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20/06/2024 | FRANCE | N°22/02576

France | France, Cour d'appel de Caen, 2ème chambre civile, 20 juin 2024, 22/02576


AFFAIRE : N° RG 22/02576 - 



ARRÊT N°



NLG





ORIGINE : DECISION du TJ de CAEN en date du 24 Mai 2022

RG n° 21/04474





COUR D'APPEL DE CAEN

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

ARRÊT DU 20 JUIN 2024









APPELANTS :



Monsieur [W] [F]

né le [Date naissance 4] 1943 à [Localité 7] (ALGERIE)

[Adresse 5]

[Localité 2]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 141180022022006522 du 27/10/2022 accord

ée par le bureau d'aide juridictionnelle de CAEN)



Monsieur [O] [F]

né le [Date naissance 3] 1989 à [Localité 2]

[Adresse 5]

[Localité 2]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 1411800...

AFFAIRE : N° RG 22/02576 - 

ARRÊT N°

NLG

ORIGINE : DECISION du TJ de CAEN en date du 24 Mai 2022

RG n° 21/04474

COUR D'APPEL DE CAEN

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

ARRÊT DU 20 JUIN 2024

APPELANTS :

Monsieur [W] [F]

né le [Date naissance 4] 1943 à [Localité 7] (ALGERIE)

[Adresse 5]

[Localité 2]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 141180022022006522 du 27/10/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de CAEN)

Monsieur [O] [F]

né le [Date naissance 3] 1989 à [Localité 2]

[Adresse 5]

[Localité 2]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 141180022022006523 du 10/11/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de CAEN)

Représentés et assistés par Me Marion AUDAS, avocat au barreau de CAEN

INTIMEE :

S.A. CONSUMER FINANCE

N° SIRET : 542 097 522

[Adresse 1]

[Localité 6]

prise en la personne de son représentant légal

Représentée par Me Dorian SAINT-LÉGER, avocat au barreau de CAEN,

Assistée de Me Erwan LECLERCQ, avocat au barreau de RENNES

DEBATS : A l'audience publique du 15 avril 2024, sans opposition du ou des avocats, M. GOUARIN, Conseiller, a entendu seul les plaidoiries et en a rendu compte à la cour dans son délibéré

GREFFIER : Mme FLEURY, greffier

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Madame EMILY, Président de Chambre,

Mme COURTADE, Conseillère,

M. GOUARIN, Conseiller,

ARRET prononcé publiquement le 20 juin 2024 à 14h00 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Madame EMILY, président, et Mme LE GALL, greffier

*

* *

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS

Selon offre préalable acceptée le 16 septembre 2019 comportant une clause résolutoire, la SA Consumer Finance a consenti à MM. [O] et [W] [F] (les consorts [F]) un crédit affecté au financement de l'acquisition d'un véhicule automobile Audi Q5 d'un montant de 20.990 euros, au taux d'intérêt nominal de 4,12 % l'an et au TAEG de 5,691 % l'an, remboursable en 48 échéances mensuelles.

Le véhicule a été livré le 17 septembre 2019. Un acompte d'un montant de 6.000 euros avait été versé.

Les fonds ont été débloqués le 2 octobre 2019.

Les échéances du prêt n'ont plus été payées à partir de janvier 2020.

Par lettres recommandées avec demande d'avis de réception du 21 juillet 2020, le prêteur a prononcé la déchéance du terme et mis en demeure les emprunteurs de lui payer la somme de 23.906,42 euros au titre du capital restant dû et des échéances impayées.

Suivant actes d'huissier du 22 décembre 2021, le prêteur a fait assigner les emprunteurs devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Caen aux fins, notamment, de voir condamner ceux-ci au paiement de la somme de 23.858,24 euros avec intérêts au taux de 4,12 % l'an à compter du 21 juillet 2020.

Par jugement réputé contradictoire du 24 mai 2022, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Caen a :

- déclaré la société Consumer finance recevable en son action en paiement,

- condamné solidairement les consorts [F] à payer à la société Consumer finance la somme de 20.438,26 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter de l'assignation,

- débouté la société Consumer finance de ses demandes plus amples ou contraires,

- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum les consorts [F] aux dépens.

Selon déclaration du 5 octobre 2022, les consorts [F] ont interjeté appel de cette décision.

Par dernières conclusions du 30 octobre 2022, les appelants demandent à la cour d'infirmer le jugement attaqué en ce qu'il les a condamnés solidairement à payer à la société Consumer finance la somme de 20.438,26 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter de l'assignation et in solidum aux dépens, statuant à nouveau de ces chefs, de débouter l'intimée de toutes ses demandes et de condamner celle-ci à leur verser la somme de 1.500 euros à titre d'indemnité de procédure en application de l'article 37 de la loi du 19 juillet 1991 ainsi qu'aux entiers dépens.

