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26/03/2024 | FRANCE | N°21/00315

France | France, Cour d'appel de Caen, 1ère chambre civile, 26 mars 2024, 21/00315


AFFAIRE : N° RG 21/00315 - N° Portalis DBVC-V-B7F-GVWO

 



ARRÊT N°









ORIGINE : DÉCISION du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de [Localité 19] du 11 Décembre 2020

RG n° 19/00933







COUR D'APPEL DE CAEN

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 26 MARS 2024





APPELANTE :



Madame [W] [B] épouse [A]

née le [Date naissance 5] 1961 à [Localité 16]

[Adresse 11]

[Localité 3]



représentée et assistée de Me

Pascale GRAMMAGNAC-YGOUF, avocat au barreau de CAEN







INTIMÉES :



La S.A. AXA FRANCE IARD

prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 9]

[Localité 14]



représentée et assistée de Me Olivier FE...

AFFAIRE : N° RG 21/00315 - N° Portalis DBVC-V-B7F-GVWO

 

ARRÊT N°

ORIGINE : DÉCISION du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de [Localité 19] du 11 Décembre 2020

RG n° 19/00933

COUR D'APPEL DE CAEN

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 26 MARS 2024

APPELANTE :

Madame [W] [B] épouse [A]

née le [Date naissance 5] 1961 à [Localité 16]

[Adresse 11]

[Localité 3]

représentée et assistée de Me Pascale GRAMMAGNAC-YGOUF, avocat au barreau de CAEN

INTIMÉES :

La S.A. AXA FRANCE IARD

prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 9]

[Localité 14]

représentée et assistée de Me Olivier FERRETTI, avocat au barreau de CAEN

L'Association UDAF DE L'ORNE

prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 10]

[Localité 12]

représentée et assistée de Me Christophe VALERY, avocat au barreau de CAEN

INTERVENANTE:

La S.A. ALLIANZ IARD, intimée sur appel provoqué par l'UDAF DE L'ORNE

prise en la personne de son représentant légal

N° SIRET : 542 110 291

[Adresse 1]

[Localité 13]

représentée et assistée de Me Anne-charlotte POTEL-BLOOMFIELD, avocat au barreau de CAEN

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

M. GUIGUESSON, Président de chambre,

Mme DELAUBIER, Conseillère,

Mme VELMANS, Conseillère,

DÉBATS : A l'audience publique du 12 décembre 2023

GREFFIER : Mme COLLET

ARRÊT : rendu publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile le 26 Mars 2024, après prorogation du délibéré initialement fixé au 27 février 2024, et signé par M. GUIGUESSON, président, et Mme COLLET, greffier

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

[S] [B] est décédé le [Date décès 8] 2009 à [Localité 20]-sur-[Localité 17] laissant pour lui succéder sa veuve [I] [U] et sa fille issue d'une première union, Mme [W] [A] née [B].

Aux termes d'un acte de partage en date du 28 mai 2010, les immeubles situés à [Localité 20]-sur-[Localité 17], respectivement au [Adresse 7] (maison d'habitation) et au [Adresse 2] (terrain et garage), appartiennent en usufruit à [I] [U] et en nue-propriété à Mme [A].

Par décision du 24 février 2015, le juge des tutelles d'[Localité 15] a placé [I] [U] sous le régime de la curatelle renforcée et nommé l'ACSEA service ATC en qualité de curateur.

La majeure protégée a été admise le 29 mai 2015 à l'EHPAD Marescot de Vimoutiers dans l'Orne et, suivant ordonnance du 6 octobre 2015, l'Union Départementale des Associations Familiales de l'Orne (dénommée ci-après l'UDAF de l'Orne) a été désignée en lieu et place de l'ACSEA.

Le 19 mai 2016, la mesure de curatelle renforcée a été transformée en tutelle, toujours exercée par l'UDAF de l'Orne.

Constatant des traces d'humidité dans la maison située au [Adresse 7], l'UDAF de l'Orne a sollicité la société GL Couverture pour réparer la toiture, travaux qui ont été effectués le 2 février 2017.

Des désordres hydriques persistant dans la maison, l'UDAF de l'Orne a, le 13 mars 2018, déclaré un dégât des eaux à la société Allianz, assureur multirisques habitation.

[I] [U] est décédée le [Date décès 4] 2018.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 24 mai 2018, l'UDAF de l'Orne a informé Mme [A] de la déclaration de sinistre effectuée pour le dégât des eaux et de son impossibilité de poursuivre les démarches auprès de l'assureur, son mandat ayant pris fin à la mort de la majeure protégée.

Par constat d'huissier établi le 18 mai 2018, Mme [A], ayant reçu les clés de la maison par lettre recommandée de l'UDAF de l'Orne le 7 mai précédent, a fait constater la vétusté de l'immeuble ainsi que la présence d'infiltrations, moisissures et champignons.

Par ordonnance de référé du 13 septembre 2018, le président du tribunal de grande instance de Lisieux a ordonné une expertise judiciaire, au contradictoire de l'UDAF de l'Orne, de la société Allianz Iard et de la société Axa France Iard ès qualités d'assureur de la société GL Couverture, désignant M. [R] [L] en qualité d'expert.

