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19/03/2024 | FRANCE | N°21/02242

France | France, Cour d'appel de Caen, 1ère chambre civile, 19 mars 2024, 21/02242


AFFAIRE : N° RG 21/02242 -

N° Portalis DBVC-V-B7F-GZZO





ARRÊT N°



JB.





ORIGINE : Décision du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de CAEN du 08 Juillet 2021

RG n° 20/01087







COUR D'APPEL DE CAEN

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 19 MARS 2024





APPELANTE :



La S.A. CNP ASSURANCES

N° SIRET : 341 737 062

[Adresse 2]

[Localité 4]

prise en la personne de son représentant légal



représe

ntée et assistée de Me Brigitte JUSSEAUME, avocat au barreau de CAEN



INTIMÉE :



Madame [P] [B]

née le 28 Juillet 1970 à [Localité 5]

[Adresse 3]

[Localité 1]



représentée et assistée de Me Valérie CHEVRIER, avoc...

AFFAIRE : N° RG 21/02242 -

N° Portalis DBVC-V-B7F-GZZO

ARRÊT N°

JB.

ORIGINE : Décision du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de CAEN du 08 Juillet 2021

RG n° 20/01087

COUR D'APPEL DE CAEN

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 19 MARS 2024

APPELANTE :

La S.A. CNP ASSURANCES

N° SIRET : 341 737 062

[Adresse 2]

[Localité 4]

prise en la personne de son représentant légal

représentée et assistée de Me Brigitte JUSSEAUME, avocat au barreau de CAEN

INTIMÉE :

Madame [P] [B]

née le 28 Juillet 1970 à [Localité 5]

[Adresse 3]

[Localité 1]

représentée et assistée de Me Valérie CHEVRIER, avocat au barreau de CAEN

DÉBATS : A l'audience publique du 18 janvier 2024, sans opposition du ou des avocats, M. GUIGUESSON, Président de chambre, a entendu seul les observations des parties sans opposition de la part des avocats et en a rendu compte à la Cour dans son délibéré

GREFFIER : Mme COLLET

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

M. GUIGUESSON, Président de chambre,

Mme DELAUBIER, Conseillère,

Mme VELMANS, Conseillère,

ARRÊT : rendu publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile le 19 Mars 2024 et signé par M. GUIGUESSON, président, et Mme COLLET, greffier

* * *

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Le 19 septembre 1995, M. [Y] a souscrit un contrat collectif d'assurance-vie 'Poste avenir' par la Poste auprès de la société Cnp Assurances désignant Mme [M] [Y], sa mère, comme bénéficiaire.

Par courrier du 24 juin 2014, M. [Y] a modifié la clause bénéficiaire et a désigné à parts égales comme bénéficiaires M. [J] [K], Mme [T] [K], M. [H] [W], Mme [P] [B] épouse [X], M. [I] [X], M. [L] [U], Mme [O] [V] et à défaut ses héritiers.

M. [Y] est décédé le 5 juillet 2014.

Le 25 septembre 2014, la société Cnp Assurances a versé à Mme [P] [B] épouse [X] la somme de 42 619,95 euros. Par courrier du 24 novembre 2016, la société d'assurances a réclamé à Mme [B] le remboursement d'une partie de cette somme à hauteur de 11 797,88 euros, estimant qu'elle avait été incluse à tort dans le capital de l'assurance vie qui aurait dû revenir à la succession.

La société Cnp Assurances, sur les préconisations de la médiation de l'assurance, a réduit de moitié sa demande en restitution de l'indu et a sollicité de Mme [B] le remboursement de la somme de 5 898,94 euros.

Suite au refus de Mme [B], une mise en demeure lui a été adressée le 18 septembre 2018.

Par acte d'huissier du 25 février 2020, la société Cnp Assurances a fait assigner Mme [B] devant le tribunal judiciaire de Caen aux fins d'obtenir à titre principal sa condamnation au paiement de la somme de 5 898,94 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 18 septmbre 2018.

