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04/09/2024 | FRANCE | N°24/02157

France | France, Cour d'appel de Caen, Recours soins psychiatriq, 04 septembre 2024, 24/02157


C O U R D ' A P P E L D E C A E N







JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

CONTENTIEUX DES PERSONNES HOSPITALISÉES SANS LEUR CONSENTEMENT





N° RG 24/02157 - N° Portalis DBVC-V-B7I-HPQY

N° MINUTE :25/2024



AUDIENCE PUBLIQUE DU 04 Septembre 2024









O R D O N N A N C E







CONTRÔLE DE PLEIN DROIT DE L'HOSPITALISATION















Appel de l'ordonnance rendue le 28 Août 2024 par le juge des libertés et de

la détention du tribunal judiciaire d'Alençon





APPELANT :



Madame [Z] [L]

Née le 21/7/1983 à [Localité 3] (61)

Comparant

Assisté par Maître Dorian SAINT-LEGER , avocat du barreau de CAEN commis d'office.





IN...

C O U R D ' A P P E L D E C A E N

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

CONTENTIEUX DES PERSONNES HOSPITALISÉES SANS LEUR CONSENTEMENT

N° RG 24/02157 - N° Portalis DBVC-V-B7I-HPQY

N° MINUTE :25/2024

AUDIENCE PUBLIQUE DU 04 Septembre 2024

O R D O N N A N C E

CONTRÔLE DE PLEIN DROIT DE L'HOSPITALISATION

Appel de l'ordonnance rendue le 28 Août 2024 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire d'Alençon

APPELANT :

Madame [Z] [L]

Née le 21/7/1983 à [Localité 3] (61)

Comparant

Assisté par Maître Dorian SAINT-LEGER , avocat du barreau de CAEN commis d'office.

INTIME :

Le directeur du centre hospitalier CPO d'[Localité 1] (61)

Non comparant

LE MINISTÈRE PUBLIC :

En l'absence du ministère public, auquel l'affaire a été régulièrement communiquée,

Devant Nous, Etienne LESAUX, président de chambre, délégué par ordonnance du premier président, assisté de Sophie EHRHOLD, greffière

A l'audience publique du 4 Septembre 2024, ont été entendus : Madame [Z] [L], son avocat, ;

Les parties comparantes ayant été avisées à l'issue des débats que l'ordonnance serait prononcée le même jour et leur serait immédiatement notifiée ;

DÉBATS à l'audience publique du 4 Septembre 2024;

Les réquisitions de Monsieur le procureur général ont été lues par la présidente en son rapport.

ORDONNANCE prononcée publiquement le 04 Septembre 2024 ,signée par Etienne LESAUX et
Sophie EHRHOLD;

Nous, Etienne LESAUX,

Vu l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire d'Alençon qui a maintenu l'hospitalisation complète de Madame [Z] [L], hospitalisée en cas de péril imminent, à l'établissement CPO d'Alençon (61) depuis le 24 janvier 2024;

Vu la notification de cette ordonnance le à Madame [Z] [L] ;

Vu l'appel de cette ordonnance interjeté par Madame [Z] [L] le 28 Août 2024 ;

Vu les avis adressés aux parties et au ministère public les informant de la tenue de l'audience le 04 Septembre 2024;

Vu les pièces du dossier ;

Vu l'avis écrit de Monsieur le procureur général;

DÉCISION :

Procédure

Vu les articles L. 3211-1 et suivants, R. 3211-1 et suivants du code de la santé publique,

Par décision en date du 24 janvier 2024, le directeur du CPO d'[Localité 1] (61), s'appropriant les termes du certificat médical du docteur [S] [O], a ordonné l'admission en soins psychiatriques , sous la forme d'une hospitalisation complète, de Madame [Z] [L] sur le fondement d'un péril imminent;

Par ordonnance du 28 Août 2024, le juge de la liberté et de la détention du tribunal judiciaire de Alençon a ordonné la poursuite de l'hospitalisation complète dont fait l'objet Madame [Z] [L] ; cette décision a été notifiée le jour même à Madame [Z] [L] , qui en a interjeté appel le .

