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27/06/2024 | FRANCE | N°22/03103

France | France, Cour d'appel de Caen, 2ème chambre sociale, 27 juin 2024, 22/03103


AFFAIRE : N° RG 22/03103

N° Portalis DBVC-V-B7G-HDVU

 Code Aff. :



ARRET N°



C.P





ORIGINE : Décision du Pôle social du Tribunal Judiciaire d'ALENCON en date du 08 Novembre 2022 - RG n° 22/00077









COUR D'APPEL DE CAEN

2ème chambre sociale

ARRET DU 27 JUIN 2024





APPELANTE :



Madame [D] [C]

[Adresse 1]

[Localité 3]



Comparante en personne





INTIMEE :



URSSAF DE NORMA

NDIE

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 4]



Représentée par Mme [T], mandatée







DEBATS : A l'audience publique du 06 mai 2024, tenue par M. GANCE, Conseiller, Magistrat chargé d'instruire l'affaire lequel a, les parties ne s'y é...

AFFAIRE : N° RG 22/03103

N° Portalis DBVC-V-B7G-HDVU

 Code Aff. :

ARRET N°

C.P

ORIGINE : Décision du Pôle social du Tribunal Judiciaire d'ALENCON en date du 08 Novembre 2022 - RG n° 22/00077

COUR D'APPEL DE CAEN

2ème chambre sociale

ARRET DU 27 JUIN 2024

APPELANTE :

Madame [D] [C]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Comparante en personne

INTIMEE :

URSSAF DE NORMANDIE

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Mme [T], mandatée

DEBATS : A l'audience publique du 06 mai 2024, tenue par M. GANCE, Conseiller, Magistrat chargé d'instruire l'affaire lequel a, les parties ne s'y étant opposées, siégé seul, pour entendre les plaidoiries et en rendre compte à la Cour dans son délibéré

GREFFIER : Mme GOULARD

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme CHAUX, Présidente de Chambre,

M. LE BOURVELLEC, Conseiller,

M. GANCE, Conseiller,

ARRET prononcé publiquement le 27 juin 2024 à 14h00 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Mme CHAUX, présidente, et Mme GOULARD, greffier

La cour statue sur l'appel régulièrement interjeté par Mme [D] [C] d'un jugement rendu le 8 novembre 2022 par le tribunal judiciaire d'Alençon dans un litige l'opposant à l'Urssaf Normandie.

FAITS ET PROCEDURE

Mme [C] a été inscrite en qualité de travailleur indépendant sous le régime de la micro-entreprise pour une activité de guide interprète du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2019.

Suite à un contrôle inopiné effectué le 28 mai 2019, les agents du recouvrement ont constaté que Mme [C] n'avait jamais procédé à une déclaration sociale pour son activité de guide interprète.

Les inspecteurs ont conclu au délit de travail dissimulé par dissimulation d'activité et ont dressé un procès-verbal en ce sens.

Le 13 octobre 2019, l'Urssaf de Basse-Normandie a adressé à Mme [C] une lettre d'observations portant notification d'un redressement de 60418 euros au titre des cotisations pour la période du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2019, outre 15105 euros de majoration de redressement complémentaire.

Le 10 mars 2021, l'Urssaf de Basse-Normandie a adressé à Mme [C] une mise en demeure de régler les sommes susvisées outre des majorations de retard de 3142 euros, soit un total de 78665 euros.

Par jugement du 21 novembre 2021, le tribunal correctionnel d'Alençon a déclaré Mme [C] coupable du délit de travail dissimulé sur la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2020 et l'a condamnée à payer une amende de 4 000 euros.

Le 11 mars 2022, le directeur de l'Urssaf Normandie venant aux droits de l'Urssaf de Basse-Normandie a décerné à l'encontre de Mme [C] une contrainte de 78665 euros signifiée le 27 avril 2022.

Suivant requête du 9 mai 2022, Mme [C] a saisi le tribunal judiciaire d'Alençon afin de former opposition à cette contrainte.

