AFFAIRE : N° RG 20/02554 -
N° Portalis DBVC-V-B7E-GUE3
ARRÊT N°
JB.
ORIGINE : Décision du Tribunal de Grande Instance de LISIEUX du 28 Mars 2019
RG n° 18/00045
COUR D'APPEL DE CAEN
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 13 JUIN 2023
APPELANT :
Monsieur [K] [W] [Y]
né le [Date naissance 3] 1952 à [Localité 13]
[Adresse 5]
[Localité 9]
représenté et assisté de Me Cécile BREAVOINE, avocat au barreau de LISIEUX
INTIMÉ :
Monsieur [J] [O]
né le [Date naissance 1] 1954 à [Localité 12]
[Adresse 2]
[Localité 7]
représenté et assisté de Me Marie-Claude PIRO-VINAS, avocat au barreau de LISIEUX
DÉBATS : A l'audience publique du 06 avril 2023, sans opposition du ou des avocats, M. GARET, Président de chambre, a entendu seul les plaidoiries et en a rendu compte à la cour dans son délibéré
GREFFIER : Mme COLLET
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
M. GUIGUESSON, Président de chambre,
M. GARET, Président de chambre,
Mme VELMANS, Conseillère,
ARRÊT : rendu publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile le 13 Juin 2023 et signé par M. GUIGUESSON, président, et Mme COLLET, greffier
* * *
FAITS ET PROCEDURE
Se prévalant d'un jugement du tribunal de grande instance de Paris du 8 février 2011 - définitif sur ce point - qui en avait ordonné la licitation, M. [J] [O], propriétaire indivis des trois lots de copropriété n° [Cadastre 8], [Cadastre 10] et [Cadastre 4] d'un immeuble situé [Adresse 11] (Calvados) et cadastré section A n° [Cadastre 6], en a poursuivi l'adjudication devant le tribunal de grande instance de Lisieux.
A cette fin et en date du 27 novembre 2018, il a fait déposer auprès du greffe du tribunal le cahier des conditions de vente.
Suivant acte du 4 décembre 2018, M. [O] a fait sommation à M. [Y], co-indivisaire, de prendre communication dudit cahier et d'assister à l'adjudication.
Par jugement du 28 mars 2019, le tribunal de grande instance de Lisieux a :
- débouté M. [Y] de l'ensemble de ses demandes incidentes tendant à ce qu'il soit procédé à l'adjudication';
- y ayant procédé, déclaré M. [A] [Z] adjudicataire de l'immeuble au prix de 92.000 € outre les charges et frais de vente taxés à la somme de 4.744,37 €';
- dit que les frais de l'instance seraient employés en frais privilégiés de vente.
Par déclaration du 25 avril 2019, M. [Y] a exercé son droit de substitution à l'adjudicataire, sans toutefois s'acquitter du prix de l'adjudication dans le délai imparti.
M. [O] a alors poursuivi la réitération de la vente sur nouvelles enchères.
Par déclaration du 24 novembre 2020, M. [Y] a interjeté appel du jugement du 28 mars 2019.
Par jugement du 26 novembre 2020, le tribunal judiciaire de Lisieux, statuant sur réitération des enchères, a adjugé l'immeuble à M. [V] [E] au prix de 121.000 € outre les charges et frais de vente taxés à la somme de 2.428,15 €.
De nouveau, M. [Y] a exercé son droit de substitution, toujours sans s'acquitter du prix de l'adjudication dans le délai imparti.
M. [Y] a également interjeté appel du jugement du 26 novembre 2020, cet appel, enregistré sous le n° RG 21/143, étant toujours pendant devant la présente cour.
Quant à M. [O], il a saisi le tribunal judiciaire de Lisieux d'une demande tendant à la nullité de la déclaration de substitution consécutive à la deuxième adjudication en date du 26 novembre 2020, cette instance étant toujours pendante devant le tribunal.
