N° RG 22/00060 - N° Portalis DBVC-V-B7G-HB4S
COUR D'APPEL DE CAEN
Minute n° 2022/76
PREMIÈRE PRÉSIDENCE
ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ DU 20 DECEMBRE 2022
DEMANDEUR AU RÉFÉRÉ :
Monsieur [S] [K]
[Adresse 1]
[Localité 5]
non comparant représenté par Me Gaël BALAVOINE, avocat au barreau de CAEN et
assisté de Me Hélène LAUDIC BARON, avocat au barreau de RENNES
DÉFENDERESSES AU RÉFÉRÉ :
S.A.R.L. ENVERGURE AUTO
prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 8]
[Adresse 8]
[Localité 4]
non comparante représentée par Me Jean-Jacques SALMON, avocat au barreau de CAEN
S.A.R.L. L.E. AUTOMOBILES exerçant sous l'enseigne BH CAR
prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 6]
[Localité 2]
non comparante représentée par Me Muriel LETAROUILLY-DOUCIN, avocat au barreau de COUTANCES et assistée de Me Grégoire MARCHAC, avocat au barreau de PARIS
S.A. BMW FRANCE
prise en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 3]
[Localité 7]
non comparante représentée par Me François-Xavier BOUTTEREUX, avocat au barreau de COUTANCES et assistée de Me Gilles SEREUILLE, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION LORS DES DÉBATS :
PRÉSIDENT
Monsieur Dominique GARET
GREFFIERE
Madame Estelle FLEURY
DÉBATS
L'affaire a été appelée à l'audience publique du 04 Octobre 2022 puis renvoyée à la demande des parties à l'audience du 15 Novembre 2022 au cours de laquelle elle a été débattue.
ORDONNANCE
Rendue publiquement le 20 Décembre 2022 par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, et signée par Monsieur Dominique GARET, président de chambre délégué aux fonctions de premier président à la cour d'appel de Caen et par Madame Estelle FLEURY, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCEDURE
Le 10 décembre 2016, la SARL L.E Automobiles a acheté un véhicule automobile de marque BMW auprès de M. [S] [K].
A la suite d'une panne du véhicule, la société L.E Automobiles a assigné M. [K] en qualité de vendeur ainsi que la société Envergure Auto, qui l'avait réparé peu avant la vente, devant le tribunal judiciaire de Coutances aux fins d'obtenir la résolution du contrat.
La société Envergue Auto a alors appelé en cause la société BMW France.
Par jugement du 2 juin 2022, le tribunal a, entre autres dispositions :
- déclaré M. [K] responsable d'un vice caché affectant le véhicule;
- prononcé en conséquence la résolution de la vente ;
- condamné à M. [K] à restituer le prix de vente à la société L.E Automobiles, soit 28.000 e outre intérêts au taux légal à compter du jugement';
- condamné in solidum M. [K] et la société Envergure Auto à payer à la société L.E Automobiles une somme de 2.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile;
- condamné in solidum M. [K] et la société Envergure Auto aux entiers dépens de l'instance, en ce compris le coût de l'expertise judiciaire que le tribunal avait ordonnée avant-dire-droit;
- ordonné l'exécution provisoire de la décision.
M. [K] a interjeté appel de ce jugement.
Par acte du 10 août 2022, il a saisi le premier président de la cour d'appel de Caen d'une demande tendant à l'arrêt de l'exécution provisoire du jugement déféré.
A cet effet, M. [K] soutient qu'il existe un moyen sérieux de réformation du jugement, en ce qu'il l'a déclaré responsable d'un vice caché alors que le vendeur avait confié le véhicule à un garagiste, la société Envergure Auto, aux fins de réparation avant la vente; il fait valoir que le tribunal n'a pas tiré toutes les conséquences de son raisonnement puisqu'il n'a pas condamné M. [K] à réparer le préjudice complémentaire allégué par l'acheteur.
Il conteste également être tenu de restituer le prix de vente à hauteur de 28.000 €, dès lors que s'il reprend le véhicule, il n'en retirera qu'une valeur résiduelle très inférieure puisqu'il est économiquement irréparable.
Enfin, se prévalant de sa qualité de simple particulier qui a contracté avec des professionnels, il se plaint des conséquences manifestement excessives qu'entrainerait l'exécution provisoire de la décision, M. [K] se disant dans l'incapacité d'assumer le règlement des sommes auxquelles il a été condamné.
