AFFAIRE : N° RG 19/02781 -
N° Portalis DBVC-V-B7D-GNGO
ARRÊT N°
JB.
ORIGINE : DÉCISION du Tribunal de Grande Instance d'ARGENTAN du 18 Juillet 2019 -
RG n° 18/00968
COUR D'APPEL DE CAEN
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 24 JANVIER 2023
APPELANTE :
Madame [G] [V]
née le [Date naissance 6] 1958 à [Localité 8] (95)
[Adresse 5]
[Localité 4]
représentée et assistée de Me Alice DUPONT-BARRELLIER, avocat au barreau de CAEN
INTIMÉES :
La CAISSE DE REASSURANCE MUTUELLE AGRICOLE DU CENTRE MANCHE
N° SIRET : 383 853 801
[Adresse 1]
[Localité 7]
prise en la personne de son représentant légal
représentée et assistée de Me Olivier FERRETTI, avocat au barreau de CAEN
L'Etablissement CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE BASSE
NORMANDIE
[Adresse 2]
[Localité 3]
pris en la personne de son représentant légal
La Mutuelle GROUPAMA MUTUELLE
[Adresse 1]
[Localité 7]
prise en la personne de son représentant légal
non représentées, bien que régulièrement assignées
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
M. GUIGUESSON, Président de chambre,
M. GARET, Président de chambre,
Mme VELMANS, Conseillère,
DÉBATS : A l'audience publique du 13 septembre 2022
GREFFIER : Mme COLLET
ARRÊT : rendu publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile le 24 Janvier 2023 par prorogation du délibéré initialement fixé au 22 Novembre 2022 et signé par M. GUIGUESSON, président, et Mme COLLET, greffier
* * *
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Le 14 avril 2013, Mme [V] a été victime d'un accident de la circulation alors qu'elle était passagère d'une moto régulièrement assurée auprès de la société Groupama Centre Manche.
Une expertise amiable a été diligentée aux termes de laquelle un rapport a été établi le 22 février 2017 par le Dr [N], mandaté par la société Groupama et le Dr [L], mandaté par Mme [V].
Par actes des 10 et 26 octobre 2018, Mme [V] a fait assigner la société Groupama Centre Manche, la Cpam de Basse-Normandie et la société Groupama Mutuelle afin de les voir condamner à l'indemniser des préjudices subis.
La date de consolidation a été fixée au 24 mars 2014.
Par jugement du 18 juillet 2019 auquel il est renvoyé pour un exposé complet des prétentions en première instance, le tribunal de grande instance d'Argentan a :
- condamné la société Groupama Centre Manche à payer à Mme [V] la somme de 42 551,29 euros au titre des préjudices susvisés (au titre de ses préjudices) avec intérêts au taux légal à compter du 10 octobre 2018 ;
- dit en outre que cette somme dans la limite des indemnités offertes par la société Groupama Centre Manche dans ses écritures notifiées le 4 février 2019, portera intérêts au double du taux légal du 16 mai 2015 au 4 février 2019 avant imputation des créances des tiers payeurs et provisions versées non déduites ;
- dit que les intérêts dus pour une année entière produiront eux-mêmes intérêts au taux légal ;
- condamné la société Groupama Centre Manche aux dépens en ce inclus les frais d'expertise et dépens de référé avec droit de recouvrement direct au profit de Me Barrelier ;
- condamné la société Groupama Centre Manche à payer à Mme [V] la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- ordonné l'exécution provisoire ;
- rappelé que la décision est opposable à la Cpam de Basse-Normandie et la société Groupama Mutuelle ;
- débouté les parties de leurs demandes plus amples et contraires comme précisé aux motifs auxquels il est expressément renvoyé.
Par déclaration du 2 octobre 2019, Mme [V] a formé appel de ce jugement.
Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 21 juin 2022, Mme [V] demande à la cour de :
- la déclarer recevable et bien fondée en son appel ;
- confirmer le jugement s'agissant de l'évaluation :
* des dépenses de santé : 5 207, 84 euros dont 127,45 euros à sa charge,
* des frais divers : 3 097,50 euros,
* de la tierce personne temporaire : 4 914 euros,
* des pertes de gains professionnels actuels : 11 275 euros entièrement prise en charge par la Cpam ;
* des souffrances endurées : 8 500 euros,
* du préjudice esthétique temporaire : 1 500 euros,
* du préjudice esthétique permanent : 1 000 euros,
- l'infirmer pour le surplus en ce qu'il a :
* rejeté les demandes d'indemnisation formulées :
- au titre des frais de logement adapté,
* limité :
- les frais de véhicules adaptés à la somme de 7 759,98 euros,
- l'incidence professionnelle à la somme de 3 000 euros,
- l'indemnité au titre du déficit fonctionnel temporaire à la somme de 3 167,10 euros,
- l'indemnité au titre du déficit fonctionnel permanent à la somme de 14 485,36 euros,
¿ l'application des dispositions de l'article L211-13 du code des assurances à la période du 16 mai 2015 au 4 février 2019 ;
- évaluer les préjudices dont appel à la somme de 82 260,22 euros ou subsidiairement à la somme 55 389,76 euros se décomposant comme suit :
frais de logement adapté :
évaluation : 6 108,28 euros
priorité victime : 6 108,28 euros
tiers payeurs : 0 euro
frais de véhicule adapté :
évaluation : 14 174,18 euros
priorité victime : 14 174,18 euros
tiers payeurs : 0 euro
incidence professionnelle temporaire :
évaluation : 6 826,95 euros
priorité victime : 6 826,95 euros
tiers payeurs : 0 euro
incidence professionnelle permanente :
évaluation : 4 016,90 euros
priorité victime : 4 016,90 euros
tiers payeurs : 0 euro
déficit fonctionnel temporaire :
évaluation : 3 870,90 euros
priorité victime : 3 870,90 euros
tiers payeurs : 0 euro
déficit fonctionnel permanent :
* évaluation
principal : 11 221 euros du 23 mars 2014 au 31 décembre 2022 et 33 134,43 euros pour l'avenir ;
subsidiaire : 6 924,96 euros pour les arrérages échus et 10560 euros pour le préjudice futur
* tiers payeurs principal : 0 euro
subsidiaire : 0 euro
total de l'ensemble :
* évaluation : 82 260,22 euros
subsidiairement : 55 389,76 euros
* priorité victime : 82 260,22 euros
subsidiairement : 55 389,76 euros
tiers payeurs : 0 euro
en conséquence
- condamner la société Groupama Centre Manche à lui payer la somme de 106 399,17 euros ou subsidiairement la somme de 79 528,71 euros en réparation de son entier préjudice ;
- dire et juger que le total du préjudice, incluant la créance des tiers payeurs et sans tenir compte des provisions versées, produira intérêts au double du taux légal du 14 décembre 2013 jusqu'au jour où l'arrêt à intervenir aura un caractère définitif ;
- condamner la société Groupama Centre Manche à lui payer, en plus de l'indemnité allouée par le tribunal, la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens et dire qu'ils seront recouvrés par Me Barrelier, avocat.
Aux termes de leurs dernières écritures notifiées le 9 mars 2020, la société Groupama Centre Manche demande à la cour de :
- confirmer le jugement du tribunal de grande instance d'Argentan du 18 juillet 2019 en toutes ses dispositions et rejeter toute demande supérieure de Mme [V] ;
y ajoutant,
- juger qu'elle a payé à Mme [V] la somme de 10 000 euros à titre de provision amiable, outre la somme de 46 051,39 euros au titre de l'exécution provisoire du jugement de première instance, et déduire ces sommes de toutes condamnations mises à sa charge ;
- rejeter la demande formulée au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- statuer ce que de droit quant aux dépens.
L'ordonnance de clôture de l'instruction a été prononcée le 29 juin 2022.