Par jugement du 8 juillet 2021 auquel il est renvoyé pour un exposé complet des prétentions en première instance, le tribunal judiciaire de Caen a :

- déclaré irrecevables comme étant prescrites les demandes de la société Cnp Assurances ;

- condamné la société Cnp Assurances à verser à Mme [B] une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- débouté la société Cnp Assurances de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la société Cnp Assurances aux dépens ;

Par déclaration du 28 juillet 2021, la société Cnp Assurances a formé appel de ce jugement.

Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 22 décembre 2023, la société Cnp Assurances demande à la cour de :

- débouter Mme [B] de ses moyens, fins et prétentions ;

- infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Caen en date du 8 juillet 2021 en l'intégralité de ses dispositions ;

statuant à nouveau,

- juger recevable comme non prescrite son action diligentée selon assignation en date du 25 février 2020 ;

- juger qu'elle est bien fondée en son action ;

- condamner Mme [B] à lui restituer la somme de

- 5 898,94 euros au principal, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 18 Septembre 2018 ;

- condamner Mme [B] à payer la somme de 589,89 euros à titre de dommages et intérêts ;

- condamner Mme [B] à payer la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 ducode de procédure civile ;

- condamner Mme [B] aux entiers dépens.

Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 18 décembre 2023, Mme [B] demande à la cour de :

- rejeter l'appel interjeté par la société Cnp Assurances ainsi que ses entières demandes ;

- confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Caen le 8 juillet 2021 en l'intégralité de ses dispositons;

- à titre subsidiaire, et dans l'hypothèse ou l'action de la société Cnp Assurances serait jugée recevable,

- déclarer mal fondée l'action en restitution formée par la société Cnp Assurances à son encontre ;

- débouter la société Cnp Assurances de l'intégralité de ses demandes formées à son encontre ;

- à titre plus subsidiaire, et dans l'hypothèse où la demande en restitution de la société Cnp Assurances serait jugée fondée,

- dire que la société Cnp Assurances a commis une faute dans l'exécution du mandat qui lui a été confié le 29 juin 2014 et qui lui a causé un préjudice ;

- en conséquence, condamner la société Cnp Assurances à lui verser une somme de 5 898,94 euros en réparation de son préjudice ;

- ordonner la compensation entre les sommes qui pourraient être respectivement dues ;

- à titre encore plus subsidiaire,

- réduire la restitution à l'Euro symbolique ;

- dans tous les cas,

- débouter la société Cnp Assurances de ses demandes en paiement d'intérêts et de dommages et intérêts et d'indemnité fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société Cnp Assurances à lui verser une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société Cnp Assurances aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture de l'instruction a été prononcée le 10 janvier 2024.

Pour l'exposé complet des prétentions et de l'argumentaire des parties, il est expressément renvoyé à leurs dernières écritures susvisées conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

- Sur la prescription de l'action de la société Cnp Assurances :

La société Cnp Assurances sollicite l'infirmation du jugement entrepris en ce qu'il a considéré que l'ensemble de ses demandes étaient irrecevables comme prescrites.

La société Cnp Assurances fait grief au jugement entrepris en ce qu'il a considéré que le point de départ du délai de prescription devait être fixé au 25 septembre 2014 soit au jour du versement du capital décès à Mme [B], qu'elle disposait de l'ensemble des renseignements sur la date du décès de M. [Y] et sur celle du virement sur le compte d'assurance vie, qu'elle savait que la somme de 83 000 euros était incluse dans le capital qu'elle distribuait et que dès lors son action en répétition de l'indu introduite par assignation en date du 25 février 2020 était nécessairement prescrite.

La société Cnp Assurances soutient au contraire que le point de délai de prescription doit être fixé au 2 novembre 2016, date à laquelle l'une des héritières de M. [Y], Mme [R], a contesté le prélèvement effectué sur le compte postal après le décès de M. [Y] pour abonder le capital de l'assurance vie et que dès lors ce n'est qu'à cette date qu'elle a eu effectivement connaissance de cette difficulté.

