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18/04/2024 | FRANCE | N°21/03261

France | France, Cour d'appel de Caen, 2ème chambre sociale, 18 avril 2024, 21/03261


AFFAIRE : N° RG 21/03261

N° Portalis DBVC-V-B7F-G4GJ

 Code Aff. :



ARRET N°



C.P





ORIGINE : Décision du Pôle social du Tribunal Judiciaire de CAEN en date du 27 Août 2021 - RG n° 19/01168









COUR D'APPEL DE CAEN

2ème chambre sociale

ARRET DU 18 AVRIL 2024





APPELANT :



Monsieur [J] [P]

[Adresse 1]

[Localité 2]



Représenté par Me Stéphanie PICK, avocat au barreau de RENNES





I

NTIME :



Urssaf de Normandie venant aux droits de l'Urssaf de Basse-Normandie

[Adresse 3]

[Adresse 5]

[Localité 4]



Représenté par Mme [G], mandatée









DEBATS : A l'audience publique du 14 mars 2024, tenue par Monsi...

AFFAIRE : N° RG 21/03261

N° Portalis DBVC-V-B7F-G4GJ

 Code Aff. :

ARRET N°

C.P

ORIGINE : Décision du Pôle social du Tribunal Judiciaire de CAEN en date du 27 Août 2021 - RG n° 19/01168

COUR D'APPEL DE CAEN

2ème chambre sociale

ARRET DU 18 AVRIL 2024

APPELANT :

Monsieur [J] [P]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Stéphanie PICK, avocat au barreau de RENNES

INTIME :

Urssaf de Normandie venant aux droits de l'Urssaf de Basse-Normandie

[Adresse 3]

[Adresse 5]

[Localité 4]

Représenté par Mme [G], mandatée

DEBATS : A l'audience publique du 14 mars 2024, tenue par Monsieur LE BOURVELLEC, Conseiller, Magistrat chargé d'instruire l'affaire lequel a, les parties ne s'y étant opposées, siégé seul, pour entendre les plaidoiries et en rendre compte à la Cour dans son délibéré

GREFFIER : Mme GOULARD

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme CHAUX, Présidente de Chambre,

M. LE BOURVELLEC, Conseiller,

M. GANCE, Conseiller,

ARRET prononcé publiquement le 18 avril 2024 à 14h00 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Mme CHAUX, présidente, et Mme GOULARD, greffier

La cour statue sur l'appel régulièrement interjeté par M. [P] d'un jugement rendu le 27 août 2021 par le tribunal judiciaire de Caen dans un litige l'opposant à l'Urssaf de Basse-Normandie aux droits de laquelle vient l'Urssaf Normandie.

FAITS ET PROCEDURE

M. [P] est affilié depuis le 29 décembre 2007 en qualité de gérant de la Sarl Espace Funéraire Orbecquois. A ce titre, il est redevable de cotisations et contributions sociales obligatoires envers l'Urssaf.

En application de l'article 15 de la loi n° 2017-1836 du 30 décembre 2017 portant loi de financement de la sécurité sociale pour 2018, le régime social des indépendants (RSI ) a été supprimé et ses missions ont été transférées aux Urssaf ou aux caisses générales de sécurité sociale, pour le recouvrement des cotisations et contributions sociales.

Une mise en demeure datée du 3 avril 2019 a été notifiée par l'Urssaf de Basse-Normandie (l'Urssaf) à M. [P] pour un montant de 37 194 euros (35 319 euros de cotisations, 1 875 euros de majorations de retard), concernant les périodes du 1er trimestre 2019 et la régularisation des années 2017 et 2018.

En l'absence de paiement, une contrainte a été établie le 18 octobre 2019, signifiée à M. [P] le 22 octobre 2019, au titre des mêmes périodes et pour le même montant.

Le 4 novembre 2019, M. [P] a formé opposition à la contrainte devant le pôle social du tribunal de grande instance de Caen.