Conformément aux dispositions de l'article R. 3211-19 du code de la santé publique, Madame [Z] [L] , son conseil, Maître Dorian SAINT-LEGER, le directeur CPO d'[Localité 1] (61), et le ministère public ont été avisés que l'audience se tiendrait le

Le docteur [M] [P] a établi le 2 septembre 2024 un certificat médical de situation.

Sur la recevabilité de l'appel

L'appel formé par Madame [Z] [L] est recevable pour avoir été interjeté dans le délai et selon les modalités prévues par les articles R 3211-18 et R 3211-19 du code de la santé publique.

Sur la régularité de la procédure

A l'audience de ce jour, l'avocat de Madame [Z] [L] soulève une irrégularité de procédure.

Il soutient que la décision de maintien en soins psychiatriques en date du 27 août 2024 ne comporte pas la signature de sa cliente et ne lui a donc pas été régulièrement notifiée.

Il ne pourra qu'être relevé que cette irrégularité alléguée est antérieure à la décision du juge des libertés et de la détention du 28 août 2024, objet du présent appel. Cette irrégularité n'a pas été soulevée à l'occasion de l'audience du 28 août. La décision rendue par le juge des libertés et de la détention à cette date a, ainsi, validé la procédure antérieure, aucune irrégularité, antérieure à cette audience, ne peut donc être valablement soulevée (Cass. Civ 1ère, 19 octobre 2016, n°16-18.849)

La procédure est donc régulière.

Sur le fond

Aux termes du I de l'article L. 3212-1 du code de la santé publique, une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l'objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d'un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 du même code que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies : 1° Ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ; 2° Son état mental impose des soins immédiats assortis soit d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d'une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2° de l'article L. 3211-2-1.

Aux termes de l'article L3212-1 II 2° du code de la santé publique, le directeur de l'établissement hospitalier peut prononcer l'admission en soins psychiatriques d'une personne malade lorsqu'il s'avère impossible d'obtenir une demande d'un tiers et qu'il existe, à la date d'admission, un péril imminent pour la santé de la personne dûment constaté par un certificat médical d'un médecin n'exerçant pas dans l'établissement d'accueil.

Par ordonnance du 28 août 2024, la juge des libertés et de la détention du Tribunal judiciaire d'ALENCON a rejeté la demande de mainlevée de la mesure d'hospitalisation de Mme [Z] [L].

Elle retient notamment qu'il résulte de l'expertise réalisée le 21 août 2024 par le docteur [F] que Madame [Z] [L] souffrirait d'un trouble de la personnalité borderline (ou état limite). L'expert écrit que l'état psychique de Madame [Z] [L] est loin d'être satisfaisant et équilibré, qu'elle reste dans le déni total de ses troubles et surtout de ses antécédents suicidaires où elle a réellement mis sa vie en danger.

Dès lors, ses troubles mentaux rendent impossible son consentement et le risque suicidaire ne permet pas, actuellement, de proposer une sortie dans le cadre d'un programme de soins ambulatoires.

Il convient de rappeler que le consentement à prendre le traitement n'est pas nécessairement le consentement aux soins, car le premier peut être de circonstance pour une patiente qui sait qu'elle ne peut pas échapper à la prise d'un traitement au sein d'un établissement, mais qu'une fois sortie, elle pourrait ne plus prendre son traitement, estimant ne pas avoir besoin de soins car, en l'espèce Madame [Z] [L] ne se reconnaît pas atteinte d'un trouble mental mais pense avoir une attitude normale en raison de la séparation avec ses enfants.

En outre, l'expert a noté une grande instabilité émotionnelle touchant les relations inter personnelles perturbées avec une incapacité à accepter la solitude et un risque suicidaire encore présent. Dès lors, son état mental impose des soins immédiats assortis d'une surveillance médicale constante.

