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15/02/2022 | FRANCE | N°20/000241

France | France, Cour d'appel de chambéry, 10, 15 février 2022, 20/000241


IRS/SL

COUR D'APPEL de CHAMBÉRY

Chambre civile - Première section

Arrêt du Mardi 15 Février 2022

No RG 20/00024 - No Portalis DBVY-V-B7E-GMKW

Décision attaquée : Jugement du Tribunal de Grande Instance de BONNEVILLE en date du 03 Juin 2019, RG 15/01183

Appelante

Association DIRECTION AUX AFFAIRES SAVOISIENNES dont le siège social est situé [Adresse 1]

Représentée par Me Michel FILLARD, avocat postulant au barreau de CHAMBERY
Représentée par Me David RAJJOU, avocat plaidant au barreau de BREST

Intimée

Mme LA

PROCUREURE GENERALE PRES LA COUR D'APPEL
[Adresse 2]

-=-=-=-=-=-=-=-=-

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors de l'audience publ...

IRS/SL

COUR D'APPEL de CHAMBÉRY

Chambre civile - Première section

Arrêt du Mardi 15 Février 2022

No RG 20/00024 - No Portalis DBVY-V-B7E-GMKW

Décision attaquée : Jugement du Tribunal de Grande Instance de BONNEVILLE en date du 03 Juin 2019, RG 15/01183

Appelante

Association DIRECTION AUX AFFAIRES SAVOISIENNES dont le siège social est situé [Adresse 1]

Représentée par Me Michel FILLARD, avocat postulant au barreau de CHAMBERY
Représentée par Me David RAJJOU, avocat plaidant au barreau de BREST

Intimée

Mme LA PROCUREURE GENERALE PRES LA COUR D'APPEL
[Adresse 2]

-=-=-=-=-=-=-=-=-

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors de l'audience publique des débats, tenue le 07 décembre 2021 avec l'assistance de Mme Sylvie LAVAL, Greffier,

Et lors du délibéré, par :

- M. Michel FICAGNA, Président,

- Mme Alyette FOUCHARD, Conseiller,

- Mme Inès REAL DEL SARTE, Conseiller, qui a procédé au rapport,

-=-=-=-=-=-=-=-=-

Par acte du 14/08/2015, M. le Procureur de la République près le tribunal de grande instance de Bonneville a assigné l'association Direction aux Affaires Savoisiennes aux fins de dissolution, pour objet illicite.

Par ordonnance du 04/04/2016, le juge de la mise en état de ce tribunal :

?s'est déclaré compétent pour interpréter les traités internationaux en vigueur et juger de la régularité de leur ratification,

?a débouté l'association Direction aux Affaires Savoisiennes de sa demande de transmission d'une question préjudicielle au Conseil d'Etat,

?a dit que l'article 44 du traité de paix du 10/02/1947 ne s'applique pas au traité de Turin du 24/03/1860,

?a débouté l'association Direction aux Affaires Savoisiennes de sa demande tendant à enjoindre au ministère public de produire aux débats soit en original soit en fac-similé certifié conforme, les pièces par lesquelles l'Etat français a mis en oeuvre sa faculté de notifier à l'Etat italien de remettre en vigueur les traités, conventions et accords bilatéraux conclus antérieurement à l'état de guerre de 1940, conformément aux dispositions de l'article 44 du traité de paix et de sa demande de suspension d'instance afin d'appeler en cause Mme l'Agent Judiciaire de l'Etat à cette même fin, soit le service des traités du Ministère des Affaires Etrangères de la République, soit les archives nationales,

?a dit que le traité de Turin du 24/03/1860 est toujours demeuré applicable dans ses dispositions fixant les frontières franco-italiennes, et que la réunion de la Savoie à la France n'est pas caduque,

?déclaré le tribunal de grande instance de Bonneville territorialement compétent,

?renvoyé la procédure à une audience de mise en état pour conclusions au fond.

L'association Direction aux Affaires Savoisiennes a formé un contredit contre cette ordonnance, le 19/04/2016, demandant à la Cour de :

- surseoir à statuer et ordonner les mesures d'instruction sollicitées devant le premier juge ;

- subsidiairement, l'autoriser à appeler en cause le représentant de l'Etat à cette fin ;

- plus subsidiairement, dire que la juridiction judiciaire n'est pas compétente pour apprécier la validité et la régularité de l'acte administratif que constitue la notification effectuée par l'Etat à la république italienne en application de l'article 44 du même traité, ni celle de la communication publiée au Journal Officiel du 14/11/1948 ;

- faire droit à la demande de question préjudicielle au Conseil d'Etat telle que formulée devant le premier juge et surseoir à statuer dans l'attente.