Au contraire, la société L.E Automobiles demande au premier président de débouter M. [K] de sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire, sollicitant en outre de le voir condamner au paiement d'une somme de 4.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
A cet effet, elle fait observer que la demande doit être examinée au regard non pas du nouvel article 514-3 du code de procédure civile, inapplicable en l'espèce, mais de l'ancien article 524, ce qui implique seulement de vérifier si l'exécution provisoire entraînerait des conséquences manifestement excessives, tel n'étant pas le cas en l'occurrence, alors en effet que M. [K] ne justifie pas de ses revenus et charges.
Quant à la société Envergure Auto, elle demande également, pour des raisons similaires, que M. [K] soit débouté de sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire et qu'il soit condamné à lui payer une somme de 2.000 € au titre des frais irrépétibles.
Enfin, la société BMW France déclare s'en remettre à justice sur la demande de suspension de l'exécution provisoire formée par M. [K], demandant en toute hypothèse que celui-ci soit condamné à lui payer une somme de 1.500 € au titre des frais irrépétibles.
SUR CE,
Conformément à l'article 55-II du décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019, les dispositions nouvelles du code de procédure civile relatives à l'exécution provisoire ne s'appliquent qu'aux instances introduites devant les juridictions du premier degré à compter du 1er janvier 2020.
En l'espèce, il résulte du jugement déféré que l'instance a été introduite par assignations en date des 28 et 30 novembre 2017.
Ainsi, la présente instance ayant été introduite antérieurement au 1er janvier 2020, il y a lieu de statuer au visa des dispositions antérieures à l'entrée en vigueur du décret, soit sur le fondement de l'ancien article 524.2° du code de procédure civile selon lequel, lorsqu'elle a été ordonnée, l'exécution provisoire ne peut être arrêtée, en cas d'appel, que si elle est interdite par la loi ou si elle risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives.
En l'espèce, il n'est pas soutenu que l'exécution provisoire du jugement rendu par le tribunal de Coutances le 2 juin 2022 ait été interdite par la loi.
Quant au caractère manifestement excessif des conséquences de l'exécution provisoire ordonnée, il ne peut être apprécié qu'au regard de la situation du débiteur condamné, notamment compte tenu de ses facultés de paiement, ou encore des facultés de remboursement de la partie adverse pour le cas où le jugement serait ultérieurement infirmé, et non au regard de la régularité du jugement ou du bien-fondé de la décision prise par les premiers juges.
Or, M. [K] ne justifie pas des conséquences prétendument «'irréparables'» que pourrait avoir sur lui l'exécution immédiate du jugement.
Au demeurant, il manque de transparence quant à la réalité de ses revenus, s'abstenant en effet de produire son avis d'imposition pour lui préférer une simple attestation de son comptable qui ne rend pas nécessairement compte de l'intégralité de ses revenus.
D'ailleurs, il faut relever l'incohérence qui existe entre les charges dont il justifie et la faiblesse des ressources dont il se prévaut ; en effet, il paraît étonnant de pouvoir acquitter une mensualité de remboursement de prêt de 560 € alors qu'on disposerait d'un revenu mensuel de 500€ seulement.
En conséquence et faute de justifier en quoi l'exécution provisoire de la décision déférée entraînerait pour lui des conséquences manifestement excessives, alors par ailleurs qu'il n'est pas établi en quoi la société L.E. Automobiles serait en difficulté pour rembourser les sommes qui lui ont été allouées en première instance pour le cas où le jugement serait infirmé, M. [K] sera débouté de sa demande tendant à l'arrêt de l'exécution provisoire.
Partie perdante, M. [K] sera condamné à verser à chacune des défenderesses une somme de 1.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Enfin, il supportera les dépens du présent référé.
PAR CES MOTIFS,
Statuant publiquement par mise à disposition au greffe, et par ordonnance contradictoire :
- déboutons M. [S] [K] de sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire;
- condamnons M. [S] [K] à payer à la société L.E Automobiles une somme de 1.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile;
- condamnons M. [S] [K] à payer à la société Envergure Auto une somme de 1.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile;
- condamnons M. [S] [K] à payer à la société BMW France une somme de 1.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile;
- condamnons M. [S] [K] aux dépens.
LA GREFFIÈRE LE PRESIDENT DE CHAMBRE DELEGUE
Estelle FLEURY Dominique GARET