AFFAIRE : N° RG 21/01906
ARRÊT N°
NLG
ORIGINE : DECISION du Tribunal de Commerce d'ALENCON en date du 25 Mai 2021
RG n° 2021000375
COUR D'APPEL DE CAEN
DEUXIEME CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE
ARRÊT DU 04 AVRIL 2024
APPELANTE :
S.A.S. LOCAM
N° SIRET : 310 880 315
[Adresse 3]
[Localité 1]
prise en la personne de son représentant légal
Représentée par Me Julia ZIVY, avocat au barreau de CAEN,
Assistée de Me Michel TROMBETTA de la SELARL LEXI, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE,
INTIMEE :
S.A.R.L. KRX ENGINEERING
N° SIRET : 539 510 453
[Adresse 4]
[Localité 2]
prise en la personne de son représentant légal
Représentée par Me Jérémie PAJEOT, substitué par Me Noëmie REICHLING, avocats au barreau de CAEN,
Assistée de Me Peter SCHMID, avocat au barreau de PARIS
DEBATS : A l'audience publique du 05 février 2024, sans opposition du ou des avocats, Madame EMILY, Président de Chambre, a entendu seule les plaidoiries et en a rendu compte à la cour dans son délibéré
GREFFIER : Mme LE GALL, greffier
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Madame EMILY, Président de Chambre,
M. GOUARIN, Conseiller,
Mme DELAUBIER, Conseillère,
ARRÊT prononcé publiquement le 04 avril 2024 à 14h00 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Madame EMILY, président, et Mme LE GALL, greffier
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* *
Arguant d'un contrat de location financière portant sur la fourniture de divers matériels de télécommunication conclu le 27 juillet 2017 avec la société KRX engineering et de l'existence de plusieurs loyers impayés, la société LOCAM a, par acte d'huissier de justice du 7 mars 2018, assigné la société KRX engineering devant le tribunal de commerce de Saint-Étienne aux fins d'obtenir la condamnation de la défenderesse au paiement de la somme principale de 24.039,93 euros.
Par jugement du 6 novembre 2020, le tribunal de commerce de Saint-Etienne a dit que les signatures électroniques du contrat et du procès-verbal étaient inopposables à la société KRX Engineering et s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce d'Alençon.
Par jugement du 25 mai 2021, le tribunal de commerce d'Alençon a :
- déboute la société Locam - location automobiles matériels de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions ;
- débouté la société KRX engineering de sa demande d'annulation de l'assignation et de demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
- condamné la société Locam - location automobiles matériels à payer à la société KRX engineering SARL la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens ;
- ordonné l'exécution provisoire ;
- liquidé les frais de greffe à la somme de 80,76 euros.
Par déclaration au greffe en date du 20 juin 2021, la SAS Locam a fait appel de ce jugement.
Par dernières conclusions déposées le 16 février 2023, la société Locam demande à la cour de :
- Juger bien fondé l'appel de la société Locam,
- Réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- Condamner la SARL KRX engineering à régler à la société Locam la somme principale de 24.039,93 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 16 janvier 2018,
- Débouter la SARL KRX engineering de toutes ses demandes comme pour partie irrecevables et toutes non fondées,
- La condamner à régler à la société Locam une indemnité de 2.500 euros au titre del'article 700 du code de procédure civile,
- Condamner la SARL KRX engineering en tous les dépens d'instance et d'appel..
Par dernières conclusions déposées le 6 janvier 2022, la SARL KRX engineering demande à la cour de :
A titre principal,
- Déclarer l'appel irrecevable,
Subsidiairement,
- Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Très Subsidiairement,
- Annuler le contrat pour défaut d'objet,
En tout état de cause,
- Débouter la société Locam SAS de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions
- Condamner la société Locam SAS à payer à la société KRX engineering la somme de 5.000 euros à titre d'indemnité pour appel abusif,
- Condamner la société Locam SAS à payer à la société KRX engineering une indemnité de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamner la société Locam SAS aux entiers dépens d'appel.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 10 janvier 2024.
Il est expressément renvoyé aux écritures précitées pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.
