AFFAIRE : N° RG 23/00321
N° Portalis DBVC-V-B7H-HEX7
Code Aff. :
ARRET N°
C.P
ORIGINE : Décision du Pôle social du Tribunal Judiciaire de CAEN en date du 06 Janvier 2023 - RG n° 21/00403
COUR D'APPEL DE CAEN
2ème chambre sociale
ARRET DU 27 JUIN 2024
APPELANTE :
URSSAF DE BRETAGNE
[Adresse 4]
[Localité 3]
Représentée par Mme [K], mandatée
INTIME :
Monsieur [F] [X]
[Adresse 1]
[Localité 2]
Dispensé de comparaître en vertu des articles 946 et 446-1 du code de procédure civile
DEBATS : A l'audience publique du 06 mai 2024, tenue par M. GANCE, Conseiller, Magistrat chargé d'instruire l'affaire lequel a, les parties ne s'y étant opposées, siégé seul, pour entendre les plaidoiries et en rendre compte à la Cour dans son délibéré
GREFFIER : Mme GOULARD
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Mme CHAUX, Présidente de Chambre,
M. LE BOURVELLEC, Conseiller,
M. GANCE, Conseiller,
ARRET prononcé publiquement le 27 juin 2024 à 14h00 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Mme CHAUX, présidente, et Mme GOULARD, greffier
La cour statue sur l'appel régulièrement interjeté par l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales de Bretagne (l'Urssaf) d'un jugement rendu le 6 janvier 2023 par le tribunal judiciaire de Caen dans un litige l'opposant à M. [F] [X].
FAITS ET PROCEDURE
M. [F] [X] a été affilié auprès du régime social des indépendants de Bretagne aux droits duquel vient l'Urssaf de Bretagne, en qualité de travailleur indépendant au titre d'une activité de commerçant du 1er janvier 2004 au 3 juillet 2012.
Courant 2013, le régime social des indépendants de Bretagne a adressé à M. [X] quatre mises en demeure :
- mise en demeure du 9 août 2013 portant sur les cotisations des 1er, 2ème, 3ème et 4ème trimestres 2011 à hauteur de 11 478 euros outre les majorations de retard de 619 euros, soit une somme globale de 12 097 euros
- mise en demeure du 9 août 2013 portant sur les cotisations des 1er, 2ème, 3ème et 4ème trimestres 2012 à hauteur de 12 749 euros outre les majorations de retard pour 686 euros, soit une somme globale de 13 435 euros
- mise en demeure du 11 septembre 2013 portant sur une régularisation au titre de l'année 2011 au titre des cotisations et majorations de retard à hauteur de 6875 euros outre les majorations de retard de 371 euros, soit une somme globale de 7246 euros
- mise en demeure du 10 octobre 2013 portant sur les cotisations et majorations de retard du quatrième trimestre 2012 à hauteur de 456 euros outre les majorations de retard pour 30 euros, soit une somme globale de 486 euros.
Le 12 août 2015, le directeur du régime social des indépendants de Bretagne a émis une contrainte portant sur ces différentes sommes, et ce à hauteur d'un montant total de 23 404 euros compte tenu d'une déduction de 7246 euros au titre de l'annulation de la régularisation 2011 du même montant.
Cette contrainte a été signifiée par acte d'huissier de justice le 9 septembre 2015.
Suivant requête du 22 septembre 2015, M. [X] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Saint-Brieuc afin de former opposition à cette contrainte.
Par ordonnance du 29 avril 2022, ce tribunal, devenu tribunal judiciaire, s'est déclaré incompétent au profit du tribunal judiciaire de Caen qui a été saisi du renvoi pour incompétence par un soit-transmis du 27 août 2022.
Par jugement du 6 janvier 2023, le tribunal judiciaire de Caen a :
- annulé les mises en demeure des 9 août 2013, 11 septembre 2013, 10 octobre 2013 et par voie de conséquence la contrainte du 12 août 2015 pour la somme de 23 404 euros
- débouté l'Urssaf de toutes ses demandes
- rappelé que les frais afférents à la délivrance de la contrainte annulée resteront à la charge de l'Urssaf, en application de l'article R. 133-6 du code de la sécurité sociale
- rappelé que le présent jugement est exécutoire à titre provisoire
- condamné l'Urssaf aux dépens.
