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11/04/2024 | FRANCE | N°23/01270

France | France, Cour d'appel de Caen, 3ème chambre civile, 11 avril 2024, 23/01270


AFFAIRE : N° RG 23/01270 - N° Portalis DBVC-V-B7H-HG36



ARRET N°



CP





ORIGINE : Décision du Juge aux affaires familiales de COUTANCES du 20 avril 2023

RG n° 21/00540







COUR D'APPEL DE CAEN

TROISIEME CHAMBRE CIVILE

ARRET DU 11 AVRIL 2024





APPELANT :



Monsieur [D] [F] [I] [M]

né le [Date naissance 1] 1964 à [Localité 9]

[Adresse 2]

[Localité 5]



représenté et assisté de Me Virginie HANTRAIS, avocat au barreau de C

OUTANCES





INTIMEE :



Madame [G] [P]

née le [Date naissance 4] 1967 à [Localité 6]

domicile élu, cabinet de Marlène [Adresse 7]

la londe

[Localité 3]



représentée et assistée de Me Marlène DES...

AFFAIRE : N° RG 23/01270 - N° Portalis DBVC-V-B7H-HG36

ARRET N°

CP

ORIGINE : Décision du Juge aux affaires familiales de COUTANCES du 20 avril 2023

RG n° 21/00540

COUR D'APPEL DE CAEN

TROISIEME CHAMBRE CIVILE

ARRET DU 11 AVRIL 2024

APPELANT :

Monsieur [D] [F] [I] [M]

né le [Date naissance 1] 1964 à [Localité 9]

[Adresse 2]

[Localité 5]

représenté et assisté de Me Virginie HANTRAIS, avocat au barreau de COUTANCES

INTIMEE :

Madame [G] [P]

née le [Date naissance 4] 1967 à [Localité 6]

domicile élu, cabinet de Marlène [Adresse 7]

la londe

[Localité 3]

représentée et assistée de Me Marlène DESOUCHES-EDET, avocat au barreau de CAEN

DEBATS : A l'audience du 15 février 2024, sans opposition du ou des avocats, Mme GAUCI SCOTTE, Conseillère, a entendu seule les plaidoiries et en a rendu compte à la cour dans son délibéré

GREFFIERE : Mme FLEURY

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

M. GARET, Président de chambre,

Mme DE CROUZET, Conseiller,

Mme GAUCI SCOTTE, Conseillère,

ARRET prononcé publiquement le 11 avril 2024 à 14h00 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour et signé par M. GARET, président, et Mme FLEURY, greffier

PROCEDURE

M. [D] [M] et Mme [G] [P] ont conclu un pacte civil de solidarité enregistré le 2 novembre 2015 et dissout le 13 avril 2018.

Le 5 octobre 2015, ils ont fait l'acquisition, chacun pour moitié indivise, d'une maison d'habitation située à [Localité 5], pour un prix de 645 000 euros, outre les frais d'acte et les honoraires de négociation d'un montant de 59 645 euros.

Par assignation du 29 avril 2021, Mme [G] [P] a saisi le Juge aux Affaires Familiales près le Tribunal Judiciaire de Coutances aux fins de voir ordonner l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision existant entre les anciens partenaires.

Par jugement du 20 avril 2023, le Juge aux Affaires Familiales a notamment :

déclaré recevable la demande en partage,

ordonné l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision existant entre [G] [P] et [D] [M],

désigné Maître [Y] [B], Notaire à [Localité 8], pour élaborer un projet de liquidation du régime matrimonial des époux,

désigné avant-dire-droit [V] [E], expert en estimation immobilière, aux fins d'estimation de la valeur de la maison d'habitation située [Adresse 2], ainsi que de sa valeur locative,

sursis à statuer sur l'attribution préférentielle de la maison d'habitation située [Adresse 2] au bénéfice d'[D] [M],

dit que [D] [M] est redevable envers l'indivision d'une indemnité d'occupation du 4 février 2018 jusqu'à la date du partage définitif,

dit que le notaire devra proposer, sur la base de la valeur locative déterminée par l'expert en estimation immobilière, un montant au titre de l'indemnité d'occupation due au titre de la jouissance de la maison d'habitation située [Adresse 2],

constaté l'accord des parties pour attribuer la sculpture de l'artiste [W] [X] dans le lot revenant à [G] [P] pour une valeur de 41 600 €,

constaté l'accord des parties pour attribuer l'intégralité du mobilier garnissant l'immeuble situé [Adresse 2], dans le lot revenant à [D] [M], pour un montant à déterminer avec le notaire désigné,

étendu la mission du notaire commis à la consultation des fichiers FICOBA et FICOVIE.