Mme [B] sollicite au contraire la confirmation du jugement entrepris aux motifs que le point de départ du délai de prescription pouvait être fixé au 25 septembre 2014 tel que retenu par le juge de première instance ou au plus tard le 23 décembre 2014.

Elle affirme qu'à la date du 25 septembre 2014, la société Cnp Assurances avait connaissance ou aurait du connaître le caractère indu du versement aux motifs qu'à cette date, lorsque le capital de l'assurance vie a été distribué entre les bénéficiaires, elle avait ou devait avoir connaissance de la date de décès du M. [Y] survenu le 5 juillet 2014, de la date à laquelle la somme de 83 000 euros dont le défunt avait demandé le virement sur son assurance vie avait été portée au crédit de ce compte le 15 juillet 2014 selon les propres affirmations de la société Cnp Assurances et le fait que cette somme avait été incluse dans le capital de l'assurance-vie qu'elle venait de distribuer.

Mme [B] conteste dès lors qu'à la date du 25 septembre 2014, la société Cnp Assurances n'était pas en possession de tous les éléments lui permettant d'exercer son action.

Mme [B] ajoute qu'en tout état de cause, le délai de prescription a commencé à tout le moins à courir à la date du 23 décembre 2014 date à laquelle la société Cnp Assurances a procédé à un traitement de la situation concernant le dossier de M. [Y] et que dès lors, elle aurait du se rendre compte de la difficulté concernant le versement litigieux.

A défaut de dispositions propres aux quasi contrats, les actions en répétition de l'indu sont soumises au délai de prescription de droit commun prévu par les dispositions de l'article 2224 du code civil.

Aux termes de l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

Il est constant que l'action en répétition de l'indu est engagée à la date où le paiement est devenu indu, le point de départ du délai de prescription étant fixé au jour où le solvens a connu ou aurait du connaître le caractère indu du paiement.

SUR CE :

En l'espèce, il est établi qu'à la date du 25 septembre 2014, la somme de 42 619,95 euros a été virée sur le compte de Mme [B], cette somme correspondant à la part devant lui revenir aux termes du courrier de modification de la clause bénéficiaire par M. [Y] en date du 24 juin 2014.

La société Cnp Assurances persiste à soutenir en cause d'appel qu'à cette date qu'elle n'était pas en possession l'ensemble des informations nécessaires lui permettant d'exercer une action en répétition de l'indu et que ce n'est qu'à partir du 2 novembre 2016 qu'elle aurait effectivement été informée d'une difficulté concernant le versement de la somme de 83 000 euros sur le compte assurance vie.

Il résulte du courrier de l'héritière de M. [Y], Mme [R] née [Y], en date du 2 novembre 2016 que la société Cnp Assurances a pris connaissance de la difficulté concenant la somme de 83 000 euros à cette date, aucun élément ne permet de contester la date à laquelle la réclamation de Mme [R] a été formulée contrairement à ce qui a été retenu par le juge de première instance, la réclamation de Mme [R] étant datée et une copie de sa pièce d'identité étant jointe à ladite réclamation.

De plus il est clairement indiqué sur le courrier dont s'agit dont un exemplaire est produit au dossier que celui-ci a été enregistré par les services de la Cnp le 4 novembre 2016.

Par ailleurs, il ressort de la note de synthèse produite que la société Cnp Assurances serait intervenue le 23 décembre 2014, date à laquelle un versement en date d'effet du 4 août 2014 pour un montant de 159,92 euros a été rapporté à la succession. Cependant cette note de synthèse qui n'est pas datée ne permet pas d'établir que la société Cnp Assurances disposait à cette date de l'ensemble des informations nécessaires pour exercer une action en répétition de l'indu à l'encontre de Mme [B], d'autant que la somme rapportée à la succession étant très modeste en son montant ne permet pas ainsi de démontrer que l'appelante savait que l'ensemble de la somme de 83 000 euros serait susceptible d'être rapportée à la succession.

