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20/06/2024 | FRANCE | N°22/02888

France | France, Cour d'appel de Caen, 2ème chambre civile, 20 juin 2024, 22/02888


AFFAIRE :N° RG 22/02888 



ARRÊT N°



NLG





ORIGINE : DECISION en date du 12 Octobre 2022 du Tribunal de Commerce de CAEN

RG n° 2022000700





COUR D'APPEL DE CAEN

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

ARRÊT DU 20 JUIN 2024









APPELANTE :



S.A.R.L. CABLEO

N° SIRET : 824 666 804

[Adresse 1]

[Localité 2]

prise en la personne de son représentant légal



Représentée et assistée par Me David DREUX, a

vocat au barreau de CAEN









INTIMEE :



Madame [B] [X] épouse [G]

née le 19 Février 1972 à [Localité 5]

[Adresse 4]

[Localité 3]



Représentée par Me Alain LANIECE, substitué par Me TEXIER, avocats au barr...

AFFAIRE :N° RG 22/02888 

ARRÊT N°

NLG

ORIGINE : DECISION en date du 12 Octobre 2022 du Tribunal de Commerce de CAEN

RG n° 2022000700

COUR D'APPEL DE CAEN

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

ARRÊT DU 20 JUIN 2024

APPELANTE :

S.A.R.L. CABLEO

N° SIRET : 824 666 804

[Adresse 1]

[Localité 2]

prise en la personne de son représentant légal

Représentée et assistée par Me David DREUX, avocat au barreau de CAEN

INTIMEE :

Madame [B] [X] épouse [G]

née le 19 Février 1972 à [Localité 5]

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Alain LANIECE, substitué par Me TEXIER, avocats au barreau de CAEN,

Assistée de Me Thierry CHAPRON, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Madame EMILY, Président de Chambre,

Mme COURTADE, Conseillère,

M. GOUARIN, Conseiller,

DÉBATS : A l'audience publique du 18 avril 2024

GREFFIER : Mme GOULARD, greffier

ARRET prononcé publiquement le 20 juin 2024 à 14h00 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Madame EMILY, président, et Mme LE GALL, greffier

La SARL Cableo exploite une activité d' électricité générale et de plomberie sanitaire pour le logement, le tertiaire et les collectivités.

La SAS Corea, exploitant une activité de construction de maisons individuelles, a pour président la société Bold & Sabio invest, ayant eu elle-même pour cogérants M. [F] [G] et Mme [B] [G], puis comme dirigeante unique Mme [B] [G], M. [F] [G] étant décédé en 2019.

La SAS Corea a sous-traité à la société Cableo des travaux d'électricité dans le cadre de constructions de maison individuelles, notamment sur les lots Malo 3 et 4 sur un terrain situé à [Localité 6] (14) appartenant à la société Malo immobilier représentée par Mme [D].

Entre mars 2020 et avril 2021, cinq factures émises par la société Cableo ont été partiellement réglées et un total de 8.866,34 euros est resté impayé.

Par jugement du 21 avril 2021, le tribunal de commerce de Lisieux a ouvert au bénéfice de la SAS Corea une procédure de sauvegarde.

Le 4 mai 2021, la société Cableo a déclaré une créance pour un montant de 8.866,34 euros entre les mains du mandataire judiciaire, Me [E].

Malgré la procédure collective affectant la SAS Corea, les parties ont poursuivi leur relation contractuelle, la société Cableo ayant honoré les bons de commande du 30 septembre 2020 établis par la SAS Corea intitulés 'Sari Malo 3 lieu-dit Parquet' pour 18.886,50 euros et 'Sari Malo 4 lieu-dit Parquet' pour 18.886,15 euros, ces travaux donnant lieu à 4 factures :

- n°1731 du 30 avril 2021, d'un montant de 3.180,60 euros,

- n°1732 du 30 avril 2021, d'un montant de 2.623,99 euros,

- n°1787 du 31 mai 2021 d'un montant de 11.539,95 euros,

- n° 1845 du 30 juin 2021 d'un montant de 15.382,80 euros,

soit un total de 32.727,34 euros.

Le 24 juin 2021, la SAS Corea et le maître de l'ouvrage ont signé un procès-verbal de réception des travaux sans réserve relativement à la maison n° 3 qui ont été facturés par la SAS Corea à hauteur de 168.725 euros, déduction faite de la somme de 3.420 euros au titre d'indemnités de retard.