SUR CE, LA COUR
Sur l'irrecevabilité de l'appel
Aux termes de l'article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.
Aux termes de l'article 77 ancien du code de procédure civile applicable en l'espèce, lorsqu'il ne se prononce pas sur le fond du litige, mais que la détermination de la compétence dépend d'une question de fond, le juge doit, dans le dispositif du jugement, statuer sur cette question de fond et sur la compétence par des dispositions distinctes.
Aux termes de l'article 80 ancien du code de procédure civile applicable en l'espèce, lorsque le juge se prononce sur la compétence sans statuer sur le fond du litige, sa décision ne peut être attaquée que par la voie du contredit, quand bien même le juge aurait tranché la question de fond dont dépend la compétence.
L'ntimée soulève l'irrecevabilité de l'appel du fait de l'autorité de la chose jugée attachée au jugement du tribunal de commerce de Saint-Etienne qui a tranché la question de fond concernant l'opposabilité à la société KRX Engineering des signatures électroniques invoquées par la société LOCAM.
La société LOCAM fait valoir que ce moyen relève de la compétence du conseiller de la mise en état, que son appel est recevable contre le jugement du tribunal de commerce d'Alençon qui l'a déboutée de toutes ses demandes après examen au fond de l'affaire et qu'en toute hypothèse la preuve est libre entre commerçants.
Il sera relevé que dans le dispositif de ses conclusions, qui seul saisit la cour, la société LOCAM ne soulève pas l'incompétence de la cour pour statuer sur la recevabilité de l'appel.
Le tribunal de commerce d'Alençon a débouté la société LOCAM de toutes ses demandes et donc de sa demande en paiement de la somme de 24.39,92 euros réclamée au titre de l'inexécution du contrat de location.
L'appel formé par la société LOCAM est recevable, sa demande en paiement ne se heurtant pas à l'autorité de la chose jugée puisque le tribunal de commerce de Saint-Etienne n'a pas statué sur cette demande.
Sur la demande en paiement
Aux termes de l'article 1353 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.
Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.
Aux termes de l'article L110-3 du code de commerce, à l'égard des commerçants, les actes de commerce peuvent se prouver par tous moyens à moins qu'il n'en soit autrement disposé par la loi.
Aux termes de l'article 77 ancien du code de procédure civile applicable en l'espèce, lorsqu'il ne se prononce pas sur le fond du litige, mais que la détermination de la compétence dépend d'une question de fond, le juge doit, dans le dispositif du jugement, statuer sur cette question de fond et sur la compétence par des dispositions distinctes.
Aux termes de l'article 80 ancien du code de procédure civile applicable en l'espèce, lorsque le juge se prononce sur la compétence sans statuer sur le fond du litige, sa décision ne peut être attaquée que par la voie du contredit, quand bien même le juge aurait tranché la question de fond dont dépend la compétence.
La société KRX Engineering soutient que l'autorité de la chose jugée attachée à la décision du tribunal de commerce de Saint-Etienne ne peut que conduire à débouter la société LOCAM de sa demande en paiement fondée sur l'existence d'un contrat et que cette dernière ne dispose d'aucune preuve de l'existence d'un contrat de location financière.
La société LOCAM conclut à la validité des signatures électroniques portées sur le contrat de location et sur le procès-verbal de livraison et de conformité.
Elle argue par ailleurs du principe de la liberté de la preuve entre commerçants et fait valoir que le défaut de signature électronique n'emporte pas à lui seul l'inexistence de la convention dont elle poursuit l'exécution.
Le juge du tribunal de commerce de Saint-Etienne a tranché dans le dispositif de sa décision la question de fond relative à l'opposabilité des signatures électroniques dont dépendait la solution sur la compétence puisque le contrat de location dont se prévaut la société LOCAM prévoit une clause d'attribution de compétence.
Cette décision au fond a force de chose jugée puisqu'aucun appel n'a été formé à son encontre.
C'est donc vainement que la société LOCAM développe des moyens sur la validité des signatures électroniques du contrat de location et du procès-verbal de livraison et de conformité.