S'agissant de l'appel formé à l'encontre du jugement du 28 mars 2019, M. [Y] a notifié ses dernières conclusions le 27 février 2023, M. [O] les siennes le 14 mars 2023.
La clôture a été prononcée par ordonnance du 15 mars 2023.
MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES
M. [Y] demande à la cour de :
- le déclarer recevable et bien fondé en son appel';
Y faisant droit,
- infirmer le jugement du 28 mars 2019';
Statuant à nouveau,
- juger que ni le procès-verbal de description de l'immeuble mis aux enchères publiques, ni les diagnostics techniques de l'article L 271-4 du code de la construction et de l'habitation n'ont été versés contradictoirement aux débats de première instance ;
En conséquence,
- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions pour non-respect du contradictoire ;
- juger que le procès-verbal de description de l'immeuble proposé aux enchères publiques n'a pas été annexé au cahier des conditions de vente du 19 novembre 2018 qui ne vise que quatre pièces jointes ;
- juger que n'ont pas non plus été annexés au cahier des conditions de vente les diagnostics techniques exigés par l'article L 271-4 du code de la construction et de l'habitation ;
En conséquence,
- juger la nullité du cahier des conditions de vente du 19 novembre 2018 avec toutes conséquences de droit sur la licitation du 28 mars 2019, en l'infirmant en toutes ses dispositions;
Subsidiairement,
- juger qu'en demandant à la cour la confirmation du jugement du 26 novembre 2020 qui a adjugé à un tiers le même bien immobilier que celui attribué à un autre adjudicataire par le jugement du 28 mars 2019, M. [O] a renoncé expressément et de manière non équivoque à cette décision du 28 mars 2019 ;
- en conséquence, écarter toutes contestations de sa part et le débouter de toutes ses demandes, en ce compris celle tendant à la confirmation d'une décision au bénéfice de laquelle il a lui-même renoncé ;
- condamner M. [O] en tous les dépens de première instance et d'appel.
Au contraire, M. [O] demande à la cour de :
- déclarer l'appel de M. [Y] recevable mais mal-fondé ;
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Lisieux le 28 mars 2019 ;
- débouter M. [Y] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;
- condamner M. [Y] au paiement d'une somme de 5.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Pour l'exposé complet des prétentions et de l'argumentation des parties, il est expressément renvoyé à leurs dernières écritures, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DECISION
Pour réclamer l'infirmation du jugement du 28 mars 2019 en ce qu'il a, sur licitation de l'indivision existant entre MM. [O] et [Y], prononcé l'adjudication de l'immeuble au profit de M. [Z], M. [Y] se prévaut':
- à titre principal, de la nullité du cahier des conditions de vente déposé au greffe du tribunal le 27 novembre 2018 qui, selon lui, ne contenait ni le procès-verbal descriptif de l'immeuble tel que prévu à l'article R 322-10 du code des procédures civiles d'exécution, ni les diagnostics techniques exigés par l'article L 271-4 du code de la construction et de l'habitation';
- à titre subsidiaire, de la renonciation de M. [O] à se prévaloir du jugement d'adjudication du 28 mars 2019 du fait qu'il a depuis lors obtenu une nouvelle adjudication suivant jugement du 26 novembre 2020.
S'agissant du moyen principal, il convient d'observer':
- que les parties conviennent que la licitation de leur immeuble relèvent des règles prévues aux articles 1271 et suivants du code de procédure civile, lesquelles renvoient elles-mêmes à un certain nombre de dispositions du code des procédures civiles d'exécution';
- qu'elles divergent en revanche sur le point de savoir si l'article R 322-10 est applicable à cette forme de licitation en ce qu'il prévoit le dépôt au greffe du tribunal, au plus tard le cinquième jour ouvrable suivant l'assignation, du cahier des conditions de vente qui doit contenir, à peine de nullité, notamment, le procès-verbal descriptif du bien';
- qu'elles divergent également sur le point de savoir, à supposer que l'article R 322-10 soit applicable, si ce procès-verbal - dont le tribunal relève expressément dans son jugement la présence au dossier le jour de l'adjudication - a été déposé en même temps que le cahier des conditions de vente dans le respect du délai prévu à l'article R 322-10, ou s'il l'a rejoint postérieurement, au demeurant à une date indéterminée';
- que M. [Y] fait également valoir qu'il n'a jamais pu être justifié, pas même en cause d'appel, de ce que les diagnostics techniques imposés par l'article L 271-4 du code de la construction et de l'habitation aient été annexés au cahier des conditions de vente, alors que l'article précité le prévoit pourtant en cas de vente publique'; sur ce point, force est de constater que le jugement déféré ne précise pas si ces diagnostics figuraient ou non dans le dossier du tribunal.
