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24/01/2023 | FRANCE | N°22/00595

France | France, Cour d'appel de Caen, 1ère chambre civile, 24 janvier 2023, 22/00595


AFFAIRE : N° RG 22/00595 -

N° Portalis DBVC-V-B7G-G6EE





ARRÊT N°



JB.





ORIGINE : Décision du Juge de l'exécution de CAEN du 22 Février 2022 - RG n° 21/02552







COUR D'APPEL DE CAEN

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 24 JANVIER 2023





APPELANTE :



Madame [D], [J], [G] [R]

née le [Date naissance 6] 1995 à [Localité 10] (44)

[Adresse 5]

[Localité 3]



représentée et assistée de Me Marie-Sophie LAMY,

avocat au barreau de CAEN

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 141180022022001717 du 17/03/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de CAEN)





INTIMÉES :



Madame [N], [L], [X] [U]...

AFFAIRE : N° RG 22/00595 -

N° Portalis DBVC-V-B7G-G6EE

ARRÊT N°

JB.

ORIGINE : Décision du Juge de l'exécution de CAEN du 22 Février 2022 - RG n° 21/02552

COUR D'APPEL DE CAEN

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 24 JANVIER 2023

APPELANTE :

Madame [D], [J], [G] [R]

née le [Date naissance 6] 1995 à [Localité 10] (44)

[Adresse 5]

[Localité 3]

représentée et assistée de Me Marie-Sophie LAMY, avocat au barreau de CAEN

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 141180022022001717 du 17/03/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de CAEN)

INTIMÉES :

Madame [N], [L], [X] [U]

née le [Date naissance 1] 1990 à [Localité 9] (76)

[Adresse 7]

[Localité 4]

représentée et assistée de Me Victor DEFRANCQ, avocat au barreau de CAEN

La CAISSE D'ALLOCATIONS FAMILIALES DU CALVADOS

[Adresse 8]

[Localité 3]

prise en la personne de son représentant légal

représentée et assistée de Me Coralie LOYGUE, avocat au barreau de CAEN

DÉBATS : A l'audience publique du 17 novembre 2022, sans opposition du ou des avocats, M. GUIGUESSON, Président de chambre, a entendu seul les plaidoiries et en a rendu compte à la cour dans son délibéré

GREFFIER : Mme COLLET

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

M. GUIGUESSON, Président de chambre,

M. GARET, Président de chambre,

Mme VELMANS, Conseillère,

ARRÊT : rendu publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile le 24 Janvier 2023 et signé par M. GUIGUESSON, président, et Mme COLLET, greffier

* * *

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Par jugement du 15 janvier 2021 rectifié le 7 mai 2021, le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Caen a déclaré M. [U] père de l'enfant [W] [R] et l'a condamné à verser à Mme [R] une pension alimentaire mensuelle de 150 euros au titre de sa contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant.

Par acte du 4 mars 2021, M. [U] a interjeté appel de ce jugement.

Par jugement du 2 avril 2021, le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Caen a autorisé la modification des actes d'état civil de M. [U] notamment quant à la mention du sexe qui indique désormais 'féminin'.

Par courrier du 28 mai 2021, la Caisse d'Epargne a informé Mme [U] d'une demande en paiement direct de pension alimentaire de la Caf du Calvados à la demande de Mme [R].

Par acte du 28 juillet 2021, Mme [U] a fait assigner Mme [R] devant le juge de l'exécution près le tribunal judiciaire de Caen aux fins d'obtenir au principal la mainlevée de la procédure de paiement direct.

Par jugement du 22 février 2022 auquel il est renvoyé pour un exposé complet des prétentions en première instance, le juge de l'exécution près le tribunal judicaire de Caen a :

- rejeté l'exception de procédure de Mme [R] de sursis à statuer ;

- ordonné la mainlevée de la procédure de paiement direct opérée par Mme [R] à l'encontre de Mme [U] ;

- rejeté la demande de condamnation de Mme [R] au paiement d'une amende civile ;

- rejeté la demande de Mme [R] de condamnation de la Caf du Calvados ;

- condamné Mme [R] à payer à Mme [U] la somme de 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné Mme [R] aux dépens lesquels seront recouvrés conformément aux règles de l'aide juridictionnelle ;

- rappelé que la présente décision bénéficie de l'exécution provisoire de droit dès sa notification.