M. [Y] [M], désigné en remplacement de M. [L], a rendu son rapport le 29 avril 2019.

Par actes des 21 et 23 octobre 2019, Mme [A], dûment autorisée, a fait assigner à jour fixe l'UDAF de l'Orne, la société Allianz Iard et la société Axa France Iard devant le tribunal de grande instance de Lisieux en réparation des dommages subis.

Par jugement du 11 décembre 2020 auquel il est renvoyé pour un exposé complet des prétentions en première instance, le tribunal judiciaire de Lisieux a :

- déclaré nulle l'assignation délivrée par Mme [A] à l'encontre de la société Axa France Iard ;

- débouté Mme [A] de l'ensemble de ses demandes ;

- condamné Mme [A] à payer à l'UDAF de l'Orne, à la société Axa France Iard et à la société Allianz Iard la somme de 1 500 euros à chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné Mme [A] aux entiers dépens de l'instance et autorisé la SCP Ferreti-Herel-Leplatois à recouvrer directement ceux des dépens dont elle a fait l'avance en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

Par déclaration du 3 février 2021, Mme [A] a relevé appel de ce jugement, intimant l'UDAF de l'Orne et la société Axa France Iard.

Par acte du 7 juillet 2021, l'UDAF de l'Orne a fait assigner aux fins d'appel provoqué la société Allianz Iard, laquelle a constitué avocat le 19 juillet suivant.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 22 septembre 2022, Mme [A] demande à la cour de :

- la recevoir en son appel l'y déclarer bien fondée ;

- réformer la décision entreprise en ce qu'elle l'a déclarée mal fondée en ses demandes à l'encontre de l'UDAF de l'Orne et irrecevable en ses demandes à l'encontre de la société Axa France Iard ;

- les condamner in solidum à lui payer les sommes suivantes :

*58 254,93 euros TTC au titre des frais de réparations et de remise en état suite aux désordres constatés ;

*136,40 euros TTC correspondant aux mesures conservatoires de l'Eurl Couvertures Petruvien du 27 décembre 2018 ;

*650 euros par mois au titre du préjudice économique subi à compter du 1er juin 2018 jusqu'à règlement de l'ensemble des condamnations prononcées ;

*3 250 euros correspondant au préjudice subi du fait des travaux pendant 5 mois ;

*10 000 euros à titre de dommages et intérêts en indemnisation d u préjudice moral qu'elle a subi ;

- les condamner in solidum aux entiers dépens en ce compris le procès-verbal de constat de Me [C], huissier de justice à [Localité 18] pour 364,89 euros TTC, ainsi que les frais de la procédure en référé, les frais d'expertise qui se sont élevés à la somme de 5 973,60 euros ainsi qu'au paiement d'une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières écritures d'intimée n°3 notifiées le 15 décembre 2021, l'UDAF de l'Orne demande à la cour de :

A titre principal,

- confirmer le jugement rendu le 11 décembre 2020 en ce qu'il a débouté Mme [A] de ses demandes à son encontre ;

- débouter Mme [A] de l'intégralité de ses demandes à son encontre ;

A titre subsidiaire, en cas d'infirmation du jugement sur sa responsabilité,

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a retenu l'absence de faute de la société Allianz Iard ;

Statuant à nouveau,

- dire que la faute qui lui est reprochée est sans lien de causalité avec le préjudice et débouter Mme [A] de ses demandes ;

- dire que seuls les travaux conservatoires sur la charpente et de traitement fongicide d'un

montant de 8 238,82 euros auraient pu être effectués en 2017 et 2018 et débouter Mme [A] de toute autre demande ;

- dire que les conditions générales du contrat Allianz Iard ne sont pas opposables ;

- dire que l'exclusion de la garantie en raison du défaut d'entretien de son contrat n'est pas applicable ;

- condamner in solidum la société Axa France Iard et la société Allianz Iard à la garantir de la totalité des condamnations prononcées contre elle ;

- rejeter toutes les demandes formées à son encontre ;

En toute hypothèse,

- condamner Mme [A], la société Axa France Iard et la société Allianz Iard in solidum à lui payer une indemnité de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouter la société Axa France Iard de toutes ses demandes à son encontre ;

- condamner solidairement Mme [A] et tout succombant aux entiers dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions (n°3) notifiées le 4 novembre 2022, la société Axa France Iard demande à la cour de :

A titre principal,

- confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré nulle l'assignation délivrée à son encontre et débouter Mme [A] de l'ensemble de ses demandes formulées à son encontre ;

- la mettre purement et simplement hors de cause ;

A titre subsidiaire, en cas d'infirmation du jugement s'agissant de la nullité de l'assignation qui lui a été délivrée,

- dire et juger que la société GL Couverture n'a pas construit d'ouvrage, de sorte que sa responsabilité décennale n'est pas susceptible d'être engagée ;

- dire et juger que la société GL Couverture n'a commis aucune faute causale avec les réclamations de Mme [A] ;

- en conséquence, rejeter toutes demandes formulées à son encontre, fût-ce à titre de garantie ;