Il résulte de tout ce qui précède que le point de départ du délai de prescription doit être fixé au 2 novembre 2016, que dès lors l'action au fond de la société Cnp Assurances ayant été introduite par acte du 25 février 2020, soit avant l'expiration du délai de prescription quinquennale fixée au 2 novembre 2021, n'est pas prescrite.

Aussi, le jugement sera infirmé de ce chef et la demande présentée par la Cnp Assurances doit être regardée comme recevable ;

- Sur la répétition de l'indu :

La société Cnp Assurances soutient qu'elle est bien fondée en son action en répétition de l'indu au motif qu'elle aurait intégré à tort dans le capital décès la somme de 83 000 euros, que cette somme a été prélevée sur le compte postal de M. [Y] et porté au crédit du contrat Poste-Avenir le 11 juillet 2014 soit postérieurement au décès de M. [Y] survenu le 5 juillet 2014.

La société Cnp Assurances affirme que Mme [B] a reçu un capital d'assurance vie alors qu'elle n'en était pas bénéficiaire, que s'agissant d'un indu subjectif, Mme [B] est tenue de restituer la somme indûment versée.

Mme [B] soutient que la demande en répétition de l'indu de la société Cnp Assurances est au contraire infondée. Elle se prévaut d'un jugement en date du 8 juillet 2021 aux termes duquel le tribunal judiciaire de Caen a considéré que le versement de la somme de 83 000 euros ordonné par M. [Y] le 27 juin 2014 a eu lieu ou devait avoir lieu en tout état de cause avant la date de son décès survenu le 5 juillet 2014, qu'il en résultait que la société Cnp Assurances n'établissait nullement que cette somme n'aurait pas dû être intégrée au capital de l'Assurance vie ni que c'est à tort que M. [X] en avait reçu une partie en sa qualité de bénéficiaire de cette Assurance vie, qui n'est pas contestée, par un versement du 25 septembre 2014 et que par conséquent la société Cnp Assurances devait être déboutée de sa demande en répétition de l'indu.

Aux termes de l'article 1235 ancien du code civil applicable aux faits de l'espèce, tout paiement suppose une dette : ce qui a été payé sans être dû, est sujet à répétition. La répétition n'est pas admise à l'égard des obligations naturelles qui ont été volontairement acquittées.

L'article 1376 ancien du code civil dispose que celui qui reçoit par erreur ou sciemment ce qui ne lui est pas dû s'oblige à le restituer à celui de qui il l'a indûment reçu.

L'article 720 du code civil précise que les successions s'ouvrent par la mort, au dernier domicile du défunt.

L'article 724 du même code expose que les héritiers désignés par la loi sont saisis de plein droit des biens, droits et actions du défunt.

SUR CE :

En l'espèce, il est précisé que le jugement dont se prévaut Mme [B] au soutien de ses prétentions a été infirmé par un arrêt rendu le 13 avril 2023 par la deuxième chambre civile de la cour de céans qui a considéré que l'action en répétition de l'indu de la société Cnp Assurances était bien fondée ;

En effet il a été retenu que le contrat d'assurance vie n'avait pas pu être abondé avant la date du 15 juillet 2014, qu'il l'a donc été après le décès de M. [Y], que cette somme revenait donc bien aux héritiers et non aux bénéficiaires du contrat d'assurances vie, l'appelant ayant reçu un capital dont il n'était pas bénéficiaire.

S'agissant des faits de l'espèce, il résulte des pièces produites que la date de valeur bancaire à retenir est effectivement la date du 11 juillet 2014.

