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18/04/2024 | FRANCE | N°21/03339

France | France, Cour d'appel de Caen, 2ème chambre sociale, 18 avril 2024, 21/03339


AFFAIRE : N° RG 21/03339

N° Portalis DBVC-V-B7F-G4LN

 Code Aff. :



ARRET N°



C.P





ORIGINE : Décision du Pôle social du Tribunal Judiciaire de CAEN en date du 19 Novembre 2021 - RG n° 20/00069









COUR D'APPEL DE CAEN

2ème chambre sociale

ARRÊT DU 18 AVRIL 2024



APPELANTE :



Madame [U] [S] épouse [L]

[Adresse 2]

[Adresse 10]

[Localité 6]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 141180022021

009752 du 20/01/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de CAEN)



Représentée par Me Sylvie MORIN-MOUCHENOTTE, avocat au barreau de CAEN





INTIMEES :



S.A. [13]

[Adresse 4] [Localité 7...

AFFAIRE : N° RG 21/03339

N° Portalis DBVC-V-B7F-G4LN

 Code Aff. :

ARRET N°

C.P

ORIGINE : Décision du Pôle social du Tribunal Judiciaire de CAEN en date du 19 Novembre 2021 - RG n° 20/00069

COUR D'APPEL DE CAEN

2ème chambre sociale

ARRÊT DU 18 AVRIL 2024

APPELANTE :

Madame [U] [S] épouse [L]

[Adresse 2]

[Adresse 10]

[Localité 6]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 141180022021009752 du 20/01/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de CAEN)

Représentée par Me Sylvie MORIN-MOUCHENOTTE, avocat au barreau de CAEN

INTIMEES :

S.A. [13]

[Adresse 4] [Localité 7]

Représentée par Me Xavier MORICE, avocat au barreau de CAEN

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU CALVADOS

[Adresse 3] - [Localité 5]

Représentée par M. [T], mandaté

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Mme CHAUX, Présidente de chambre,

M. LE BOURVELLEC, Conseiller,

M. GANCE, Conseiller,

DEBATS : A l'audience publique du 07 mars 2024

GREFFIER : Mme GOULARD

ARRÊT prononcé publiquement le 18 avril 2024 à 14h00 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Mme CHAUX, présidente, et Mme GOULARD, greffier

La cour statue sur l'appel régulièrement interjeté par Mme [U] [S] épouse [L] d'un jugement rendu le 19 novembre 2021 par le tribunal judiciaire de Caen dans un litige l'opposant à la société [13] en présence de la caisse primaire d'assurance maladie du Calvados.

FAITS et PROCEDURE

Le 25 novembre 2016, Mme [L], salariée de la société [13] (la société) a établi une déclaration de maladie professionnelle au titre d'une 'surdité mixte bilatérale'.

Le certificat médical initial du 24 novembre 2016 fait état d'une 'audiométrie tonale et vocale (suite illisible) concordant avec une surdité mixte bilatérale' avec 'composante compatible avec une surdité professionnelle'.

Après enquête, par décision du 9 juin 2017, la caisse primaire d'assurance maladie du Calvados (la caisse) a pris en charge cette maladie du 24 novembre 2016 sous la qualification 'Hypoacousie de perception' sur le fondement du tableau n° 42 au titre d'une 'atteinte auditive provoquée par les bruits lésionnels'.

L'état de santé de Mme [L] a été déclaré consolidé par la caisse à la date du 24 novembre 2016 avec un taux d'incapacité permanente partielle de 30 %.

Le 23 mai 2019, Mme [L] a saisi la caisse afin de voir reconnaître la faute inexcusable de son employeur.

Le 29 juillet 2019, un procès-verbal de non-conciliation a été notifié aux parties.

Selon requête du 4 février 2020, Mme [L] a saisi le tribunal judiciaire de Caen afin de voir reconnaître la faute inexcusable de la société [13].