Pour l'exposé complet des prétentions et de l'argumentaire des parties, il est expressément renvoyé à leurs dernières écritures susvisées conformément à l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS
La cour saisie des prétentions de madame [V] ne statuera que sur les postes de préjudices contestés ;
- Sur les frais de logement adapté :
Les juges de 1ère instance ont rejeté ce poste au motif qu'il n'était pas justifié, la Caisse de Réassurance Mutuelle Agricole du Centre Manche sollicite la confirmation de cette décision ;
Madame [V] explique que le principe de la réparation intégrale doit conduire à lui permettre de se laver sans douleur et avec facilité, ce qui n'est possible que par l'existence d'une douche supprimant sa baignoire, ce qui justifie sa demande ;
La cour doit constater comme les 1ers juges l'ont effectué, que l'expertise ne recommande pas les frais de logement adapté réclamés par madame [V], sachant de plus, que dans l'évaluation des souffrances endurées, réalisée par l'expertise judiciaire, la difficulté dont il est fait état, n'est pas mentionnée ;
En effet, il n'est pas fait état que l'appelante ne pourrait plus depuis l'accident, se laver sans douleur et avec facilité et que la baignoire qui existait devait pour ce motif être remplacée par une douche. De plus madame [V] ne produit aux débats aucun document médical à cette fin ;
En conséquence, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a rejeté cette prétention ;
- Sur les frais d'adaptation de véhicules :
Madame [V] fait état que l'indemnisation qui lui a été accordée de ce chef par les 1ers juges a été évaluée à la date du jugement, alors qu'elle devait l'être au jour de la consolidation soit au 24 mars 2014, et que de plus sa réclamation concernant les cales-pieds spéciaux à poser sur les motos dont elle est passagère, a été écartée de manière injustifiée ;
La Caisse de Réassurance en litige soutient qu'il n'est pas démontré de la réalité de la doléance invoquée et de la nécessité de prévoir une boîte automatique et des cales-pieds ;
La cour doit constater que la seule conclusion en la matière délivrée par l'expertise médicale est la suivante :
-Madame [V] éprouve parfois des difficultés à la conduite pour débrayer fréquemment ;
Une telle appréciation ne permet pas d'en déduire que cette doléance qui est subie 'parfois' amène à la mise en place de cales-pieds spéciaux, en ce que madame [V] en dehors du rapport d'expertise réalisé et produit aux débats, n'apporte aucun autre élément médical à l'appui de cette réclamation et ne précise pas qu'elle serait la fréquence de remplacement de ces cales-pieds ;
En conséquence, la cour confirmera le jugement entrepris puisque la Caisse de Réassurance en cause en dépit de ses contestations, ne sollicite pas l'infirmation du jugement entrepris dans son dispositif, admettant le principe même du recours à une boîte de vitesse automatique ;
Dés lors de ce chef, en ne retenant que le surcoût lié au choix d'une boite de vitesse automatique sur la base d'un surcoût annuel au regard des pièces produites par madame [V] elle-même de 323,40 euros par an, la cour sur les 2 périodes à considérer, procède aux évaluations suivantes :
- sur la période allant du 23 mars 2014 date de la consolidation au 31 décembre 2022, soit 8 années plus 9 mois, soit pour une dépense annuelle de 323,40 euros sur 8 ans de 2587,20 euros, plus 26,95 euros sur 9 mois soit 242,55 euros, plus une semaine en mars à hauteur de 6,73 euros soit un total de 2836,48 euros à allouer ;
- pour la période postérieure, il convient de retenir la somme de 323,40 euros avec une application de l'euro de rente viagère féminin pour un âge de 64 ans, selon le barême de capitalisation 2020, de la Gazette du Palais qui apparaît conforme pour la cour, compte tenu du fait que le tableau proposé repose sur une espérance de vie et un taux d'intérêts après correction de l'inflation qui peuvent être conservés à ce jour ;
- Soit sur la base de 323,40 avec application d'un taux de rente viagère de 23,523, (taux d'intérêts à 0%), soit à accorder : 7607,33 euros ;
Il convient en conséquence d'allouer à madame [V] la somme de ce chef de : 10443, 81 euros, et d'infirmer le jugement entrepris ;
- Sur l'incidence professionnelle :