Après plusieurs relances amiables restées sans réponse, la société Cableo a mis en demeure la SAS Corea par lettre recommandée du 12 juillet 2021 de lui régler les sommes dues.

Par jugement du 21 juillet 2021, le tribunal de commerce de Lisieux a mis fin à la procédure de sauvegarde de la SAS Corea et a converti la procédure en liquidation judiciaire avec une date de cessation des paiements au 1er juillet 2021.

La société Cableo a procédé à une nouvelle déclaration de créance au passif de la liquidation judiciaire de la SAS Corea pour un montant de 32.727 euros à titre chirographaire.

Considérant que Mme [B] [G], dirigeante de la société Corea, avait perçu l'intégralité des sommes de la part de la SARL Malo immobilier sans payer les factures qui lui étaient dues, la société Cableo a, par acte de commissaire de justice du 3 février 2022, assigné Mme [B] [G] devant le tribunal de commerce de Caen afin d'obtenir sa condamnation au paiement de la somme de 32.727,34 euros à titre de dommages et intérêts, outre la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement contradictoire du 12 octobre 2022, le tribunal de commerce de Caen a :

- débouté la société Cableo de l'ensemble de ses demandes ;

- débouté Mme [B] [G] de l'ensemble de ses demandes ;

- ordonné l'exécution provisoire ;

- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour chacune des parties ;

- condamné in solidum Mme [B] [G] et la société Cableo aux entiers dépens, y compris les frais de greffe s'élevant à la somme de 72,13 euros dont TVA 12,02 euros.

Par déclaration du 11 novembre 2022 adressée au greffe de la cour, la société Cableo a interjeté appel de ce jugement.

Par dernières conclusions déposées le 19 mars 2024, la société Cableo demande à la cour de :

- Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société Cableo de l'ensemble de ses demandes,

Statuant à nouveau,

- Condamner Mme [B] [G] à payer à la société Cableo la somme de 32.727,34 euros à titre de dommages et intérêts,

- Débouter Mme [B] [G] de ses demandes formées dans le cadre de l'appel incident,

- Condamner Mme [B] [G] à payer à la société Cableo la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamner Mme [B] [G] aux entiers dépens.

Par dernières conclusions déposées le 11 septembre 2023, Mme [B] [G] demande à la cour de :

- Recevoir la société Cableo en son appel, le dire mal fondé,

- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société Cableo de l'ensemble de ses demandes,

- L'infirmer en ce qu'il a

* débouté Mme [B] [G] de sa demande de voir la société Cableo condamnée à lui régler les sommes suivantes :

- 5.000 euros (cinq mille euros) à titre de dommages et intérêts,

- 5.000 euros (cinq mille euros) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

* dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

* condamné in solidum Mme [B] [G] et la société Cableo aux entiers dépens,

Statuant à nouveau,

- Condamner la société Cableo à régler à Mme [B] [G] les sommes suivantes :

* 5.000 euros (cinq mille euros) à titre de dommages et intérêts,

* 5.000 euros (cinq mille euros) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- Et aux entiers dépens,

Y ajoutant en cause d'appel,

- Condamner la société Cableo à régler à Mme [B] [G] la somme suivante de 5.000 euros (cinq mille euros) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamner la société Cableo en tous les dépens.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 3 avril 2024.

Il est expressément renvoyé aux écritures précitées pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.

MOTIFS

La SARL Cableo recherche la responsabilité personnelle de Mme [X] épouse [G] sur le fondement de l'article 1240 du code civil, lui reprochant d'avoir commis des fautes détachables de ses fonctions de dirigeante de la SAS COREA en lien avec le préjudice subi.

En l'absence de texte spécial, la responsabilité civile personnelle du dirigeant d'une société peut être engagée à l'égard des tiers sur le fondement délictuel s'il a commis une faute détachable de ses fonctions.

La faute détachable des fonctions est la faute commise intentionnellement et d'une particulière gravité incompatible avec l'exercice normal des fonctions de dirigeant.

Pour s'opposer aux prétentions de la société Cableo, Mme [X] épouse [G] fait valoir en premier lieu qu'elle n'était pas la dirigeante de la SAS Corea puisque la présidente de cette société était la SARL Bold & Sabio invest.

Cependant, en vertu de l'article L 227-7 du code de commerce, lorsqu'une personne morale est nommée président ou dirigeant d'une société par actions simplifiée, les dirigeants de ladite personne morale sont soumis aux mêmes conditions et obligations et encourent les mêmes responsabilités civile et pénale que s'ils étaient président ou dirigeant en leur nom propre, sans préjudice de la responsabilité solidaire de la personne morale qu'ils dirigent.