Par jugement du 19 novembre 2021, le tribunal judiciaire de Caen a :

- dit que la maladie professionnelle de Mme [L] ne résulte pas de la faute inexcusable de la société [13]

- débouté Mme [L] de l'ensemble de ses demandes

- débouté les parties du surplus de leurs demandes

- condamné Mme [U] [L] au paiement des dépens, lesquels seront recouvrés selon les règles applicables en matière d'aide juridictionnelle.

Par déclaration du 13 décembre 2021, Mme [L] a formé appel du jugement.

Suivant conclusions reçues au greffe le 25 février 2022 et soutenues oralement à l'audience, Mme [L] demande à la cour de :

- infirmer le jugement dont appel

- juger que la société [13] a commis une faute inexcusable dans le cadre de sa maladie professionnelle

- juger en conséquence, qu'elle bénéficiera de la majoration au taux maximum des indemnités fixées aux articles L. 452-1 et suivants du code de la sécurité sociale et l'indemnisation de son préjudice corporel et financier conformément à l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale

- ordonner une mesure d'expertise afin d'évaluer ses préjudices

- condamner la société [13] à lui payer une provision de 10000 euros à valoir sur l'indemnisation de son préjudice

- condamner la société aux dépens qui comprendront notamment la provision à valoir sur les frais d'expertise et à lui payer la somme de 4000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile avec application de l'article 37 de la loi sur l'aide juridictionnelle

- débouter la société [13] en ses conclusions et demandes

- déclarer le jugement commun à la caisse primaire d'assurance maladie du Calvados.

Suivant conclusions reçues au greffe le 23 mars 2023 et soutenues oralement à l'audience, la société [13] demande à la cour de :

à titre principal,

- débouter Mme [L] de son action en reconnaissance de faute inexcusable

en conséquence, dire n'y avoir lieu pour le surplus à l'expertise sollicitée

- condamner Mme [L] au règlement au profit de la société [13] d'une indemnité d'un montant de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance

à titre infiniment subsidiaire,

- débouter en toute hypothèse Mme [L] de sa demande de condamnation provisionnelle de la société [13] à hauteur d'une somme de 10 000 euros qui ne saurait être directement mise à sa charge.

Selon conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience, la caisse demande à la cour de :

à titre principal,

- confirmer le jugement

à titre subsidiaire,

si la cour devait infirmer le jugement, la caisse sollicite de la cour qu'elle :

- constate que la caisse s'en rapporte à justice s'agissant de la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur

- lui accorde le bénéfice de l'action récursoire sur le fondement de l'article L. 452-3-1 du code de la sécurité sociale à l'encontre de l'employeur au visa des articles L. 452-3 et suivants du code de la sécurité sociale pour l'ensemble des sommes qui viendraient à être avancées par la caisse si une telle faute venait à être reconnue à l'encontre de la société [13].

Pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, il est expressément renvoyé à leurs écritures conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR

I / Sur la faute inexcusable

Le manquement à l'obligation légale de sécurité et de protection de la santé à laquelle l'employeur est tenu envers le travailleur a le caractère d'une faute inexcusable lorsque l'employeur  avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver.

  

Il appartient au salarié de justifier que son employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel il était exposé et de démontrer qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver.

La conscience du danger doit être appréciée objectivement par rapport à la connaissance de ses devoirs et obligations que doit avoir un employeur dans son secteur d'activité.

Enfin, la faute inexcusable doit être la cause nécessaire de l'accident du travail ou de la maladie professionnelle.

En l'espèce, Mme [L] a été embauchée par la société [13] à compter du 22 novembre 1988 en qualité d'agent de production.

Le 25 novembre 2016, elle a établi une déclaration de maladie professionnelle au titre d'une 'surdité mixte bilatérale'.

Le certificat médical initial du 24 novembre 2016 mentionne une 'audiométrie tonale et vocale (suite illisible) concordant avec une surdité mixte bilatérale' avec une 'composante compatible avec une surdité professionnelle'.

