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11/04/2023 | FRANCE | N°22/01487

France | France, Cour d'appel de Caen, 1ère chambre civile, 11 avril 2023, 22/01487


AFFAIRE : N° RG 22/01487 -

N° Portalis DBVC-V-B7G-HACP





ARRÊT N°



JB.





ORIGINE : Décision du Juge de l'exécution d'ARGENTAN du 30 Mai 2022 - RG n° 22/00129









COUR D'APPEL DE CAEN

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 11 AVRIL 2023





APPELANTE :



La S.A.R.L. LA CROIX MALO

N° SIRET : 453 268 203

[Adresse 3]

[Localité 4]

prise en la personne de son représentant légal



représentée et assis

tée de Me Etienne HELLOT, avocat au barreau de CAEN







INTIMÉS :



Monsieur [R] [E]

né le 10 Juin 1937 à [Localité 2]

[Adresse 1]

[Localité 2]





Madame [G] [K] épouse [E]

née le 24 Mai 1937 à [Localité 6]

[Adre...

AFFAIRE : N° RG 22/01487 -

N° Portalis DBVC-V-B7G-HACP

ARRÊT N°

JB.

ORIGINE : Décision du Juge de l'exécution d'ARGENTAN du 30 Mai 2022 - RG n° 22/00129

COUR D'APPEL DE CAEN

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 11 AVRIL 2023

APPELANTE :

La S.A.R.L. LA CROIX MALO

N° SIRET : 453 268 203

[Adresse 3]

[Localité 4]

prise en la personne de son représentant légal

représentée et assistée de Me Etienne HELLOT, avocat au barreau de CAEN

INTIMÉS :

Monsieur [R] [E]

né le 10 Juin 1937 à [Localité 2]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Madame [G] [K] épouse [E]

née le 24 Mai 1937 à [Localité 6]

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentés et assistés de Me Nadège TARDIF, avocat au barreau de CAEN

DÉBATS : A l'audience publique du 09 février 2023, sans opposition du ou des avocats, M. GARET, Président de chambre, a entendu seul les plaidoiries et en a rendu compte à la cour dans son délibéré

GREFFIER : Mme COLLET

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

M. GUIGUESSON, Président de chambre,

M. GARET, Président de chambre,

Mme VELMANS, Conseillère,

ARRÊT : rendu publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile le 11 Avril 2023 et signé par M. GUIGUESSON, président, et Mme COLLET, greffier

* * *

FAITS ET PROCEDURE

M. [R] [E] et son épouse Mme [G] [K] (les époux [E]) sont propriétaires d'un appartement à [Localité 5] (Orne) dont il ont confié la gestion locative à la société La Croix Malo (la société) suivant mandat du 21 août 2013.

Après avoir résilié ce mandat, les époux [E] ont mis en demeure la société de lui régler le solde des loyers leur restant du et de leur remettre un certain nombre de documents afférents à la location de l'appartement (bail, quittances de loyers, relevés de gérance etc).

En l'absence de règlement amiable, ils ont fait assigner la société devant le tribunal de proximité de Flers qui, par jugement du 18 septembre 2020 rendu sur opposition à un jugement du 20 mai 2019, a':

- condamné la société à payer aux époux [E] une somme de 850,87 € pour solde des sommes restant dues dans le cadre du mandat, avec intérêts au taux légal à compter du 13 août 2018 ;

- condamné la société à communiquer aux époux [E] les relevés de gérance du 1er mai au 21 août 2018 pour l'appartement loué en vertu d'un contrat de bail du 8 août 2013, sous astreinte de 20 € par jour de retard à l'issue d'un délai de 15 jours à compter de la signification du jugement ;

- débouté les époux [E] de leur demande de dommages et intérêts';

- condamné la société aux dépens'de l'instance ;

- condamné la société à payer aux époux [E] une somme de 600 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté les parties de toutes demandes plus amples ou contraires.

Ayant été signifié à la société par acte du 15 octobre 2020, ce jugement est devenu définitif.

Par acte du 3 février 2022, les époux [E] ont fait assigner la société devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire d'Argentan aux fins de liquidation de l'astreinte.