Ce poste correspond aux séquelles qui limitent les possibilités professionnelles ou rendent l'activité professionnelle antérieure plus fatigante ou plus pénible. Cette incidence professionnelle a pour objet d'indemniser non la perte de revenus, mais les incidences périphériques du dommage touchant la sphère professionnelle comme la dévalorisation sur le marché du travail, l'augmentation de la pénibilité de l'emploi occupé ;
En l'espèce, madame [V] n'a pas perdu des suites de l'accident, son emploi ni n'a été contrainte d'effectuer une reconversion professionnelle dans son propre secteur d'activité ;
De ce chef, les experts ont souligné que madame [V] avait repris précocement son activité professionnelle du fait des contraintes liées à son métier, qui ne lui permettait pas de s'absenter trop longtemps et que cette reprise d'activité s'était effectuée avec une pénibilité pendant les 3 premiers mois ;
Madame [V] sollicite à ce titre, que ce poste de préjudice soit calculé d'après son salaire pour permettre de rétablir l'équilibre entre l'effort fourni et le revenu qui en est tiré ;
L'appelante explique que les 1ers juges n'ont pas tenu compte des conséquences de l'accident qui l'ont contrainte à effectuer un changement de tenue vestimentaire du fait de l'accident, car comme directrice d'Ehpad, elle doit avoir au quotidien, une tenue habillée, ce qui implique le port d'un tailleur avec des chaussures à talons, ce qu'elle ne peut plus faire et ce qui est source de dévalorisation ;
Sur l'incidence professionnelle temporaire, il peut être acquis que la reprise du travail par madame [V] a nécessité pour elle une pénibilité accrue pendant 3 mois ;
Cependant la cour ne peut pas effectuer un calcul si nécessaire sur la base du salaire de l'intéressée, puisque celle-ci ne verse aux débats strictement aucune pièce relative à ses revenus professionnels, ce qui rend impossible le calcul réclamé ;
Par ailleurs la pénibilité accrue n'a été estimée dans le rapport d'expertise médicale, que sur 3 mois et non pas 9 mois comme madame [V] le présente ;
Il en résulte que la cour confirmera le jugement entrepris en ce qu'il a fixé ce préjudice à la somme de 3000 euros. En conséquence, pour tenir compte de l'actualisation à effectuer, il sera alloué de ce chef la somme de 3168 euros ;
S'agissant de l'incidence professionnelle permanente, il est constant que madame [V] a conservé son emploi de directrice d'Ehpad, que s'il est juste que sa fiche de poste exige une tenue habillée pour exercice ses fonctions, celle-ci comme les 1ers juges l'ont parfaitement analysé, n'inclut pas de manière indispensable et impérative le port de chaussures à talons, que madame [V] ne peut plus utiliser ;
Il n'est pas rapporté la preuve par ailleurs que l'appelante ait été l'objet de réflexions sur ce point dans le cadre de son activité professionnelle ;
Il s'ensuit pour ce poste, qui a été écarté par les 1ers juges, qu'en l'absence de dévalorisation caractérisée dans les conditions de travail et dans l'emploi exercé, la cour confirmera le jugement entrepris ;
- Sur le déficit fonctionnel temporaire :
Comme les 1ers juges l'ont rappelé, ce poste indemnise l'indisponibilité temporaire subie par la victime pendant sa maladie traumatique dans sa sphère personnelle, à savoir la perte ou la diminution de la qualité de vie et des joies usuelles ;
De ce chef, l'expertise médicale fournit les éléments suivants qui ne sont pas contestés :
- DFT total du 14 avril 2013 au 15 avril 2013 ;
- DFT classe IV du 16 avril 2013 au 8 juillet 2013 ;
- DFT classe II du 9 juillet 2013 au 31 décembre 2013 ;
- DFT classe I du 1er janvier 2014 au 24 mars 2014 ;
Ce préjudice est évalué ordinairement entre 25 à 33 euros par jour en tenant compte des indisponibilités subies, qui en l'espèce, selon madame [V] ont concerné ses activités d'agrément et sa vie sexuelle, ayant de plus passé 3 mois entre son lit et son fauteuil ;
La cour au regard de la situation personnelle et familiale de madame [V] estime que la somme journalière de 27 euros a été correctement évaluée par les 1ers juges, qui ont fixé ce poste à la somme de 3167,10 euros ;
Dans ces conditions le jugement entrepris sera confirmé de ce chef, ce qui est sollicité par la Caisse de Réassurance à l'instance ;
- Sur le déficit fonctionnel permanent :
Ce préjudice comme les 1ers juges l'ont rappelé correspond à la réduction définitive du potentiel physique, psychosensoriel ou intellectuel résultant de l'atteinte à l'intégrité anatomopsysiologique médicalement constatable à laquelle s'ajoutent les phénomènes douloureux et les répercussions psychologiques normalement liées à l'atteinte séquellaire décrite, ainsi que les conséquences habituellement et objectivement liées à cette atteinte dans la vie de tous les jours ;