Par jugement du 8 novembre 2022, le tribunal judiciaire d'Alençon a :

- déclaré recevable mais mal fondée l'opposition à contrainte formée par Mme [C]

en conséquence,

- validé la mise en demeure du 10 mars 2021

- validé la contrainte du 11 mars 2022 d'un montant de 78 665 euros au titre des chefs de redressement pour la période du '1er décembre 2016' au 31 décembre 2019

- condamné Mme [C] à payer la somme de 78 665 euros à savoir 75523 euros au titre des cotisations et contributions sociales pour les mois de décembre 2016, 2017, 2018 et 2019 ainsi que 3142 euros au titre des majorations de retard décomptées

- rejeté les demandes de Mme [C]

- condamné Mme [C] aux dépens

- rappelé que la décision est exécutoire de droit.

Selon déclaration du 9 décembre 2022, Mme [C] a fait appel de ce jugement.

À l'audience, Mme [C] a soutenu oralement ses conclusions écrites, c'est à dire un courrier en date du 8 mars 2024 et aux termes duquel elle conteste le chiffrage de l'Urssaf indiquant qu'elle et son époux étaient censés être payés à hauteur de 30 000 euros/an et que différentes charges s'imputent sur le chiffre d'affaires. Elle affirme qu'elle est de bonne foi et qu'elle n'est pas en mesure de régler la dette alléguée, étant à la retraite et ne disposant que de faibles ressources.

Aux termes de ses conclusions reçues au greffe le 5 avril 2024 et soutenues oralement à l'audience, l'Urssaf Normandie venant aux droits de l'Urssaf de Basse-Normandie demande à la cour de :

- confirmer la décision en toutes ses dispositions

- rejeter la demande de Mme [C] aux fins d'obtenir un sursis à poursuite

- condamner Mme [C] aux dépens.

Pour l'exposé complet des prétentions et des moyens des parties, il est expressément renvoyé à leurs écritures.

MOTIFS

- Sur le travail dissimulé

L'article L 8221-5 du code du travail dispose 'qu'est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L.1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à la délivrance d'un bulletin de paie ou d'un document équivalent défini par voie réglementaire, ou de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.'

L'article L 1221-10 du code du travail dispose que 'l'embauche d'un salarié ne peut intervenir qu'après déclaration nominative accomplie par l'employeur auprès des organismes de protection sociale désignés à cet effet. L'employeur accomplit cette déclaration dans tous les lieux de travail où sont employés des salariés'.

En l'espèce, il est constant que Mme [C] a exercé son activité d'interprète à compter de l'année 2012, dans le cadre d'une micro-entreprise et ce jusqu'en 2019.

Elle a été immatriculée à l'Urssaf de Basse-Normandie du 1er janvier 2012 et son compte a été radié le 31 décembre 2019 pour cessation d'activité.

L'inspecteur du recouvrement fait état dans la lettre d'observations des flux financiers sur les comptes bancaires de Mme [C] de 2016 à 2019.

- 2016 : + 68 611 euros

- 2017 : + 49 663,86 euros

- 2018 : + 56 038 euros

- 2019 : + 69 440 euros.

Il est constant que Mme [C] n'a jamais procédé à aucune déclaration auprès de l'Urssaf sur cette période.

Elle prétend qu'elle est de bonne foi et n'avait pas conscience de la nécessité de procéder à des déclarations sociales.

En premier lieu on relèvera qu' elle a été définitivement condamnée par le tribunal correctionnel pour travail dissimulé sur la période de 2014 à 2020 ce qui implique que cette juridiction a retenu son intention frauduleuse.

En second lieu, le redressement de l'Urssaf a pour seul objet de recouvrer les cotisations qui auraient dû être payées de telle sorte qu'il n'est pas nécessaire d'établir l'intention frauduleuse du cotisant.

En conclusion, l'Urssaf rapporte la preuve d'une situation de travail dissimulé au sens des dispositions de l'article L 8221-5 du code du travail justifiant un rappel de cotisations et contributions pour la période du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2019.

- Sur le montant du redressement

Mme [C] conteste le chiffrage de l'Urssaf retenu dans la contrainte prétendant qu'elle exposait des frais élevés. Elle fournit différentes factures datées de 2015 à 2019.

