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18/06/2024 | FRANCE | N°23/02897

France | France, Cour d'appel de Caen, 1ère chambre civile, 18 juin 2024, 23/02897


AFFAIRE : N° RG 23/02897 -

N° Portalis DBVC-V-B7H-HKPO





ARRÊT N°



JB.





ORIGINE : Décision du Juge de la mise en état de CAEN du 30 Novembre 2023

RG n° 22/03658







COUR D'APPEL DE CAEN

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 18 JUIN 2024





APPELANT :



Monsieur [O] [T]

né le [Date naissance 2] 1979

[Adresse 8]

[Localité 3]



représenté par de Me Jérémie PAJEOT, avocat au barreau de CAEN

as

sisté de Me Denis LATREMOUILLE, avocat au barreau de Paris



INTIMÉES :



Madame [J] [N] épouse [M]

née le [Date naissance 1] 1957 à [Localité 7]

[Adresse 9]

[Localité 6]



représentée et assistée de Me Lori HELLOCO, ...

AFFAIRE : N° RG 23/02897 -

N° Portalis DBVC-V-B7H-HKPO

ARRÊT N°

JB.

ORIGINE : Décision du Juge de la mise en état de CAEN du 30 Novembre 2023

RG n° 22/03658

COUR D'APPEL DE CAEN

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 18 JUIN 2024

APPELANT :

Monsieur [O] [T]

né le [Date naissance 2] 1979

[Adresse 8]

[Localité 3]

représenté par de Me Jérémie PAJEOT, avocat au barreau de CAEN

assisté de Me Denis LATREMOUILLE, avocat au barreau de Paris

INTIMÉES :

Madame [J] [N] épouse [M]

née le [Date naissance 1] 1957 à [Localité 7]

[Adresse 9]

[Localité 6]

représentée et assistée de Me Lori HELLOCO, avocat au barreau D'ARGENTAN

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE L'ORNE

[Adresse 4]

[Localité 5]

prise en la personne de son représentant légal.

non représentée, bien que régulièrement assignée

DÉBATS : A l'audience publique du 14 mars 2024, sans opposition du ou des avocats, M. GUIGUESSON, Président de chambre, a entendu seul les observations des parties sans opposition de la part des avocats et en a rendu compte à la Cour dans son délibéré

GREFFIER : Mme LEBOULANGER

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

M. GUIGUESSON, Président de chambre,

Mme VELMANS, Conseillère,

Mme DELAUBIER, Conseillère,

ARRÊT : rendu publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile le 18 Juin 2024 par prorogation du délibéré initialement fixé au 04 Juin 2024, puis 11 Juin 2024 et signé par M. GUIGUESSON, président, et Mme COLLET, greffier

* * *

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Par actes des 28 octobre et 3 novembre 2022, Mme [M] a fait assigner le Dr [T] et la CPAM de l'Orne aux fins principalement de voir condamner le Dr [T] à le déclarer responsable des dommages subis par elle à la suite de l'intervention chirurgicale pratiquée le 22 octobre 2018 pour une coxarthrose invalidante.

Par ordonnance du 30 novembre 2023 à laquelle il est renvoyé pour un exposé complet des prétentions en première instance, le juge de la mise en état près le tribunal judiciaire de Caen :

- s'est déclaré compétent pour statuer sur la demande d'expertise formée par Mme [M] ;

- a ordonné une mesure d'expertise judiciaire et désigné pour y procéder M. [U] ;

- débouté M. [T] de ses demandes ;

- condamné M. [T] à verser à Mme [M] la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné M. [T] aux dépens.

Par déclaration du 18 décembre 2023, M. [T] a formé appel de cette ordonnance.

Autorisé par une ordonnance du 21 décembre 2023, monsieur [T] par exploit du 28 décembre 2023 a fait assigner à jour fixe la Cpam de l'Orne ainsi que madame [M] devant la 1ère chambre de la cour d'appel de Caen pour l'audience du 14 mars 2024.

Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 8 mars 2024, M. [T] demande à la cour de :

- infirmer l'ordonnance rendue par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Caen le 30 novembre 2023 en toutes ses dispositions ;

- statuant à nouveau,

- dire que la demande d'expertise formulée par voie d'incident par Mme [M] doit s'analyser comme une demande de contre-expertise médicale ;

- déclarer en conséquence le juge de la mise en état incompétent pour ordonner la réalisation d'une contre-expertise médicale ;

à titre subsidiaire, et en tout état de cause ;

- débouter Mme [M] de sa demande de contre-expertise;

- renvoyer l'affaire au fond ;

- condamner Mme [M] au paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner Mme [M] aux dépens de la procédure d'incident et d'appel.

Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 11 février 2024, Mme [M] demande à la cour de :

- dire recevable mais mal fondé l'appel interjeté par le M. [T] ;

- confirmer l'ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Caen en date du 30 novembre 2023 ;

y ajoutant,

- condamner M. [T] à payer une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

- condamner le M. [T] aux dépens de l'appel.

La déclaration et les conclusions d'appel ayant été régulièrement signifiées, la CPAM de l'Orne n'a pas constitué avocat en cause d'appel.

Pour l'exposé complet des prétentions et de l'argumentaire des parties, il est expressément renvoyé à leurs dernières écritures susvisées conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

Le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Caen a estimé que l'expertise réclamée pouvait être ordonnée au motif que la mesure d'expertise précédente avait été menée dans le cadre d'une procédure amiable et que celle-ci n'avait pas eu un caractère contradictoire suffisant ;

Qu'il ne s'agissait donc pas d'une contre-expertise relevant de la compétence du juge du fond ;

Monsieur [T] s'oppose à cette mesure d'expertise en soutenant qu'il entend contester la demande à laquelle il a été fait droit au motif qu'une expertise ordonnée par la Commission de conciliation et d'indemnisation en cause a été réalisée par le docteur [B] et que la demande de madame [M] s'analyse en fait comme une contre-expertise, ce qui ne relève pas de la compétence du juge de la mise en état ;

Qu'en tout état de cause, il est démontré que le principe du contradictoire a été respecté pour la réalisation des opérations menées suite à la décision de la Commission de conciliation et d'indemnisation ;

Que le rapport du docteur [B] répond ainsi en tout point aux règles procédurales encadrant la réalisation des mesures d'expertise, de sorte que la demande présentée doit s'analyser comme une en contre-expertise, ce qui relève de la seule compétence du juge du fond ;

Madame [M] répond qu'il est évident à l'aune de l'ensemble des éléments médicaux qui sont avérés que le docteur [T] a commis une faute ;

Or le docteur [B] selon elle a refusé d'admettre les évidences et les constatations médicales du docteur [I] ;

Que force est de constater que le docteur [B] n'est pas un expert judiciaire et qu'il ne présente pas les garanties d'indépendance et d'impartialité d'un expert inscrit sur la liste des experts judiciaires ayant prêté serment ;

Que de plus il est constant que durant les opérations contestées elle n'était pas assistée d'un avocat et qu'aucun pré-rapport n'a été établi et que celui du docteur [B] ne peut donc pas être considéré comme présentant les mêmes garanties qu'un rapport d'expertise judiciaire qui obéit strictement au principe du contradictoire ;

Sur ce en préalable la cour rappellera que les Commissions de conciliation et d'indemnisation ne sont pas des juridictions mais des commissions de nature administrative et que le recours aux CCI constitue une voie originale et non contentieuse en vue d'une résolution amiable et rapide des conflits pouvant opposer les professionnels et établissements de santé aux patients.

L'expertise réalisée à la demande de la CCI est une expertise amiable et tel est le cas en l'espèce s'agissant de celle réalisée par le docteur [B] qui a été désigné à cette fin ;

Il est juste de relevé que ladite expertise devant avoir lieu le 7 avril 2021, des échanges de pièces ont eu lieu entre les parties, ce qui n'est pas véritablement débattu même si la teneur du courrier du 23 février 2021 du conseil de madame [M] et celle de la correspondance du conseil du docteur [T] du 22 mars 2021 ne rapportent pas la preuve que ces échanges ont eu lieu entre les parties elles mêmes ;

La cour en tout état de cause constate que madame [M] était présente mais non assistée de son conseil lors de la réalisation des opérations d'expertise le 7 avril 2021 ;