Par jugement du 27 août 2021, le tribunal de grande instance, devenu tribunal judiciaire de Caen, a :

- déclaré recevable mais mal fondée l'opposition formée par M. [P] à la contrainte du 18 octobre 2019 signifiée le 22 octobre 2019,

- rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée,

- constaté que M. [P] abandonne le moyen tendant à remettre en cause la légitimité de l'Urssaf à procéder au recouvrement des cotisations et contributions des personnes affiliées au régime des travailleurs indépendants,

- débouté M. [P] de l'ensemble de ses demandes,

- validé la contrainte du 18 octobre 2019 pour son nouveau montant de 29 389 euros,

- condamné M. [P] à payer à l'Urssaf la somme de 29 389 euros au titre de la contrainte du 18 octobre 2019,

- dit que les frais de recouvrement afférents à la délivrance de contrainte (soit le coût de chacune des significations) et aux actes qui pourront faire suite (en cas de nécessité de recourir à des mesures d'exécution forcée) seront à la charge de M. [P], par application de l'article R.133-6 du code de la sécurité sociale et l'a condamné au paiement de ceux-ci,

- rappelé que la décision est exécutoire de droit à titre provisoire, en application des dispositions de l'article R.133-3 dernier alinéa du code de sécurité sociale.

- condamné M. [P] en tant que de besoin aux dépens.

M. [P] a formé appel de ce jugement par déclaration du 3 décembre 2021.

Aux termes de ses conclusions déposées le 7 juillet 2023, soutenues oralement par son conseil, M. [P] demande à la cour de :

- déclarer recevable et bien-fondé l'appel formé par M. [P],

A titre principal,

- infirmer le jugement déféré, et :

- annuler la mise en demeure du 3 avril 2019 et la contrainte pour défaut de motivation relatif à l'absence de mention de motif,

- annuler la contrainte en l'absence de preuve d'envoi de la mise en demeure préalable du 2 avril 2019 dont la date figure sur la contrainte, ce qui entraîne un défaut de motivation ne permettant pas au requérant de connaître la cause, la nature et l'étendue de ses obligations, et ne lui permet pas non plus de vérifier le quantum des soldes réclamés,

En tout état de cause,

- débouter l'Urssaf de toutes ses demandes,

- débouter l'Urssaf de sa demande d'article 700 du code de procédure civile, de son éventuelle demande de condamnation au versement de dommages et intérêts et au paiement d'une amende civile pour procédure abusive et dilatoire,

- condamner la caisse à payer au requérant la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

Par écritures déposées le 14 mars 2024, soutenues oralement par sa représentante, l'Urssaf Normandie, venant aux droits de l'Urssaf de Basse-Normandie, demande à la cour de :

A titre principal,

- déclarer l'appel de M. [P] irrecevable,

- dire que la cour d'appel n'est saisie d'aucune demande,

A titre subsidiaire,

- débouter M. [P] de toutes ses demandes,

- confirmer en tout point le jugement déféré,

En tout état de cause,

- condamner M. [P] au paiement de la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [P] aux dépens.

Pour l'exposé complet des prétentions et des moyens des parties, il est expressément renvoyé à leurs écritures.

MOTIFS

- Sur la recevabilité de l'appel

L'article 933 du code de procédure civile dispose :

La déclaration comporte les mentions prescrites par les 2° et 3° de l'article 54 et par le troisième alinéa de l'article 57. Elle désigne le jugement dont il est fait appel, précise les chefs du jugement critiqués auquel l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible, et mentionne, le cas échéant, le nom et l'adresse du représentant de l'appelant devant la cour. Elle est accompagnée de la copie de la décision.

Aux termes de l'article 57 du code de procédure civile :

Lorsqu'elle est formée par le demandeur, la requête saisit la juridiction sans que son adversaire en ait été préalablement informé. Lorsqu'elle est remise ou adressée conjointement par les parties, elle soumet au juge leurs prétentions respectives, les points sur lesquels elles sont en désaccord ainsi que leurs moyens respectifs.