Après enquête, par décision du 9 juin 2017, la caisse a pris en charge cette maladie du 24 novembre 2016 sous la qualification 'Hypoacousie de perception' sur le fondement du tableau n° 42 au titre d'une 'atteinte auditive provoquée par les bruits lésionnels'.

L'état de santé de Mme [L] a été déclaré consolidé par la caisse à la date du 24 novembre 2016 avec un taux d'incapacité permanente partielle de 30 %.

Mme [L] prétend que sa maladie professionnelle est due à la faute inexcusable de la société [13].

Elle expose que son employeur avait connaissance de ses difficultés d'audition liées aux bruits trop importants des ateliers dans lesquels elle travaillait, mais qu'il n'a pas pris les précautions nécessaires pour la protéger.

En particulier, après avoir rappelé que les documents uniques d'évaluation des risques mentionnent les risques liés aux bruits, Mme [L] affirme que la société ne lui a fourni que de simples bouchons d'oreille jetables et qu'elle n'a jamais mis en oeuvre les mesures indiquées dans le rapport du service de santé au travail du 21 octobre 2012.

Pour s'opposer aux demandes de Mme [L], la société [13] se prévaut de l'absence de signalement de problèmes auditifs par la salariée, des avis d'aptitude de la médecine du travail ainsi que des audiogrammes réalisés lors des visites de reprise des salariés.

Elle ajoute qu'elle a fourni à Mme [L] des protections auditives comme le démontrent les factures d'achat versées aux débats pour les dix dernières années et que ces protections sont conformes à la réglementation en vigueur.

Elle précise encore qu'elle a fait l'acquisition de machines moins bruyantes comme en attestent les factures produites.

À titre liminaire, on constatera que la société [13] ne conteste pas le caractère professionnel de la maladie de Mme [L].

Sur la conscience du risque :

Mme [L] indique qu'elle effectuait les tâches suivantes dans un environnement bruyant:

- pliage sur TRVBEND V230 et 7036

- sertissage sur sertisseuse

- soudure par points sur soudeuse par points

- montage intégration avec utilisation de tournevis, clés, visseuses

- peinture avec opération de manutention et marouflage

- finitions avec rivetage et limage.

La société [13] précise qu'entre 2009 et 2017, Mme [L] a travaillé 54,1 % de son temps de travail au service pliage et 35,7 % de son temps de travail au service montage.

Mme [M] qui a travaillé au sein de la société [13] de 2006 à 2016 en qualité de magasinière, atteste que Mme [L] travaillait principalement au service pliage dans l'atelier tôlerie.

Elle précise dans son attestation que cet atelier regroupait plusieurs services : pliage, meulage, perçage, soudure par point, redressage (marteau maillet masse).

Il est donc établi que Mme [L] a principalement travaillé au service pliage dans l'atelier tôlerie qui regroupait divers services générant des nuisances sonores.

Les documents uniques d'évaluation des risques de 2002 à 2010 font d'ailleurs état du risque lié au 'bruit' pour les salariés affectés au poste de travail 'presse-plieuse'.

Les documents uniques d'évaluation des risques de 2012 à 2016 font précisément mention du risque de 'surdité partielle' pour les salariés affectés au poste 'presse plieuse'.

Il résulte de ces observations que la société [13] avait conscience du risque lié aux bruits auquel Mme [L] était exposée.

Sur l'absence de mise en oeuvre des mesures nécessaires :

Mme [L] prétend que la société [13] ne lui a fourni aucune protection auditive individuelle avant les dix dernières années et que les bouchons de protection auditive fournis au cours des dix dernières années étaient insuffisants.

Elle ne produit aucune pièce démontrant qu'elle ne bénéficiait d'aucune protection auditive avant les dix dernières années.

En revanche, il résulte de la fiche technique des bouchons d'oreille fournis au cours des dix dernières années d'activité de Mme [L] au sein de la société [13], qu'il s'agit de 'bouchons d'oreilles jetables série 1100' à 'usage unique'.