Par jugement du 30 mai 2022, le magistrat a':

- liquidé l'astreinte précédemment ordonnée à la somme de 7.600 € et condamné la société à payer cette somme aux époux [E] ;

- assorti l'obligation faite à la société de remettre aux époux [E] les relevés de gérance du 1er mai au 21 août 2018 d'une astreinte définitive d'un montant de 40 € par jour de retard pendant une durée de 100 jours, et ce, passé un délai de 30 jours à compter de la signification du jugement;

- condamné la société à payer aux époux [E] une somme de 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la société aux dépens ;

- rappelé que le jugement bénéficiait de l'exécution provisoire dès sa notification.

Par déclaration reçue au greffe de la cour le 15 juin 2022, la société a interjeté appel de cette décision.

L'appelante a notifié ses dernières conclusions le 30 janvier 2023, les intimés les leurs le 26 janvier 2023.

La clôture a été prononcée par ordonnance du 1er février 2023.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

La société demande à la cour de :

- la déclarer recevable et bien fondée en son appel ;

- réformer le jugement en ce qu'il a :

* liquidé l'astreinte ordonnée par le tribunal de proximité de Flers dans son jugement du 18 septembre 2020 à la somme de 7.600 € et en ce qu'il a condamné la société à payer cette somme aux époux [E] ;

* assorti l'obligation qui était faite à la société par le jugement du 18 septembre 2020 de remettre aux époux [E] les relevés de gérance du 1er mai au 21 août 2018 d'une astreinte définitive d'un montant de 40 € par jour de retard pendant une durée de 100 jours, passé un délai de 30 jours à compter de la signification de la décision ;

* condamné la société à payer aux époux [E] une somme de 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

* condamné la société aux dépens ;

Statuant à nouveau,

- ordonner la suppression de l'astreinte en raison de l'impossibilité pour la société de communiquer des pièces qui n'existent pas ;

- débouter les époux [E] de l'intégralité de leurs demandes, fins et prétentions ;

- condamner les époux [E] au paiement d'une somme de 3.500 € au titre de l'article 700 ainsi qu'aux entiers dépens.

Au contraire, les époux [E] demandent à la cour de :

A titre principal,

- dire et déclarer que la cour n'est pas saisie par la société d'un appel à l'encontre du jugement déféré dans l'ensemble de ses dispositions ;

- en conséquence, déclarer l'appel mal fondé ;

- dès lors, confirmer le jugement en toutes ses dispositions ;

A titre subsidiaire, si la cour s'estimait régulièrement saisie d'un appel formé à l'encontre dudit jugement':

- déclarer irrecevables et mal fondés les moyens, fins et demandes de la société et les rejeter intégralement, y compris au titre des frais de procédure ;

- en conséquence, confirmer le jugement en toutes ses dispositions ;

Y additant,

- déclarer recevable et bien fondée la demande additionnelle des époux [E] en liquidation de l'astreinte provisoire pour la période postérieure et complémentaire à la délivrance de l'assignation, soit du 16 décembre 2021 jusqu'au 29 mai 2022 inclus (166 jours X 20 €) ;

- condamner en conséquence la société à verser aux époux [E], unis d'intérêts, une somme de 3.320 €, à parfaire ou diminuer, au titre de la liquidation de l'astreinte provisoire prononcée par le jugement du 18 septembre 2020 au titre de cette période complémentaire, avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir jusqu'à parfait paiement ;

Y additant,

- dire que la cour devra liquider l'astreinte définitive maintenue et assortissant le jugement du 18 septembre 2020 de communiquer les relevés de gérance conformément à la décision du juge de l'exécution qui sera confirmée aux termes de l'arrêt à intervenir ;

- condamner ainsi la société à verser aux époux [E], unis d'intérêts, la somme de 4.000 € (40€ X 100 jours) au titre de la liquidation de cette astreinte définitive, avec intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir et jusqu'à parfait paiement ;

En toutes hypothèses,

- à titre reconventionnel, condamner la société à payer aux époux [E], unis d'intérêts, une somme de 3.500 € au titre de l'article 700 en cause d'appel, ainsi qu'aux entiers dépens comprenant le timbre fiscal de 225 €, le droit de plaidoirie de 13 € et les frais de recouvrement (articles 695 et suivants du code de procédure civile), le tout avec intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir et jusqu'à parfait paiement.