A titre très subsidiaire,

- dire et juger que la part maximum des responsabilités à sa charge ne saurait être supérieure à 5 % et rejeter toute condamnation solidaire à son encontre ;

- réduire les demandes de Mme [A] en fonction des observations ci-dessus, des préjudices réellement éprouvés et des éléments justificatifs versés aux débats ;

- condamner solidairement l'UDAF de l'Orne et la société Allianz Iard à la garantir de toutes éventuelles condamnations prononcées à son encontre en principal, intérêts, frais et accessoires ;

- rejeter les demandes de la société Allianz à son encontre ;

- dire et juger la franchise d'un montant de 888,87 euros opposable et déduire ce montant de toute

condamnation prononcée à son encontre ;

En toute hypothèse,

- confirmer le jugement de première instance s'agissant de la condamnation aux dépens ainsi que de l'indemnité qui lui a été allouée par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner les succombants à lui payer la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel ainsi qu'aux entiers dépens d'appel.

Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 7 octobre 2021, la société Allianz Iard demande à la cour de :

- confirmer purement et simplement le jugement dont appel et notamment en ce qu'il rejette les demandes dirigées à son encontre ;

Subsidiairement, s'il était fait droit au recours en garantie exercé à son encontre par l'UDAF de l'Orne,

- constater que les conséquences du dégât des eaux ne sont pas chiffrées par l'UDAF de l'Orne

ce qui rend sa demande irrecevable, et qu'en tout état de cause si elle était jugée recevable, que

lesdites conséquences ne pourraient être garanties qu'à hauteur du plafond de garantie visé dans les conditions générales à hauteur de 8 000 euros ;

- si toutefois une quelconque somme était mise à sa charge, la déclarer recevable et fondée à opposer sa franchise contractuelle à hauteur de 230 euros ;

- lui accorder recours et garantie contre la société Axa Iard, en indemnisation des sommes qui seraient le cas échéant mises à sa charge ;

- condamner la partie succombante à lui payer une indemnité de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture de l'instruction a été prononcée le 15 novembre 2023.

Pour l'exposé complet des prétentions et de l'argumentaire des parties, il est expressément renvoyé à leurs dernières écritures susvisées conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

Liminairement, il sera rappelé que la cour n'est pas saisie du chef de jugement ayant débouté Mme [A] de ses demandes dirigées à l'encontre de la société Allianz Iard.

-Sur la responsabilité de l'UDAF de l'Orne :

À titre infirmatif, Mme [A] invoque, sur le fondement des dispositions des articles 1240 et 1241 du code civil, les fautes commises par l'UDAF de l'Orne au titre du mandat de protection exercé auprès de [I] [U], à l'origine des dommages subis par elle, nu-propriétaire du bien immobilier litigieux et tiers à ce mandat.

Elle reproche au tuteur au bien de ne pas avoir respecté ses obligations de conserver le logement et les biens meublants en ne procédant pas aux réparations de la toiture idoines dès 2015, ce qui a entraîné sa dégradation constatée par huissier de justice le 18 mai 2018 puis par l'expert judiciaire. Elle lui fait encore grief de ne pas avoir valorisé le patrimoine de la majeure protégée en ne donnant pas l'immeuble en location, à tout le moins dans sa partie non dégradée, alors que les loyers perçus ajoutés à son épargne auraient permis de financer les travaux nécessaires à son entretien.

En définitive, Mme [A] soutient que l'inaction de l'UDAF de l'Orne et pour le moins sa négligence sont à l'origine d'une dégradation des lieux d'une telle ampleur que le coût de réfection a été évalué par l'expert à la somme de 58 254,93 euros.

A titre confirmatif, l'UDAF de l'Orne fait valoir sur le fondement des articles 421 et 1240 du code civil, que Mme [A] ne rapporte pas la preuve d'une quelconque faute commise dans l'exécution de son mandat exercé durant seulement deux ans et demi et qui serait la cause du préjudice subi de sorte que sa responsabilité quasi délictuelle n'a pas à être retenue.

Elle ajoute que l'expert a lui-même imputé une partie des désordres relevés à la vétusté, à distinguer d'un éventuel défaut d'entretien du tuteur entre 2015 et 2018. Elle assure qu'elle s'est acquittée de son obligation de veiller à la conservation de l'immeuble de la majeure protégée, laquelle n'est que de moyen, en particulier, en faisant appel par deux fois à des professionnels -couvreur et plombier chauffagiste- pour tenter de remédier aux fuites constatées, ainsi qu'en procédant à une déclaration de sinistre sans délai auprès de la société Allianz Iard.

L'UDAF de l'Orne soutient encore que le défaut d'établissement d'un inventaire même avéré est sans lien avec les dommages subis, qu'elle n'avait aucune obligation de mettre le bien en location, alors qu'il était de l'intérêt de la majeure protégée de ne pas conclure de bail portant sur un logement indécent et que celle-ci ne disposait pas des fonds suffisants pour la remise en état nécessaire et préalable du dit bien.

Sur ce,

Selon l'article 421 du code civil, tous les organes de la mesure de protection judiciaire sont responsables du dommage résultant d'une faute quelconque qu'ils commettent dans l'exercice de leur fonction.