Suivant le relevé du compte courant à la Banque Postale de M. [Y], il est constant qu'une remise de chèque de 83 000 euros a eu lieu le 26 juin 2014. La demande n'a été traitée par la Banque Postale que le 11 juillet 2014 et le prélèvement a été porté au débit du compte postal le 15 juillet 2014, soit après le décès de M. [Y] survenu le 5 juillet 2014.

Il est donc établi que la somme devait revenir aux héritiers et non aux bénéficiaire du contrat d'assurance vie. Mme [B] a donc reçu de la part de la société Cnp Assurances un capital dont elle n'était pas bénéficiaire dans son montant ;

Par ailleurs, si une erreur a effectivement été commise par la société Cnp Assurances en ce que le document 'Demande d'opération financière versement ultérieur du 27 juin 2014" a été signé du seul conseiller bancaire et non de M. [Y], cette erreur ne fait pas obstacle à l'exercice par lui de son action en répétition de l'indu.

Aussi, l'action en répétition de l'indu de la société Cnp Assurances sera jugeée bien fondée.

En conséquence, Mme [B] sera condamnée à payer à la société Cnp Assurances la somme de 5 898,94 euros avec intérêt au taux légal à compter du présent arrêt qui tranche le litige ;

- Sur la responsabilité de la société Cnp Assurances :

La société Cnp Assurances soutient que sa responsabilité ne saurait être engagée au motif que le prélèvement effectué J + 10 ouvrés du compte bancaire de M. [Y] relève d'une opération de la Banque Postale, que ce retard de prélèvement ne lui est pas imputable au motif qu'il n'est ni à l'origine ni responsable de l'opération, que son rôle se limitait à recevoir les fonds à une date sur laquelle elle ne pouvait agir, que sa personnalité morale juridique diffère de celle de la Banque Postale.

La société Cnp Assurances ajoute que le délai de prélèvement effectué à J + 10 ouvrés est justifé en ce qu'il avait été convenu avec M.[Y] que le prélèvement devait être différé, un document intitulé 'Demande d'opération financière versement ultérieur' en date du 27 juin 2014 prévoyait le versement ultérieur de cotisation d'un montant de 83 000 euros avec une date de prélèvement prévue au 11 juillet 2014.

Mme [B] soutient au contraire qu'elle est bien fondée à engager la responsabilité de la société Cnp Assurances en ce qu'elle a commis une faute dans l'exécution du mandat qui lui a été confié le 27 juin 2014, que cette faute lui a causé un préjudice en ce qu'elle est tenue de restituer la somme de 5 898,94 euros et que dès lors elle est bien fondée à demander la condamnation de la société à lui payer la somme de 5 898,94 euros au titre du préjudice subi, soit le montant de la somme à laquelle elle est condamnée au titre de la répétition de l'indu.

Mme [B] soutient que contrairement à ce qui est invoqué par la société Cnp Assurances, cette dernière est bien responsable tout comme la Banque Postale du déroulé de l'opération juridique confiée par M. [Y] le 27 juin 2014.

Elle souligne que le document dont se prévaut la société Cnp Assurances pour justifier du prélèvement différé n'est pas opposable en ce qu'il a été seulement signé par le conseiller bancaire et non par M. [Y] lui-même. Elle affirme dès lors que la société Cnp Assurances a violé les dispositions du code monétaire et financier. Elle ajoute que les moyens au soutien du prélèvement 10 jours après la date prévue soutenus par la société Cnp Assurances ne seraient pas recevables ne reposant sur aucun texte ni sur aucun fondement conventionnel.

Enfin, elle souligne que le contrat signé par M. [Y] ne prévoit pas que la prise d'effet d'un versement ultérieur sur le contrat d'assurance vie.

En l'espèce, il est établi que le 27 juin 2014, un document intitulé 'DEMANDE D'OPERATIONS FINANCIERES - VERSEMENT' a été rempli aux termes duquel M. [Y] a déclaré effectuer un versement d'un montant de 83 000 euros de son compte bancaire détenu à la banque postale vers le support Poste Avenir.

