N° RG 22/00072 - N° Portalis DBVC-V-B7G-HDFA
COUR D'APPEL DE CAEN
Minute n° 2023/ 04
PREMIÈRE PRÉSIDENCE
ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ DU 24 JANVIER 2023
DEMANDEURS AU RÉFÉRÉ :
Monsieur [D] [O]
[Adresse 2]
[Localité 1]
Comparant assisté de Me Marion AUDAS, avocat au barreau de CAEN
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 141180022022006525 du 10/11/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de CAEN)
Monsieur [R] [O]
[Adresse 2]
[Localité 1]
Comparant assisté de Me Marion AUDAS, avocat au barreau de CAEN
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 141180022022006524 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de CAEN)
DÉFENDERESSE AU RÉFÉRÉ :
S.A. CA CONSUMER FINANCE
prise en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 3]
non comparante représentée par Me Guillaume CHANUT substitué par Me DESCALLIEZ, avocats postulants au barreau de CAEN et par Me CASTRES avocat au barreau de RENNES
COMPOSITION LORS DES DÉBATS :
PRÉSIDENTE
Madame Sandra ORUS
GREFFIERE
Madame Estelle FLEURY
DÉBATS
L'affaire a été appelée à l'audience publique du 29 Novembre 2022 puis renvoyée à la demande des parties à l'audience du 03 Janvier 2023 au cours de laquelle elle a été débattue.
ORDONNANCE
Rendue le 24 Janvier 2023 par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, et signée par Madame Sandra ORUS, première présidente de la cour d'appel de Caen et par Madame Estelle FLEURY, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCEDURE
Le 16 septembre 2019, la société Consumer Finance a consenti à M. [O] [R] et M. [O] [D] un crédit pour l'acquisition d'un véhicule automobile.
Le 21 juillet 2022, la société Consumer Finance a prononcé la déchéance du terme du prêt et mis en demeure les emprunteurs de régler la somme de 23.906,42 euros au titre des échéances impayées.
Le 22 décembre 2021, la société Consumer Finance a assigné en paiement des sommes dues les consorts [O] devant le juge des contentieux de la protection près le tribunal judiciaire de Caen.
Le 24 mai 2022, le juge des contentieux de la protection a rendu un jugement, auquel il convient de se référer expressément, aux termes duquel il a condamné solidairement les consorts [O] à payer à la société Consumer Finance la somme de 20.438,26 euros.
Les consorts [O] ont interjeté appel de cette décision le 5 octobre 2022.
Par exploit du 3 novembre 2022, les consorts [O] ont assigné en référé la société Consumer Finance devant le premier président de la cour d'appel de Caen, sur le fondement de l'article 514-3 du code de procédure civile, aux fins d'ordonner l'arrêt de l'exécution provisoire du jugement rendu par le juge des contentieux de la protection près le tribunal judiciaire de Caen le 24 mai 2022.
Les consorts [O] font valoir essentiellement qu'ils ont été victimes d'une usurpation d'identité ; qu'ils n'ont jamais signé de contrat de prêt avec la société Consumer Finance ; et qu'une plainte a été déposée le 30 septembre par M. [D] [O].
Ils contestent en outre la validité du contrat puisque les signatures sont différentes et qu'au surplus M. [D] [O] ne sait ni lire ni écrire.
Aussi, ils soutiennent que les bulletins produits à la société Consumer Finance sont des faux ; et que différentes adresses ont été indiquées dans le contrat de prêt.
Enfin, ils affirment que l'exécution provisoire du jugement rendu par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Caen aurait des conséquences manifestement excessives puisqu'ils sont dans l'impossibilité de payer les sommes auxquelles ils ont été condamnés.
Dans ses conclusions, la société Consumer Finance demande au premier président de débouter les consorts [O] de toutes leurs demandes, et de les condamner solidairement au paiement de la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens.
