AFFAIRE : N° RG 21/02358 -
N° Portalis DBVC-V-B7F-G2BN
ARRÊT N°
JB.
ORIGINE : Décision du Commission d'indemnisation des victimes de dommages résultant d'une infraction d'ARGENTAN du 15 Juillet 2021 - RG n° 20/00012
COUR D'APPEL DE CAEN
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 02 AVRIL 2024
APPELANT :
Monsieur [L] [B]
né le [Date naissance 2] 1972 à [Localité 5]
[Adresse 6]
[Adresse 6]
représenté et assisté de Me Joffrey LE RUYET, avocat au barreau de CAEN
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 141180022021007082 du 25/11/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de CAEN)
INTIMÉ :
LE FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES DES ACTES DE TERRORISME ET D'AUTRES INFRACTIONS
[Adresse 3]
[Adresse 3]
pris en la personne de son représentant légal
représenté et assisté de Me Noël LEJARD, substitué par Me RICCOBONO avocats au barreau de CAEN
DÉBATS : A l'audience publique du 01 février 2024, sans opposition du ou des avocats, Mme VELMANS, Conseillère, a entendu seule les plaidoiries et en a rendu compte à la cour dans son délibéré
GREFFIER : Mme COLLET
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
M. GUIGUESSON, Président de chambre,
Mme VELMANS, Conseillère,
Mme DELAUBIER, Conseillère,
ARRÊT : rendu publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile le 02 Avril 2024 et signé par M. GUIGUESSON, président, et Mme COLLET, greffier
* * *
EXPOSE DU LITIGE
Suivant acte sous seing privé du 2 décembre 2018, Monsieur [L] [B] a consenti à Messieurs [Z] [C] et [S] [I] un bail d'habitation portant sur une maison d'habitation située [Adresse 1].
A la suite du préavis donné par les locataires en mai 2020, Maître [H], huissier de justice, a dressé le 31 juillet 2020, un procès-verbal de constat valant état des lieux de sortie, en présence de Monsieur [S] [I].
A cette occasion, ce dernier a déclaré que le poêle à granulés qui se trouvait dans la pièce à usage de séjour avait disparu alors qu'il était encore présent le samedi précédent, sans que n'aient été constatées de traces d'effraction.
Monsieur [B] a déposé plainte contre ses anciens locataires le même jour.
Par requête déposée le 12 août 2020, au greffe de la commission d'indemnisation des victimes d'infraction d'[Localité 4], il a formulé une demande tendant à obtenir à titre principal le versement d'une indemnité de 8.500,00 €, et subsidiairement, une provision de 4.000,00 € à valoir sur le montant de son indemnisation, au motif qu'il aurait été victime de dommages matériels résultant des infractions de vol et de dégradations constitutives d'atteintes aux biens.
Par jugement du 15 juillet 2021, la commission d'indemnisation des victimes d'infractions d'[Localité 4], l'a déclaré irrecevable en sa demande d'indemnisation, l'a débouté de sa demande d'indemnité provisionnelle, a rejeté sa demande de sursis à statuer et a laissé les dépens à la charge du Trésor Public.
Par déclaration du 4 août 2021, Monsieur [B] a formé appel de la décision.
Aux termes de ses écritures en date du 2 novembre 2021, il conclut au visa des articles 706-3 et 706-14 à l'infirmation du jugement entrepris, et demande à la cour de condamner le Fonds de garantie à lui payer une somme de 4.484,00 € en réparation de son préjudice.
Aux termes de ses écritures en date du 1er décembre 2021, le Fonds de garantie conclut à la confirmation du jugement entrepris et au rejet des demandes, fins et prétentions de l'appelant.