Par dernières conclusions du 18 janvier 2023, le prêteur demande à la cour de dire nul le jugement entrepris, 'évoquant ou réformant', d'infirmer le jugement attaqué en ce qu'il l'a déchu de son droit aux intérêts du prêt, de débouter les consorts [F] de toutes leurs demandes, de condamner en conséquence ces derniers solidairement à lui payer la somme de 23.858,24 euros avec intérêts au taux de 4,12 % l'an à compter du 21 juillet 2020 jusqu'à parfait paiement.

Subsidiairement, elle demande à la cour de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné solidairement les consorts [F] à lui payer la somme de 20.438,26 euros outre les intérêts au taux légal à compter de l'assignation.

En tout état de cause, la société Consumer finance sollicite la condamnation in solidum des consorts [F] au paiement de la somme de 2.500 euros à titre d'indemnité de procédure ainsi qu'aux entiers dépens.

Par ordonnance du 24 janvier 2023, la première présidente de cette cour a rejeté la demande d'arrêt de l'exécution provisoire du jugement entrepris formée par les appelants.

La mise en état a été clôturée le 13 mars 2024.

Pour plus ample exposé des prétentions et moyens, il est référé aux dernières écritures des parties.

MOTIFS

1. Sur la validité du jugement entrepris

L'intimée soutient que le jugement entrepris est nul en ce que le premier juge a retenu d'office que le préteur ne démontrait pas avoir remis une fiche d'information précontractuelle européenne normalisée (FIPEN) aux emprunteurs, alors qu'il n'appartient pas au juge de se substituer au débiteur même au visa de l'article 472 du code de procédure civile.

Toutefois, il résulte des articles 16 du code de procédure civile et R. 632-1 du code de la consommation que le juge peut relever d'office toutes les dispositions de ce code dans les litiges nés de son application à condition d'avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations.

Or, en l'espèce, il ressort des énonciations non discutées du jugement entrepris que le premier juge a soulevé d'office à l'audience de plaidoirie le moyen tiré du défaut de remise aux emprunteurs de la FIPEN prévue aux articles L. 312-2 et L. 341-1 du code de la consommation et a recueilli les observations de l'établissement de crédit lors de cette même audience, lequel a affirmé ne pas encourir de déchéance de son droit aux intérêts contractuels.

La demande d'annulation du jugement dont appel sera donc rejetée.

2. Sur les demandes principales

2-1 Sur la signature de l'offre préalable de prêt

Selon l'article 1373 du code civil, la partie à laquelle on l'oppose peut désavouer son écriture ou sa signature. Dans ces cas, il y a lieu à vérification d'écriture dans les conditions des articles 287 à 298 du code de procédure civile.

Les appelants sollicitent le rejet des demandes formées par la société Consumer finance au motif qu'ils ne sont pas les signataires du contrat de crédit en cause, leur identité ayant été usurpée.

Ils soutiennent que la signature de M. [O] [F] n'est pas la même en page 17 de l'offre de prêt que sur les autres pages de cette offre, que cette signature ne correspond pas à celle figurant sur sa carte nationale d'identité, que M. [W] [F] ne sait ni lire ni écrire et qu'il est incapable de former de belles lettres telles que celles figurant sur l'offre de prêt, que les bulletins de salaires communiqués au prêteur sont des faux car M. [O] [F] n'a pas été employé par la société Normatrans à compter du 3 décembre 2018 et que l'adresse mentionnée sur l'offre de prêt, la facture du garage vendeur et sur le tableau d'amortissement n'est pas la même que celle portée sur la demande de financement, qui seule est exacte.

Les appelants exposent avoir déposé plainte pour usurpation d'identité et ne pas avoir reçu les mises en demeure adressées à une adresse qui n'est pas la leur.

L'intimée réplique que les consorts [F] n'ont déposé plainte pour usurpation d'identité que postérieurement à la mise en 'uvre de mesures d'exécution forcée du jugement attaqué rendu en leur absence malgré leur assignation régulière, que la signature apposée sur une pièce d'identité se fait dans un cadre plastifié qui réduit la liberté de mouvement de la main et qui peut entraîner une modification de la signature habituelle, qu'il n'existe aucune incompatibilité flagrante entre les signatures, que M. [W] [F] reconnaît que sa signature varie, qu'il n'est produit aucun document contemporain de la conclusion du contrat litigieux, que les pièces d'identité des emprunteurs ont été fournies au prêteur alors que les appelants admettent être restés en possession de ces documents, que le numéro de sécurité sociale de M. [O] [J] fourni dans l'offre de crédit correspond à celui figurant sur les bulletins de paie fournis, que l'adresse mail de celui-ci correspond à celle indiquée lors du dépôt de sa plainte, qu'un acompte de 6.000 euros avait été versé, que le compte dont le RIB a été fourni lors de la souscription du prêt est celui du compte sur lequel la première et seule échéance honorée a été prélevée et que les bulletins de salaire produits par M. [O] [F] ne couvrent pas la période d'avril à juin 2019 pour laquelle des bulletins de paie émis par la société Normatrans ont été remis au prêteur avec la demande de financement.