Par arrêt en date du 13 décembre 2016, après avoir rappelé que les décisions du juge de la mise en état statuant sur la compétence ne sont pas susceptibles de contredit, et que lorsqu'elle est saisie à tort par la voie du contredit contre une décision du juge de la mise en état, la cour d'appel n'en demeure pas moins saisie en application de l'article 91 du code de procédure civile, la présente cour a :

- déclaré le recours formé contre l'ordonnance déférée par l'association Direction aux Affaires savoisiennes recevable

- renvoyé l'affaire à la mise en état.

Par arrêt en date du 13 février 2018, la cour a confirmé l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions et condamné l'association Direction aux Affaires Savoisiennes aux dépens de première instance et d'appel.

Par jugement en date du 3 juin 209, le tribunal de grande instance de Bonneville a :

?Prononcé la dissolution de l'association Direction aux Affaires Savoisiennes déclarée le 21 août 2014 auprès de la Préfecture de Haute-Savoie,

?Condamné l'association Direction aux Affaires Savoisiennes aux dépens.

L'association Direction aux Affaires Savoisiennes a interjeté appel de cette décision.

Aux termes de ses conclusions en date du 22 juin 2020, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé des moyens, l'association Direction aux Affaires Savoisiennes demande à la cour de :

Vu les articles 3 et 7 de la loi du 1 juillet 1901,
Vu l'article 89 du l'article 89 de la Constitution du 4 octobre 1958,

Infirmer le jugement de première instance rendu par le tribunal de grande instance de Bonneville le 3 juin 2019 en ce qu'il a prononcé la dissolution de l'association Direction aux Affaires Savoisiennes et condamné cette dernière aux dépens,

Dire et juger le Procureur de la République mal fondé dans ses demandes,

En conséquence le débouter de sa demande de dissolution,

Condamner l'Etat Français, représenté par M. le Procureur Général, à payer à l'association une somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Aux termes de ses réquisitions en date du 29 novembre 2021, le parquet général a requis la confirmation du jugement déféré.

L'ordonnance de clôture est en date du 29 novembre 2021.

MOTIFS DE LA DECISION

En l'absence d'élément nouveau, c'est par une motivation pertinente que la cour adopte expressément que le premier juge a retenu que :

- L'article 3 de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association apporte une restriction à la liberté d'association en disposant que toute association fondée sur une cause ou en vue d'un objet illicite, contraire aux lois, aux bonnes m?urs, ou qui aurait pour but de porter atteinte à l'intégrité du territoire national et à la forme du gouvernement est nulle de nul effet.

- L'objet déclaré par l'association Direction Aux Affaires Savoisiennes est :

«La promotion et la défense de la Savoie sur la totalité du territoire délimité par les bornes frontières présentant la croix de Savoie et l'emblème de la Suisse, l'Italie et la France de l'autre côté par toutes ses formes, visuelle auditive, papier, télévisuelle, radiophonique, internet ? sur le sol de la Savoie et à l'international;

La délivrance de documents permettant aux savoisiens de faire reconnaître leur peuple (cartes d'identité, permis de conduire, passeports, extraits d'acte de mariage, de décès, de naissance..);

La représentation des savoisiens auprès des instances internationales : LHCR, UNPO, ONU, ambassades et/ou toute autre entité reconnue internationalement;

La récolte de dons. »

Cet objet déclaré et réellement exercé, porte en premier lieu sur la revendication d'un peuple savoisien, issu d'un territoire délimité, délivrant ses propres documents d'identité et d'état civil et prétendant devoir être représenté au plan international,

Cet objet ne vise pas à renverser la République et donc à porter atteinte à la forme républicaine du Gouvernement, puisqu'il tend à la reconnaissance du peuple savoisien et non d'un Etat savoisien.

Pour autant cet objet remet en cause la notion de « peuple français » dont la valeur constitutionnelle a été reconnue par le conseil constitutionnel par décision du 9 mai 1991 qui a précisé que la constitution ne connait que le peuple français, composé de tous les citoyens français sans distinction d'origine, de race ou de religion, et il est donc illicite.

En outre, l'objet déclaré par cette association et effectivement exercé par cette dernière, consistant à délivrer des pièces d'état civil est également illicite comme étant contraire à certaines dispositions législatives et réglementaires tels que la délivrance des cartes d'identité et de permis de conduire réservée aux préfets et sous-préfets, ou la délivrance des actes de l'état civil réservée aux officiers de l'état-civil.
Il sera ajouté que contrairement à ce que soutient l'appelante l'article 3 du la loi du 19 juillet 1901 n'implique pas que l'ensemble des motifs visés par ce dernier soient cumulatifs.

Le jugement qui a ordonné la dissolution de l'association Direction aux Affaires Savoisiennes, sera confirmé.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne l'association Direction aux Affaires Savoisiennes aux dépens d'appel.

Ainsi prononcé publiquement le 15 février 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Michel FICAGNA, Président et Sylvie LAVAL, Greffier.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de chambéry
Formation : 10
Numéro d'arrêt : 20/000241
Date de la décision : 15/02/2022
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Bonneville, 03 juin 2019


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.chambery;arret;2022-02-15;20.000241 ?
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