L'action en responsabilité contre le mandataire judiciaire prévue par ce texte est réservée au majeur protégé, son représentant légal ou à ses ayants droit. Toutefois, les tiers sont recevables à rechercher la responsabilité du tuteur ou curateur sur le fondement des articles 1382 ancien devenu 1240 et 1383 ancien devenu 1241 du code civil, lesquels disposent que tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer, et que chacun est responsable du dommage qu'il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou son imprudence.

Il appartient au tiers de caractériser la faute du tuteur et le préjudice qui en est résulté pour lui, en lien avec cette faute.

Dans ces conditions, il revient à Mme [A], qui n'est pas héritière de [I] [U], de démontrer en application des articles précités, les fautes qu'elle entend reprocher à l'UDAF de l'Orne, son préjudice et le lien de causalité existant entre les fautes et le dommage.

En l'espèce, [I] [U] a bénéficié d'une mesure de curatelle renforcée suivant jugement du juge des tutelles d'[Localité 15] rendu le 24 février 2015, puis d'une mesure de tutelle à compter du 19 mai 2016 lesquelles ont été successivement confiées à l'UDAF de l'Orne à compter du 6 octobre 2015. En application des articles 418 et 443 du code civil, le mandat de l'UDAF de l'Orne a pris fin au décès de la majeure protégée survenu le [Date décès 4] 2018, de sorte que la période à examiner au titre de la responsabilité de l'intimée porte sur 30 mois et 10 jours, soit du 6 octobre 2015 au [Date décès 4] 2018.

Dans le cadre de l'exercice de sa mission de protection, il appartenait au mandataire judiciaire, en application de l'article 496 du code civil, d'assister dans un premier temps, puis de représenter [I] [U] dans les actes nécessaires à la gestion de son patrimoine et, à ce titre, d'apporter dans celle-ci, des soins prudents, diligents et avisés ce, dans le seul intérêt de la personne protégée.

Le dommage allégué par Mme [A] qui sollicite la réparation du préjudice en résultant porte sur l'état dégradé de la maison située [Adresse 6] à [Localité 21] et dont elle était nu-propriétaire, en sa partie atteinte par des inondations provenant de la toiture, étant précisé qu'aux termes de l'acte de partage du 28 mai 2010, ce bien était mentionné 'en bon état' et que par dérogation à l'article 605 du code civil, les parties avaient convenu que [I] [U], usufruitière, supporterait, 'en sus des réparations dites d'entretien, les grosses réparations telles qu'elles sont définies à l'article 606 du dit code'.

Si l'article 606 susvisé intègre 'les couvertures entières' au titre des grosses réparations, l'article 607 précise que 'ni le propriétaire ni l'usufruitier ne sont tenus de rebâtir ce qui est tombé de vétusté, ou ce qui a été détruit par cas fortuit'.

Il ressort du procès-verbal de constat d'huissier du 18 mai 2018 que les murs et plafonds de la cuisine, comme ceux de la cage d'escalier conduisant à l'étage, du dressing, du cabinet de toilette et des deux petites chambres, comportent de nombreuses traces de moisissures, voire d'infiltrations, des fissures, cloques, avec des petits champignons noirs apparaissant par endroits à l'intérieur des fissures anciennes. Les murs du dressing particulièrement, sont notés comme gorgés d'eau et son plafond dont le plâtre est partiellement tombé au sol est recouvert de champignons dont le stade est avancé tout comme dans le cabinet de toilette, ces deux pièces étant qualifiées d''insalubres' par l'huissier.

Dans son rapport du 29 avril 2019, l'expert judiciaire renvoie à la lecture de ce constat s'agissant de la description des désordres dont la maison est atteinte lors de la première réunion du 18 mai 2018 relevant au surplus, des flaques d'eau au sol dans la cuisine, le dressing, la salle d'eau et le grenier, toutes ces pièces étant estimées insalubres par M. [M]. Après diverses investigations utiles à la recherche des causes des désordres et l'enlèvement total des meubles, la présence d'un 'trou dans le bas du rampant Est en tuiles plates', découvert par Mme [A], a été confirmée par l'expert judiciaire lors de la réunion du 16 janvier 2019. Il affirme alors que 'les graves dommages hydriques constatés viennent de façon certaine de la couverture tuiles de l'aile sur cour et du rampant nord de la couverture en ardoises', estimant que 'la cause première des dommages est donc la vétusté des couvertures', et ajoutant 'une cause secondaire possible restant à investiguer au niveau du réseau chauffage'. Depuis un échafaudage en éventail dressé en cours d'expertise par une entreprise de couverture, il relève 'la vétusté générale de la couverture en tuiles plates de l'aile sur la cour, avec bâchage ponctuel par trou en bas de rampant Est sur environ 1,50m2, l'état hors service de la gouttière pendante Est engendrant des coulures sur le mur de façade Est en contrebas, des solins et garnitures d'étanchéité en mauvais état, tant sur couverture tuiles que sur couverture ardoises, des ardoises manquantes et d'autres qui glissent, des joints délités sur la souche de cheminée en briques, la présence de colombages dans la façade aveugle nord au contact de la couverture tuiles et du bardage ardoise Est'. S'il conclut que l'origine des désordres vient de la 'négligence dans l'entretien des couvertures sur cour', il admet que la dégradation générale des couvertures en cause n'est pas un fait récent mais bien antérieur à la période au cours de laquelle l'UDAF de l'Orne exerçait en qualité de curatrice.

