AFFAIRE : N° RG 21/02068
N° Portalis DBVC-V-B7F-GZND
Code Aff. :
ARRET N°
C.P
ORIGINE : Décision du Pôle social du Tribunal Judiciaire de CAEN en date du 15 Juin 2021 - RG n° 19/00204
COUR D'APPEL DE CAEN
2ème chambre sociale
ARRET DU 08 JUIN 2023
APPELANTE :
CARSAT [Localité 5]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par M. [M], mandaté
INTIME :
Monsieur [S] [K]
[Adresse 3]
Représenté par Me Coralie LOYGUE, avocat au barreau de CAEN
INTERVENANTE:
CAISSE PRIMAIRE D ASSURANCE MALADIE DU [Localité 4]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Dispensée de comparaître en vertu des articles 946 et 446-1 du code de procédure civile
DEBATS : A l'audience publique du 27 mars 2023, tenue par Mme CHAUX, Président de chambre, Magistrat chargé d'instruire l'affaire lequel a, les parties ne s'y étant opposées, siégé seul, pour entendre les plaidoiries et en rendre compte à la Cour dans son délibéré
GREFFIER : Mme GOULARD
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Mme CHAUX, Présidente de chambre,
M. LE BOURVELLEC, Conseiller,
M. GANCE, Conseiller,
ARRET prononcé publiquement le 08 juin 2023 à 14h00 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Mme CHAUX, présidente, et Mme GOULARD, greffier
La cour statue sur l'appel régulièrement interjeté par la caisse d'assurance retraite et de santé au travail de [Localité 5] d'un jugement rendu le 15 juin 2021 par le tribunal judiciaire de Caen dans un litige l'opposant à la M. [S] [K].
FAITS et PROCEDURE
M. [S] [K] est né le 9 mars 1958.
Le 14 décembre 2011, la caisse primaire d'assurance maladie du [Localité 4] lui a notifié l'attribution d'un taux d'incapacité permanente partielle de 15% et d'une rente à compter du 27 octobre 2011, suite à un accident du travail/ maladie professionnelle en date du 1er avril 2009.
Le 6 mars 2018, M. [K] a adressé à la caisse d'assurance retraite et de santé au travail de [Localité 5] ( la Carsat) une demande de retraite pour pénibilité, à effet du 1er avril 2018, faisant valoir qu'il bénéficiait d'une rente accident du travail.
Par courrier du 11 juillet 2018, la Carsat a rejeté sa demande au motif, qu'en application de l'article L 351-1-4 du code de la sécurité sociale, les rentes consécutives à un accident de trajet n'ouvrent pas droit à cette prestation.
Le 4 août 2018, M. [K] a contesté cette décision devant la commission de recours amiable laquelle, par décision du 20 décembre 2018, a rejeté son recours et confirmé la décision de la Carsat au motif que l'incapacité permanente qui lui a été reconnue à hauteur de 15% est fondée sur une accident de trajet et non sur un accident de travail.
Le 12 février 2019, M. [K] a saisi le tribunal de grande instance de Caen d'un recours contre cette décision.
Par jugement du 15 juin 2021, ce tribunal, devenu tribunal judiciaire, a :
- déclaré le recours de M. [K] recevable et bien fondé,
En conséquence,
- annulé la décision de rejet rendue par la commission de recours amiable de la caisse d'assurance retraite et de santé au travail de [Localité 5], lors de sa séance du 20 décembre 2018, confirmant la notification de la caisse datée du 11 juillet 2018, portant rejet de la demande d'admission au bénéfice de la retraite pour incapacité permanente,
- dit que M. [S] [K] a été victime d'un accident du travail le 1er avril 2009,
- constaté que M. [S] [K] justifie d'une incapacité permanente au moins égale à 10%, en l'occurence 15% , reconnue au titre de l'accident du travail du 1er avril 2009, selon la décision de la caisse primaire d'assurance maladie du [Localité 4] du 14 décembre 2011,
- renvoyé M. [S] [K] devant la Carsat [Localité 5] afin que le médecin conseil régional statue sur l'identité des lésions dont souffre l'assuré avec celles figurant sur la liste prévue à l'article R 351-24-1 du code de la sécurité sociale, aux fins d'attribution éventuelle d'une retraite pour incapacité permanente du 1er avril 2018 au 1er avril 2020,
- condamné la Carsat [Localité 5] à payer à M. [K] la somme de 800 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la Carsat [Localité 5] aux dépens de l'instance.