Par acte du 2 juin 2023, M. [D] [M] a interjeté appel de cette décision en ce qu'elle a dit qu'il serait redevable à l'indivision d'une indemnité d'occupation à compter du 4 février 2018 et jusqu'à la date du partage définitif, et dit que le notaire devrait proposer un montant au titre de l'indemnité d'occupation.

Mme [G] [P] a constitué avocat devant la cour le 20 juin 2023.

Par ses dernières conclusions en date du 2 février 2024, M. [M] conclut en ces termes :

Réformer le jugement en date du 20 avril 2023 en ce qu'il a :

- Dit que M. [D] [M] est redevable envers l'indivision d'une indemnité d'occupation du 4 février 2018 jusqu'à la date du partage définitif,

- Dit que le notaire devra proposer, sur la base de la valeur locative déterminée par l'expert en estimations immobilières, un montant au titre de l'indemnité d'occupation due au titre de la jouissance de la maison d'habitation située [Adresse 2],

- Débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Statuant à nouveau :

Dire et juger que M. [D] [M] n'est redevable d'aucune indemnité d'occupation envers l'indivision.

Débouter Mme [G] [P] de toutes demandes, fins ou prétentions contraires.

Confirmer le jugement en date du 20 avril 2023 en ses autres dispositions non contraires.

Condamner Mme [G] [P] au paiement d'une indemnité de 1500 € au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

Condamner Mme [G] [P] aux entiers dépens d'appel, avec droit de recouvrement au profit de la SCP BERLEMONT COCHARD HANTRAIS.

Subsidiairement :

Dire et juger que l'indemnité d'occupation dont M. [D] [M] pourrait être redevable envers l'indivision n'a commencé à courir qu'à compter du 29 avril 2021.

Dire et juger que le notaire devra proposer, sur la base de la valeur locative déterminée par l'expert en estimations immobilières, un montant au titre de l'indemnité d'occupation sur la base de la valeur locative de l'immeuble.

Par ses dernières écritures en date du 6 novembre 2023, Mme [G] [P] conclut en ces termes :

Confirmer le jugement du 20 avril 2023 en ce qu'il a :

* dit que M. [D] [M] est redevable envers l'indivision d'une indemnité d'occupation du 4 février 2018 jusqu'à la date du partage définitif,

* débouté en conséquence M. [M] de ses demandes.

Réformer le jugement du 20 avril 2023 en ce qu'il a :

* dit que le notaire devra proposer, sur la base de la valeur locative déterminée par l'expert en estimation immobilière, un montant au titre de l'indemnité d'occupation due au titre de la jouissance de la maison d'habitation située [Adresse 2],

Et statuant à nouveau :

Dire que l'indemnité d'occupation sera calculée conformément à la jurisprudence de la Cour d'Appel de Caen en retenant 5,50 % de la valeur du bien immobilier, avec un abattement de 20 % lié au caractère précaire de l'occupation,

En tout état de cause,

Condamner M. [M] au paiement d'une indemnité de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 ainsi qu'aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 7 février 2024 avant l'ouverture des débats à l'audience du 15 février 2024.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, à leurs dernières conclusions sus-visées.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l'étendue de la saisine de la cour :

Les parties n'entendent voir infirmer le jugement qu'en ce qui concerne les dispositions relatives à l'indemnité d'occupation mise à la charge de M. [M] et les modalités de calcul de cette dernière.

En conséquence, les autres dispositions non critiquées de la décision, ont d'ores et déjà acquis force de chose jugée.

Sur l'indemnité d'occupation due par un coïndivisaire :

M. [M] conteste le jugement déféré en ce qu'il l'a déclaré redevable à l'égard de l'indivision d'une indemnité au titre de son occupation du bien immobilier indivis situé à [Localité 5].

Il réfute en l'espèce avoir disposé d'une jouissance privative de ce bien au détriment de Mme [P].