Le même jour, M. [Y] a autorisé la Banque Postale à effectuer des prélèvements sur son compte bancaire.

Il n'est pas contesté que la somme de 83 000 euros n'est arrivée sur le compte Assurances Vie qu'à la date du 15 juillet 2014, soit après le décès de M. [Y] intervenu le 5 juillet 2014.

Cependant, si une erreur peut être retenue à l'encontre de la société Cnp Assurances en ce que le document du 27 juin 2014 ne comporte que la signature du conseiller bancaire, sa responsabilité ne saurait être engagée au motif qu'il est établi que le prélèvement effectué par la Banque Postale relève d'une opération bancaire, que seule la Banque Postale est effectivement à l'origine de cette opération, le rôle de la société Cnp Assurances se limitant effectivement à recevoir les fonds à une date sur laquelle seule la Banque Postale pouvait agir.

Aussi, la responsabilité de la société Cnp Assurances ne saurait être engagée, en ce que de surcroît seule la Banque Postale dans un 1er temps pouvait être informée du décès de monsieur [Y] intervenu le 5 juillet 2014 ;

En conséquence, Mme [B] sera déboutée de sa demande, tant portant sur une réparation en dommages-intérêts à hauteur de 5898,94€, en compensation, en l'absence de toute faute dûment caractérisée imputable à la Cnp Assurances ;

- Sur la demande de réduction de la somme à restituer :

A titre encore plus subsidaire, Mme [B] demande que la somme à restituer soit réduite à l'euro symbolique au motif que la société Cnp Assurances a commis une erreur dans l'exécution du mandat qui lui a été confié le 27 juin 2014.

La société Cnp Assurances s'oppose à la réduction du montant de la somme à restituer au motif que ce montant a déjà été réduit.

L'article 1302-3 alinéa 2 du code civil dispose que la restitution peut être réduite si le paiement procède d'une faute.

En l'espèce, il résulte de ce qui précède qu'une faute ne peut pas être caractérisée et circonstanciée à l'encontre de la société Cnp Assurances.

Par ailleurs, il est établi que suivant les préconisations du médiateur de l'assurance, le montant de la somme à restituer a été réduite de moitié soit à la somme de 5 898,94 euros.

En conséquence, Mme [B] divorcée de monsieur [X] sera déboutée de sa demande présentée en application des dispositions de l'article 1302-3 alinéa 2 du code civil ;

- Sur la demande en dommages-intérêts de la Cnp Assurances :

La Cnp Assurances réclame une somme de 589,89€ de dommages-intérêts, sans véritablement justifier d'un préjudice qui en serait le support ;

Ainsi dans ces conditions cette demande sera écartée ;

- Sur les dépens et les frais irrépétibles :

Le jugement étant infirmé sur le principal, il sera aussi infirmé sur les dépens et les frais irrépétibles.

Succombant en appel, Mme [B] sera aussi condamnée aux dépens d'appel.

En outre, il est équitable de condamner Mme [B] à payer à la société Cnp Assurances la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, sa demande formée à ce titre étant écartée ;

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort par mise à disposition au greffe ; 

- Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau et y ajoutant :

- Déclare non prescrite l'action de la Cnp Assurances dirigée contre madame [B] et déclare celle-ci recevable ;

- Condamne Mme [B] à payer à la société Cnp Assurances la somme de 5 898,94 euros avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;

- Déboute Mme [B] de toutes ses demandes, en ce compris de celle formée en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Déboute la Cnp Assurances de toutes ses autres demandes ;

- Condamne Mme [B] aux entiers dépens comprenant ceux de première instance et d'appel ;

- Condamne Mme [B] à payer à la Cnp Assurances la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

M. COLLET G. GUIGUESSON


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Caen
Formation : 1ère chambre civile
Numéro d'arrêt : 21/02242
Date de la décision : 19/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-19;21.02242 ?
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