L'existence d'une dégradation patente de la maison depuis 2010 est incontestable tout comme son origine résidant dans la vétusté de la toiture qui s'est abîmée au point de ne plus remplir sa fonction d'étanchéité.

Pour autant, le tribunal a considéré que cette dégradation ne pouvait être rattachée à un quelconque manquement de l'UDAF de l'Orne, et la cour ne peut qu'approuver le premier juge dont la motivation sera adoptée pour les raisons suivantes.

En premier lieu, ainsi que le relève avec exactitude le tribunal, aucun élément ne permet de déterminer l'état de la maison où logeait [I] [U] à la date de son départ en EHPAD le 29 mai 2015, soit cinq ans après la signature de l'acte de partage. Les attestations versées au débats en cause d'appel par Mme [A] émanant de voisins (pièces 48 et 50) assurant que 'la maison était entretenue' et sans humidité ne sauraient suffire à présumer de l'état de la couverture ni même de l'absence à cette période de la moindre infiltration alors que les dégâts constatés par l'huissier le 18 mai 2018, puis l'expert le 9 novembre 2018, concerneront principalement le dressing et la salle d'eau, à l'exclusion de la salle à manger et que par ailleurs, il sera relevé que les pièces entièrement meublées, les habillages muraux comme ceux des rampants ne permettaient pas de visualiser alors tous les dommages hydriques. De surcroît, les attestations des fils de Mme [A] (MM. [E] et [N] [A] : pièces 49 et 51), même à les considérer suffisamment objectives en dépit du lien de parenté de leurs auteurs avec l'appelante, n'évoquent pas précisément de visites postérieurement à 2012.

Enfin, il sera rappelé que la mesure de curatelle renforcée a été exercée par l'ACSEA et non l'UDAF de l'Orne du 24 février 2015 au 6 octobre suivant et il n'est produit aucun élément de nature à établir l'état exact de la maison durant cette période, pas même un inventaire auquel était tenu de procéder l'association initialement désignée en application de l'article 503 du code civil.

A cet égard, l'UDAF de l'Orne relève à juste titre que le défaut d'accomplissement d'un inventaire, lequel doit comprendre en application de l'article 1253 du code de procédure civile, une estimation des biens immobiliers, est sans lien avec le dommage allégué dès lors que celle-ci, avant tout quantitative et estimatoire, ne constitue pas 'un état des lieux exhaustif', et qu'au demeurant, l'estimation du bien à laquelle le mandataire judiciaire a fait procéder le 5 septembre 2017 par Me [Z] [O], notaire, ne contient aucune mention concernant la toiture ou l'état particulièrement dégradé de la maison.

Plus généralement, alors que selon l'expert, l'état vétuste de la toiture préexistait à la prise de fonction de l'UDAF de l'Orne, celle-ci n'avait pas l'obligation de procéder à une révision complète des ouvertures alors que [I] [U] avait quitté son logement depuis le 29 mai 2015 sans qu'il soit contesté qu'un retour à domicile n'était nullement envisagé, et qu'une première fuite sera constatée par le mandataire judiciaire en janvier 2017 à l'occasion de sa visite de l'immeuble pour relever le compteur d'alimentation en eau potable.

Aucun élément ne permet de retenir l'existence d'infiltrations avant cette date et il n'est pas réellement remis en cause ainsi que l'indique l'expertise que les dommages sont apparus dans leur ampleur au début de l'année 2018.

En second lieu, il est établi que suite à ses constatations faites en janvier 2017, l'UDAF de l'Orne a fait appel le 31 janvier 2017 (sa pièce 18) à la société GL Couverture pour remédier aux dégradations à l'origine de la fuite relevée, laquelle, a, selon facture du 2 février 2017, procédé à la 'réparation sur toitures ardoise et tuile avec fourniture' pour un montant de 503,80 euros. Il est par ailleurs démontré que le mandataire judiciaire s'est rapproché du notaire dès le 21 février 2017 pour une estimation de la valeur vénale du bien afin d'envisager une renonciation à l'usufruit, que cette estimation a eu lieu le 23 mai suivant, soit postérieurement à l'exécution des travaux, 'compte tenu de l'état d'entretien' de la maison mais sans observation particulière sur l'état de vétusté de la toiture, d'éventuels travaux à accomplir ni à fortiori d'éventuels dommages tels que ceux qui seront relevés en 2018, et qu'enfin, par mail du 1er août 2017, l'UDAF de l'Orne a demandé au notaire les coordonnées de la nu-propriétaire (fille de feu M. [B]) afin de pouvoir la contacter (pièce 2 de l'UDAF de l'Orne) après avoir rappelé les travaux de réparation de la toiture réalisés précédemment 'à titre conservatoire'.