En toute hypothèse et à l'instar de ce qu'a justement retenu le tribunal, il convient de rappeler que l'article R 322-10 du code des procédures civiles d'exécution dispose que la nullité des actes de la procédure de saisie immobilière est régie par la section IV du chapitre II du titre V du livre Ier du code de procédure civile, section dans laquelle est inséré l'article 114 qui dispose'qu'aucun acte de procédure ne peut être déclaré nul pour vice de forme si la nullité n'en est pas expressément prévue par la loi, sauf en cas d'inobservation d'une formalité substantielle ou d'ordre public, et que la nullité ne peut être prononcée qu'à charge pour l'adversaire qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité, même lorsqu'il s'agit d'une formalité substantielle ou d'ordre public.
Or, M. [Y] ne justifie pas du grief qui lui serait causé par l'irrégularité qu'il invoque.
En effet, s'il fait certes valoir qu'il pourrait s'exposer à une action de l'adjudicataire en raison du non-respect des prescriptions précédemment évoquées, en réalité cette crainte est totalement vaine puisque M. [Y] a exercé son droit de substitution à l'adjudicataire, en l'occurrence M. [Z], ce dont il résulte qu'il ne peut plus craindre aucune action de la part de ce dernier qui, du seul fait de cette substitution, a perdu la qualité d'adjudicataire, qualité qu'il ne recouvrera jamais
Par suite et dans la mesure où l'irrégularité alléguée ne cause aucun grief à M. [Y], ce dernier ne saurait s'en prévaloir, ce dont il résulte qu'aucune nullité n'est encourue.
Quant au moyen subsidiaire développé par M. [Y], il sera également écarté, étant en effet observé':
- que ce n'est qu'en raison du défaut de paiement par M. [Y], substitué au premier adjudicataire, du prix fixé par le jugement du 28 mars 2019, que M. [O] a poursuivi la réitération des enchères qui a conduit à une nouvelle adjudication par jugement du 26 novembre 2020';
- qu'il s'agit là de la même procédure de licitation, les deux jugements étant indissociables l'un de l'autre, sans que M. [Y], qui est seul responsable de la réitération des enchères, puisse valablement soutenir que son co-indivisaire, qui ne fait que poursuivre son objectif de liquidation de ses propres droits, ait renoncé au jugement du 28 mars 2019.
Par là même, M. [O] demeure recevable et bien fondé à solliciter la confirmation de ce jugement.
En conséquence et dans la mesure où M. [Y] ne développe aucune critique pertinente à l'encontre de cette décision, celle-ci sera confirmée en toutes ses dispositions.
Y ajoutant, la cour condamnera M. [Y], partie perdante, à payer à M. [O] une somme de 3.000 € au titre des frais irrépétibles exposés par ce dernier en cause d'appel.
De même, M. [Y] sera condamné aux entiers dépens de la procédure d'appel.
PAR CES MOTIFS,
La cour,
Statuant publiquement par mise à disposition, contradictoirement et en dernier ressort':
- confirme le jugement en toutes ses dispositions';
- y ajoutant':
* condamne M. [K] [Y] à payer à M. [J] [O] une somme de 3.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile';
* condamne M. [K] [Y] aux entiers dépens de la procédure d'appel.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
M. COLLET G. GUIGUESSON