Or, le rapport du 31 octobre 2012 du service de santé au travail préconise notamment la fourniture de bouchons moulés en lieu et place des bouchons jetables. Il est précisé que les bouchons moulés sont plus confortables et permettent 'd'adapter les filtres aux fréquences nocives relevées'.

Il résulte de ce rapport que la question du confort est essentielle dans la mesure où l'efficacité des protections auditives implique qu'elles soient portées en permanence. À titre d'exemple, si les bouchons sont portés 98 % du temps d'exposition au bruit, l'atténuation effective des nuisances sonores est pratiquement diminuée de moitié, passant de 30 dB(A) à 17dB(A).

En conséquence, il est établi que la société [13] n'a pas mis à la disposition de Mme [L] des bouchons moulés pourtant plus confortables et plus efficaces que les bouchons jetables, et ce, y compris après le rapport du service de santé au travail du 31 octobre 2012.

Par ailleurs, ce même rapport mentionne différentes pistes d'amélioration des protections collectives, en particulier l'installation d'écrans afin de 'casser' le son de l'atelier et de diminuer ainsi 'l'effet résonnance'.

Il en résulte nécessairement que ces mesures n'avaient pas été mises en oeuvre avant l'intervention du service de santé au travail, étant rappelé qu'au moment de cette intervention, Mme [L] travaillait dans l'entreprise depuis plus de vingt ans.

L'absence de mesure de protection collective de type 'écrans' entre les différentes sources de nuisances sonores est confirmée par l'attestation de Mme [M], salariée de la société [13] de 2006 à 2016 qui, après avoir rappelé que Mme [L] travaillait principalement dans l'atelier tôlerie, précise que cet atelier regroupait différents services 'meulage, perçage, soudure par point, sablage, redressage (marteau, maillet, masse..)', 'sans séparation', c'est à dire sans écrans protecteurs entre les différentes machines ou postes de travail bruyants.

Compte tenu de ces observations, il est démontré que la société [13] n'a pas mis en oeuvre les mesures individuelles et collectives nécessaires pour préserver Mme [L] du risque de surdité.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a :

- dit que la maladie professionnelle de Mme [L] ne résulte pas de la faute inexcusable de la société [13]

- débouté Mme [L] de l'ensemble de ses demandes.

Statuant à nouveau, il convient de dire que la maladie professionnelle (hypoacousie de perception) de Mme [L] déclarée le 25 novembre 2016 est due à la faute inexcusable de la société [13].

II / Sur les conséquences de la faute inexcusable

- Sur la majoration de la rente

Il résulte de l'article L. 452-2 du code de la sécurité sociale que dans le cas où la faute inexcusable est reconnue, la victime reçoit une majoration de la rente ou de l'indemnité en capital.

Il convient donc d'ordonner la majoration de la rente allouée à Mme [L] à son montant maximum.

- Sur l'expertise et la provision

L'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale dispose que : 'indépendamment de la majoration de la rente qu'elle reçoit en vertu de l'article précédent, la victime a le droit de demander à l'employeur devant la juridiction de sécurité sociale la réparation du préjudice causé par les souffrances physiques et morales par elle endurées, de ses préjudices esthétiques et d'agrément ainsi que celle du préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle. Si la victime est atteinte d'un taux d'incapacité permanente de 100 %, il lui est alloué, en outre, une indemnité forfaitaire égale au montant du salaire minimum légal en vigueur à la date de consolidation.

(...)

La réparation de ces préjudices est versée directement aux bénéficiaires par la caisse qui en récupère le montant auprès de l'employeur.'

En outre, par décision du 18 juin 2010 n° 2010-8 QPC, le Conseil constitutionnel a décidé que : 'en présence d'une faute inexcusable de l'employeur, les dispositions de l'article L 452-3 ne sauraient sans porter une atteinte disproportionnée au droit des victimes d'actes fautifs, faire obstacle à ce que les victimes ou leurs ayants droit puissent devant les mêmes juridictions demander à l'employeur réparation de l'ensemble des dommages non couverts par le livre IV.'