La société LOCAM indique que l'intimée reconnaît dans ses écritures (pages 3, paragraphe 1.2 in fine) la livraison et l'installation des matériels objets du bail.
La société KRX Engineering reconnaît avoir été contactée par un commercial de la société Agence Premium, avoir signé un bon de commande pour la fourniture d'équipements téléphoniques sous réserve de l'accord de financement et sous réserve de l'acceptation du dossier de financement, que le matériel a été installé le 6 septembre 2017, que par courrier du 14 septembre 2017 elle a mis un terme à toute discussion contractuelle alors qu'aucun contrat n'avait encore été accepté ce qui constitue selon elle une rétractation d'offre au sens des articles 1115, 1116 du code civil et L221-18 et L221-3 du code de la consommation , qu'elle a restitué le matériel le 9 octobre 2017, qu'elle n'a eu aucun contact avec la société LOCAM.
Il ressort des pièces communiquées que la société KRX Engineering a signé avec la société Agence Premium une commande de matériels le 21 juillet 2017 prévoyant une location linéaire sur 21 trimestres pour un montant mensuel de 272 euros ht sous condition d'accord de financement par l'organisme financier 'indépendant à Alcatel et à l'opérateur téléphonique'.
Il ne s'agit pas d'une offre émise par la société Agence Premium mais bien d'une commande de matériel par la société KRX Engineering.
La société KRX Engineering a signé le 6 septembre 2017 le bon d'intervention de la société Agence Premium attestant de l'installation du matériel commandé.( Pièce 3 de l'intimée)
Elle indique dans ses conclusions avoir reçu postérieurement un contrat intitulé 'Avenant au contrat de location n°2776959".
Cet avenant daté du 6 septembre 2017 avait pour objet de définir les modalités de mise en place d'une opération de location financière entre le locataire, le fournisseur et la société LOCAM.(Pièce 4 de l'intimée)
Par courrier du 14 septembre 2017 adressé à la société Agence Premium, et en copie à la société LOCAM , la société KRX Engineering a indiqué ne pas vouloir conclure le contrat tripartite et qu'elle ne souhaitait pas conclure un nouveau contrat de fourniture de matériels de téléphonie.
Elle indique avoir restitué le matériel livré à la société Agence Premium le 9 octobre 2017.
La société LOCAM communique :
- le contrat de location daté du 27 juillet 2017 dont elle se prévaut et un procès-verbal de livraison et de conformité du 6 septembre 2017 sur lequel elle apparaît en qualité de bailleur signés électroniquement et dont il a été jugé que les signatures étaient inopposables à la société KRX Engineering,
- la facture que lui a adressée la société Agence Premium,
- une facture unique de loyers en euros établie par ses soins.
Il s'ensuit que la société LOCAM ne rapporte pas la preuve d'un engagement de la société KRX Engineering avec elle au titre d'un contrat de location financière.
Dès lors, sa demande en paiement est mal fondée et sera rejetée.
Le jugement entrepris sera confirmé par substitution de motifs.
Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive
Le droit d'exercer une action en justice ou une voie de recours ne dégénère en abus que s'il révèle de la part de son auteur une intention maligne, une erreur grossière ou une légèreté blâmable dans l'appréciation de son droit qui ne saurait résulter du seul rejet de ses prétentions.
Faute pour l'intimée d'établir un tel abus, sa demande de dommages et intérêts sera rejetée.
Sur les demandes accessoires
Les dispositions du jugement relatives à l'indemnité de procédure et aux dépens, exactement appréciées, seront confirmées.
La société LOCAM, qui succombe à titre principal, sera condamnée aux dépens d'appel, à payer à la société KRX Engineering la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et sera déboutée de sa demande formée à ce titre.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe ;
Déclare recevable l'appel formé par la société LOCAM ;
Confirme le jugement entrepris dans les limites de l'appel ;
Y ajoutant ,
Déboute la société KRX Engineering de sa demande de dommages et intérêts pour appel abusif;
Condamne la société LOCAM à payer à la société KRX Engineering la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;
Déboute la société LOCAM de sa demande d'indemnité de procédure ;
Condamne la société LOCAM aux dépens d'appel.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
N. LE GALL F. EMILY