M. [M] fait valoir que le couple s'est séparé en février 2018 et que, dès le mois de mai 2018, il a adressé un courrier à Mme [P] lui proposant de disposer de la jouissance du bien indivis et lui indiquant qu'il était près à quitter les lieux si elle émettait ce souhait.

Il affirme que Mme [P] n'a pas répondu à sa proposition et n'a jamais revendiqué l'occupation du bien après son départ des lieux.

M. [M] conteste en outre le contexte de violences qui aurait été celui de la séparation. S'il reconnaît un épisode unique de violences le 4 février 2018, il affirme qu'il n'a pas été aussi intense que ce que prétend Mme [P]. Il réfute en outre que d'autres scènes de violences soient intervenues précédemment et souligne que les mains courantes de janvier 2018 établies par Mme [P] précisent clairement qu'aucune violence physique n'est survenue.

M. [M] constate au contraire que Mme [P] a exprimé dès le 27 janvier 2018 son intention de séjourner chez son frère et qu'elle a quitté le domicile conjugal sans lui laisser de moyen de la contacter.

M. [M] soutient donc qu'il n'a jamais privé Mme [P] de la jouissance du bien indivis, de sorte qu'il ne serait redevable d'aucune indemnité d'occupation pour s'être maintenu dans les lieux.

Il sollicite donc l'infirmation du jugement déféré de ce chef.

Subsidiairement, si le principe de l'indemnité d'occupation devait être confirmé, M. [M] conteste le point de départ de celle-ci.

Il soutient que cette indemnité ne pourrait être due qu'à compter de la demande en justice qui en est faite, soit le 29 avril 2021, date de l'assignation délivrée par Mme [P].

Enfin, M. [M] fait part de son accord quant aux conditions de calcul de l'indemnité d'occupation retenues par le premier juge, qui retient la valeur locative du bien.

En réplique, Mme [P] sollicite confirmation du premier jugement en ce qu'il a retenu le principe d'une indemnité d'occupation à compter du 4 février 2018.

Elle affirme qu'elle a quitté le domicile commun le 4 février 2018 à la suite d'un épisode de violences physiques dont elle a été victime de la part de M. [M] qui, selon ses déclarations, l'aurait bousculée et lui aurait porté trois grandes claques au visage.

Mme [P] soutient qu'avant cet épisode, elle avait déjà établi deux mains courantes en janvier 2018 pour faire état de violences verbales.

Dans ce contexte, Mme [P] déclare avoir quitté le domicile commun dans la peur, et considère qu'il était tout à fait inenvisageable de partager la jouissance du bien indivis avec M. [M] par la suite.

Elle affirme qu'elle a de fait été privée de la jouissance de ce bien puisque M. [M] s'est maintenu dans les lieux, ce qui entraîne l'obligation de M. [M] à verser une indemnité d'occupation.

De même, Mme [P] relève que cette jouissance exclusive a débuté dès le 4 février 2018 et que, dès lors, l'indemnité d'occupation est due dès cette date.

En revanche, Mme [P] forme appel incident du jugement rendu le 20 avril 2023 s'agissant du mode de calcul retenu pour l'indemnité d'occupation.

Elle sollicite que cette indemnité soit calculée en retenant un pourcentage de la valeur de l'immeuble, soit 5,5 %, avec application d'un coefficient d'abattement de 20 % pour tenir compte de la précarité de l'occupation.

Mme [P] considère qu'il n'appartient pas au notaire désigné de déterminer les conditions de calcul de l'indemnité d'occupation et que la cour doit au contraire en fixer les critères.

Sur ce , la cour observe qu'il résulte de la convention de PACS adoptée entre M. [M] et Mme [P] le 2 novembre 2015 que les partenaires ont opté pour un régime de séparation de biens.

Toutefois, l'acte authentique d'acquisition de l'immeuble situé [Adresse 2] en date du 5 octobre 2015 indique que M. [M] et Mme [P] ont acquis chacun pour moitié indivise la propriété du bien immobilier.

C'est donc bien le régime de l'indivision prévu aux articles 815-8 et suivants du code civil qui s'applique dans la liquidation de leurs intérêts patrimoniaux.

En application de l'article 815-9 du code civil, chaque indivisaire peut user et jouir des biens indivis conformément à leur destination, dans la mesure compatible avec le droit des autres indivisaires et avec l'effet des actes régulièrement passés au cours de l'indivision. A défaut d'accord entre les intéressés, l'exercice de ce droit est réglé, à titre provisoire, par le président du tribunal.