Par déclaration du 7 mars 2022, Mme [R] a formé appel de ce jugement.

Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 19 juillet 2022, Mme [R] demande à la cour de :

- recevoir son appel du jugement en date du 7 mars 2022 et le disant bien fondé ;

- réformer la décision en ce qu'elle :

* a ordonné la mainlevée de la procédure de paiement direct qu'elle a opérée à l'encontre de Mme [U] ;

* a rejeté sa demande de condamnation de la Caf du Calvados ;

* l'a condamnée au paiement de la somme de 500 euros au profit de Mme [U] en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

* l'a condamnée aux dépens, lesquels seront recouvrés conformément aux règles de l'aide juridictionnelle ;

statuant à nouveau,

- ordonner la compensation entre la somme de 695,10 euros qu'elle a perçue et la contribution alimentaire due par Mme [U] pour l'entretien et l'éducation de [W] fixé par l'arrêt de la cour d'appel de Caen du 31 mars 2022 ;

- subsidiairement condamner la Caf du Calvados à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre au profit de Mme [U] à raison de la procédure de recouvrement forcée initiée par la Caf du Calvados sur le fondement du jugement du juge aux affaires familiales de Caen du 15 janvier 2021 ;

en tout état de cause,

- débouter Mme [U] et la Caf du Calvados de l'intégralité de leurs demandes, fins et prétentions dirigées à son encontre ;

- condamner toute partie succombante à lui régler la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner toute partie succombante aux dépens en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, à tout le moins selon la loi relative à l'aide juridictionnelle.

Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 27 juin 2022, Madame [U] demande à la cour de :

- infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande de condamnation de Mme [R] au paiement d'une amende civile de 1 000 euros en application de l'article R.213-8 du code de procédure civile ;

en conséquence,

- condamner Mme [R] au paiement d'une amende de 1 000 euros pour procédure abusive ;

- confirmer la décision pour le surplus ;

en tout état de cause,

- débouter Mme [R] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

- condamner Mme [R] aux dépens ;

- condamner Mme [R] à lui verser une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 27 juin 2022, la CAF demande à la cour de :

- confirmer le jugement rendu par le juge de l'exécution de Caen en ce qu'il a rejeté les demandes présentées à son encontre ;

- constater qu'au regard de l'évolution du litige, la main levée de la procédure de recouvrement forcée, d'ores et déjà réalisée, n'a plus d'objet ;

- condamner Mme [R] à lui payer la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les entiers dépens.

L'ordonnance de clôture de l'instruction a été prononcée le 19 octobre 2022.

Pour l'exposé complet des prétentions et de l'argumentaire des parties, il est expressément renvoyé à leurs dernières écritures susvisées conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

- Sur la demande de sursis à statuer :

Mme [R] demande à la cour de constater que sa demande de sursis à statuer est devenue sans objet suite à l'arrêt rendu par la cour d'appel de Caen le 31 mars 2022 qui a confirmé le jugement du juge aux affaires familiales de Caen du 15 janvier 2021.

L'article 378 du code procédure civile dispose que la décision de sursis suspend le cours de l'instance pour le temps ou jusqu'à la survenance de l'événement qu'elle détermine.

En l'espèce, la demande de Mme [R] dans ces conditions peut être accueillie;

- Sur la mainlevée de la procédure de paiement direct :

Mme [R] sollicite la réformation du jugement déféré en ce qu'il a ordonné la mainlevée de la procédure de paiement direct opérée par la Caf du Calvados à l'encontre de Mme [U]. Au soutien de ses prétentions, Mme [R] affirme qu'elle bénéficiait d'un titre exécutoire lors de la mise en oeuvre de la procédure de paiement direct par la Caf du Calvados.

Mme [U] demande quant à elle la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a ordonné la mainlevée de la procédure de paiement direct. Au soutien de ses prétentions, Mme [U] affirme que la décision sur laquelle s'est fondée la Caf du Calvados pour mettre en oeuvre la procédure de paiement direct était dépourvue de caractère exécutoire provisoire de droit au motif qu'elle contestait le lien de filiation. Elle ajoute que la procédure de paiement direct n'était pas régulière puisque Mme [R] n'avait procédé ni à la notification ni à la signification du jugement du 15 janvier 2021.