Il en résulte, comme l'a relevé le tribunal, qu'aucun élément ne permettait alors à l'UDAF de l'Orne de douter de l'efficacité de la réparation faite par la société GL Couverture alors que son intervention ne s'était nullement limitée à un simple bâchage de la toiture, ni de se convaincre de la nécessité voire de l'urgence de procéder à des travaux supplémentaires de plus grande ampleur.

En dernier lieu, il est tout autant avéré qu'à l'occasion d'une visite de l'immeuble pour la vérification de l'installation de chauffage par l'entreprise Sanders (cf facture du 29 mars 2018 pièce 5 de l'UDAF de l'Orne), une nouvelle fuite a été constatée avec des dégâts reconnus plus importants, ce qui a donné lieu à l'établissement d'un devis 'pour les travaux chauffage suite à un dégât des eaux' par le plombier qui soupçonnait alors l'existence d'une fuite dans le circuit de chauffage, à une déclaration de sinistre par le mandataire auprès de la société Allianz, assureur multirisques habitation, et, sur demande de ce dernier, à une nouvelle demande de devis pour recherche de fuite par l'UDAF de l'Orne, le 3 avril 2018 renouvelée avant le décès de [I] [U] le [Date décès 4] suivant.

Le premier juge a ainsi exactement considéré qu'à compter du constat de la dégradation du bien, l'UDAF de l'Orne s'était montrée réactive en temps utile pour remédier aux désordres tels qu'identifiés, et que celle-ci avait agi dans l'intérêt de la majeure protégée, usufruitière, en conservant le bien et valorisant les actifs dans la perspective première de financer les charges d'hébergement, prioritairement à la réalisation de travaux d'ampleur de la maison que [I] [U] n'avait plus vocation à habiter ni les moyens de rénover.

A cet égard, les fiches budgétaires produites par l'UDAF de l'Orne démontrent que ses ressources d'un montant total de 1509,70 euros ne couvraient pas même ses dépenses d'hébergement en EHPAD et de charges courantes pour un montant total de 2607,27 euros. Le tuteur justifie avoir été autorisée par le juge des tutelles à plusieurs reprises à clôturer ses contrats d'assurance vie d'un montant total de 33 035,22 euros alors que les factures d'hébergement de mars à septembre 2016 d'un montant total de 12500 euros, n'avaient pas été réglées faute de liquidités suffisantes sur le compte individuel (pièces 20 à 26 de l'UDAF de l'Orne). La demande d'admission de [I] [U] à l'aide sociale du 9 janvier 2018 à laquelle il sera fait droit établit l'insuffisance de ressources de la majeure protégée pour procéder à des travaux d'importance sur la toiture même à supposer que leur nécessité eut été caractérisée durant cette période.

Et c'est avec le même souci d'assurer prioritairement le paiement des frais d'hébergement dans l'intérêt de la majeure protégée, que l'UDAF de l'Orne s'était renseignée auprès du notaire afin de pouvoir renoncer, au nom de [I] [U] qu'elle représentait, à l'usufruit du bien litigieux dont les charges ne pouvaient qu'aggraver la situation financière déjà obérée de la majeure protégée.

Enfin, c'est à tort que Mme [A] reproche à l'UDAF de l'Orne de ne pas avoir donné en location le dit bien pour obtenir des ressources supplémentaires qui auraient permis de remédier au fur et à mesure aux infiltrations et d'éviter l'aggravation des désordres de la couverture. En effet, si l'appelante produit plusieurs annonces locatives dont il résulterait une valeur locative moyenne de 8,75 euros le m2, affirmant que le bien était en bon état général du temps de l'occupation de la de cujus et que les dégradations du bien concernaient seulement la partie de l'immeuble couverte en tuiles et non celle couverte en ardoises, il doit être relevé que les seules attestations de voisins et des fils de Mme [A] déjà citées sont insuffisantes à caractériser l'existence d'un bien en état d'entretien suffisamment conforme aux exigences réglementaires en la matière pour être donné en location sans engager des frais supplémentaires de travaux, diagnostics et démarches diverses à accomplir par le mandataire judiciaire, lequel au demeurant, n'exerce pas des fonctions d'administrateur de biens immobiliers. Au surplus, il apparaissait difficile de donner en location la seule partie du bien sous couverture en ardoises telle que suggérée, laquelle ne concerne que la salle à manger et la chambre du premier étage à l'exclusion de la cuisine, toilettes et salle de bain, sans compter l'état dégradé de l'escalier à emprunter.

Du tout il en résulte qu'en l'absence de manquement de l'UDAF de l'Orne à ses obligations de mandataire judiciaire exercées en faveur de [I] [U], le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme [A] de l'ensemble de ses demandes présentées à son encontre.

Il s'en suit que le recours en garantie exercé par l'UDAF de l'Orne à l'encontre des sociétés Axa France Iard et la société Allianz Iard, devenus sans objet, seront rejetés.