Sans qu'il soit nécessaire d'ordonner la production d'autres pièces de comparaison, la vérification d'écriture opérée à partir des productions permet de conclure à la sincérité du contrat de prêt.

En effet, si les signatures apposées sur l'adhésion à l'assurance facultative ne correspondent pas à celles figurant sur l'offre de prêt acceptée, ces dernières correspondent à celles apposées sur la fiche de dialogue et la demande de financement et sont compatibles avec celles figurant sur la carte nationale d'identité de M. [O] [F] et sur la plainte déposée par M. [W] [F], étant tenu compte du caractère malhabile du tracé de ce dernier lié à son illettrisme et de la possible variation d'une signature entre 2012, date de délivrance de la carte nationale d'identité de M. [O] [F] et 2019, date de conclusion du prêt litigieux.

M. [O] [F] échoue à établir que les fiches de paie par la société Normatrans sur la période d'avril à juin 2019 produites par le prêteur sont des faux, dès lors que les bulletins de salaire communiqués par cet appelant émanent de la société d'intérim Crit et ne portent pas sur la même période.

En outre, il est relevé que les appelants ne discutent pas l'authenticité du relevé d'identité bancaire à son nom auprès de la société Ma French Bank (pièce n°22 prêteur) fourni par M. [O] [F] lors de la souscription du crédit affecté en cause et sur le compte duquel a été prélevée la première et seule échéance payée.

La divergence des adresses mentionnées sur la facture d'achat du véhicule financé, l'offre de prêt et le tableau d'amortissement d'une part et la demande de financement d'autre part ne suffit pas à mettre en cause la sincérité de l'acte litigieux, dès lors que la demande de financement portant la signature de l'emprunteur mentionne son adresse, correspondant à celle figurant sur sa pièce d'identité et ses bulletins de salaire communiqués au prêteur.

Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a condamné solidairement MM. [F] au paiement des sommes dues en vertu du contrat de crédit affecté conclu le 16 septembre 2019.

2-2 Sur la déchéance du droit aux intérêts

Suivant l'article L. 341-1 du code de la consommation, le prêteur qui accorde un crédit sans communiquer à l'emprunteur les informations précontractuelles dans les conditions fixées par l'article L. 312-12 ou, pour les opérations de découvert en compte, à l'article L. 312-85 est déchu du droit aux intérêts.

Cette information est assurée par la remise d'une fiche d'information précontractuelle européenne normalisée, conformément aux articles R. 312-2 et R. 312-5.

Contrairement à ce que soutient le prêteur, il résulte des dispositions précitées que la signature par l'emprunteur de l'offre préalable de crédit comportant une clause selon laquelle il reconnaît que le prêteur, qui doit rapporter la preuve de ce qu'il a satisfait à ses obligations, lui a remis la fiche précontractuelle d'information normalisée européenne constitue seulement un indice qu'il incombe au prêteur de corroborer par un ou plusieurs éléments complémentaires, lesquels ne peuvent être constitués par des documents émanant du seul établissement de crédit (Civ. 1ère, 7 juin 2023, n°22-15.552).

Il s'ensuit en l'espèce que la remise de la fiche d'information précontractuelle européenne normalisée par la société Consumer finance aux consorts [F] ne saurait être établie par la seule signature par ceux-ci d'une clause par laquelle ils reconnaissent avoir reçu et pris connaissance de cette fiche et par la production d'une liasse vierge comportant une telle fiche, ce dernier document émanant du seul établissement de crédit.

Le jugement entrepris sera donc également confirmé sur ce point.

3. Sur les demandes accessoires

Les dispositions du jugement entrepris relatives aux frais irrépétibles et aux dépens de première instance, fondées sur une exacte appréciation, seront confirmées.

MM. [O] et [W] [F], succombant, seront condamnés in solidum aux dépens d'appel.

Il n'y a pas lieu de prononcer de condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

Rejette la demande d'annulation du jugement entrepris formée par la SA Consumer finance ;

Confirme le jugement entrepris ;

Y ajoutant,

Condamne in solidum MM. [O] et [W] [F] aux dépens d'appel ;

Rejette toutes les demandes formées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

N. LE GALL F. EMILY


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Caen
Formation : 2ème chambre civile
Numéro d'arrêt : 22/02576
Date de la décision : 20/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 26/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-20;22.02576 ?
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