Elle soutient que l'absence de réaction des consorts [O] face à l'assignation en paiement est significative et que seul M. [D] [O] a déposé plainte pour usurpation d'identité après la saisie-vente de ses biens meubles.
Elle ajoute qu'il n'existe pas d'incompatibilité flagrante entre les signatures dans l'acte de prêt ; que les papiers d'identité des consorts [O], les bulletins de salaires de M. [R] [O] et son relevé d'identité bancaire ont été produits lors de la souscription du prêt, alors qu'ils n'ont jamais fait état de leur perte ou de leur vol, ce qui ne peut, dès lors, laisser penser à une usurpation d'identité.
Enfin, la société Consumer Finance indique que les consorts [O] ne justifient pas des conséquences manifestement excessives qu'aurait pour eux l'exécution provisoire de la décision dont appel.
MOTIFS
Il résulte des dispositions de l'article 514-3 du code de procédure civile, qu'en cas d'appel, le premier président peut être saisi afin d'arrêter l'exécution provisoire de la décision lorsqu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives. Ces deux conditions sont cumulatives.
La demande de la partie qui a comparu en première instance sans faire valoir d'observations sur l'exécution provisoire n'est recevable que si, outre l'existence d'un moyen sérieux d'annulation ou de réformation, l'exécution provisoire risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives qui se sont révélées postérieurement à la décision de première instance.
Le caractère manifestement excessif des conséquences de l'exécution provisoire doit être apprécié au regard de la situation du débiteur, compte tenu de ses facultés de paiement et des facultés de remboursement de la partie adverse.
S'agissant du risque de réformation de la décision déférée, les demandeurs développent des moyens portant à titre principal sur l'usurpation de leur identité. Pour autant, les documents d'identité produits lors de la souscription du prêt n'ont pas fait l'objet d'une plainte pour perte ou vol ; le relevé d'identité bancaire communiqué à l'établissement prêteur correspond au compte de M. [O], sur lequel a été prélevé la première échéance et il est relevé, enfin, que le véhicule automobile, objet du prêt, a été livré à M. [R] [O], pour lequel un acompte de 6.000 euros a été payé au concessionnaire par lui-même, sans qu'il ne conteste le principe de la commande.
Le risque de réformation ou d'annulation de la décision dont il est fait appel ne présente pas, au premier examen qui est celui de la procédure en référé devant le premier président et sans préjudice de l'examen de l'affaire au fond, de caractère sérieux au sens de l'article 514-3 du code de procédure civile précité.
Pour faire la démonstration de l'existence d'un risque de conséquences manifestement excessives en lien avec les condamnations pécuniaires mises à leur charge, les consorts [O] produisent leur avis d'imposition, l'un percevant une pension de retraite à hauteur de 1.367 euros par mois et l'autre n'ayant déclaré que 122 euros de revenus pour l'année 2021. Pour autant, une saisie attribution pratiquée sur le compte de M. [D] [O] a déjà permis de d'attribuer plus de 4.000 euros à la société Consumer Finance.
La condition de l'existence d'un risque de conséquences manifestement excessives du fait de l'exécution de la décision dont appel n'étant pas davantage démontrée, il ne sera pas fait droit à la demande des consorts [O] tendant à arrêter l'exécution provisoire du jugement déféré.
L'équité commande de condamner solidairement les consorts [O] à payer la somme de 500 euros à la société Consumer Finance au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Succombant, les consorts [O] supporteront la charge des dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par ordonnance contradictoire,
Déboutons M. [R] [O] et M. [D] [O] de leur demande d'arrêt de l'exécution provisoire;
Condamnons solidairement M. [R] [O] et M. [D] [O] au paiement de la somme de 500 euros à la société Consumer Finance au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamnons M. [R] [O] et M. [D] [O] aux dépens de l'instance.
LA GREFFIÈRE LA PREMIERE PRÉSIDENTE
Estelle FLEURY Sandra ORUS