- Sur la responsabilité de la société GL Couvertures et la garantie de la société Axa France Iard :

Mme [A] sollicite la réformation du jugement en ce qu'à tort, le jugement a déclaré nulle l'assignation dirigée à l'encontre de la société Axa France Iard pour défaut d'exposé des moyens de droit alors que cet acte faisait état de la faute contractuelle de la société GL couverture, et que par conclusions ultérieures, elle invoquait au surplus la responsabilité décennale et civile du couvreur ainsi que les dispositions de l'article 1792 du code civil. Elle assure que le préjudice qu'elle invoque est né dans le cadre de l'activité de couverture telle que garantie par la société Axa France Iard afin de couvrir les conséquences de la responsabilité civile de l'entreprise en l'occurrence engagée par sa négligence au sens de l'article 1241 du code civil.

Au fond, Mme [A] fait valoir que la société GL couverture a manqué à son devoir de conseil à l'égard de l'UDAF de l'Orne ainsi que l'a souligné l'expert judiciaire de sorte que la société Axa France Iard doit l'indemniser des préjudices subis au titre de la responsabilité civile professionnelle souscrite par le couvreur.

La société Axa France Iard avait soulevé in limine litis la nullité de l'assignation délivrée à son encontre au cours de la première instance, en raison de l'absence de fondement juridique allégué.

A titre confirmatif, elle reprend en cause d'appel son argumentation ajoutant que les conclusions ultérieures de Mme [A] n'ont rien ajouté à l'exclusion de visas généraux et qu'ainsi, elle n'a pas été en mesure d'assurer utilement sa défense. Elle relève au surplus que les conclusions d'appel de Mme [A] ne visent à nouveau aucun fondement juridique, rappelant que la 'responsabilité civile professionnelle' ne constitue pas davantage un tel fondement.

En toutes hypothèses, l'assureur estime ces demandes mal fondées en l'absence de toute faute commise par la société GL Couverture de nature à engager sa responsabilité tant sur un plan délictuel que contractuel mais aussi de tout lien de causalité avec les préjudices subis par l'appelante.

Sur ce,

- Sur la nullité de l'assignation :

Selon l'article 56 du code de procédure civile, l'assignation contient à peine de nullité un exposé des moyens de fait et de droit.

En application de l'article 114 du code de procédure civile, la nullité d'un acte de procédure ne peut être prononcée qu'à charge pour l'adversaire qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité, même lorsqu'il s'agit d'une formalité substantielle ou d'ordre public.

Le premier juge a fait droit à cette demande, retenant l'existence d'un grief tel qu'allégué par la société Axa France Iard, lié à l'impossibilité de se défendre et de comprendre ce qui lui est reproché.

Il ressort néanmoins de l'assignation que Mme [A], qui recherchait 'en premier lieu' la responsabilité de l'UDAF de l'Orne pour solliciter la réparation des dommages subis en raison de ses manquements à ses obligations de mandataire judiciaire, réclamait la condamnation in solidum du tuteur avec la société Axa France Iard, assureur de l'entreprise GL couverture avec laquelle l'UDAF de l'Orne avait contracté, en invoquant les manquements de l'assurée à son devoir de conseil envers cette dernière tels que soulignés par l'expert judiciaire, comme l'absence de réparation 'correcte' de la toiture, à l'origine des dommages subis par Mme [A], tiers à la relation tuteur/couvreur, de sorte que l'objet de la demande était bien exprimé de façon implicite, sur un fondement délictuel ou quasi-délictuel au titre des manquements contractuels de l'entreprise GL couverture envers l'UDAF de l'Orne dans l'exercice de ses fonctions.

Au surplus, dans ses conclusions récapitulatives devant le tribunal (sa pièce 46), Mme [A] développait ce moyen de droit en invoquant le manquement de la société GL Couvertures à son devoir de conseil à l'égard de l'UDAF de l'Orne, manquement caractérisant selon elle une faute contractuelle à l'égard du tuteur, lui donnant la possibilité d'agir à l'encontre de l'assureur sur le fondement de l'article 1240 du code civil.

Par ailleurs, Mme [A] invoquait un autre moyen en expliquant que la société GL Couvertures avait engagé sa responsabilité sur le fondement de l'article 1792 du code civil en ce que les infiltrations affectant la couverture constituaient des désordres de nature décennale alors que la facture du 2 février 2017 relative à son intervention mentionnait que le couvreur était assuré auprès de la société Axa Iard au titre de sa responsabilité décennale et civile professionnelle. Elle précisait encore qu'il appartenait à l'assurée, lors de son intervention, de faire tous les travaux nécessaires pour faire cesser les infiltrations, ce qu'elle n'avait pas fait, de sorte que son assureur lui devait sa garantie.

Enfin, Mme [A] soulevait un dernier moyen sur le fondement de l'article L. 124-3 du code des assurance qui, selon elle, lui donnait le droit d'agir directement contre la société Axa Iard.

Il en ressort que Mme [A] a, s'il en était besoin, régularisé l'absence de fondement juridique de son assignation, en présentant différents moyens de droit à l'appui de sa demande de condamnation de la société Axa Iard.

En tout état de cause, il apparaît que la société Axa Iard a été en mesure de se défendre utilement ainsi qu'en atteste l'exposé des faits, prétentions et moyen des premiers juges reprenant les moyens de défense développés en réplique par l'assureur (p5/11 du jugement).