Par déclaration du 9 juillet 2021, la Carsat [Localité 5] a interjeté appel de ce jugement.
Par conclusions reçues au greffe le 11 janvier 2023, soutenues oralement à l'audience par son représentant, elle demande à la cour d'infirmer la décision déférée et
- de confirmer la décision prise par la Carsat [Localité 5] le 11 juillet 2018 et confirmée par la commission de recours amiable le 20 décembre 2018,
- de constater que M. [K] a été victime d'un accident de trajet,
- de rejeter toute demande de condamnation relative à l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens,
- par conséquent, de débouter M. [K] de l'ensemble de son recours.
Par conclusions reçues au greffe le 17 mars 2023, soutenues oralement à l'audience par son conseil, M. [K] demande à la cour de :
A titre principal:
- Confirmer le jugement déféré en ce qu'il a :
* annulé la décision de rejet rendue par la commission de recours amiable de la caisse d'assurance retraite et de santé au travail de [Localité 5], confirmant la notification de la caisse du 11 juillet 2018, portant rejet de la demande d'admission au bénéfice de la retraite pour incapacité permanente,
* dit que M. [S] [K] a été victime d'un accident du travail le 1er avril 2009,
* condamné la Carsat [Localité 5] à payer à M. [K] la somme de 800 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- le réformer pour le surplus et condamner la Carsat à lui octroyer le bénéfice de la pension de vieillesse pour pénibilité de manière rétroactive, de la date de la demande initiale le 1er avril 2018 jusqu'au 1er avril 2020, date de sa retraite au titre de l'inaptitude,
A titre subsidiaire :
- confirmer le jugement déféré en son intégralité,
En tout état de cause:
- condamner la Carsat [Localité 5] à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les éventuels dépens.
En cause d'appel, la Carsat [Localité 5] a sollicité la mise en cause de la caisse primaire d'assurance maladie du [Localité 4] afin qu'elle puisse fournir des éléments l'ayant amenée à qualifier l'accident du 1er avril 2009 d'accident de trajet et non d'accident de travail.
La caisse primaire d'assurance maladie du [Localité 4], régulièrement convoquée, a sollicité par courrier électronique du 20 mars 2023, à être dispensée de comparution à l'audience du 27 mars 2023.
La cour a fait droit à cette demande.
Par conclusions du 14 février 2023, la caisse primaire d'assurance maladie du [Localité 4] demande à la cour de lui donner acte :
- de son intervention volontaire suite à sa mise en cause par la Carsat de [Localité 5] appelante,
- de ce qu'elle produit les éléments au débat lui permettant de qualifier en accident de trajet l'accident dont a été victime M. [K] le 1er avril 2009,
- de ce qu'elle s'en remet à la sagesse de la cour quant à la l'issue du litige qui oppose la Carsat de [Localité 5] à M. [K] .
Il est fait référence aux écritures ainsi déposées de part et d'autre pour un plus ample exposé des moyens proposés par les parties au soutien de leurs prétentions.
SUR CE, LA COUR
Il sera donné acte à la caisse primaire d'assurance maladie du [Localité 4] de son intervention volontaire.
Il résulte de la combinaison des articles L 351-1-4 et D 351-1-10 du code de la sécurité sociale, que lorsque les assurés justifient d'une incapacité permanente qui résulte d'un accident du travail ayant entraîné des lésions identiques à celles indemnisées au titre d'une maladie professionnelle, ils peuvent prétendre à un départ en retraite anticipé, au taux plein de 50% , à partir de 60 ans.
En application de l'article D 351-1-9 du code de la sécurité sociale, le bénéfice de la retraite au titre de la pénibilité est réservé aux assurés justifiant d'un taux d'incapacité permanente:
- au moins égal à 20%
- ou au moins égal à 10% et inférieur à 20%, sous réserve, dans certains cas, d'un avis favorable de la commission pluridisciplinaire.