Toutefois, conformément à l'article L. 613-7 du code de la sécurité sociale, l'assiette des cotisations dues par un auto-entrepreneur est constituée par son chiffre d'affaires sans qu'il y ait lieu d'imputer les dépenses de fonctionnement afférentes à l'activité de l'auto-entrepreneur.

C'est donc à juste titre que l'Urssaf a calculé les cotisations dues en se fondant sur les chiffres d'affaires ci-avant rappelés pour chaque année tels qu'ils ont pu être reconstitués sur le fondement des relevés de compte examinés.

En conséquence, le montant de cotisations dues s'élève à :

- 17 358 euros pour 2016

- 12 388 euros pour 2017

- 13 698 euros pour 2018

- 16 974 euros pour 2019

soit un total de : 60 418 euros.

En outre, il résulte de l'article L 243-7-7 du code de la sécurité sociale, qu'en cas de travail dissimulé au sens de l'article L. 8221-5 du code du travail, le montant du redressement est majoré de 25 %.

Dans le cas présent, la majoration du redressement s'élève donc à 60 418 euros x 25 % = 15 105 euros.

Enfin, le calcul des majorations de retard n'est pas contesté par Mme [C] et sera donc entériné.

Ces majorations de retard seront retenues à hauteur de 3142 euros.

La situation financière de la cotisante n'affecte pas le calcul du montant des cotisations.

Par ailleurs, conformément à l'article R. 243-21 du code de la sécurité sociale, les juridictions de sécurité sociale n'ont pas le pouvoir d'accorder des délais de paiement des cotisations et contributions sur le fondement de l'article 1343-5 du code civil.

La demande de sursis à poursuite sera déclarée irrecevable.

En conclusion, c'est à juste titre que le jugement a validé la mise en demeure et la contrainte à hauteur de la somme globale de 78 665 euros et condamné Mme [C] au paiement de cette somme.

En revanche, c'est par suite d'erreurs matérielles que le tribunal a indiqué que la contrainte du 11 mars 2022 d'un montant de 78 665 euros portait sur des chefs de redressement pour la période du '1er décembre 2016' au 31 décembre 2019 et condamné Mme [C] à payer la somme de 78 665 euros à savoir '75523 euros au titre des cotisations et contributions sociales pour les mois de décembre 2016, 2017, 2018 et 2019' ainsi que 3142 euros au titre des majorations de retard décomptées.

En effet, le redressement porte sur la période du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2019 et la somme de 75 523 euros ne porte pas uniquement sur les cotisations et contributions, mais sur les cotisations et contributions augmentées du montant de la majoration de 25 % pour travail dissimulé.

Le dispositif du jugement sera rectifié en ce sens que :

- les mots '1er décembre 2016' doivent être remplacés par '1er janvier 2016'

- les mots '75523 euros au titre des cotisations et contributions sociales pour les mois de décembre 2016, 2017, 2018 et 2019' doivent être remplacés par '75523 euros au titre des cotisations et contributions sociales augmentées de la majoration de 25 % pour travail dissimulé pour la période du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2019'.

Le jugement ainsi rectifié sera confirmé.

- Sur les dépens et les frais irrépétibles

Le jugement étant confirmé sur le principal, il sera aussi confirmé en ses dispositions relatives aux dépens.

Succombant, Mme [C] sera condamnée aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Rectifie dispositif du jugement déféré en ce que :

- les mots '1er décembre 2016' doivent être remplacés par '1er janvier 2016'

- les mots '75523 euros au titre des cotisations et contributions sociales pour les mois de décembre 2016, 2017, 2018 et 2019' doivent être remplacés par '75523 euros au titre des cotisations et contributions sociales augmentées de la majoration de 25 % pour travail dissimulé pour la période du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2019';

Confirme le jugement déféré ainsi rectifié ;

Y ajoutant,

Déclare irrecevable la demande de sursis à poursuites de Mme [C] ;

Condamne Mme [D] [C] aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

E. GOULARD C. CHAUX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Caen
Formation : 2ème chambre sociale
Numéro d'arrêt : 22/03103
Date de la décision : 27/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-27;22.03103 ?
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