Selon déclaration du 31 janvier 2023, l'Urssaf a formé appel du jugement.
L'Urssaf et M. [X] ont été convoqués par courriers recommandés avec accusés de réception signés le 19 octobre 2023 à l'audience du 12 février 2024 à 14 heures.
Selon courrier reçu au greffe le 12 février 2024, M. [X] a indiqué qu'il ne pourrait se présenter à l'audience pour causes de santé.
L'affaire a été renvoyée à l'audience du 6 mai 2024.
Aux termes de ses conclusions reçues au greffe le 3 avril 2023 et soutenues oralement à l'audience, l'Urssaf demande à la cour de :
- infirmer le jugement du 6 janvier 2023
- valider la contrainte du 12 août 2015 pour son entier montant de cotisations et majorations de retard afférentes aux 1er, 2ème, 3ème et 4ème trimestres 2011, à la période de régularisation 2011, aux 1er, 2ème, 3ème et 4ème trimestres 2012 et la régularisation 2012
- condamner M. [X] à payer à l'Urssaf la somme de 23 404 euros dont 22 069 euros de cotisations et 1335 euros de majorations de retard sous réserve des majorations de retard complémentaires restant à courir jusqu'au complet paiement
- condamner M. [X] à payer à l'Urssaf les frais de signification de la contrainte à hauteur de 72,56 euros.
Selon courrier reçu le 29 avril 2024, M. [X] a sollicité une dispense de comparution à l'audience du 6 mai 2024 en raison de problèmes de santé dont il a justifié, demande à laquelle il a été fait droit.
Par mail du 6 mai 2024, M. [X] a précisé qu'il demandait la confirmation du jugement et qu'en cas d'infirmation, il demandait une certaine bienveillance en raison de sa situation financière et médicale.
Pour l'exposé complet des prétentions et des moyens des parties, il est expressément renvoyé à leurs écritures.
MOTIFS
- Sur l'opposition à contrainte
L'article R. 133-3 du code de la sécurité sociale dans sa version applicable au litige dispose que: 'Si la mise en demeure ou l'avertissement reste sans effet au terme du délai d'un mois à compter de sa notification, le directeur de l'organisme créancier peut décerner la contrainte mentionnée à l'article L. 244-9 ou celle mentionnée à l'article L. 161-1-5. La contrainte est signifiée au débiteur par acte d'huissier de justice ou par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.
(..)
Le débiteur peut former opposition par inscription au secrétariat du tribunal compétent dans le ressort duquel il est domicilié ou par lettre recommandée avec demande d'avis de réception adressée au secrétariat dudit tribunal dans les quinze jours à compter de la signification.'
Il est constant qu'il incombe à l'opposant à contrainte de rapporter la preuve du caractère infondé du redressement de cotisations.
De même, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation conformément à l'article 1315 du code civil dans sa version applicable au litige.
En l'espèce, M. [F] [X] a été affilié en qualité de travailleur indépendant au titre d'une activité de commerçant du 1er janvier 2004 au 3 juillet 2012.
Courant 2013, le régime social des indépendants de Bretagne a adressé à M. [X] quatre mises en demeure :
- mise en demeure du 9 août 2013 portant sur les cotisations des 1er, 2ème, 3ème et 4ème trimestres 2011 à hauteur de 11 478 euros outre les majorations de retard de 619 euros, soit une somme globale de 12 097 euros
- mise en demeure du 9 août 2013 portant sur les cotisations des 1er, 2ème, 3ème et 4ème trimestres 2012 à hauteur de 12 749 euros outre les majorations de retard pour 686 euros, soit une somme globale de 13 435 euros
- mise en demeure du 11 septembre 2013 portant sur une régularisation au titre de l'année 2011 au titre des cotisations et majorations de retard à hauteur de 6875 euros outre les majorations de retard de 371 euros, soit une somme globale de 7246 euros
- mise en demeure du 10 octobre 2013 portant sur les cotisations et majorations de retard du quatrième trimestre 2012 à hauteur de 456 euros outre les majorations de retard pour 30 euros, soit une somme globale de 486 euros.
Le 12 août 2015, le directeur du régime social des indépendants de Bretagne a émis une contrainte portant sur ces différentes sommes, et ce à hauteur d'un montant total de 23 404 euros compte tenu d'une déduction de 7246 euros au titre de l'annulation de la régularisation 2011 du même montant.