L'expert dans son rapport évalue le taux de ce préjudice à 8% ;
Madame [V] entend que ce poste soit évalué en tenant compte de l'importance du taux d'incapacité mais également des troubles dans les conditions d'existence et de l'atteinte à l'intégrité physique et des souffrances endurées, et que seule une indemnisation fondée sur la base d'une indemnité journalière rapportée à son espérance de vie au jour de l'arrêt peut permettre une réparation intégrale ;
La Caisse de Réassurance en litige sollicite la confirmation du jugement entrepris qui a cependant retenu une indemnisation sur le fondement d'un montant journalier correspondant à celui du déficit fonctionnel temporaire entre la date de consolidation le 24 mars 2014 et celui de la clôture des débats devant les 1ers juges ;
La cour en l'absence de toute contestation sur le calcul du déficit fonctionnel permanent pour cette 1ère période selon la méthode ci-dessus visée, retiendra celle-ci, bien que le préjudice dont s'agit ne soit pas à caractère économique ;
Tenue par l'actualisation indispensable, la cour pour la période écoulée entre la date de consolidation le 24 mars 2014 et la date du présent arrêt le 24 janvier 2023, soit 3228 jours, calculera le déficit fonctionnel en cause comme suit :
-27 euros multiplié par 8% multiplié par 3228 jours soit : 6972, 48 euros ;
Pour la période future, la cour se reportera au point de déficit fonctionnel permanent de 1400 euros, appliqué par les 1ers juges au regard de l'âge de madame [V], la cour ne modifiant pas le point retenu, sachant que pour l'évaluation de celui-ci les experts médicaux ont pris en considération les trois composantes du déficit fonctionnel permanent, soit outre l'incapacité, la gêne ressentie dans la vie quotidienne et les douleurs persistantes puisque leur appréciation a été faite sur les éléments suivants :
- 'Il persiste après consolidation un déficit fonctionnel permanent constitué par des douleurs iliaques gauche de type mécanique, apparaissant à la marche mais également en position assise prolongée et en position allongée, douleurs limitant le périmètre de marche, entrainant une gêne à la descente des escaliers, l'examen clinique objectivant une limitation discrète des amplitudes de hanche gauche, la flexion forcée, ainsi que l'abduction contrariée de la hanche gauche étant douloureuses' ;
Il s'ensuit que le montant à allouer doit être de 11200 euros + 6972,48 euros soit un total de 18172,48 euros, le jugement étant infirmé de ce chef ;
- Sur le doublement des intérêts :
Les 1ers juges ont retenu que Groupama Centre Manche n'avait transmis une offre complète que dans ses écritures du 4 février 2019, et ont ainsi aménagé le doublement des intérêts légaux du 16 mai 2015 au 4 février 2019, sachant que Groupama Centre Manche demande la confirmation du jugement entrepris ;
Madame [V] conteste cette position en estimant que si les conclusions notifiées le 4 février 2019 valaient effectivement offre d'indemnisation, celles-ci n'en étaient pas moins incomplètes, puisque ne contenant aucune proposition concernant l'incidence professionnelle, et que les propositions faites étaient dérisoires ;
S'agissant des dispositions des articles L-211-9 et suivants du code des assurances, la cour estime que les 1ers juges ont justement relevé que le rapport d'expertise du 1er décembre 2014 diligenté par l'assureur Groupama avait été notifié le 16 décembre 2014, que ce document visait la date de consolidation et que dans ces conditions, le délai de 5 mois à appliquer devait être calculé à compter de cette date, ce qui revenait à retenir le16 mai 2015 ;
De la même manière, les 1ers juges ont justement apprécié que l'offre faite par l'assureur le 18 avril 2016, qualifiée de 'Définitive Détaillée' était incomplète, ce qui n'est pas sérieusement contesté puisque la Caisse de Réassurance sollicite la confirmation du jugement entrepris ;
La cour à l'analyse des conclusions notifiées le 4 février 2019 par la Caisse de Réassurance en litige estime que l'offre que celles-ci comprennent, ne peut pas être qualifiée de dérisoire étant de plus de 20 000 euros, le tribunal ayant alloué une somme de 42551 euros.