L'indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d'une indemnité.

La nature même du régime de l'indivision confère à chacun des coïndivisaires des droits concurrents sur le bien dont la propriété est démembrée.

La jurisprudence a précisé que la jouissance privative d'un immeuble indivis résulte de l'impossibilité de droit ou de fait, pour les coïndivisaires, d'user de la chose, et que l'indemnité, contrepartie du droit de jouir privativement, est due même en l'absence d'occupation effective des lieux.

Néanmoins, la jouissance privative ouvrant droit à indemnité pour les coïndivisaires ne s'entend que de la situation dans laquelle l'occupation par un indivisaire de l'immeuble indivis exclut la même utilisation par ses coïndivisaires.

Par ailleurs, si l'indemnité d'occupation a pour but de dédommager l'impossibilité pour un indivisaire d'user et de jouir d'un bien indivis, cette impossibilité ne doit pas résulter de la volonté ou du fait de celui qui n'exerce pas son droit, mais bien de ses coïndivisaires.

A défaut de quoi, le coïndivisaire qui profite d'une jouissance privative n'est pas tenu à paiement d'une indemnité d'occupation.

En l'espèce, M. [M] conteste que Mme [P] ait été privée de la jouissance de l'immeuble indivis de son fait personnel.

Il est constant en l'espèce que Mme [P] a définitivement quitté l'immeuble indivis qui constituait le domicile commun du couple le soir du 4 février 2018, à la suite d'une scène de violences physiques dont elle a été victime de la part de M. [M].

Ce dernier ne conteste pas que des violences physiques aient été commises le soir du 4 février 2018, même s'il minimise les gestes décrits par Mme [P].

Un certificat médical a cependant été remis par Mme [P] lors de son dépôt de plainte le 5 février 2018, mentionnant un choc psychologique et prescrivant une ITT de 3 jours.

De même, il est établi par les déclarations de main courante versées à la procédure, datées des 19 et 27 janvier 2018, que de précédentes disputes étaient survenues au sein du couple dans les jours précédents le départ de Mme [P], poussant chacun des partenaires alternativement à quitter le domicile conjugal à titre temporaire.

Si, dans ces déclarations de main courante, Mme [P] a indiqué qu'aucune violence physique n'avait été commise lors des épisodes de janvier 2018, elle a pourtant dénoncé à l'occasion de la plainte déposée le 5 février 2018 de précédentes bousculades en décembre 2017 et janvier 2018.

Il se déduit de l'ensemble de ces éléments que le départ de Mme [P] du domicile commun est survenu dans un contexte de tension au sein du couple, ponctué de fréquentes disputes qui ont atteint leur paroxysme le 4 février 2018 avec la commission par M. [M] de violences physiques non contestées qui ont causé à Mme [P] un choc psychologique avéré.

Dans ces conditions, la poursuite de la cohabitation ne pouvait plus être envisagée par Mme [P].

Cette dernière s'est donc trouvée privée, de fait, de la possibilité de jouir du bien, dès lors que M. [M] se maintenait dans les lieux après l'avoir chassée du domicile commun.

Mme [P] fait ainsi la démonstration d'un motif légitime faisant obstacle à son accès au bien.

Postérieurement à ce départ, il apparaît que les anciens concubins n'ont pas communiqué durant plusieurs mois.

En effet, la lecture du courrier adressé le 7 mai 2018 par l'avocat de M. [M] au conseil de Mme [P] démontre que les parties n'ont eu aucun contact direct après la séparation.

Contrairement à ce que prétend M. [M], il n'a donc jamais proposé à Mme [P] de quitter les lieux pour lui en laisser la jouissance, et le courrier du 7 mai 2018 ne formule pas d'offre en ce sens. Il se contente en effet de mentionner : « M. [M] n'entendait pas se maintenir dans l'immeuble indivis si Mme [P] avait revendiqué sa jouissance ».

A défaut d'une telle proposition, il ne peut valablement prétendre que Mme [P] aurait sciemment renoncé à jouir du bien dans lequel il se maintenait lui-même.