Il en résulte qu'en plus des postes de préjudices limitativement énumérés par l'article L 452-3, la victime est bien fondée à demander à son employeur devant la juridiction de sécurité sociale notamment, la réparation du préjudice sexuel, du déficit fonctionnel temporaire et du préjudice d'assistance par une tierce personne avant consolidation.

En l'espèce, Mme [L] s'est vue reconnaître un taux d'incapacité permanente partielle de 30 % ce dont il résulte qu'elle présente des séquelles importantes de sa maladie professionnelle.

Elle produit différents témoignages de ses proches attestant de ses difficultés à mener une vie normale en raison de son handicap.

Il convient donc d'ordonner une mesure d'expertise afin d'évaluer ses préjudices corporels dans les conditions précisées au dispositif.

Par ailleurs, Mme [L] demande la condamnation de la société [13] à lui payer 10 000 euros de provision.

Comme le relève la société [13], cette provision ne peut être directement mise à sa charge, et ce conformément à l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale.

Mme [L] sera donc déboutée de sa demande de provision à l'encontre de la société [13].

Sur l'action récursoire de la caisse :

L'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale dispose s'agissant des préjudices indemnisés au titre de la faute inexcusable devant la juridiction de sécurité sociale que 'la réparation de ces préjudices est versée directement aux bénéficiaires par la caisse qui en récupère le montant auprès de l'employeur.'

De même, s'agissant de la majoration du capital ou de la rente en cas de faute inexcusable de l'employeur, l'article L. 452-2 précise que la majoration est payée par 'la caisse qui en récupère le capital représentatif auprès de l'employeur dans des conditions déterminées par décret'.

En application de ces dispositions, il sera dit que la caisse récupérera auprès de l'employeur les sommes dont elle est tenue de faire l'avance au titre de la faute inexcusable.

III / Sur les dépens et frais irrépétibles

Il convient de surseoir à statuer sur les dépens et les demandes formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile jusqu'à ce qu'il soit statué après dépôt du rapport d'expertise.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme le jugement déféré en ce qu'il a :

- dit que la maladie professionnelle de Mme [U] [L] ne résulte pas de la faute inexcusable de la société [13]

- débouté Mme [U] [L] de l'ensemble de ses demandes ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit que la maladie professionnelle (hypoacousie de perception) déclarée par Mme [U] [L] le 25 novembre 2016 est due à la faute inexcusable de la société [13] ;

Ordonne la majoration de la rente de Mme [U] [L] à son montant maximum;

Déboute Mme [U] [L] de sa demande de condamnation de la société [13] à lui payer 10 000 euros de provision à valoir sur ses préjudices ;

Avant-dire-droit sur l'indemnisation des préjudices de Mme [U] [L],

Ordonne une expertise médicale, et désigne pour y procéder M. [I] [V] Médecin expert ORL inscrit sur la liste des experts de la cour d'appel de Rouen

[Adresse 11]

[Localité 9]

Tél : [XXXXXXXX01]

Fax : POSTE [XXXXXXXX08]

Mèl : [Courriel 12],

lequel aura pour mission, après avoir examiné la victime et recueilli ses doléances, avoir entendu les parties en leurs observations, s'être fait remettre tous documents médicaux et s'être entouré de tous renseignements utiles, en se faisant adjoindre éventuellement un sapiteur psychiatre ou psychologue,

de donner son avis sur l'existence et l'étendue des dommages suivants, compte tenu d'une date de consolidation fixée au 24 novembre 2016 :

1. Souffrances physiques et morales endurées : Décrire les différents aspects de ce préjudice et en évaluer la gravité sur une échelle de 1 à 7,