Or si ces opérations ont eu lieu en la présence contradictoire des parties, le déroulement de celles-ci n'est pas véritablement conforme au principe du contradictoire comme celui-ci est entendu sur le plan judiciaire puisque les parties n'ont pas la possibilité de formaliser des dires, de présenter des observations en l'absence de note aux parties ou de rédaction d'un pré-rapport d'expertise ;

Le rapport du docteur [B] a la valeur d'un rapport amiable soit celui de renseignement au regard des juridictions judiciaires, et il n'empêche pas le recours à une expertise judiciaire en cas de contestation par une partie, sans qu'il puisse lui être opposé que seul le juge du fond peut apprécier la possibilité d'ordonner une nouvelle mesure d'expertise, car celle-ci n'a pas la qualité procédurale d'une demande de contre-expertise, la 1ère mesure étant de nature amiable ;

Il s'ensuit que l'ordonnance entreprise sera confirmée en ce que le juge de la mise en état s'est déclaré compétent pour examiner la demande d'expertise présentée ;

S'agissant du motif légitime pour obtenir cette mesure, monsieur [T] en conteste le principe en expliquant ce que suit :

- que dans la mesure où le juge n'est pas tenu par les conclusions expertales madame [M] est tout à fait en mesure de faire valoir ses observations dans le cadre de la procédure judiciaire au fond ;

- que l'impartialité du docteur [B] ne peut pas être remise en cause et que ce dernier a pris connaissance des documents médicaux, qu'il a procédé à l'examen clinique de la patiente ;

- que s'agissant du fragment métallique retrouvé un tel fragment de 4cm n'aurait en aucun cas pu passer inaperçu à l'imagerie, et qu'il a été constaté que la partie de tournevis apportée par la plaignante lors des opérations d'expertise ne correspondait pas à un tournevis chirurgicale ;

Monsieur [T] explique que l'utilité de la mesure d'expertise sollicitée n'est pas rapportée et qu'il convient d'infirmer l'ordonnance entreprise ;

Madame [M] répond que le docteur [B] n'a pas consulté et interrogé le docteur [I] en qualité de sachant pour établir la réalité des constatations concernant le morceau de tournevis retrouvé ;

Sur ce la cour doit constater pour la problématique particulière du corps étranger retrouvé que l'expert amiable n'a pas consulté le docteur [I] qui a pourtant délivré un certificat médical le 14 avril 2021 mentionnant ce que suit :

- Je soussigné Docteur [I] certifie avoir opéré madame [J] [M] pour un allongement du membre inférieur droit suite à une PTH et que lors de cette intervention du 6 décembre 2019 il a été découvert un corps étranger métallique de 3 à 4 cm correspondant à un morceau de tournevis ;

Or sur ce point important qui a été à l'origine de souffrances importantes, le docteur [B] précise ce que suit :

- un fragment métallique de 10 à 12 millimètres reste inclus dans les parties molles. Ce fragment se mobilise secondairement et devient visible en novembre. Il ne peut pas s'agir du fragment de tournevis présenté. L'expert n'est même pas persuadé que ce tournevis soit un matériel chirurgical.

Or sur ce point, la cour constate qu'un vrai débat contradictoire doit être engagé, car il convient de vérifier la réalité et l'origine du corps étranger retrouvé, ce qui n'a pas été réalisé dans le cadre de l'expertise amiable ;

Cette seule situation sans remettre en cause l'impartialité du docteur [B], rend légitime la demande d'expertise sollicitée et ordonnée, ce qui conduit la cour à confirmer l'ordonnance entreprise.

Compte tenu de l'état d'avancement de la procédure, la cour estime qu'il n'y a pas lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et qu'il convient d'écarter les demandes respectivement présentées de ce chef.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement par arrêt réputé contradictoire, rendu en dernier ressort et par mise à disposition au greffe.

- Confirme l'ordonnance entreprise du juge de la mise en état en date du 30 novembre 2023 ;

- Déboute monsieur [T] de toutes ses demandes ;

- Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Met les dépens d'appel à la charge de monsieur [T].

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

M. COLLET G. GUIGUESSON


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Caen
Formation : 1ère chambre civile
Numéro d'arrêt : 23/02897
Date de la décision : 18/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 24/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-18;23.02897 ?
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