La docteure [M] [P] a établi, le 2 septembre 2024, un certificat médical de situation en ces termes :

'Patiente hospitalisée suite à une nouvelle décompensation de son trouble psychiatrique avec un passage à l'acte suicidaire grave ayant nécessité un séjour en réanimation. La patiente est suivie depuis 5 ans pour une pathologie mentale chronique avec plusieurs tentatives de suicide. Le tableau clinique est fait par des troubles au niveau du contenu et du cours de la pensée.

En effet, malgré une apparence calme de la patiente elle a des difficultés à avoir un raisonnement logique. La pensée est pauvre très peu élaborée, ce qui rend la patiente incapable et inaccessible au raisonnement logique (fait une demande sans cesse d'aller en clinique à [Localité 2], mais pour elle l'objectif est le rapprochement de ses enfants et non pas les soins, malgré les explications qu'une clinique reste un lieu de soins et non pas un lieu de vie, la patiente persiste sur sa demande. Elle harcèle par des appels téléphoniques le médecin de garde, les pompiers, l'hôpital général pour avancer un rendez-vous pourtant elle a eu toutes les explications par le médecin généraliste et le psychiatre...). Elle reste incurique (mauvaise hygiène). Elle est dans le déni total des troubles et n'adhère pas aux soins, négocie le traitement médicamenteux et refuse catégoriquement les activités thérapeutiques qui ont pour objectif de travailler sur ses capacités cognitives, sur son comportement au quotidien ainsi que sur l'adhésion aux soins. Elle nie jusque-là avoir pris une quantité importante de médicaments dans un but suicidaire, malgré qu'elle a été admise aux urgences dans un état comateux, elle reste inaccessible aux explications. Les passages à l'acte suicidaires sont en rapport avec des moments d'angoisses majeures, qui restent inopinés et imprévisibles. Ces angoisses, associées aux troubles du jugement, la banalisation et la rationalisation, rendent le risque de passage à l'acte élevé.

Ainsi, un cadre structurant est nécessaire pour travailler l'adhésion aux soins et la conscience de la maladie.

L'hospitalisation sous contrainte à temps complet reste justifiée.''

A l'audience de ce jour, Mme [L] exprime aller très bien maintenant, elle se plaint de la violence au CPO et réitère son souhait de rejoindre ses enfants à [Localité 2].

Il résulte donc clairement de ces éléments que la situation précédemment relevée perdure, le médecin souligne le déni des troubles ayant conduit à son hospitalisation, une banalisation de son état et une faible implication aux soins. Ainsi se trouvent caractérisées l'absence de consentement de la patiente aux soins entrepris et la nécessité de ceux-ci, son état l'ayant conduit à un passage à l'acte engendrant un risque avéré pour sa santé.

Dans son ordonnance, la juge des libertés et de la détention rappelle enfin justement que, lorsqu'il est saisi d'une demande de mainlevée d'une mesure de soins psychiatriques sans consentement, le juge doit examiner le bien-fondé de cette mesure au regard des certificats et avis médicaux produits, sans pouvoir porter une appréciation d'ordre médical sur le traitement mis en 'uvre ni déterminer s'il est le plus approprié à l'état de santé du patient (Cass.civ 1ère, 15 novembre 2023, n°23-14.928).

Par suite, la mesure d'hospitalisation complète régulièrement ordonnée apparaît nécessaire et proportionnée à la situation de Mme [Z] [L] et l'ordonnance en cause sera confirmée.

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement par ordonnance,

Déclarons l'appel de Madame [Z] [L] recevable ;

Confirmons l'ordonnance entreprise ;

Disons que la présente ordonnance sera notifiée à toutes les parties.

Disons que la présente décision sera communiquée au ministère public ;

Laissons les dépens à la charge de l'Etat.

Sophie EHRHOLD Etienne LESAUX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Caen
Formation : Recours soins psychiatriq
Numéro d'arrêt : 24/02157
Date de la décision : 04/09/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 10/09/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-09-04;24.02157 ?
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