Pour l'exposé complet des prétentions et de l'argumentaire des parties, il est expressément renvoyé à leurs dernières écritures susvisées conformément à l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 10 janvier 2024.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la recevabilité de la demande
L'article 706-3 du code de procédure pénale dispose que toute personne ayant subi un préjudice résultant de faits volontaires ou non qui présentent le caractère matériel d'une infraction, peut obtenir la réparation intégrale des dommages qui résultent des atteintes à la personne, sous réserve que soient réunies les conditions suivantes :
- que ces atteintes n'entrent pas dans le champ d'application de l'article 53 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, ni de l'article L126-1 du code des assurances ni du chapitre 1er de la loi du 5 juillet 1985 sur les accidents de la circulation et n'ont pas pour origine un acte de chasse ou de destruction d'animaux susceptibles d'occasionner des dégâts,
- que les faits soit ont entraîné la mort, une incapacité permanente ou une incapacité totale de travail personnel égale ou supérieure à un mois, soit sont prévus et réprimés par les articles 222-22 à 222-30, 224-1 A à 224-1 C, 225-4-1 à 225-4-5, 225-14-1 et 225-14-2, et 227-25 à 227-27 du code pénal,
- que la personne lésée soit de nationalité française ou que les faits aient été commis sur le territoire national,
ce texte précise que la réparation peut être refusée ou son montant réduit à raison de la faute de la victime.
Il résulte de ce texte, que pour que sa demande soit déclarée recevable, Monsieur [B] doit d'abord établir que les faits dont il se prévaut, présentent le caractère matériel d'une infraction.
L'article 706-14 du code de procédure pénale vise toute personne, victime d'un vol, d'une escroquerie, d'un abus de confiance, d'une extorsion de fonds ou d'une destruction, d'une dégradation ou d'une détérioration d'un bien lui appartenant, ainsi que les victimes d'une atteinte à la personne prévue par l'article 706-3 dont les conséquences entraînent une incapacité totale de travail inférieure à un mois.
Toutefois, des conditions spécifiques doivent encore être remplies dans ce second régime, subsidiaire d'indemnisation.
La victime doit en effet apporter la preuve qu'elle ne peut obtenir à un titre quelconque une réparation ou une indemnisation effective et suffisante (donc simplement partielle) de son préjudice et se trouve, de ce fait, dans une situation matérielle ou psychologique grave.
Elle doit également démontrer que ses ressources sont inférieures au plafond prévu par la loi relative à l'aide juridique pour bénéficier de l'aide juridictionnelle partielle, compte tenu, le cas échéant, de ses charges de famille.
En l'espèce, comme l'ont relevé à juste titre les premiers juges, le caractère matériel de l'infraction de vol n'est pas caractérisé dès lors que s'il est certain que le poêle a granulés n'était plus présent lors de l'état des lieux de sortie, il n'a pas été relevé de traces d'effraction, ce qui ne permet pas de confirmer l'hypothèse de son enlèvement par un tiers dans l'intention de se l'approprier, et que Monsieur [B] ne justifie pas davantage en appel, des suites données à la plainte qu'il a déposée.
Il en est de même de l'infraction de dégradations alors que l'appelant ne produit pas l'état des lieux d'entrée, ce qui ne permet pas de la comparer à l'état des lieux de sortie et que l'état de saleté noté par l'huissier de justice dans son procès-verbal de constat, ne caractérise pas une telle infraction.
Enfin, Monsieur [B] ne rapporte pas la preuve qu'il ne peut obtenir à un titre quelconque une réparation ou une indemnisation effective et suffisante de son préjudice et se trouve, de ce fait, dans une situation matérielle ou psychologique grave, alors qu'il n'établit pas avoir agi contre ses anciens locataires au titre des dégradations au plan civil en vertu du bail.
En outre, le certificat établi par son médecin mentionnant un état d'anxiété après la dispariton du poêle à granulés, est insuffisant pour démontrer qu'il se trouverait dans une situation psychologique grave.
Quant au justificatif Pôle Emploi produit en vue de la déclaration sur les revenus 2020, il n'est pas de nature à établir le montant total de ses revenus pour cette année, et ne permet pas de démontrer qu'il serait trouvé dans une situation matérielle grave à la suite de la disparition du poêle à granulés
Il sera relevé en tout état de cause que devant la cour, il a réduit sa demande indemnitaire et ne sollicite plus qu'une indemnité de 4.484,00 € au titre du vol du poêle à granulés et ne formule aucune demande de provision et de sursis à statuer.
Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a déclaré Monsieur [B] irrecevable en sa demande d'indemnisation.
Sur les dépens
Les dépens seront laissés à la charge du Trésor Public.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort, mis à disposition au greffe,
CONFIRME le jugement de la commission d'indemnisation des victimes d'infractions d'[Localité 4] du 15 juillet 2021,
Y ajoutant,
LAISSE les dépens à la charge du Trésor Public.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
M. COLLET G. GUIGUESSON