La Caf du Calvados sollicite également la confirmation du jugement au motif qu'elle a procédé à la mainlevée de la saisie et a remboursé Mme [U] des deux dernières sommes saisies dés qu'elle a été informée de la présente procédure devant les 1ers juges ;

L'article 503 du code de procédure civile dispose que les jugements ne peuvent être exécutés contre ceux auxquels ils sont opposés qu'après leur avoir été notifiés, à moins que l'exécution n'en soit volontaire. En cas d'exécution au seul vu de la minute, la présentation de celle-ci vaut notification.

Aux termes de l'article 1074-1 du code de procédure civile, à moins qu'il n'en soit disposé autrement, les décisions du juge aux affaires familiales qui mettent fin à l'instance ne sont exécutoires à titre provisoire que si elles l'ordonnent. Par exception, les mesures portant sur l'exercice de l'autorité parentale, la pension alimentaire, la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant et la contribution aux charges du mariage, ainsi que toutes les mesures prises en application de l'article 255 du code civil, sont exécutoires de droit à titre provisoire.

L'article L111-10 du code des procédures civiles d'exécution précise que sous réserve des dispositions de l'article L. 311-4, l'exécution forcée peut être poursuivie jusqu'à son terme en vertu d'un titre exécutoire à titre provisoire. L'exécution est poursuivie aux risques du créancier. Celui-ci rétablit le débiteur dans ses droits en nature ou par équivalent si le titre est ultérieurement modifié.

Il résulte des dispositions de l'article L.213-1 du code des procédures civiles d'exécution que tout créancier d'une pension alimentaire peut se faire payer directement le montant de cette pension par les tiers débiteurs de sommes liquides et exigibles envers le débiteur de la pension. Il peut notamment exercer ce droit entre les mains de tout débiteur de sommes dues à titre de rémunération, ainsi que de tout dépositaire de fonds.

La demande en paiement direct est recevable dès qu'une échéance d'une pension alimentaire n'a pas été payée à son terme et qu'elle a été fixée par une décision judiciaire devenue exécutoire, n'ayant pas été payée à son terme.

L'article L.213-4 du code des procédures civile d'exécution prévoit que la procédure de paiement direct est applicable aux termes à échoir de la pension alimentaire. Elle l'est aussi aux termes échus pour les six derniers mois avant la notification de la demande de paiement direct. Le règlement de ces sommes est fait par fractions égales sur une période de douze mois. Par dérogation aux deuxième et troisième alinéas, lorsqu'un organisme débiteur de prestations familiales agit pour le compte d'un créancier d'aliments, la procédure de paiement direct est applicable aux termes échus de la pension alimentaire dans la limite des vingt-quatre derniers mois avant la notification de la demande de paiement direct. Dans ce cas, le règlement de ces sommes s'effectue sur une période maximale de vingt-quatre mois dans des conditions définies par décret en conseil d'Etat.

En l'espèce, il est établi que Mme [R] a donné naissance le [Date naissance 2] 2016 à une enfant prénommée [W] reconnue à l'époque par l'ancien compagnon de Mme [R], M. [O].

Mme [R] a engagé une action en contestation de filiation et a ainsi fait assigner M. [U] devant le juge aux affaires familiales de Caen aux fins que soit établi le lien de filiation paternel à son égard et que la reconnaissance de paternité réalisée par M. [O] soit annulée.

Par jugement du 15 janvier 2021 rectifié le 7 mai 2021, le tribunal judiciaire de Caen a déclaré M. [U] père de l'enfant et a fixé à sa charge une somme de 150 euros par mois au titre de la contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant.

Le 28 janvier 2021, Mme [R] a acquiescé au jugement.

Le 23 février 2021, Mme [R] a entrepris des démarches en ligne auprès de la Caf du Calvados aux fins de solliciter son aide pour obtenir le règlement de la pension alimentaire due par Mme [U].

Le 4 mars 2021, M. [U] a fait appel du jugement du 15 janvier 2021.

A défaut de règlement amiable, la Caf du Calvados a été contrainte le 28 mai 2021 de mettre en oeuvre une procédure de paiement direct de pension alimentaire à l'encontre de M. [U].

Parallèlement, M. [U] a entrepris des démarches pour changer de sexe et c'est ainsi que par jugement du 2 avril 2021, le tribunal judiciaire de Caen a autorisé la modification des actes de l'état civil pour faire mention du sexe féminin et du changement de prénoms.