2. Préjudice esthétique : Décrire les différents aspects de ce préjudice tant temporaire que permanent et en évaluer la gravité sur une échelle de 1 à 7,

3. Préjudice d'agrément : Indiquer s'il existe un préjudice d'agrément caractérisé par la perte ou la diminution d'activités spécifiques de sport ou de loisir et en déterminer l'étendue,

4.Préjudice sexuel : Indiquer s'il existe un tel préjudice et en déterminer la gravité,

5. Déficit fonctionnel temporaire : Evaluer ce préjudice en indiquant sa durée et s'il a été total ou partiel en précisant les périodes et le taux,

6. Besoin d'assistance tierce personne avant consolidation : Indiquer, le cas échéant, si l'assistance d'une tierce personne auprès de la victime était nécessaire pendant la période d'incapacité de travail temporaire ayant précédé la consolidation et, dans l'affirmative, préciser le nombre d'heures utiles et la durée de l'aide, et les périodes,

7. Frais d'aménagement de véhicule ou de logement : Donner son avis sur d'éventuels aménagements nécessaires pour permettre, le cas échéant, à la victime d'adapter son logement et/ou son véhicule à son handicap et en déterminer le coût,

8. Perte ou diminution des possibilités de promotion professionnelle : Donner son avis sur l'incidence de l'accident sur la carrière professionnelle de la victime si celle-ci avait des chances sérieuses de promotion,

9. chiffrer, par référence au 'Barème indicatif des déficits fonctionnels séquellaires en droit commun' le taux éventuel de déficit fonctionnel permanent (état antérieur inclus) imputable à la maladie professionnelle (hypoacousie de perception) déclarée le 25 novembre 2016 par Mme [U] [L], résultant de l'atteinte permanente d'une ou plusieurs fonctions persistant au moment de la consolidation, le taux de déficit fonctionnel devant prendre en compte, non seulement les atteintes aux fonctions physiologiques de la victime mais aussi les douleurs physiques et morales permanentes qu'elle ressent, la perte de qualité de vie et les troubles dans les conditions d'existence qu'elle rencontre au quotidien après consolidation ; dans l'hypothèse d'un état antérieur, préciser en quoi la maladie professionnelle a eu une incidence sur celui-ci et décrire les conséquences de cette situation ;

- de manière générale, fournir tout renseignement technique utile à la résolution du litige,

Dit que l'expert pourra s'adjoindre tout sapiteur de son choix ;

Dit qu'en cas d'empêchement de l'expert, il sera pourvu à son remplacement par ordonnance rendue sur requête ;

Dit que l'expert devra établir un pré-rapport qu'il adressera aux parties ;

Dit que l'expert devra déposer son rapport au greffe de la cour et l'adresser aux parties dans un délai de huit mois à compter de l'acceptation de sa mission ;

Ordonne la consignation au greffe de la cour par la caisse primaire d'assurance maladie du Calvados d'une provision de 1 500 euros à valoir sur les honoraires de l'expert, somme qui devra être versée dans le mois de la notification du présent arrêt ;

Dit que faute de consignation avant cette date, il sera fait application des dispositions de l'article 271 du code de procédure civile ;

Dit que la caisse primaire d'assurance maladie du Calvados récupérera auprès de la société [13] l'ensemble des sommes dont elle est tenue de faire l'avance au titre de la faute inexcusable;

Renvoie l'affaire à l'audience du jeudi 5 décembre 2024 à 9 heures, Cour d'appel, Place Gambetta, 14000 Caen, Salle Malesherbes - 3ème étage,

Dit que la notification du présent arrêt vaut convocation régulière des parties devant la cour ;

Sursoit à statuer sur les dépens et les demandes présentées au titre de l'article 700 du code de procédure civile jusqu'à ce qu'il soit statué après dépôt du rapport d'expertise.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

E. GOULARD C. CHAUX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Caen
Formation : 2ème chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21/03339
Date de la décision : 18/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 29/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-18;21.03339 ?
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