En application de ce texte, Mme [X] épouse [G], qui était la gérante de la holding SARL Bold & Sabio invest, encourt la même responsabilité que si elle était présidente de la SAS Corea en son nom propre.

Par suite, sa responsabilité personnelle peut être engagée.

L'appelante reproche à l'intimée le défaut de paiement de la somme de 32.727,34 euros due au titre des travaux d'électricité par elle exécutés en sa qualité de sous-traitante de la SAS Corea, ce malgré les règlements effectués par le maître de l'ouvrage quelques jours avant la déclaration d'état de cessation des paiements, notamment le règlement d'une somme de 172.145 euros le 24 juin 2021 que Mme [X] épouse [G] a préféré conserver et dilapider.

Cette dernière réplique que la liquidation judiciaire a été ouverte avec une trésorerie approximativement de 70.000 euros , qu'elle était en état de cessation des paiements et ne pouvait donc régler aucun de ses fournisseurs.

Comme relevé par le tribunal, le caractère incomplet des relevés bancaires de la société Corea versés aux débats ne permet pas de déterminer l'existence de flux financiers anormaux et frauduleux imputables à la dirigeante, étant observé qu'aucune procédure n'a été diligentée à l'initiative du mandataire liquidateur ou du parquet contre celle-ci pour sanctionner d'éventuelles fautes de gestion ou prélèvements irréguliers de sa part.

Le motif avancé par le conseil de Mme [X] épouse [G] pour ne pas déférer à la sommation de communiquer l'intégralité des relevés de compte de la SAS Corea, à savoir le défaut d'accès aux archives du fait de la liquidation judiciaire de ladite société, n'apparaît pas illégitime.

Ainsi, à défaut pour la SARL Cableo de rapporter la preuve lui incombant des faits allégués, c'est à juste titre que le tribunal n'a pas retenu à cet égard une faute détachable des fonctions.

La SARL Cableo reproche encore à la dirigeante de ne pas avoir conclu le contrat de sous-traitance par écrit en violation de l'article L 321-13 du code de la construction et de l'habitation, de n'avoir justifié d'aucune garantie de paiement pour sa sous-traitante et de ne pas avoir sollicité auprès du maître de l'ouvrage son agrément la privant ainsi de toute action directe en paiement contre lui, ce dans le seul but de conserver et dilapider les fonds encaissés.

Cependant, si les manquements de l'intimée aux règles protectrices du sous-traitant sont établis, rien ne prouve qu'ils ont été commis avec la conscience des conséquences dommageables pour la SARL Cableo et encore moins dans le but délibéré d'échapper à l'obligation de paiement à son égard.

Le simple fait que ces violations du code de la construction et de l'habitation sont intervenues pendant la procédure de sauvegarde ne suffit pas à caractériser, en l'absence d'autre élément, une faute d'une particulière gravité incompatible avec l'exercice normal des fonctions de dirigeante.

En conséquence, en l'absence d'une faute de Mme [X] épouse [G] détachable de ses fonctions, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a écarté sa responsabilité personnelle et débouté la SARL Cableo de sa demande indemnitaire.

La procédure engagée, quoique mal fondée, ne procède pas d'une intention de nuire ou d'un quelconque comportement fautif de la part de la SARL Cableo, de nature à faire dégénérer en abus le droit d'agir en justice ou de contester une décision, et c'est à bon droit que la demande indemnitaire présentée par Mme [X] épouse [G] a été rejetée.

La SARL Cableo succombant, est condamnée aux dépens de première instance et d'appel, à payer à Mme [B] [X] épouse [G] la somme de 4.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et est déboutée de sa demande formée à ce titre.

Les dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles sont infirmées.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement entrepris sauf en ce qui concerne les dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens ;

Statuant à nouveau du chef des dispositions infirmées et y ajoutant,

CONDAMNE la SARL Cableo à payer à Mme [B] [X] épouse [G] la somme de 4.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

DEBOUTE la SARL Cableo de sa demande formée à ce titre ;

CONDAMNE la SARL Cableo aux dépens première instance et d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

N. LE GALL F. EMILY


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Caen
Formation : 2ème chambre civile
Numéro d'arrêt : 22/02888
Date de la décision : 20/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 26/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-20;22.02888 ?
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