De plus ces écritures comportaient l'analyse de tous les éléments indemnisables, que l'offre effectuée était ainsi complète, puisqu'il y était fait des propositions ou une explication de rejet pour l'assistance Tierce personne, les frais de logement adapté, les frais de véhicule adapté, l'incidence professionnelle, le déficit fonctionnel temporaire et le déficit fonctionnel permanent ;
Dans ces conditions, il convient de confirmer le jugement entrepris, en ce qu'il a retenu le doublement des intérêts au taux légal sur la période du 16 mai 2015 au 4 février 2019 ;
Dans ces conditions, en définitive, la réparation des préjudices subis doit être estimée comme suit :
le jugement sera infirmé uniquement des chefs des postes : frais de véhicule adapté, de l'incidence professionnelle et du déficit fonctionnel permanent et du montant total à allouer qui sera fixé à la somme de : 59090,34 euros à laquelle sera tenu Groupama Centre Manche selon les demandes de l'appelante ;
le jugement sera également confirmé en ce qu'il a dit en outre que cette somme dans la limite des indemnités offertes par la société Groupama Centre Manche dans ses écritures notifiées le 4 février 2019, portera intérêts au double du taux légal du 16 mai 2015 au 4 février 2019 avant imputation des créances des tiers payeurs et provisions versées non déduites ;
- dit que les intérêts dus pour une année entière produiront eux-mêmes intérêts au taux légal ;
sachant que la Caisse de Réassurance au litige réclame la confirmation du jugement entrepris ;
- Sur les autres demandes :
L'équité et les solutions apportées par la cour permettent d'allouer à madame [V] la somme de 2000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, qui sera prise en charge par le Centre de Réassurance à la procédure, qui partie perdante supportera les dépens ;
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire, rendu en dernier ressort et par mise à disposition au greffe.
- Dans les limites de la saisine de la cour, confirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a :
- fixé aux sommes de 7759,86 euros les frais de véhicule adapté, de 3000 euros l'incidence professionnelle, et à 14485,36 euros le déficit fonctionnel permanent;
- condamné la société Groupama Centre Manche à payer à Mme [V] la somme de 42 551,29 euros au titre des préjudices susvisés avec intérêts au taux légal à compter du 10 octobre 2018 ;
- L'infirme de ces seuls chefs et statuant à nouveau :
- Fixe à la somme de 10443, 81 euros la réparation du préjudice lié aux frais de véhicule adapté, à celle de 3168 euros le préjudice de l'incidence professionnelle et à 18172, 48 euros le déficit fonctionnel permanent ;
- Condamne Groupama Centre Manche à payer à Mme [V] la somme de 59090,34 euros au titre de ses préjudices avec intérêts au taux légal à compter du 10 octobre 2018, sous déduction des sommes déjà versées par la Caisse de Réassurance Mutuelle Agricole du Centre Manche soit à titre provisionnelle, soit en exécution du jugement entrepris, du chef des préjudices à réparer ;
- Déboute madame [V] du surplus de ses demandes ;
- Rejette toutes autres demandes, fins et conclusions ;
- Condamne la Caisse de Réassurance Mutuelle Agricole du Centre Manche à payer à madame [V] la somme de 2000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamne la Caisse de Réassurance Mutuelle Agricole du Centre Manche en tous les dépens avec application de l'article 699 du code de procédure civile au profit de l'avocat en ayant fait la demande.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
M. COLLET G. GUIGUESSON