Dès lors, il s'infère de l'ensemble de ces éléments que, par son comportement lors de la séparation et par son maintien dans les lieux postérieur, M. [M] a fait obstacle à la jouissance du bien indivis par Mme [P], et qu'il s'est attribué une jouissance privative du bien qui l'oblige au paiement d'une indemnité d'occupation à l'égard de l'indivision.

Le jugement déféré sera donc confirmé de ce chef.

Quant à la date à compter de laquelle M. [M] est redevable de l'indemnité d'occupation, il convient de rappeler que la gratuité de l'occupation du domicile commun, prévue au dernier alinéa de l'article 262-1 du code civil jusqu'à la demande en divorce, n'est applicable que dans le cadre du mariage et de la liquidation du régime matrimonial, mais qu'aucune disposition similaire n'est applicable dans le cadre de l'indivision de droit commun.

Dans ce dernier cadre, l'indemnité d'occupation est due dès que débute la jouissance privative, son objet étant, comme il l'a été rappelé, d'indemniser l'impossibilité pour un indivisaire d'user et de jouir d'un bien indivis.

Par conséquent, dès lors qu'il n'est pas contesté que M. [M] occupe seul le bien indivis depuis le 4 février 2018, il est redevable dès cette date de l'indemnité d'occupation.

Le jugement déféré sera donc également confirmé de ce chef.

Enfin, s'agissant du calcul de l'indemnité d'occupation, il est de principe que celle-ci soit déterminée par référence à la valeur locative du bien, qui peut être évaluée par référence à un pourcentage de la valeur de l'immeuble à défaut d'estimation de la valeur locative disponible.

En outre, la jurisprudence admet qu'un coefficient d'abattement soit retenu sur cette valeur locative, pour compenser le caractère précaire de l'occupation du bien du fait de la nature indivise de celui-ci.

Le premier juge a confié au notaire la mission de proposer un montant pour l'indemnité d'occupation su la base de la valeur locative déterminée par l'expert en estimation immobilière.

Toutefois, il n'appartient pas au notaire de fixer les critères de détermination de l'indemnité d'occupation, lesquels doivent être arrêtés par la juridiction.

Le jugement déféré sera par conséquent infirmé sur ces dispositions.

Dès lors qu'en l'espèce, un expert en estimation immobilière a été désigné pour déterminer tant la valeur de l'immeuble que sa valeur locative, il apparaît justifié de retenir, pour détermination de l'indemnité d'occupation due par M. [M], la valeur locative du bien qui sera fixée en son temps.

Par ailleurs, l'occupation de M. [M] du bien ayant un caractère précaire, il convient d'appliquer à la valeur locative un coefficient d'abattement que la cour fixe à 15 %, et ce au regard de la durée et des conditions de l'occupation du bien par ce dernier.

Par conséquent, l'indemnité d'occupation due par M. [M] devra être calculée par le notaire commis sur la base de la valeur locative arrêtée par l'expert en estimation immobilière et, à défaut de valeur précise, sur la base de la valeur médiane de l'estimation fournie, avec application d'un coefficient d'abattement de 15 %, et ce à compter du 4 février 2018 jusqu'à la date du partage définitif.

Sur les frais et dépens :

L'équité ne justifie pas qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en faveur de l'une ou de l'autre des parties.

La nature familiale du litige justifie que chacune des parties conserve ses dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant dans les limites de sa saisine, par décision contradictoire,

Confirme le jugement prononcé le 20 avril 2023 par le juge aux affaires familiales du Tribunal Judiciaire de Coutances, sauf en ses dispositions relatives au calcul de l'indemnité d'occupation due par M. [D] [M] à l'indivision,

Statuant à nouveau,

Dit que l'indemnité d'occupation due par M. [D] [M] à l'indivision, pour l'occupation de l'immeuble situé [Adresse 2], devra être calculée par le notaire commis sur la base de la valeur locative arrêtée par l'expert en estimation immobilière, et à défaut de valeur précise, sur la base de la valeur médiane de l'estimation fournie, avec application d'un coefficient d'abattement de 15 %, et ce à compter du 4 février 2018 jusqu'à la date du partage définitif,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

Laisse à chaque partie la charge de ses frais et dépens de l'appel.

LA GREFFIERE LE PRÉSIDENT

Estelle FLEURY Dominique GARET


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Caen
Formation : 3ème chambre civile
Numéro d'arrêt : 23/01270
Date de la décision : 11/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 17/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-11;23.01270 ?
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