Cette contrainte a été signifiée par acte d'huissier de justice le 9 septembre 2015.
M. [X] demande la confirmation du jugement qui a annulé la contrainte, de telle sorte qu'il s'approprie les motifs du jugement.
Le tribunal a annulé les mises en demeure aux motifs que :
- M. [X] avait procédé à un règlement de 13 230,05 euros le 8 mars 2013 qui ne figurait pas sur les mises en demeure
- la déduction de 7246 euros mentionnée sur la contrainte du 12 août 2015 a une origine inconnue et son montant ne correspond pas au versement susvisé
- l'Urssaf ne justifiant pas de sa créance, les mises en demeure et la contrainte doivent être annulées.
Tout d'abord, il convient de rappeler que M. [X] a été affilié en qualité de travailleur indépendant de 2004 à 2012 de telle sorte qu'il s'est trouvé redevable de cotisations sur cette période.
Le paiement du 8 mars 2013 de 13 320, 05 euros ne peut donc être considéré comme s'étant nécessairement imputé sur les cotisations et régularisations des années 2011 et 2012 visées dans les mises en demeure et la contrainte.
Or, M. [X] à qui incombe la preuve du paiement de la dette litigieuse, c'est à dire les sommes visées dans les mises en demeure et la contrainte, ne fournit aucune explication ou pièce susceptible de démontrer que son paiement s'est imputé sur ces sommes.
Au contraire, l'Urssaf fournit un décompte détaillé des versements effectués par M. [X] depuis le 24 janvier 2008 jusqu'au 1er juillet 2016, dont il résulte que le paiement du 8 mars 2013 a été imputé sur d'autres cotisations que celles visées dans les mises en demeure et la contrainte, et en particulier sur les cotisations du 2ème trimestre et du 4ème trimestre 2010.
Par ailleurs, la situation financière de M. [X] et son état de santé sont sans emport sur le montant de la créance exigible.
Enfin, il sera rappelé que la juridiction sociale n'a pas le pouvoir d'accorder des délais de paiement.
Compte tenu de ces observations dont il résulte que M. [X] ne rapporte pas la preuve du caractère infondé des sommes visées dans les mises en demeure et la contrainte, le jugement sera infirmé en ce qu'il a annulé les mises en demeure et la contrainte.
Statuant à nouveau, il convient de :
- valider les mises en demeure des 9 août 2013, 11 septembre 2013 et 10 octobre 2013
- valider la contrainte du 12 août 2015 pour son entier montant de cotisations et majorations de retard afférentes aux 1er, 2ème, 3ème et 4ème trimestres 2011, à la période de régularisation 2011, aux 1er, 2ème, 3ème et 4ème trimestres 2012 et à la régularisation 2012
- condamner M. [X] à payer à l'Urssaf la somme de 23 404 euros dont 22 069 euros de cotisations et 1335 euros de majorations de retard sous réserve des majorations de retard complémentaires restant à courir jusqu'au complet paiement outre les frais de signification de la contrainte à hauteur de 72, 56 euros.
- Sur les dépens
Le jugement étant infirmé sur le principal, il sera aussi infirmé en ses dispositions relatives aux dépens.
Succombant, M. [X] sera condamné aux dépens de première instance et d'appel.
PAR CES MOTIFS,
La cour,
Infirme le jugement déféré;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Valide les mises en demeure des 9 août 2013, 11 septembre 2013 et 10 octobre 2013 émises par le régime social des indépendants de Bretagne à l'encontre de M. [F] [X] ;
Valide la contrainte du 12 août 2015 émise par le régime social des indépendants de Bretagne à l'encontre de M. [F] [X], pour son entier montant de 23 404 euros au titre des cotisations et majorations de retard afférentes aux 1er, 2ème, 3ème et 4ème trimestres 2011, à la période de régularisation 2011, aux 1er, 2ème, 3ème et 4ème trimestres 2012 et à la régularisation 2012 ;
Condamne M. [F] [X] à payer à l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales de Bretagne la somme de 23 404 euros dont 22 069 euros de cotisations et 1335 euros de majorations de retard sous réserve des majorations de retard complémentaires restant à courir jusqu'au complet paiement, outre les frais de signification de la contrainte à hauteur de 72, 56 euros ;
Condamne M. [F] [X] aux dépens de première instance et d'appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
E. GOULARD C. CHAUX