Par le jugement du 22 février 2022 dont il est fait grief, le juge de l'exécution a ordonné la mainlevée de la procédure de paiement direct au motif que la procédure était irrégulière, Mme [R] n'ayant pas fait procéder à la notification ou à la signification préalable du jugement du 15 janvier 2021 qui constituait son titre exécutoire.

Mme [R] souligne que le lien de filiation a été judiciairement établi par le jugement du 15 janvier 2021 et que comme l'a retenu le premier juge, la mesure portant sur la contribution alimentaire est exécutoire de droit à titre provisoire.

Mme [U] persiste quant à elle à contester le caractère exécutoire de la mesure portant sur la contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant au motif qu'à l'époque elle contestait le lien de filiation.

Cependant s'il résulte des dispositions précitées que la mesure portant contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant est exécutoire de droit à titre provisoire alors même que le lien de filiation est contesté, il résulte cependant de tout ce qui précède que c'est à ses risques que Mme [R] pouvait poursuivre l'exécution du jugement du 15 janvier 2021 alors que Mme [U] avait interjeté appel, mais il lui appartenait au préalable de procéder à la notification ou à la signification du jugement contesté, ce dont elle s'est abstenue alors que la procédure de paiement direct a été mise en place le 28 mai 2021 ;

C'est donc de manière justifiée que le juge de l'exécution a ordonné la mainlevée de la procédure en paiement direct au motif qu'il appartenait à Mme [R] de notifier ou de signifier à Mme [U] le jugement du 15 janvier 2021. Cette condition faisant défaut au jour où la Caf du Calvados a mis en oeuvre la procédure de paiement direct à l'encontre de Mme [U]. De ce fait, en conséquence la procédure était irrégulière.

Aussi, le jugement déféré sera confirmé de ce chef.

- Sur la demande de compensation :

Mme [R] soutient que le litige ayant évolué suite à l'arrêt rendu par la cour le 31 mars 2022, elle sollicite en cause d'appel la compensation entre la somme de 695,10 euros qu'elle a déjà perçue et la contribution alimentaire restant due, demande à laquelle Mme [U] s'oppose.

L'article 1347 du code civil dispose que la compensation est l'extinction simultanée d'obligations réciproques entre deux personnes. Elle s'opère, sous réserve d'être invoquée, à due concurrence, à la date où ces conditions se trouvent réunies.

L'article 1347-1 du code civil poursuit que sous réserve des dispositions prévues à la sous-section suivante, la compensation n'a lieu qu'entre deux obligations fongibles, certaines, liquides et exigibles. Sont fongibles les obligations de somme d'argent, même en différentes devises, pourvu qu'elles soient convertibles, ou celles qui ont pour objet une quantité de choses de même genre.

En l'espèce, par arrêt du 31 mars 2022, la cour de céans a confirmé le jugement du 15 janvier 2021 en ce qu'il mis à la charge de Mme [U] une contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant mais en a modifié le montant qui a été fixé à la somme de 100 euros.

Mme [R] se fonde sur cet arrêt pour demander la compensation entre la somme de 695,10 euros qu'elle a déjà perçue pour la période de juin à août 2021 au titre de la procédure initiée par la Caf du Calvados et la contribution alimentaire qui reste due par Mme [U].

Cependant Mme [R] sera déboutée de sa demande, car la compensation ne peut avoir lieu qu'entre des sommes certaines à savoir fixées dans leur montant et la compensation ne peut pas être ordonnée avec le principe de la contribution alimentaire fixée par la cour d'appel de Caen.

Il appartiendrait pour madame [R] de déterminer le montant précis qui lui est due et sur quelle période ;

La compensation ne peut pas avoir lieu entre deux montants dont l'un n'est pas déterminé ni chiffré ;

- Sur la demande de condamnation de la Caf du Calvados :

A titre subsidiaire, Mme [R] demande la condamnation de la Caf du Calvados à la garantir de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre au motif que l'organisme aurait commis une faute, en ce qu'il lui appartenait de vérifier que la décision était exécutoire avant d'initier une procédure de recouvrement forcé. Mme [R] prétend que cette faute serait à l'origine des poursuites engagées à son encontre par Mme [U]. Elle soutient également que cette faute lui a causé un dommage en ce qu'elle a été condamnée au paiement d'une indemnité au titre des frais irrépétibles en première instance. Mme [R] conteste ainsi avoir commis une faute qui a conduit à la réalisation de son propre dommage.