Pour l'exposé complet des prétentions et de l'argumentation des parties, il est expressément renvoyé à leurs dernières écritures conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le moyen tiré d'une absence de saisine de la cour :

Les époux [E] soutiennent à titre principal que la cour n'est pas saisie d'un appel à l'encontre du jugement du 30 mai 2020 dans la mesure où, après avoir établi une déclaration d'appel dans laquelle elle sollicitait «'l'annulation, sinon l'infirmation ou en tout cas la réformation de la décision'», la société a finalement modifié l'objet de son recours en concluant à la réformation du jugement.

Ils précisent en effet que l'infirmation et la réformation ne sont pas des synonymes.

Ils en résulte, selon eux, que l'effet dévolutif de l'appel n'a pas opéré, de sorte que la cour ne peut que confirmer le jugement déféré.

La cour ne les suivra pas dans cette analyse, rappelant en effet qu'aux termes de l'article 542 du code de procédure civile, l'appel tend, par la critique du jugement rendu par une juridiction du premier degré, à sa réformation ou à son annulation par la cour.

En l'espèce, il résulte de la déclaration d'appel déposée au greffe de la cour le 15 juin 2022 que la société a réclamé «'l'annulation, sinon l'infirmation ou en tout cas la réformation de la décision'» du juge de l'exécution en ce qu'elle a [suit l'énumération des chefs critiqués du jugement dont appel, et ce, conformément aux exigences de l'article 901].

Par là même, l'effet dévolutif de l'appel a pleinement opéré, ce recours ayant initialement pour objet l'annulation du jugement ou la réformation/infirmation des chefs précités tels qu'énumérés dans la déclaration.

Le fait que la société n'ait pas conclu, depuis lors, à l'annulation du jugement est sans effet sur la validité de l'appel, traduisant seulement sa renonciation à se prévaloir de vices qui, par hypothèse, affecteraient le jugement critiqué.

Le fait encore qu'elle conclut désormais, dans le dispositif de ses dernières écritures, non plus à l'infirmation, mais à la réformation du jugement, et plus précisément d'un certain nombre de dispositions de celui-ci, est également sans conséquence sur l'effet dévolutif de l'appel, la distinction opérée par les intimés entre infirmation et réformation étant artificielle et en tout cas dépourvue de substance, puisqu'ils s'abstiennent d'expliquer quelle en serait la différence.

En tout état de cause, il résulte de ce qui précède que la société appelante a satisfait aux exigences des articles 542 et 954 du code de procédure civile en demandant à la cour, d'abord dans sa déclaration d'appel, ensuite dans le dispositif de ses dernières conclusions, de «'réformer'» certaines dispositions du jugement qu'elle critique.

Etant vain, le moyen développé par les intimés sera donc écarté.

Sur la demande de liquidation de l'astreinte provisoire :

L'article L 131-4 du code des procédures civiles d'exécution dispose':

«'Le montant de l'astreinte provisoire est liquidé en tenant compte du comportement de celui à qui l'injonction a été adressée et des difficultés qu'il a rencontrées pour l'exécuter.

Le taux de l'astreinte définitive ne peut jamais être modifié lors de sa liquidation.

L'astreinte provisoire ou définitive est supprimée en tout ou partie s'il est établi que l'inexécution ou le retard dans l'exécution de l'injonction du juge provient, en tout ou partie, d'une cause étrangère.'»

En l'espèce, la société, pour s'opposer à l'astreinte provisoire que le juge de l'exécution a liquidé à son encontre à hauteur d'une somme totale de 7.600 €, fait essentiellement valoir que les documents que les époux [E] lui reprochent de ne pas leur avoir communiqués - en l'occurrence des relevés de gérance pour la location de l'appartement au titre de la période du 1er mai au 21 août 2018 - n'existent pas, expliquant en substance soit qu'elle les a déjà fournis, soit qu'elle ne les a jamais établis.