Ce taux d'incapacité permanente doit être reconnu :
- soit au titre d'une maladie professionnelle,
- soit au titre d'un accident du travail ayant entraîné des lésions identiques à celles indemnisées au titre d'une maladie professionnelle.
La Carsat reproche aux premiers juges d'avoir retenu que M. [K] avait été victime d'un accident du travail.
Elle fait valoir qu'il ressort des pièces produites en cause d'appel par la caisse qu'il a été victime d'un accident de trajet.
La déclaration d'accident du travail établie le 7 avril 2009 par l'employeur de M. [K] fait état des éléments suivants :
'- date: 1er avril 2009 à 13 heures
- lieu de l'accident: domicile de la victime - [Adresse 3]
- circonstances : accident de trajet : en rentrant chez lui , M. [K] se serait foulé le genou en descendant de sa voiture
- siège des lésions: membres inférieurs genou ( droit)
- nature des lésions : entorse - foulure'.
Le certificat médical initial en date du 1er avril 2009 fait état d'une entorse genou droit.
Dans le cadre de l'instruction du dossier, M. [K] a indiqué que les faits s'étaient déroulés à l'extérieur de sa propriété.
Par courrier du 23 avril 2009, la caisse l'a informé de la prise en charge au titre de la législation professionnelle de l'accident de trajet du 1er avril 2009.
Il maintient devant la cour avoir été victime d'un accident de travail et non d'un accident de trajet.
Il se prévaut à cet égard :
- du compte- rendu du service des urgences de la Polyclinique du parc en date du 1er avril 2009 mentionnant : ' histoire de la maladie: accident travail, trauma du genou droit'
- du compte-rendu du docteur [D], rhumatologue, du 18 août 2009 : ' gonalgie droite en AT post saut d'un camion poubelle, sans chute véritable mais avec chute au sol tt de même de sa partie antérieure rotulienne, le 1/04/2009 ( ...)'
- du certificat médical du 23 juillet 2018 du docteur [Z] - [J], attestant que M. [K] a été victime d'un accident du travail le 1er avril 2009 en travaillant en tant que ripper, entorse genou droit avec consolidation en AT final en octobre 2011 avec séquelles.
Si ces certificats décrivent les lésions constatées par les médecins, en revanche, ils ne font que reprendre les propos du patient sur les circonstances dans lesquelles celles -ci sont intervenues.
En conséquence, ces pièces ne permettent pas de retenir qu'il s'agit d'un accident du travail.
Ainsi, la déclaration d'accident du travail, décrivant un accident de trajet, et la décision de la caisse, de prise en charge au titre de la législation professionnelle, d'un accident de trajet, notifiée à l'employeur par courrier du 23 avril 2009 et dont M. [K] a été informé par courrier du même jour, établissent qu'il a été victime d'un accident de trajet.
Les autres courriers de la caisse faisant référence de façon générale à un accident du travail / maladie professionnelle ne permettent pas de remettre en cause cette qualification.
En l'état de ces éléments, il convient donc d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a qualifié le sinistre d'accident de travail, et de dire que l'accident dont a été victime M. [K] le 1er avril 2009 est un accident de trajet.
En conséquence, le taux d'incapacité de 15% qui lui a été reconnu par la caisse l'a été au titre d'un accident de trajet et n'ouvre pas droit à la retraite pour pénibilité.
Les demandes de M. [K] seront donc, par voie d'infirmation, rejetées et la décision de la commission de recours amiable de la Carsat [Localité 5] en date du 20 décembre 2018 sera confirmée.
Le jugement étant infirmé sur le principal, il le sera également sur les dépens et les frais irrépétibles.
M. [K] qui succombe supportera les dépens d'appel et sera débouté de sa demande présentée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
La cour,
Donne acte à la caisse primaire d'assurance maladie du [Localité 4] de son intervention volontaire,
Infirme le jugement déféré,
Statuant à nouveau,
Dit que l'accident dont a été victime M. [K] le 1er avril 2009 est un accident de trajet,
Confirme la décision de la commission de recours amiable de la Carsat [Localité 5] en date du 20 décembre 2018 ayant confirmé le rejet de la demande de M. [K] de pension pour pénibilité,
Déboute M. [K] de l'ensemble de ses demandes,
Condamne M. [K] aux dépens de première instance et d'appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
E. GOULARD C. CHAUX