La Caf du Calvados demande le rejet de la demande de Mme [R] de la garantir de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre au profit de Mme [U]. Elle soutient n'avoir commis aucune faute au titre de la procédure de paiement direct mise en oeuvre sur la base des informations fournies par Mme [R]. La Caf affirme au contraire que Mme [R] a elle-même commis une faute à l'origine de son propre dommage en ce qu'elle n'a pas veillé à faire signifier le jugement du 15 janvier 2021, qu'elle a déclaré méconnaître l'adresse de M. [U] et ne pas lui a pas signalé que M. [U] avait interjeté appel de cette décision.

L'article 1240 du code civil dispose que tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

Il résulte des pièces produites que la Caf du Calvados a mis en oeuvre la procédure de paiement direct sur la base des informations qui lui ont été transmises par Mme [R] à savoir le jugement du 15 janvier 2021 établissant le lien de filiation et l'obligation alimentaire de M. [U] à l'égard de l'enfant, accompagné de l'acte d'acquiescement.

S'il n'est pas contesté que Mme [R] a entrepris seule des démarches auprès de la Caf, il est rappelé que cette dernière était effectivement assistée d'un Conseil dans le cadre de la procédure devant le juge aux affaires familiales, ce qui lui permettait de prendre connaissance de la nécessité de procéder à la signification de la décision afin de protéger ses intérêts.

En outre, il est établi particulièrement que si Mme [R] avait déclaré l'adresse effective de M. [U] à l'époque, la Caf du Calvados n'aurait pas adressé diverses lettres de relance et mises en demeure qui, à défaut de réponse, l'ont conduite à mettre en oeuvre la procédure de paiement direct, ce qui lui aurait permis d'apprendre que Mme [U] avait interjeté appel du jugement du 15 janvier 2021.

Aussi, Mme [R] sera déboutée de sa demande de garantie et le jugement sera confirmé de ce chef.

- Sur la demande de condamnation à une amende civile :

Mme [R] demande la confirmation du jugement en ce qu'il a rejeté la demande de condamnation à son encontre d'une amende civile formée par Mme [U] au motif que la preuve de sa mauvaise foi n'était pas rapportée.

Mme [U] sollicite quant à elle l'infirmation du jugement en ce qu'il a rejeté sa demande de condamnation de Mme [R] au paiement d'une amende civile de 1 000 euros pour procédure abusive, au motif que cette dernière serait de mauvaise foi en ce qu'elle aurait dissimulé des revenus dans le cadre de l'instance devant le juge aux affaires familiales et que cette dissimulation a eu des conséquences direct sur la procédure de paiement direct engagée par la Caf du Calvados à son encontre.

L'article R.213-8 du code des procédures civiles d'exécution dispose que le créancier d'aliments qui, de mauvaise foi, fait usage de la procédure de paiement direct peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10 000 euros.

En l'espèce, Mme [U] est défaillante à rapporter la preuve de la mauvaise foi de Mme [R], en particulier en ce qu'elle aurait tenté de dissimuler des revenus à la Caf. En outre, il résulte des pièces produites que Mme [R] a entrepris diverses démarches, aux fins d'obtenir la mainlevée de la procédure de recouvrement forcé.

Aussi, le jugement sera confirmé de ce chef.

- Sur les dépens et les frais irrépétibles :

Le jugement étant confirmé sur le principal, il sera aussi confirmé sur les dépens et les frais irrépétibles.

Succombant en appel, Mme [R] sera condamnée aux dépens.

En outre, il est équitable de condamner Mme [R] à payer à Mme [U] et à la Caf du Calvados la somme de 1 000 euros chacune au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort par mise à disposition au greffe ;

Confirme le jugement déféré ;

Statuant à nouveau,

Constate que la demande de sursis à statuer est devenue sans objet ;

Déboute Mme [R] de toutes ses demandes, en ce compris de celle formée en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejette toutes autres demandes ;

Condamne Mme [R] aux dépens qui seront recouvrés comme en matière d'aide juridictionnelle ;

Condamne Mme [R] à payer à Mme [U] et à la Caf du Calvados la somme de 1 000 euros chacune au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

M. COLLET G. GUIGUESSON


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Caen
Formation : 1ère chambre civile
Numéro d'arrêt : 22/00595
Date de la décision : 24/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-24;22.00595 ?
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