En conséquence, le jugement sera infirmé en ce qu'il a déclaré nulle l'assignation délivrée par Mme [A] à la société Axa France Iard et la demande d'annulation de la dite assignation sera rejetée.

Au fond :

Il résulte de l'article 1240 du code civil que le tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel dès lors que ce manquement lui a causé un dommage.

Il appartient en conséquence à Mme [A] de rapporter la preuve du manquement contractuel reproché à la société GL Couverture et de son lien de causalité avec le dommage subi alors que l'appelante sollicite d'être indemnisée au titre du coût des réparations de la couverture (rénovation complète de 42 m2 de la couverture en tuiles plates incluant la réparation de la charpente), des frais de remise en état (50 016,11 euros) et des mesures conservatoires (136,40 euros), et aussi au titre de ses préjudices économique, de jouissance et moral.

Pour caractériser le manquement du couvreur à son devoir de conseil, Mme [A] se réfère au rapport d'expertise judiciaire, lequel conclut sur les responsabilités encourues : 'les réparations ponctuelles de février 2017, sur des couvertures vétustes, auraient dû conduire l'entreprise GL-couverture à conseiller à l'UDAF leur intervention (...).'

Pour autant, il est établi que suivant facture du 2 février 2017, conforme au devis accepté par l'UDAF de l'Orne du 31 janvier 2017, la société GL Couvertures a procédé à des travaux de 'réparation sur toiture ardoise et tuiles avec fournitures' à la demande du représentant de [I] [U], à la suite de son constat d'une fuite à l'intérieur de la maison.

L'UDAF de l'Orne affirme que l'intervention 'a mis fin à la fuite qui avait été constatée' et nul ne vient contester en cause d'appel la qualité de la réparation effectuée, étant relevé que le mandataire judiciaire a indiqué au notaire qu'ils avaient été exécutés à titre conservatoire. Enfin, si l'état de vétusté de la couverture devait être visible lors de l'intervention du couvreur, il n'est pas prétendu que 'le trou dans le bas du rampant Est en tuiles plates'découvert en cours d'expertise et qui est à l'origine d'infiltrations et désordres concerne précisément la partie limitée de la couverture sur laquelle est intervenue la société GL Couvertures, ni que ce désordre existait déjà lors de son intervention ce, alors que les conséquences des infiltrations par ce trou n'ont pas été relevées lors de l'estimation du bien en mai 2017. Dans ces conditions, il ne peut être reproché au couvreur de ne pas avoir informé l'UDAF de l'Orne de la nécessité voire de l'urgence de rénover la partie de toiture telle que préconisée par l'expert, alors que sa réparation réalisée conformément et dans les limites de la demande du tuteur, ne présentait pas un caractère 'provisoire' nécessitant à court terme, sur la partie objet de sa réparation, une autre intervention plus importante, ce dont l'entrepreneur aurait dû aviser la cliente le cas échéant, étant rappelé que les fuites ultérieures seront constatées au printemps 2018 soit plus d'une année après son intervention.

Enfin, et en tout état de cause, le préjudice consécutif au manquement du professionnel à son devoir de conseil a la nature de la perte d'une chance, et le préjudice causé par une telle perte est distinct de l'avantage qu'aurait procuré la chance perdue si elle s'était réalisée. Or, la situation financière de [I] [U] en début d'année 2017 et la priorité donnée au paiement de ses frais d'hébergement dans l'intérêt de la majeure protégée, ne permettent pas de retenir que l'UDAF de l'Orne, dûment informée par la société GL Couvertures, aurait procédé aux travaux de rénovation préconisés par l'expert. Ainsi, le lien de causalité entre le manquement de la société GL Couvertures, à supposer établi, et les dommages allégués par Mme [A] n'est pas établi.

Pour l'ensemble de ces motifs, Mme [A] sera déboutée de ses demandes dirigées à l'encontre de la société Axa Iard.

- Sur les demandes accessoires :

Le jugement doit être confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

Au regard des situations économiques respectives des parties, l'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

Mme [A], partie qui succombe, sera condamnée aux entiers dépens de la procédure d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Statuant dans les limites de sa saisine, par arrêt contradictoire rendu en dernier ressort, publiquement par mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement rendu le 11 décembre 2020 par le tribunal judiciaire de Lisieux sauf en ce qu'il a déclaré nulle l'assignation délivrée par Mme [W] [A] née [B] à l'encontre de la société Axa France Iard ;

Statuant à nouveau du seul chef infirmé et y ajoutant,

Rejette la demande d'annulation de l'assignation délivrée par Mme [W] [A] née [B] à l'encontre de la société Axa France Iard ;

Rejette les demandes présentées par Mme [W] [A] née [B] à l'encontre de la société Axa France Iard ;

Rejette toutes les autres demandes formées par les parties en ce compris les demandes présentées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel ;

Condamne Mme [W] [A] née [B] aux dépens de la procédure d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

M. COLLET G. GUIGUESSON


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Caen
Formation : 1ère chambre civile
Numéro d'arrêt : 21/00315
Date de la décision : 26/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 01/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-26;21.00315 ?
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