Elle ajoute qu'elle serait dans l'incapacité de les reconstituer aujourd'hui, puisqu'ayant restitué aux époux [E] l'ensemble des pièces afférentes à la gestion locative de l'appartement, en particulier toute la comptabilité propriétaire et locataire qui recensait l'ensemble des encaissements et décaissements effectués par le gestionnaire pour le compte de ses mandants.

Rappelant qu'elle a exécuté toutes les autres dispositions du jugement du 18 septembre 2020, notamment en réglant l'ensemble des sommes qu'elle restait devoir aux époux [E] au titre du mandat résilié, elle explique ne pas comprendre pourquoi ceux-ci s'acharnent à lui réclamer des documents inexistants alors qu'ils ont été remplis de leurs droits.

Au contraire, les époux [E] persistent à exiger de la société qu'elle défère à l'injonction qui lui a été faite par le jugement du 18 septembre 2020 de leur communiquer les relevés de gérance manquants, soit ceux du 1er mai au 21 août 2018, rappelant qu'il lui appartenait de former un pourvoi en cassation à l'encontre de cette décision si celle-ci ne la satisfaisait pas.

Pour autant et nonobstant le caractère définitif de cette décision, le juge de l'exécution, de première instance ou d'appel, n'en conserve pas moins un pouvoir d'appréciation quant au bien-fondé de la demande de liquidation de l'astreinte, l'article L 131-4 du code des procédures civiles d'exécution lui permettant d'en moduler le montant, voire de la supprimer, pour tenir compte des difficultés rencontrées par le débiteur de l'injonction pour l'exécuter.

Tel doit être le cas en l'espèce, dès lors en effet':

- que la société ne saurait communiquer aux époux [E] des documents qui n'existent pas, au risque de se voir reprocher un faux en écritures, afin de satisfaire des exigences, étant rappelé qu'ils ont déjà reçu, sinon l'ensemble des relevés réclamés, à tout le moins toutes les pièces comptables leur permettant de calculer les sommes qui leur restaient dues au terme du mandat de gestion qu'ils avaient confié à la société';

- que d'ailleurs, il n'est pas soutenu que la société resterait leur devoir quelque autre somme à ce titre, étant rappelé qu'il n'est pas contesté qu'elle a intégralement exécuté les autres dispositions du jugement du 18 septembre 2020, notamment en réglant aux époux [E] la somme de 850,87 € qu'elle restait leur devoir pour solde du mandat;

- que dans ces conditions, la société justifie d'une impossibilité matérielle de communiquer aux époux [E] les documents qu'ils lui réclament, ce dont ils sont informés depuis des conclusions déposées par la société à l'audience du tribunal de proximité de Flers du 7 février 2020.

En tout état de cause et face à cette impossibilité matérielle, il convient de supprimer purement et simplement l'astreinte provisoire précédemment fixée et partant, de débouter les époux [E] de leur demande de liquidation.

Sur les autres demandes':

Pour le même motif que celui précédemment développé, soit l'impossibilité pour

la société de communiquer des documents qui n'existent pas, les époux [E] seront déboutés de leur demande de liquidation d'un complément d'astreinte provisoire.

De même, le jugement sera infirmé en ce qu'il a fixé une astreinte définitive, les époux [E] devant dès lors être déboutés de leur demande tendant à la liquidation de celle-ci.

L'ensemble des parties seront déboutées de leurs demandes au titre des frais irrépétibles.

Enfin, parties perdantes, les époux [E] supporteront les entiers dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Statuant publiquement par mise à disposition, contradictoirement et en dernier ressort':

- déboute les époux [E] de leur demande tendant à voir juger que la cour n'est pas saisi d'un appel à l'encontre du jugement du juge de l'exécution du tribunal judiciaire d'Argentan en date du 30 mai 2022;

- infirme ledit jugement en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

- ordonne la suppression de l'astreinte provisoire et de l'astreinte définitive précédemment fixées à l'encontre de la société La Croix Malo';

- déboute en conséquence M. et Mme [E] de leurs demandes tendant à leur liquidation';

- déboute la société La Croix Malo de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile';

- condamne M. et Mme [E] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

M. COLLET G. GUIGUESSON


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Caen
Formation : 1ère chambre civile
Numéro d'arrêt : 22/01487
Date de la décision : 11/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-11;22.01487 ?
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