Elle contient, outre les mentions énoncées à l'article 54, également à peine de nullité :

-lorsqu'elle est formée par une seule partie, l'indication des nom, prénoms et domicile de la personne contre laquelle la demande est formée ou s'il s'agit d'une personne morale, de sa dénomination et de son siège social ;

-dans tous les cas, l'indication des pièces sur lesquelles la demande est fondée.

Elle est datée et signée.

L'Urssaf fait valoir que faute pour M. [P] d'avoir signé la déclaration d'appel, son appel est irrecevable.

C'est à juste titre que M. [P] soutient que le défaut de signature de sa déclaration n'a pas pour effet de rendre son appel irrecevable dès lors qu'il n'est pas justifié d'un grief.

Or, force est de constater d'une part, que la déclaration d'appel datée du 3 décembre 2021 comporte les nom, prénom et adresse de l'appelant, excluant tout doute sur l'identité de l'appelant et d'autre part, que l'Urssaf ne fait état d'aucun grief qui lui serait causé par l'absence de signature de ladite déclaration.

Ce moyen doit donc être écarté et l'appel sera déclaré recevable.

- Sur la régularité de la mise en demeure et de la contrainte

Les dispositions du jugement déféré par lesquelles le tribunal a :

- déclaré recevable l'opposition formée par M. [P] à la contrainte du 18 octobre 2019 signifiée le 22 octobre 2019,

- rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée,

- constaté que M. [P] abandonne le moyen tendant à remettre en cause la légitimité de l'Urssaf à procéder au recouvrement des cotisations et contributions des personnes affiliées au régime des travailleurs indépendants,

ne sont pas remises en cause. Elles sont donc acquises.

- Sur le défaut de motivation des mises en demeure et des contraintes pour absence de mention de motif

M. [P] fait valoir que la mise en demeure ne comporte pas de motif, mentionnant simplement sa cause en ces termes : 'nous vous mettons en demeure de régler dans un délai d'un mois à compter de la réception de la présente, la somme dont vous êtes redevable envers l'Urssaf [.....] au titre des cotisations et contributions sociales obligatoires dont décompte ci - après', alors que le motif, distinct de la cause, doit être indiqué sur la mise en demeure à peine de nullité de celle-ci entraînant par conséquent, la nullité de plein droit de la contrainte qui suivrait , sans qu'il soit besoin de démontrer un grief.

Il est constant que seuls la nature, le montant des cotisations réclamées ainsi que la période à laquelle ces cotisations se rapportent, sont requis pour que la mise en demeure et la contrainte soient valides, à l'exclusion du motif.

M. [P] ne peut valablement invoquer l'absence de motif, s'agissant en l'espèce, non pas d'un redressement effectué par l'Urssaf suivi d'une lettre d'observations, mais d'une mise en demeure émise en l'absence de paiement des cotisations, contributions qui ont été appelées.

En outre, la mise en demeure précise la 'nature des sommes dues en cotisations, contributions, majorations ou pénalités'. De plus, une colonne est dédiée à la mention du montant et de la date des éventuels versements qui auraient été déjà effectués par le cotisant.

En l'espèce, aucune mention ne figure dans la colonne dédiée à ces versements dans la mise en demeure.

En conséquence, ce moyen tiré de l'absence de motif mentionné sur la mise en demeure sera rejeté.

- Sur le défaut de motivation des contraintes en raison des dates de mises en demeure y figurant

L'article R.244-1 alinéa 1 du code de la sécurité sociale dispose que l'avertissement ou la mise en demeure précise la cause, la nature et le montant des sommes réclamées, les majorations et pénalités qui s'y appliquent ainsi que la période à laquelle elles se rapportent.

M. [P] fait valoir que la contrainte mentionne une mise en demeure du 2 avril 2019, alors que la mise en demeure produite par l'Urssaf porte la date du 3 avril 2019.

