selon les constatations de l'enquêteur, la conformité des installations n'est pas en cause, ce que la victime ne conteste pas. En conséquence, le jugement entrepris sera confirmé. Il y a lieu de débouter l'intimée de sa demande formée sur le fondement de l'article 700 du N.C.P.C., en raison de la situation économique de l'appelante. P A R C E S M O T I F S Y... X..., statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort après en avoir délibéré conformément à la loi, Déclare recevable l'appel dont elle est saisie, jugé régulier en la forme, Au fond, Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris. Déboute la S.A Déboute la S.A ALSACE-CROISIERES de sa demande formée sur le fondement de l'article 700 du N.C.P.C. Dispense l'appelante du paiement du droit prévu par les dispositions de l'article R 144-6 du Code de la Sécurité Sociale. Rappelle que la procédure est sans frais. Et le présent arrêt a été signé par M. SCHILLI, Conseiller faisant fonction de Président et M. UTTARD, greffier présent au prononcé.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de colmar
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006941351
Date de la décision : 21/11/2002
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Employeur - Responsabilité - Faute - Faute inexcusable - /JDF

L'employeur est tenu envers son salarié d'une obligation de sécurité, notamment en ce qui concerne les accidents du travail, et le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable lorsque l'employeur aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver. Etant démontré que l'employeur a informé son salarié du danger que représentait le fonctionnement d'une porte coupe-feu et qu'il lui a interdit de la faire fonctionner, l'accident de travail dont ce dernier a été victime n'est pas la conséquence d'une faute inexcusable de l'employeur


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.colmar;arret;2002-11-21;juritext000006941351 ?
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