Il estime que cela ne lui permet pas de faire un recoupement entre la mise en demeure figurant sur la contrainte et celle du 3 avril 2019. Il estime qu'il appartient à l'Urssaf de prouver que la mise en demeure ayant pour date celle figurant sur la contrainte lui a bien été adressée, et qu'à défaut, la contrainte serait sans fondement pour non-respect de l'article L.244-2 du code de la sécurité sociale, à défaut de preuve de l'envoi de ladite mise en demeure figurant sur la contrainte.

L'Urssaf répond qu'il s'agit d'une erreur purement matérielle, qui ne fait pas grief au cotisant puisqu'il a parfaitement connaissance de la cause, de la nature et de l'étendue de son obligation au moyen du numéro de structure de la mise en demeure repris dans le contrainte, des périodes et des montants identiques dans l'une et dans l'autre.

Il est constant que la mise en demeure, qui constitue une invitation impérative adressée au débiteur d'avoir à régulariser sa situation, dans le délai imparti, doit permettre à l'intéressé d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation et qu'à cette fin il importe qu'elle précise, à peine de nullité, outre la nature et le montant des cotisations réclamées, la période à laquelle elles se rapportent.

En l'espèce, la contrainte établie le 18 octobre 2019 mentionne une mise en demeure n° 2019012507 du 2 avril 2019, et des sommes dues pour trois périodes :

- régul 17 pour 21 526 euros

- régul 18 pour 5 137 euros

- 1er trim 19 pour 10 531 euros

Total 37 194 euros

La mise en demeure produite par l'Urssaf, datée du 3 avril 2019, comporte le numéro de dossier 2019012527, et vise trois périodes :

- régul 17 pour 21 526 euros

- régul 18 pour 5 137 euros

- 1er trim 19 pour 10 531 euros

Total 37 194 euros

Il apparaît ainsi que la contrainte précise la nature, la période concernée et le montant des cotisations et majorations de retard recouvrées et qu'elle fait référence à la mise en demeure antérieure, dont la régularité n'est pas contestée, laquelle reprenait les périodes et les montants des cotisations réclamées en ventilant les sommes dues par branches de risque concernées, de sorte que le cotisant pouvait, nonobstant l'erreur matérielle affectant la date de la mise en demeure mentionnée dans la contrainte, connaître la nature, la cause et l'étendue de son obligation.

C'est en conséquence à tort que M. [P] sollicite de l'Urssaf qu'elle produise la mise en demeure du 2 avril 2019, puisqu'il ressort de ce qui précède que c'est à la suite d'une erreur purement matérielle que la contrainte a mentionné cette date au lieu de celle du 3 avril 2019 correspondant à la mise en demeure délivrée à l'appelant.

La contrainte litigieuse se réfère expressément à la mise en demeure produite par l'Urssaf, dont il a été vu qu'elle ventile les sommes dues par branches de risque concernées.

M. [P] étant donc parfaitement informé de la cause, de la nature de la dette et de l'étendue de son obligation de paiement, il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a validé la contrainte du 18 octobre 2019 pour son nouveau montant de 29 389 euros, et condamné M. [P] à payer à l'Urssaf la somme de 29 389 euros au titre de cette contrainte du 18 octobre 2019.

Le jugement mérite par conséquent confirmation en toutes ses dispositions.

- Sur les dépens et frais irrépétibles d'appel

Succombant, M. [P] sera condamné aux dépens d'appel, débouté de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et condamné à payer à l'Urssaf la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Déclare recevable l'appel formé par M. [P] ;

Confirme le jugement déféré ;

Y ajoutant,

Condamne M. [P] à payer à l'Urssaf Normandie, venant aux droits de l'Urssaf de Basse-Normandie la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute M. [P] de sa demande au titre des frais irrépétibles ;

Condamne M. [P] aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

E. GOULARD C. CHAUX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Caen
Formation : 2ème chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21/03261
Date de la décision : 18/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 24/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-18;21.03261 ?
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